quelles luy seul auec sa femme estoient heretiers. A raison dequoy le fils se mettant en deuoir de rendre seur le chemin de son pere', lequel venoit apres son oncle Henry Duc de Bauiere, enuieux de sa gloire, excite plusieurs factions en la plus part des villes d'Italie, par le moyen desquelles Luitdolfe estoit chaffé de quelques villes d'Italie, non sans luy faire grade facherie & incommodité. Mais Othon, entré dans l'Italie fans auoir personne qui luy fistresistance,entra dans Pauieà grand' puifsance, deliure ceste Albeide tref-noble Princesse, laquelle auec l'ayde & faueur diuin, il prend pour femme. Et venu le iour de la celebration des nopces, Luitdol fe prenant en mauuaise part de ce que son pere s'estoit marié, sortit d'Italie sans fon congé & s'en va droit en Saxe. Apres le deces de la premiere femme, Othon ayant faict son testament, auoit remis sa lieutenance à son fils, auquel il auoit designé l'Empire. Pour l'amour de ce il commença de se bander contre son pere, & luy dreffer embusche. Mais Othon ayant celebré les nopces auec superbe appareil & royale magnificence, laiffant l'Italie s'en vient en Saxe, laissant le Duc Conrad à Pauie, auec forte garnison. Berenger estoit à la suitte de l'Empereur, lequel luy iurant toute fidelité, s'en retourna en Italie auec son fils Adelbert, de laquelle il fut faict poffeffeur en pur don de l'Empereur, excepté le Marquisat qui fut baillé à Henry frere d'Othon. Mais ce Berenger ne fut plustost de retour, qu'il commença à se faire haïr de tous les Princes d'Italie, vsant de plus grande rigueur, extorfion, & cruauté qu'il n'auoit oncques faica. Cependant Luitolfe fils de l'Empereur, & fon gendre Conrad, mettent en euidencela poison qu'ils auoyet cachee, & ne pourpensent que de trahir Othon,s'accostant de tous les plus mauuais garnimens de France, Saxe, & Bauiere: à euxioincts Frideric Euesque de Magunce, qui tenoit la queuë de la paëfle. De cecy l'Empereur ayant nouuelles, vint à Mogunce, laquelle ayant descouuerte pleine d'ennemis, se prepare pour les assieger : d'autre costé voicy venir Henry au secours de son frere, accompagné des plus gaillardes troupes de Bauiere, encore que l'Empereureust defia rengé par deuers soy tous les Lorrains. D'ailleurs Luitolfe, à l'instigation de la femme, femme d'Henry laquelle estoit sœur d'Arnoul le ieune: que les vns appelloyent Iudith, & les autres Adelheide, aliena les Bauariens de leur Prince, & entré dans Rauenne, rauit tous les thresors d'Henry, luy ofta tous ses biens chassant miferablement de toute la region, sa femme & fes enfans:car Arnoul estoit indigné qu'vn autre possedast la Duché de fon pere, luy estant le vray heretier. Mais l'Empereur Othon(qui n'eust souffert aucune iniure estre faicte aux siens) viết à grādes forces à Regesburg, où se campant, l'esbranla par vn million d'assauts: par lesquels ne pouuat venir à ses attentes, prolongea fi long temps auec resolution de souffrir plustoft tous inconueniens que s'efloigner d'vn seul pas, que les contraints d'endurer la plus horrible famine qui fut oncques, Luitholfe n'eut plus expedient remede, ou mourir, ou viure, que de fortir de la ville, demander paix & pardon tout ensemble, afin de sauuer sa vie de la fureur des citoyens. L'Empereur qui ne vouloit le pardoner à la volee, ny moins def quils eut descharger son courroux côtre luy, le remit iusques à vne autre fois, promettant de luy faire raison quand il seroit au pays de Saxe. Cependant il fit mettre le feu aux quatre coings de la ville de Regenspurg: & s'en reuint par apres en Saxe:où prenant recreation à la chasse, voici fans y penser le fils & gendre qui sans qu'il y pensast se vindrent à nuds pieds profterner deuant luy, & auec chaudes larmes requerans mifericorde. Laquelle leur estantottroyee depuis ils obferuerent toute fidelité. Sur cela Frideric l'Archeuesque de Magonce vint à mourir, & au mesme temps tout le païs tant de Magonce que ces lieux circonuoisins furent donnez à l'Empereur duquel il fit heretier son fils