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dit point encore quel en eft l'effet. En at tendant, on voit paroître plusieurs écrits fur les circonftances préfentes, qui tous prouvent l'opinion générale fur les prétentions de l'Angleterre. Parmi ces écrits, on en doit distinguer un qui a été publié sous le titre d'Objervations d'un citoyen d'Amfterdam, fur le mémoire présenté aux EtatsGénéraux, par M. le Chevalier Yorck, le 22 Juillet dernier.

» Rien affurément n'eft plus fait pour être respecté que le langage d'un Ambaifadeur, fur-tout lorfqu'il parle au nom de fon Souverain, & le public eft posté naturellement à ajouter foi à fes affertions; mais ce même public n'eft pas obligé d'y croire aveuglément; il a le droit d'examiner, d'approfondir & même de cenfurer. Il nous importe d'au tant plus, à nous autres Hollandois, d'ufer de ce privilége, que M. le Chevalier Yorke nous dit miniftériellement que la France & l'Espagne fon deux Puiffances perfides, qui fe font un jeu de violer le droit des gens, de troubler la tranquilité publique, qui ont formé l'effrayant projet de donner la loi à toute l'Europe, après avoir envahi l'Empire Britannique; que par conféquent notre propre intérêt, & même notre falut nous impofent le devoir de voler au fecours de l'Angleterre, c'est-à-dire de prendre part à une guerre qui sembloit nous être abfolument étrangère, contre deux Souverains qui ne nous ont point offenfés, pour une caufe que nous penfions n'avoir aucun intérêt à foutenir, Il faut avouer que fi tout ce que M. le Chevalier Yorke avance eft bien fondé, rien ne mérite plus d'attention, que les efforts réunis de la France & de l'Efpagne; que la caufe de la Cour de Londres eft celle de tous les Souverains, & que l'Europe entière

doit fe liguer pour échaper aux fers de la Maifon de Bourbon, en fauvant la Grande-Bretagne. Mais fi en revanche, S. E. a fuppofé aux Cours de Versailles & de Madrid des vues qu'elles n'ont point, fi elle a allégué des faits, qui n'exiftent pas, en un mot, fi fon Mémoire n'eft qu'une déclamation hazardée, calomnieufe & imaginée dans l'unique vue de nous égarer, il faudra avouer que fa réclamation ne mérite aucune attention, & que le feul parti qu'il nous convienne de prendre, c'eft de la rejetter, & de perfifter dans la neutralité que nous avons fi fagement adoptée «.

Pour parvenir à un résultat qui puiffe guider, le Hollandois, ou celui qui prend ce nom, analyfe le mémoire de l'Ambaffadeur, & pulvérife tous les raifonnemens & toutes les affertions. Quel que foit l'auteur de cette brochure, il annonce un homme verfé dans la politique des nations, dont il a approfondi les intérêts; & fes obfervations méritent d'être lues & méditées. Nous aurons plus d'une fois l'occafion de revenir fur ce fujet, & d'employer fréquemment ces réflexions pour jetter du jour fur les évènemens courans, fur les vues de l'Angleterre, & les intérêts des nations dont elle follicite aujourd'hui vainement les fecours; en attendant, nous continuerons l'expofé des motifs qui ont déterminé l'Ef pagne à la guerre.

3. L'Angleterre ne pouvoit pas avoir des motifs de jaloufie & de démêlés, relativement à l'Espagne, pour ceffer de la traiter d'une manière conforme aux règles de l'équité & de la reconnoiffance, & ainfi qu'aux bienséances, attendu que l'Espagne ne feroit & ne pourroit faire que très peu ou point de

commerce avec les Colons Anglois: celui de fes poffeffions en Amérique étant fuffifant, & même plus que fuffifant pour elle. Cependant la Cour de Londres, pour le ménager un prétexte de rupture, lorfque fes projets feroient parvenus à leur point de maturité, affectoit de grandes inquiétudes fur la correspondance de commerce que quelques Négocians de Bilbao entretenoient avec d'autres Négocians de fes Colonies, quoique cette correspondance eût commencé un grand nombre d'années avant qu'elles rompiffent avec leur Métropole. Le Ministère Anglois prétendit auffi devoir prendre ombrage de la correfpondance mercantile qu'entretenoient quelques Habitans François de la Louifiane avec les Colons, & il vouloit rendre le Gouvernement Efpagnol refponfable de certe contravention à fes propres loix dans ces Pays : dans le tems même que les Sujets d'Angleterre, appellés Royaliftes, étoient pareil. lement en contravention par la contrebande qu'ils faifoient fur les côtes Efpagnoles du Mitfiffipi & de la Louifiane; ce qui fut caufe qu'il y en eut plufieurs d'arrêtés & que les Anglois fe répandirent en plaintes à cette occafion. L'orgueil des Commandans Anglois dans ces parties, prétendoit auffi que l'on ne devoit point donner d'afyle dans la Louifianne aux Colons perfécutés, tandis que les Royalistes qui s'y réfugioient étoient sûrs de n'avoir rien à craindre, non-feulement pour leur vie, mais pour leurs biens. C'est un fait conftaté par les remerciemens de plufieurs des ces Royalistes au Gouverneur Espagnol, qui ne fe font pas bornés à témoigner leur reconnoiffance de vive voix mais en ont configaé l'expreffion dans un écrit figné d'un grand nombre d'entr'eux. Le Gouvernement Espagnol a porté l'humanité jufqu'à envoyer de fon propre mouvement des farines à Pensacola, d'après la connoiffance qu'il avoit de la difette qui régnoit dans cette Place: la reconnoiffance du Ministère & de la Nation Britannique a éclaté par les

