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la sève a un cours descendant pendant toute la période de végétation. Mais là ne s'arrête pas l'action de la pesanteur, elle se continue et produit des effets encore plus directs en exerçant une influence sur le mécanisme de l'accroissement et les caractères morphologiques des organes. Il n'est pas ici question de savoir si c'est à cette influence qu'obéit la racine principale des végétaux; les expériences de Knight sur les effets de la force centrifuge ne sont qu'en rapport médiat avec le cas actuel, car je ne me demande pas si la racine se dirige vers la terre uniquement à cause de son poids relatif, ce que d'ailleurs je ne crois pas, mais si tels sucs élaborés, accidentellement libres de toute relation organique et physiologique, s'organisent en racines parceque la pesanteur s'exerce presque isolément sur eux. Dans le premier cas, celui où l'embryon se développe, la pesanteur agit sur l'organe déjà formé, dans le second sur la formation de l'organe; ayant ainsi la valeur d'un chan. gement de milieu. Ce serait donc une cause extérieure provoquant une organisation propre et transformant en racine les éléments destinés dans les circonstances normales à l'édification de la tige. D'ailleurs les éléments organiques d'une racine adventive et leurs rapports ne diffèrent certainement pas assez des éléments organiques des faisceaux libero-ligneux de la tige et de leurs rapports entre eux pour que l'action prépondérante d'une force mécanique telle que la pesanteur soit reconnue incapable de déterminer le petit total de leurs différenciations. Comment pourrions-nous autrement nous rendre compte d'une apparition d'organes jusqu'à un certain degré hétérogènes au milieu d'organes qui ne les contiennent jamais à l'état normal et naturel ? Faudrait-il admettre qu'il y a des cellules spécialement destinées, les unes au bois de la tige, les autres au bois de la racine et que ce sont ces dernières qui, troublées dans leurs cours 3o SÉRIE X.

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se sont groupées et organisées en chemin, en amont de la place qui leur était assignée ? Une telle hypothèse a tout contre elle et rien pour elle. Wolkoff de Wurtzbourg n'a pas hésité, il est vrai, d'entrer dans ce courant d'idées par impuissance à s'expliquer pourquoi telle cellule était positivement et telle autre négativement sensible à la lumière; mais bien qu'un botaniste distingué, J. Sachs, se rallie à une telle hypothèse (1), nous restons convaincu qu'il y a dans ce raisonnement plus de métaphysique, que de vraie science et qu'une légère transformation de tissus due à des circonstances nouvelles suffit pour expliquer ici la présence de ces racines adventives et de celles qui partent du bourrelet supérieur. Comme exemple de certains effets de la pesanteur, de l'allongement anormal qu'elle imprime aux tissus végétaux en les étirant pendant leur formation même, je citerai un exemple curieux de mycelium de champignon que j'ai fait photographier pour les collections de la Faculté des sciences. Dans une cave creusée sous la montagne de la Bastille et dont les parois suintent d'eau d'infiltration, des planches, les unes debout les autres de plat au-dessus des premières, sont entièrement recouvertes d'un mycelium d'un blanc de neige et floconneux; les planches verticales ne présentent rien de bien particulier, mais de la face inférieure des planches supérieures et horizontales, pendent des flocons de mycelium de longueurs différentes qui varient de quelques centimètres à trois mètres; ces derniers vont bientôt toucher le sol, ce sont des stalactites de cellulose sous l'aspect de longs et gros cordons à sonnette. L'eau tombe goutte à goutte de la partie inférieure renflée, qui en est imbibée comme une éponge, c'est la même production qu'a trouvée

(1) J. Saches, Bot., p. 92

L'Héritier dans les souterrains de l'Observatoire, et appelée Bissus elongata (4). Cette élongation énorme reconnaît de toute évidence pour cause l'action de la pesanteur ; les cellules dans un état constant de tension et lestées par l'eau qui les imbibe se sont multipliées en s'étirant et les cloisons transversales qui divisent les longs filaments en faux entre-noeuds sont extraordinairement espacées. Voilà donc un exemple positif de l'influence de la pesanteur sur la multiplication, la structure et la direction de cellules végétales et cet exemple nous révèle la cause, qui est la même, du développement des racines adventives qui encombrent la cavité de l'orme de l'Ile-Verte. A la surface de la plaie primitive il existait des tissus organisables, remplis de matériaux de réserve, sous l'action de la sève descendante qui les a distendus par son poids en les nourrissant, ils se sont multipliés de haut en bas, ont ainsi formé des racines parce qu'ils s'organisaient dans le vide de la cavité soumis à la pesanteur et aux actions atmosphériques; et si par les progrès de la végétation ces racines arrivent à se greffer par approche et les bords de la cavité à se toucher et à se souder; une coupe transversale et longitudinale de cette partie du tronc montrera une structure bien autrement anormale que la plus anormale des plantes qui composent la classe artificielle des Lianes.

Ces racines et leur direction ne sont donc dues ni à l'influence de l'humidité, nià celle du sol, ni à celle de la lumière ni à un système descendant des bourgeons ou des feuilles, elles se sont formées sous l'influence de la pesanteur, et du Hamel a eu raison de dire que dans certaines circonstances, de nouvelles racines se developpent uniquement sur

(1) Lamarck E. Candoll, Flore française, t. II, p. 67.

les parties dirigées en bas ». Nous croyons en avoir indiqué la cause principale.

NOTA. Ce travail était terminé lorsque grâce à l'extrême obligeance de M. le commandant Rousset, chef du génie, j'ai pu faire abattre cet orme qui fait aujourd'hui partie des collections botaniques de la Faculté des sciences, et mieux en étudier certains détails. La section transversale pratiquée en C (voir la planche) montre les couches récentes recouvrant comme je l'avais supposé, des zones plus anciennes, c'est-à-dire celles qui étaient formées avant l'accident. Cette formation de bois et d'écorce sur la face interne des lèvres de la plaie est une preuve entre bien d'autres que les plantes savent, par des moyens que nous ne connaissons pas tous cicatriser leurs blessures en formant des couches ligneuses là où bien certainement il n'y avait pas de zone génératrice. Ces couches récentes tapissant ainsi de vieilles zones, sont cependant bien distinctes entre elles et faciles à compter; c'est là un fait qui n'a son explication dans aucune des théories connues sur l'accroissement en diamètre.

EXPLICATION DES PLANCHES

PL. I.

A. Plaquette d'écorce et de bois mort, cachant le haut de la cavité. B. Grosse racine appliquée contre le fond de la cavité.

D. Anastomose de plusieurs racines, dont les ramifications I s'implantent dans le demi-cylindre de bois mort F.

C. Niveau de la section traversale de la tige.

E. E. Lèvres ou bords de la cavité. C'est sur la face interne qu'il s'est formé de nouvelles couches de bois.

PL. II.

Photographie à la lumière électrique du Bissus elongata. (Lam. et Dec.). 1/20 de g. n.

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