Guillaume, luy baillant l'Archeuesché.D'autre costé les Hongres voltigeans par toute la Frace, n'y auoiētlaissé coing sans estre miferablement saccagé. Delà ils prindrent leur route vers Bauiere, encore qu'ils eussent enuoyez des espions vers l'Empereur, pour sonder si ses forces estoyent point diminuees par tant de continuelles guerres qu'il auoit souffertes. Mais son frere Henry luy bailla tel courage de leur abaisser les aisles, que dans moins de rien vne innumerable multitude de gendarmes marcha en campagne du costé de l'Empereur. On dit que ces Hongres formilloyent en si grand nombre, qu'ils disoyent. Ou le ciel tombant nous accablera, ou la terre ouuerte nous engloutira: car autrement nous ne craignons ennemis pour si braues qu'ils soyent, qui ayet le pouuoir de nous surmonter. Contre tous ceux cy l'Empereur desploya ses forces qui estoient huit legions d'hommes, & bien que les ennemis donnassent du commencement quelque frayeur aux Alemands ils furent neantmoins à la fin tous desconfits, & fubmergez dans la fureur des ondes & mis en fuitte. La bataille fut donnee en plein midy, lors que les rayons du soleil sont plus penetrans, qui fut cause que Cõrad suất à groffes gouttes pour la pesanteur des armes, voulant descouurir la vifiere de son cafquetpour prendre vn peu d'air, vint vn coup de fleche qui luy perça dans les ceruelles, & le fit tomber mort au grand regret de toute l'armee, on le porta à Vvormes, où il fut enfeueli. Mais encore qu'ils eussét fait ce coup ce neantmoins il y eut trois de leurs Roys lesquels prins & menez à Henry, furent pendus & estranglez suyuant leurs demerites. Tous les autres furent presque taillez en pieces. Othon appellé Empereur, & pere dela patrie, fit vn trescelebre triomphe, donnant louange & honneur à Dieu pour les succez de ces affaires. Car depuis deux cēs ans on n'auoit entēdu parler d'vne telle victoire. Apres ces victoires si heureusement conquises, l'Empereur voulutencore s'acheminer à Rome. Mais luy estant plustost besoing d'aller guerroyer les Sclaues, il mena l'armee contre iceux, faisant aller deuant son fils Luitholfe: Lequel oppressa d'vne telle manierela tyrannie de Berenger, que presque il occupoit toute l'Italie. Mais en brief de temps il termina ses iours, le corps duquel Guillaume Archeuefque de Magonce fit porter son corps à Magonce, en l'Eglise de S. Alban. Cependantles Prelats & Princes d'Italie chassez par Berenger, supplierent l'Empereur de les exempter de tant de tyrannies, que ce cruel tyran leur faifoit fouffrir. Vindrent d'ailleurs les Legats enuoyez par le Pape lean, : lean, qui requeroyentl'Empereur que ce fuft fonbon plaifir de deliurer l'Italie de tant de tyrans. L'Empereur donc folicité de tous costez, il afsembla toute la nobleffe & par leur consentement, eftablit fon fils Othon fon lieutenant de l'Empire. Depuis il le fit couronner à Aix la Chapellele recommandant à son son fils Guillaume. Apres tirant vers l'Italie, fut honorablement receu de tout le peuple: puis entrant dans Pauie, Berenger & fa femme V villa fuyans, il fit rebastir le palaix qu'ils auoient ruiné: ensemble beaucoup d'autres reparations & decisions d'affaires pour l'emolument du public: dont le peuple le proclama Empereur & Augufte, & receut l'onction par les mains du Pape. Lequel encore bien qu'il fit grandes promesses à l'Empereur, il n'en accomplit pas vne seule, ains se comporta tout au contraire. Car Adalbert fils de Berenger appellé par le Pape,entra dans Rome, où il mit garnison à sa volonté, contre le ferment qu'on auoit prefté à l'Empereur. A l'occasion de ces choses l'Empereur courroucé, laissant Pauie, entra dans Rome, laquelle pleine de diuifions, tenoit en partie le parti du Pape, partie celuy de l'Empereur. Mais le Pape gaignant au pied, tout le clergé, & peuple Romain s'affemblerét & voyás le refus que lean auoit faict pour la troisieme fois de comparoistre, creerent pour Pape Leon, homme vertueux, & de grand cerueau. Mais les Ro mains corrompus par l'argent de ce Iean