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des faits avancés dans les travaux signés de leurs noms

PIÈCES LIMINAIRES

lues dans la séance publique du 21 mai 1887.

DISCOURS D'OUVERTURE

PAR

M. l'abbé C. FERRY,
président d'année.

MESDAMES ET MESSIEURS,

On n'est pas tendre, de nos jours, pour l'éloquence académique. J'ai vu naguères son portrait, fait par un jeune, un coloriste, un de ces maîtres de l'avenir, qui broyant savamment sur leur palette verbes, substantifs et adverbes, préparent à notre France une langue nouvelle. A-t-il assez défiguré la malheureuse personne que j'ose vous présenter aujourd'hui ? Les rides ont effacé sur son visage les grâces charmantes de la jeunesse; ses vêtements, usés par le temps, trahissent sa misère; aucune lumière dans ses yeux éteints. On sent qu'elle ne marche plus, qu'elle se traîne, que ses lèvres flétries ne s'ouvrent plus que pour laisser échapper des pensées antiques, enveloppées de périodes surannées. C'est un revenant, c'est une endormeuse, et dans le groupe d'hypnotiseurs que fête la curiosité publique, aucun ne suggère aussi victorieusement aux sujets les plus rebelles la lassitude et l'ennui.

Certes, si telle est l'image fidèle de l'éloquence académique, de celle qui tient ses grandes assises sous la coupole de l'Institut, qui reçoit, en province, des hommages plus discrets et non moins sincères, et dont l'écho se fait entendre dans nos mémoires, il vaut mieux se taire que

la défendre. A quoi bon vanter ce qui a cessé de plaire? Laissons silencieusement descendre dans le royaume des ombres ce genre ennuyeux. Que si nous sommes assez naïfs pour nous en éprendre encore, cachons notre faiblesse et conservons pour nous seuls ce culte superstitieux d'un passé qui ne peut plus revenir.

Heureusement, nous avons quelques raisons pour croire que le portrait n'est pas ressemblant. J'essaierai de les exposer aussi rapidement que possible. La cause ne me paraît pas mauvaise, et d'autre part, je ne saurais trouver pour la défendre occasion plus favorable, puisque la publicité de cette séance m'assure un auditoire aussi bienveillant que flatteur pour notre Académie, Il est vrai que l'on pourra m'accuser d'être intéressé dans l'affaire et de plaider pour ma propre demeure, comme jadis un grand orateur romain. Son éloquence n'en fut pas diminuée : si la mienne ne peut en augmenter, vous voudrez bien m'accorder, qu'entre toutes les causes, celle que l'on défend le moins mal, est encore celle que l'on aime davantage.

Et d'abord, l'éloquence académique est-elle bien ce personnage antique dont je vous parlais tout à l'heure? A-t-elle réellement les rides que l'on prétend voir creusées sur son visage? Ou bien serait-ce que ses vêtements ne sont pas suffisamment ajustés à la mode présente ? Est-ce le genre lui-même qui a vieilli, ou les dehors sous lesquels il se présente qui ne répondent plus aux exigences de notre temps? Ou bien le tout n'est-il plus qu'un vestige désagréable de préjugés arriérés, maintenu par l'obstination des vieux partis qui n'épargneraient même pas la plus inoffensive des républiques, celle des lettres? Il n'y a pas à le nier. Les apparences sont contre nous. « Quel style, nous dit-on, et comme il est triste et incolore! Quoi? Toujours, depuis deux cents ans, les mêmes périodes savamment alignées, les mots qu'ont applaudis nos pères, la régularité classique qui faisait leurs délices, la dignité prétentieuse et guindée dont ils paraient leur éloquence! cela était bon jadis, quand les sciences et les lettres constituaient l'apanage exclusif d'une aristocratie adoratrice de l'étiquette, quand le style subissait le joug du pédantisme grammatical, quand on sacrifiait encore aux procédés d'une

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