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» nons eumes la douleur de voir enlever à quelques pas de nous, par un de » ces cruels animaux, un Maure de no» tre fuite, qui nous avoit été fort utile à » tous égards dans nos miféres. Le » même Tigre, après avoir achevé ce malheureux, refortit du bois, & nous fixa tous d'un regard terrible; mais » nous tenant bien ferrés ensemble " par notre fermeté & par le bruit que » nous fimes, nous l'obligeâmes de fe >> retirer.

Je ne fuivrai pointM. de Kearny dans les détails de fon voyage; il vous fuffira de favoir, qu'après avoir éprouvé tantôt de bons, tantôt de mauvais procêdés de la part des Anglois, il débarqua enfin à Lon dres, & en partit au bout d'un mois pour ferendre en France, où il eft arrivé pref que mourant. Il doit fa guérifon à M. Miffa, & lui en marque fa reconnoiffance à la fin de fa lettre.

Ce recit, Monfieur. eft très-intéreffant, & très-bien écrit ; il touche de trop près l'humanité pour qu'on ne le life pas avec cet attendriflement qu'infpirent aux coeurs les plus durs les infortunes de nos femblables. On goûte d'ailleurs, comme dit Lucrece, une forte, de fatis

faction fecrette à voir du port les hor reurs d'un naufrage.

Suave mari magno turbantibus æquora ventis,
E terrâ magnum alterius fpectare laborem.

Quinault dans fon Opéra de Phaeton, a bien imité cette pensée philofophique.

Heureux qui peut voir du rivage

Le terrible Océan par les vents agité ! Heureux qui dans le port peut plaindre en fûreté Ceux qui font dans l'horreur d'un funeste naufrage!

Hiftoire & Pratique de la Clôture.

De tous les livres qui ont été compofés fur la clôture des Religieufes, il n'y en a point de plus complet que celui du célébre M. Thiers, Curé du Diocèfe de Chartres, enfuite du Mans, imprimé en 1681. On y trouve une longue énumération de paffages des Conciles & des Pères de l'Eglife, des règles & des Statuts des Fondateurs & des Réformateurs de Religieufes; il en réfulte la clôture eft d'un droit rigoureux; qu'elle eft une loi de tous les fiécles & de tous les ordres Religieux de filles.

que

Cependant, comшe on peut ajouter

à l'ouvrage de M. Thiers des preuves plus récentes que les fiennes, & la réfolution de bien des difficultés qu'il ne s'eft pas même propofées, M. S. Cherrier, Chanoine Régulier, a cru pouvoir entreprendre fur cette matiere un nouvel écrit, qui vient de paroître fous ce titre: Hifloire & Pratique de la Clôture des Religieufes, felon l'efprit de l'Eglife & la Jurifprudence de France; dédiée à Noffeigneursles Archevêques & Evêques du Royaume un feul volume in-12 de 700 pages; à Paris chez Defprez, Imprimeur du Roi & du Clergé, rue Saint Jacques, au coin de la rue des Noyers.

Des perfonnes laïques fe font un jeu d'entrer dans des Monaftères par fubtilité. Des Religieufes elles-mêmes qui fouffrent impatiemment d'être toujours enfermées, ont recours à des prétextes, à des fubterfuges, à des interprétations illufoires de la Règle, pour franchir la barriere de leur Cloître. Elles fe difent malades, ont befoin de changer d'air & d'aller aux eaux, fe font donner des atteftations par des Médecins complai fans, &c.

Le févere auteur de ce livre fait voir tous les abus, tous les défordres, tous les fcandales que produit le relâche

ment fur ce point important. Il accable les Religieufes du poids d'une foule d'autorités anciennes & modernes ; il difcute tous les cas particuliers pour leurs forties & pour les entrées des Séculiers dans leurs Monaftères. Mais, comme des principes fpéculatifs ne fuffifent pas, & que les bons exemples ont plus de force pour perfuader, M. S. Cherrier rapporte un grand nombre de traits hiltoriques de faintes filles ou veuves, 'qui, dans divers temps & dans différens pays, ont vêcu dans la folitude la plus parfaite.

Sainte Alexandre fe voyant éperdûment aimée d'un jeune homme, fe renferma dans un tombeau où elle demeura dix années entieres fans voir perfonne, & fans manger que fur le foir un peu pain qu'on lui paffoit par un trou. Sainte Thais, d'une ville d'Egypte, vers l'an 360, de courtilanne, devint pénitente par les exhortations du folitaire Paphnuce. Ce Saint la mena dans un Monaftère de filles & l'enferma dans une cellule dont il fcella la porte avec du plomb; il ne lui laiffa qu'une très-petite fenêtre, par laquelle une Soeur du Couvent lui paffoit fa nourri ture, qui ne fut qu'un peu de pain &

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d'eau le refte de fes jours.

La vie retirée que menent encore aujourd'hui des Religieufes Grecques fous la domination des Turcs, eft bien capable d'infpirer aux Religieufes Françoifes le defir de les imiter. » Ces Religieufes Grecques vivent en » commun, fous la régle de Saint Bafile » le Grand, dans des lieux féparés des

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maifons féculières, & entourrés de » hautes murailles..... Elles ont tou»tes le même habit; il eft de laine de » couleur naturelle; leur voile eft de » même; leurs manches couvrent leurs bras & leurs mains jufqu'aux doigts; leur capuce & leur manteau font fans » plis; leurs cheveux font coupés. Après » leur office, elles font de magnifiques » couvertures en broderie, & des ceintures en forme de rets. En les dé

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pliant on y voit toutes fortes d'ani» maux merveilleufement bien formés, » & adroitement diftingués les uns des

autres. Elles font auffi, avec beau»coup d'art & de variété, toutes autres fortes d'ouvrages en foie. De là vient que quand la flote des Turcs aborde dans leur ifle (ce qui arrive tous les ans ces Infidèles vont en foule au Monaftère de ces Religieufes, & alors

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