mesmes, le chafferent, & fe bandans contre l'Empereur, cerchoient deja le moyen de se rebeller tout à faict: fileur puissance ne fust esté tout aussi tost debilitee. Et fi l'Empereur n'eust fait reuenir la garnison, il y auoit vn grand massacre dans la ville de Rome: Ayant donques baillé cent ostages, ils iurerent le ferment de fidelité à l'Empereur, & promirent de ne faire election d'aucun Pape sans son commandement. Mais ils se gouuernerent derechef tout au rebours, & r'appelerent Iean, contraignans Leon de s'enfuir vers l'Empereur. Mais Iean ne fut guiere iouissant de sa tyrannic, car il mourut bien tost apres estant massacré par un citoyen Romain, duquel il auoit le bruit d'entretenir la femme. Les Romains craignans leur peau, creerent Pape vn nommé Benoist. L'Empereur qui ne pouuoit d'auantage fouffrir leur rebellion amassant son armee mit le siege deuant la ville, fi ferré qu'ame viuate n'en pouuoit fortir. Ce Pape Benoit les exhortoit de perfeuerer contre l'Empereur, & luy manda dire mille menaces & fulminations s'il ne se retiroit. Et voyant que le siege les pressoit plus que deuant, il monta luy-mefme fur les murailles, menaçant affez arrogamment d'excommunier l'Empereur. C'estoit alors qu'Othon prennoit plus grad courage de pourfuiure viuement laffaut, & affliger la ville par extreme disette &famine, no moins que du temps des Goths & autres barbares lors qu'ils eftoient contraints de se sustenter de chair humaine. Parquoy n'en pouuās plus pour la faim qui les accabloit, ils ouurirent les portes de la ville, firent entrer dedans l'Empereur, demandans pardon, & receurent Leon, lequel deiectant Benoift du fiege, & le depouillant des ornemens pontificaux, reforma tout l'estat Romain. L'Empereur laissant l'Italie, fut griefuement molefté par toute fon armee de mortalité, & peftilence: de forte que se retirat en Ligurie, : gurie, il passa son temps à la chaffe, comme il estoit couftumier d'y prendre recreation, & employer ainsi l'Automne à se tenir coy, & fe dõner du bon temps, cependant la peste ceffa. Sortant donques d'Italie, ainsi qu'il estoit aux confins de France, son fils Othon, & Guillaume luy vindrētau deuant, lesquels il recueillit & caressa d'vne ioye paternelle. Aufsi fon frere Brunon Archeuesque de Coloigne, luy vient faire la bien-venue, ainsi qu'il s'approchoit de Vvormes.Depuis Vvormes. Depuis s'eftant s'eftant embarqué, embarqué, & & arriué à Co loigne il trouua sa mere Mechilde, & fa fœur Gerberge Royne de France auec son nepueu Lothaire qui l'embrafferent auec toute la refiouyssance qu'on sçauroit raconter. Il ammena quant & foy Benoift le Pape depofé, lequel illaissa en France,àla garde d'Adaldage Archeuesque de Coloigne:& àl'Imperatrice il donna deux filles de Berenger, belles par excellence.Enuiron ce temps le Pape Leon venant à mourir, les Romains enuoyerent versl'Empereur pour en eflire vn nouueau iusques en Saxe, lequel aussi enuoya de sa part des Embaffadeurs à Rome, & en pleine affeblee du Clergé fut efleu Pape Iean Enesque de Marmene: mais il fut tout aussi toft chaffé, & contraint d'exiler en Campanie. Au furplus l'Empereur ayant tref-bien donné ordre aux affaires de Lorraine, proposa derechef d'aller reuoir l'Italie, pour faire vne fin ou autre de ces tyrannies. Temps-pendant le Pape fut remis en son siege pour crainte de la venue del'Empereur:lequel venu fit apprehender treize des principaux motifs de la difcorde, sur la deiection du Pape, & les pendre & estrangler tous chauds.Ce faict l'Empereur mada querir son fils Othon, lequel ne fit fauté au commandement de fon pere, & le vint trouuer accompagné de toute la noblesse d'Allemaigne. Mais auant fon arriuee Nicephore Empereur de Constantinople auoit enuoyé à Rauenne vers l'Empereur vne honnorable embassade, auec presens, & choses exquises pour luy demäder l'entretien d'accord & alliance accoustumce par leurs predeceffeurs:d'autant qu'il se craignoit que Othon ayat deja fubiugué l'Italie, vinst faire vne reueuë par la Grece, afin de la