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tribuns, les actes qu'il aurait reconnus inconstitutionnels.

Venait ensuite un corps, inconnu depuis 1791, un conseil-d'état amovible, devant éclaircir les difficultés administratives, et participant à la législation, chargé, sous la direction du premier consul, de rédiger les projets de lois et les réglemens; de soutenir les projets de lois devant le corps législatif, créé muet, et de répondre aux tribuns qui parleraient sur ces mêmes projets.

65. Au reste, on conservait les garanties promises par les constitutions précédentes.

On ne parlait d'administrations locales que pour dire qu'il y en aurait.

La commission de trésorerie nationale ne devait plus exister.

La commission de comptabilité nationale était conservée, ainsi que le tribunal de cassation : les membres de ces deux corps devaient être nommés le sénat, sur les listes de présentation des corps électoraux.

par

66. Il y avait, pour juger les ministres, dans le cas de responsabilité, une haute cour nationale, composée de juges et de jurés ; mais les agens d'exécution, autres que les ministres, ne devaient être poursuivis, pour des faits relatifs à leurs fonctions, qu'en vertu d'une décision du conseil-d'état, c'està-dire du premier consul, ou de ses ministres chargés du pouvoir exécutif. Ainsi, le gouvernement pouvait violer toutes les lois, pourvu que ce fût

par ses agens quelconques autres que les ministres : tel est le sens de ce fameux article 75 de la constitution consulaire; sous ce rapport seul, il établissait en droit le despotisme le plus absolu, le plus déhonté, le plus insupportable. Les faits ne justifièrent que trop l'extrême danger d'une pareille théorie, malheureusement ressuscitée, remise en pratique par les ministres, sous la Charte constitutionnelle, au grand mécontentement des citoyens. Ce mal cesserait, s'il y avait une loi raisonnable sur la responsabilité des ministres ; mais, depuis quatre ans, cette loi, la plus nécessaire, est éludée par les

ministres.

que

Malgré ses défauts, tel était le malheur des tems, la constitution consulaire fut le plus promptement acceptée sur les registres des communes. Respectée d'abord, elle fut, dans la suite, renversée presque entièrement par des plébiscites, résultats de registres ouverts dans les communes, par les sénatus-consultes, imposés, acceptés sans discussion, depuis le mois d'août 1802, jusqu'à la chute de l'empire, et même par de simples décrets, du propre mouvement de l'empereur, qui se détruisait ainsi lui-même, et ne voulait pas s'en apercevoir, aveuglé qu'il était par l'orgueil, et enivré de l'encens que brûlaient devant lui ses esclaves et ses flatteurs.

CHAPITRE VI.

Des sénatus-consultes, des plébiscites, et des décrets impériaux, sous le gouvernement de Napoléon Bonaparte.

67. Le premier acte remarquable demandé aux sénateurs par le chef de l'état, fut un sénatus-consulte de proscription contre des citoyens déclarés dangereux. Après de longs débats, cet acte fut consenti à une faible majorité. Dès-lors on dut prévoir qu'au nom du sénat conservateur seraient sacrifiés les restes de la liberté qui existaient encore dans la constitution de 1799. L'anti-loi fut accordée sur une liste nominale de cent personnes, et le lendemain, sans nouvelle proposition, sans nouveaux débats, sans arrêté d'extension, il se trouva cent trente proscrits sur la liste. C'est ainsi que vingt-une victimes ont été ajoutées de fait à la liste du 24 juillet 1815, et trente-six au moins, par extension ministérielle, à la liste des proscrits pour leurs votes, par la loi du 12 janvier 1816.

68. Par violation d'un autre article constitutionnel, le premier consul accorda aux généraux sénateurs qui les lui demandèrent, et qui prirent ensuite ou favorisèrent l'initiative de l'établissement de sa monarchie, les fonctions et le traitement de général, en conservant le titre et le revenu de la do

tation sénatoriale. Pour aller plus vite, il fut établi par sénatus-consulte, que les sénateurs ne seraient plus absorbés; qu'ils pourraient obtenir d'autres emplois, des commissions lucratives; et trente-une sénatoreries, de vingt à trente ou quarante mille francs de revenu, furent créées pour entretenir l'émulation, récompenser le zèle et les services au gré du

monarque.

69. Autre violation de la constitution consulaire: les émigrés furent rappelés; le prince en fit ses écuyers, ses chambellans, par centaines; et, à cette école, ils se renforcèrent dans la pratique et la théorie de l'obéissance passive à laquelle déjà ils étaient dévoués.

70. Les listes des notables, ou des présentateurs, et des éligibles, furent, sans grand mystère, à Paris et dans plusieurs départemens, dressées à volonté, après qu'on eut brisé le sceau des scrutins et annulé les votes légitimes. Ces hardiesses firent du bruit, excitèrent des murmures: on dut renoncer à les renouveler; mais on inventa les électeurs adjoints par le gouvernement aux corps électoraux ; et, avec ces adjoints, on fit élire, ou plutôt présenter au sénat qui l'on voulut, comme nous avons vu, en 1815, par des électeurs adjoints, élire les introuvables qui subsistent encore en partie, et de qui nous avons reçu les lois d'exception les plus affligeantes.

Les candidats parens ou alliés des sénateurs, ou des favoris du prince, furent bientôt préférés ; ceux

qui lui déplaisaient furent constamment exclus sur la parole officieuse de quelques sénateurs, se disant porter le vœu du chef de l'état. C'est ainsi que, par divers artifices et sous un masque de liberté, on organisait la servitude.

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71. Les grands changemens qu'on avait en vue, on les prépara, on les facilita d'abord par une véritable épuration de tout le tribunat et de tout le corps législatif, mais que l'on essaya de voiler en élisant tout à-la-fois les quatre cinquièmes dans les deux corps, au lieu d'ordonner le tirage au sort d'un cinquième, et d'opérer ensuite le premier renouvellement par l'élection constitutionnelle d'un cinquième seulement.

72. Le premier consul ne devait être rééligible qu'à la dixième année de son consulat; il se hâta de demander une seconde élection décennale, et anticipée de près de neuf ans; il l'obtint, non sans difficultés, lorsqu'il attendait que, par un voeu spontané, les sénateurs le déclarassent premier consul à vie. Cette dernière proposition fut faite par des officieux, mais rejetée par la majorité des sénateurs. Sans aucun droit, Napoléon fit un acte d'appel au peuple; seul, il prescrivit la forme pour juger cet appel ambitieux, et fit surveiller, par ses agens exécutifs, des registres de votes sur le consulat à vie, dans toutes les corporations et dans

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Les épurations avaient été inventées, en 1793, par Danton, Marat et Robespierre. (Voyez Mémoire justificatif pour le comte Lanjuinais.)

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