Homme fage, & qu'alors par-tout on respectoit, craint, Dort comme un bienheureux, & bien mieux qu'un Monarque ? lui. Sire, répond l'Hermite, un pauvre Villageois ronnes : Que les honnêtes-gens foient vos feuls favoris, Et mieux dormir dans vos lits, Dormez un peu moins fur vos Trônes. Ce Conte, dont l'idée eft auffi intéref fante que le ton en eft fpirituel & facile, eft F'ouvrage d'un jeune homme de qualité, qui aime & cultive les Lettres. On y appercevra quelques négligences qui prouvent que Auteur ne l'avoit pas deftiné à l'impreffion; mais le peu d'importance qu'il attache à ces amiemens de fon loifir, nous fait croire qu'il pardonnera la petite infidélité qu'on Jui a faite. LE MORT REVENANT, Nouvelle. SI le mariage eft le tombeau de l'amour, Pabfence lui eft encore plus funefte. On cite pour exemple de cette vérité un Marchand fort riche, marié depuis fix mois, qui aimoit beaucoup fa femme, & qui en étoit fort aimé, lorfque le defir du gain l'entraîna dans un pays fort éloigné. Il partit malgré les larmes & les careffes de fa jeune époufe, lui promettant de revenir bientôt avec de nouvelles richeffes. Un de fes amis s'affocia avec lui, & ils pafsèrent aux Indes; ils firent de grandes affaires; mais plufieurs années s'écoulèrent dans leur entreprife. Enfin ils revinrent en Europe fur un vaiffeau entièrement chargé de leurs marchandises. Ils furent jetés par la tempête fur une côte d'Irlande, où ils furent obligés de s'arrêter, en attendant qu'ils puffent fe rembarquer sûrement. Le Marchand conçut le projet de faire courir le bruit de fa mort, pour furprendre enfuite plus agréablement fon époufe par sa préfence. Il écrivit lui-même un billet d'une main tremblante, comme s'il étoit expirant: il faifoit un éternel adieu à fa femme, & marquoit que fes feuls regrets étoient de la perdre. Son affocié adreffa ce billet à un Religieux de fes amis, & le pria de voir la jeune veuve, & de la préparer à fupporter avec réfignation la perte qu'il lui annonçoit. Les chofes fe firent comme le Marchand les avoit concertées: il ne ceffoit d'admirer fon bon tour, qui le rendoit furvivant à luimême, & qui devoit lui préparer une belle furprise de la part de fa tendre moitié. Toute la ville fut bientôt la trifte fin de ce Marchand. Il n'y avoit point lieu de douter de fa mort, après les preuves qu'il en avoit fi bien préparées. Sa veuve prit le deuil, & fit paroître d'abord beaucoup de trifteffe, mais un Gentilhomme qui avoit commencé à lui faire fupporter les ennuis de l'abfence, s'offrit de réparer les chagrins du veuvage. Ce fecond mari fe préfentoit avec des avantages que n'avoit pas le premier. De la jeuneffe, des grâces, de la naiffance, furent des titres qui firent recevoir promptement fa propofition. Le Gentilhomme fit porter fon nom à la veuve deux mois après la nouvelle de la mort du Marchand, & dans le temps même que ce dernier partoit d'Irlande pour jouer le mort vivant. Il arriva de nuit, fe faifant d'avance un grand plaifir de la joie que fon apparition alloit caufer. Une fervante qui vint lui ouvrir la porte, fit à fon afpect un eri épouventable, & s'enfuit; fa femme qui étoit dans une falle voifine, accourut, & croyant voir l'ombre de fon mari qui venoit fe plaindre, elle jeta de fi hauts cris, que tous les gens de la maifon & les voifins s'affemblèrent. Elle tomba évanouie fur un fiége. Le premier mari étoit d'un autre côté interdit & muet d'épouvante & de douleur. On fe regardoit, on ne favoit que penfer de cette aventure. Enfin le Marchand apprenant l'effet de la nouvelle qu'il avoit répandue de fa mort, il en demeura accablé, & en fut fi frappé, que la fièvre ne tarda point à réalifer ce qu'il avoit fi mal imaginé. Il monrut au bout de fix jours, en criant fans ceffe qu'il méritoit fon malheur. Le fecond mari, que des ordres à donner avoient fait aller à une terre, revint le jour qu'on enterra fon rival. Il ne pouvoit arriver plus à propos pour confoler encore une fois fon époufe de fon fecond veuvage. Explication de l'Enigme & du Logogryphe du Mercure précédent. LE mor de l'énigme eft Silence; celui du Logogryphe eft Sacrifice, où fe trouvent frac, fiacre, crife, fucre, ris, cri, fi, fraife, arc, fac Circe, carie, feie, & cire à acheter JE n'habit ÉNIGM E. E n'habite ni l'eau, ni le feu, ni la terre: Sans moi, Lecteur, tu n'eus pas eu Voltaire, Sans être dans les bois je fers aux éléphans. J'ai l'art de me gliffer au cœur d'une fillette; Sans moi l'on ne verroit pas clair. Sans trop favoir pourquoi, je fuis à la Bastille. On me voit à Chaillot, au Louvre, à la Courtille. Je figure au Palais Royal ; J'aide à marcher le Molinifte. Je demeure avec Lucifer: Par-tout je me retrouve à table, (Par un Abonné. y |