sousmettre à só vouloir. L'Empereur ayat receu auec infinis remerciemēs les Embaffadeurs de Grece, enuoye des fies propres, aux fins de luy demander la fille du defunct Empereur qui estoit fa belle fille, pour la marier à son fils. Mais les Grecs les affaillans traistreusement sur le chemin, en tuerent plusieurs, ammenant les autres captifs à Conftantinople. Othon bouillonnant de courroux pour vn tel affront, enuoya incontinent des fiens en armes, pour mettre toute la Calabre à feu & fang, lesquels desmatelerent villes & villages & autant de Grecs qu'ils pouuoyent trouuer, leur ayat coupé les narines, les en r'enuoyoiet camus en leurs maisons. Apres ils contraignirent ceux de Calabre & Apulie à leur payer tribut. Ce qu'entēdāt ceux de Costantinople, se rueret fur Nicephore auquel ils donnoyent la cause de tout le mal, la filleduquel nommee Theophanie, Othon le ieune print pour femme, & futoint & facré par le Pape, à la prefence de fon pere, & les nopces celebrees en Italie. A la parfin l'Empereur s'en retournant en Saxe, trouua de veines d'argent pres de Gossaric ville de Saxe, laquelle il fit edifier & enrichir de plusieurs cr,leur ayat coupé chefs chefs-d'œuure dignes d'admiration. Ayant dõques ce bon Empereura- Tres luctus caufa funt hoc fub marmore claufa, Il fut surnommé LE GRAND, acause de ses braues faicts-darmes come Charles le grand Prince tref-Chreftien. Et qui suyuantla coustume des anciens Allemands, portoit la barbe longue iusques au nombril, par laquelle en cholere, ou en disant quelque chose à bon escient, il auoit coustume de iurer. Il se faisoit porter toufiours deuant soy yne hache doree à la maniere des anciens confuls de Rome, delaquelleil frappoit ceux qui auoyent offensé. Quant à fon couronnementla Chronique d'Hirsgauie, le descrit en ceste forte. L'andel'incarnation de nostre Seigneur 936. indiction dixième, Othon premier fut oinct Roy par les mains d' Hildebert Archeuesque de Ma gonce. Kequel s'approchant de l' autel & prennant le glaiue Imperial auec le collier de l'ordre, & se tournant vers l'Empereur tout à genoux luy dit, Pren ce glaine par lequel tu extirpes tous les aduerfaires de Iefus Christ, barbares (t) Chreftiensreniés, lequelt est donné par authorité diuine auec puissance de tout l'Empire pour la tres-ferme foy de l' Eglife Chreftienne. Puis prennant l'escußon, brafssards, gantelets, & ca zaque d'armes ill'accoustra disant: Parces accoustremes qui te couurent les efpaules, c'est pourť admonefter d'estre feruent par le zele de foy, & pour entretenir la paix que tu perfeueres constamment iusques à la fin. Prenant encore le fceptre & baston, dit-il, Sois aduerti par tels signes de coriger tes fubiects par un chastiemet paternel, premierement que tu te mõstres defenseur & protecteur des feruiteurs de Dieu,puis des vefues,puis des orphelins & pupiles, & leur estendes benignement la main de mifericor-de. Apres versant l'huile de confecration sursonchef,il dit, Le Seigneur t'a oinct Roy fur son peuple, que iamais ne manque de ton chef l'huile de mifericorde & compaßion, afin qu'à l'aduenir tu puisses obtenir mifericorde de ton Createur.Ainfifoit-il. Apres il luy mit sur la teste la couronne Royale, disant. Iet ay couronné de la couronne de iu(tice, pour te remonstrer d'administrer iuftice ates fubiects, afin qu'estant fortifié par ceft ornement Royal, tu sois reueré par les tiens, & te mõstresredoutable à tes fubiects, le temps de ceste vie expiré,tu fois couronné del'eternel guerdon avecles Anges. Ainfifoit-il. Il eut deux femmes, la premiere nommee Edithe, que les autres nomment mal à propos Egid, fille d'Edouard Roy d'Angleterre, de laquelle il eut Luitolfe, & Guillaume Archeuesque de Magonce & vne fille Luithgarde qui fut mariee à Conrad. L'autre femme fut Adelheide fille de Raoul Roy de Bourgoigne & de Berthe, fœur de Conrad Roy de Bourgoignc, relaissee vefue de Lothaire Roy d'Italie. De laquelle il engedra Henry, Brunon, & Othon second du nom & fucceffeur de l'Empire:& erd admin vne |