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les Membres du Gouvernement, & leur remit le manifefte détaillé, contenant les griefs du Roi fon Maître contre la GrandeBretagne.

Comme les motifs qui ont armé la France & l'Ef pagne, font les mêmes, le manifefte imprimé en deux colonnes préfente fur l'une l'expofé de S. M. T. C., & fur l'autre les motifs particuliers de S. M. C. Dans cette relation détaillée des torts & des infultes que l'Efpagne a foufferts de la part de la nation Angloife; de la négociation fuivie à Londres, d'abord par le Chevalier d'Efcarano, Secrétaire d'Ambassade, & enfuite par le Marquis d'Almodovar on trouve les mémoires préfentés d'un côté, les réponses données de l'autre, en un mot tout l'ensemble de la longue négociation entre les deux Cours depuis fon origine jufqu'à fa ruptute. Il y a dans le parti que le Cabinet de Madrid a pris de manifefter ainfi fa conduite devant le Tribunal du public, quelque chofe de généreux & de grand, qui montre la bonne foi de fa conduite avec l'Angleterre, fon defir fincère d'obtenir par des voies de douceur & de conciliation, la juftice qu'il a été réduit à chercher par la voie des armes.

L'expofé de la France & celui de l'Espagne imprimés enfemble, & liés intimement ne devroient pas être féparés, parce que l'un n'of fre que des notes ajoutées à l'autre : comme nous avons donné le 1er. dans les Journaux du 17 & du 24 Juillet dernier, nous y renvoyons nos lecteurs, & nous détacherons ici le fecond.

1. Il feroit trop long de rapporter tous les fujets de plainte donnés à l'Espagne depuis l'époque du Traité de Paris de 1763. Nous nous bornerons aux plus graves & aux plus récens, pour qu'on ne dife point que nous rappellons des griefs anciens & ou

bliés. Par l'article 16 des Préliminaires de ce Traité l'Angleterre a reconnu que la Baye de Honduras appartenoit au territoire d'Espagne, & elle s'eft obligée à faire rafer toutes les fortifications que les fujets auroient pû avoir conftruites. dans cette partie du monde, quatre mois après la ratification du Traité: la Cour d'Angleterre n'ayant fait d'autre réserve que celle-ci; favoir, qu'on n'empêcheroit point les Anglois, fur la côte de Campeche, de couper le bois de teinture: qu'on n'inquieteroit point pour cela leurs travailleurs, & qu'ainfi ils pourroient y avoir les maifons & les magafins dont ils auroient befoin.

Jufqu'à préfent les Anglois n'ont exécuté aucune de ces conditions. Ils ont pénétré de plus en plus dans les anciens établissemens, foulevant les Indiens, & leur donnant des armes & d'autres fecours fous la protection du Gouvernement Britannique. Ils fe font encore permis de s'établir dans un grand nombre d'autres ports, rivières, anfes & côtes du territoire Efpagnol de la Baye de Honduras, où ils n'ont pas même le prétexte de bois à couper avec la feule intention d'y empiéter fur la Souverai neté Elpagnole & d'y faire la contrebande la plas étendue. Tels font les lieux appellés le Piche, Rio tinto, Rio matina & divers autres où ils ont formé & armé des Milices. Le Roi Britannique a même donné à un certain Jacob Lourri, la commiffion de Capitaine général de ces nouveaux établiffemens, Jaquelle a été lue d'une manière folemnelle à toute la Colonie le 21 Septembre 1776, les Troupes étant raffemblées; on y a lu pareillement d'autres com miffions d'Officiers on Chefs de moindre grade. Voilà ce que faifoient les Angiots & ce que l'Efpagne a découvert, après que le Ministère Britannique eut nié que ces établiffemens fe fiffent de fon confentement & par fon autorité.

Les Colons Anglois ont ufé d'artifices & de rufes pour débaucher celui qui fe nommoit Roi des In

diens Molquites, & celui qu'on appelle Capitaine ou Général des autres Indiens dont les Chefs ont envoyé des Commiffaires au Viceroi du Gouvernement Ef pagnol, fe reconnoiffant Sujets de S. M. Ils leur ont fourni des armes & toutes fortes de fecours pour les empêcher de fe metere fous la protection de l'EL pagne, à la fouveraineté de laquelle reffortiffent exclufivement tous ces territoires. Quoique ce foit l'ufage des Anglois de recevoir dans leurs Etabliffemens tous les Etrangers de quelqu'état ou religion qu'ils puiffent être, on en a toujours non-feulement refufé l'entrée aux feuls Efpagnols; mais dès qu'ils y paroiffent, ils y font arrêtés & emprifonnés, ou on les contraint d'en fortir.

Ce qui prouvre le deffein conftant de l'Angleterre de s'approprier ces vaftes territoires, d'y fonder des Etabliffemens, & d'y étendre de plus en plus l'énorme contrebande que fes Sujets font déja dans l'intérieur des Provinces Efpagnoles, il est à propos de citer auffi un évènement de l'année 1775.