menaces, les violences & les manœuvres qui viennent d'être rapportées.

4. Sans nous arrêter aux évènemens antérieurs à ces derniers tems, nous dirons que les infultes faites par la marine Angloise à la navigation & au commerce Espagnol depuis l'année 1776, jufqu'au commencement de Mars de l'année préfente 1779, fe montoient déja à 86, dans le nombre defquelles on comprend des prifes injuftes, des pirateries & des vols de différens effets à bord des bâtimens, des coups de canon tirés & d'autres violences incroyables. Depuis ce mois de Mars, & nonobftant le Mémoire remis le 14 du même mois par le' Marquis d'Almodovar, où il fe plaignoit des griefs les plus capitaux, & où il rappelloit les Mémoires précédens, les Anglois fe font emparés, les 12 19 & 26 Avril, des 3 bâtimens Espagnols nommés Nuestra Senora de la Concepcion, la Virgen de Gracia, & las Animas. Ces excès joints aux autres infultes dont la note avoit été envoyée au Marquis d'Almodovar, pour qu'il en informât les Miniftres Anglois, ont donné lieu à cet Ambaffadeur de dire, dans la dernière déclaration qu'il a remife au Ministère Anglois le 16 Juin, que les griefs dont on le plaignoit depuis ces dernières années s'approchoient du nombre de cent.

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5. Les vaiffeaux ou bâtimens du Roi Catholi que, ainfi que fes barques courières, balandres & autres, incapables de faire une réfistance convenable, qui ont été infultés par la marine Angloife dans le cours des deux années dernières, jufqu'au commencement de Mars de celle-ci, dans les mers d'Europe & d'Amérique, font au nombre de douze. On rougit de rapporter l'indécence & même l'igno minie avec lesquelles les Officiers Anglois tant dans ces circonftances que dans d'autres, ont traité le pavillon de S. M. C. On citera feulement ce qui s'eft paffé le 31 Octobre de l'année dernière, Un Officier Anglois, détaché par deux frégates

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de la même Nation, vifitant entre les ifles de la Mona & de la Saona, le Guayro Espagnol nommé Nuestra Senora de la Efclavitud, ayant fait abaiffer le pavillon du Roi, s'eft fervi de l'endroit cù étoient les armes de S. M. pour s'en frotter le vilage & elluyer fa fueur, voulant par là montrer le mépris qu'il en faifoit. Ce digne Officier & fes compagnons ont pillé le bâtiment, & jufqu'aux hardes des Matelots.

6. La Nation Angloise a violé onze fois le territoire Espagnol dans ces dernières années. Parmi toutes ces infultes, on remarquera celle que fe permitent les chaloupes de trois frégates Angloifes qui étoient dans la baye de Gibraltar le 30 Avril 1777. Elles firent feu fur le bateau des Fermes du Roi, ainfi que fur le corps-de-garde qui étoir au pont Mayorga, & enlevèrent l'équia & les - effets d'une goëlette prife par le mêmeau, parce qu'elle étoit foupçonnée de porter en contrebande du tabac & de l'argent monoyé. Auffitôt que les Anglois s'en furent emparés, ils fe retirèrent en faisant des faluts avec leurs chapeaux, comme par dérifion,

7. Les plaintes de la Cour d'Espagne ont été auffi fouvent répétées que les infultes de la part de l'Angleterre, les Mémoires fe fuccédant continuellement à Londres & à Madrid, de manière qu'on peut dire qu'il en a été donné une infinité; & malgré cela, on a ofé faire dire par S. M. B., dans fon Parlement, qu'un grand nombre de ces plaintes n'étoient point venues à fa connoiffance, & qu'elle étoit intérieurement convaincue qu'elle n'avoit point don né fujet au procédé injufte de l'Espagne. Ces plaintes, on le répète aujourd'hui, ont été fi continues, que D. Francifco Efcarano expofant par écrit quelques-uns de ces griefs au Lord Weymouth, le s Février 1778, lui témoignoit déjà qu'il fe laffoit de fe plaindre fi fouvent, & lui marquoit, » qu'il Lembloit que tous les Commandans des vaiffeaux

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