Le Docteur Irwin, Médecin célèbre par fes voyages autour du Monde, étoit parti de la Tamife même, emportant avec lui toutes fortes d'inftrumens propres au labourage & aux métiers, & une infinité d'autres chofes fournies par le Gouvernement, pour faire, dans la Province de Hacha, un établissement permanent auquel il devoit employer des familles qu'il emmenoit avec lui, & d'autres qui devoient les fuivre. Dans cette vue, il avoit nourri & élevé dans fa maifon un fils d'un Roi Indien & deux des principaux Indiens de ce canton. Le bâtiment du Docteur fut pris par les Gardes-côtes Espagnoles; & le Gouvernement Britannique, au lieu de donner Latisfaction pour cette infraction des Traités, fe plaignit amèrement, en menaçant l'Espagne de la guerre.

Au mois de Novembre 1778, quelques Espagnols voulurent s'établir fur la rivière de Saint-Juan à la

Côte des Mofquites, où ils conftruifirent des maisons. Au moment qu'ils y étoient le moins fur leurs gardes, ils fe virent attaqués par un parti d'Anglois, foutenu d'un parti d'Indiens qui bleffèrent le Capitaine du bâtiment, firent prifonniers beaucoup des gens, & commirent grand nombre d'autres violences. Cet évènement fe paffoit, pendant que la négociation fe fuivoit avec la plus grande activité de la part du Roi d'Efpagne, pour obtenir une paix favorable à l'Angleterre. Rien ne fait mieux voir combien la Cour de Londres, fon Ministère & fes Sujets répondoient

peu à de fi bonnes intentions, & combien il y a de diftance entre de pareils procédés & la conduite magnanime & généreuse de S. M.

Les Anglois ont fait la même chofe dans tous les lieux où on les a foufferts. Sur la côte de Saint-Blaife dans la Province de Darien, ils excitent à la révolte les Indiens établis fur les frontières Efpagnoles, leur donnent des fecours, les décorent même de commiffions & de marques de commandement fous la protection Britannique; c'eft fur ce pied qu'un Chef Indien, nommé Bernard, y eft pourvu d'une commiffion en forme donnée par le Gouverneur de la Jamaïque, & qu'il porte un bâton de commandement avec une infcription angloife qui le qualifie Capitaine Général de cette côte. Cette découverte s'eft faite auffi dans le commencement de l'année préfente; & le 8 Mars, il a été ordonné d'en porter plainte au Ministère Anglois, qui a répondu en affectant de l'ignorer, comme il a toujours fait.

Dans ces dernières années, les Anglois ont fait diverfes tentatives pour foulever les Nations des Indiens ou alliés amis de l'Espagne, qui habitent fur les frontières de la Louifiane, en leur fourniffant des armes, en les débauchant par des préfens, en leur donnant des commiffions & des médailles angloises, enfin en les excitant ouvertement à s'unir avec les

Anglois armés, pour commettre des hoftilités contre les Sujets de S. M. C.

Il a été porté en plufieurs occafions à la Cour de Londres des plaintes de divers évènemens de cette nature; &, quoiqu'elle ait répondu en termes géné raux, qu'elle prendroit les informations, & qu'elle expédieroit les ordres convenables, ces plaintes n'ont point produit les effets que l'Espagne devoit attendre, d'après toutes les règles de la justice & de la raison.

Au contraire, fous le prétexte de leur guerre avec les Américains, les Anglois, fermant les yeux fur l'exacte impartialité que la Colonie Efpagnole a obfervée, ainfi que fur le bon accueil qu'ils y ont toujours reçu, ont commis, tant par mer que par terre, les infultes les plus révoltantes, au point qu'une de leurs frégates de guerre a ofé menacer la Ville même de la nouvelle Orléans, capitale de la Colonie.

Dans les mois de Juin & de Juillet de l'année dernière 1778, les Anglois ont foulevé les Chatcas, les Cheroquis & les Chicachas, payant à chaque Indien la valeur d'une peau de cerf par jour, & les excitant à frapper avec la cruauté ordinaire à ces Nations barbares, fur les établiffemens Efpagnols, pour les détruire; au mépris de la paix qui régnoit entre l'Espagne & l'Angleterre, de la modération & de l'impartialité que le Roi montroit par la conduite pendant les divifions de cette Puiffance avec fes Colonies & la France.

Pour cette entreprife, les Indiens devoient s'unir avec un corps d'Anglois armés dans le district appellé Natches. Mais ce projet inhumain n'eut pas fon effet. Doux de ces Nations, touchées fans doute de l'injuftice qu'elles alloient commettre, au mépris de la bonne foi & des bons traitemens qu'elles recevoient des Espagols, fe retirèrent avant l'exécution.

Toutes les fois que les Anglois ont pris des Habitans de la Colonic Efpagnole & en ont emmené

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