grands fervices, & que les Actionnaires, loin d'avoir augmenté leur fortune particulière, ont fait à ce même Etat des facrifices immenfes. Pour prous ver la première propofition,on examine les privilèges exclufifs; il y a quelques exceptions à faire dans le mal qu'on en dit, & on ne nie pas qu'on n'en puiffe dire. Le Gouvernement, jugeant qu'une entreprise peut être utile, mais que les commencemens en feront coû. teux & les fuccès affez incertains & éloignés pour qu'on n'ofe pas la tenter fur le champ, eft alors invité par fa fageffe à y concourir. Lorfque le temps ne lui permet pas de fournir des fecours d'argent, il y fupplée quelquefois par un privilège exclufif; mais, s'il en fixe la durée en raifon de l'encouragement qui fuffit à l'entreprise fans nulle confidé. ration particulière pour l'entrepreneur, un privilège de cette efpèce ne nuit point à l'induftrie; il l'anime au con

traire en excitant un établissement qui n'auroit point eu lieu fans cela. L'auteur ajoûte » Si un privilège exclu» fiféroit, fans exception, une violation » des droits de la fociété, comment » toutes les nations de l'Europe, les plus » attachées à la liberté, auroient elles " confié l'exercice du commerce des

Indes à une Compagnie privilégiée? » Cette question ne réfoud pas la difficulté; car on pourroit demander auffi à l'auteur pourquoi les Anglois, à chaque renouvellement du privilège de leur Compagnie, demandent-ils la lie berté du commerce aux Indes? » Etoit»il un moyen plus certain continue » l'auteur, d'intéreffer à ce commerce le plus grand nombre poffible de citoyens, que de fubdivifer en trente » ou quarante mille parts tous les » fonds qu'on pouvoit y employer? »La plus grande fubdivifion poffible d'intérêts une fois établie, étoit - il

contraire à la fageffe & à la juftice d Gouvernement, de réunir ces divers » intérêts dans leur mouvement, fi »cette unité d'opérations concouroit à leur avantage & à celui de l'Etat? »Etoit-ce enfin une violation des droits » de la fociété que de préfumer que les hommes, toujours décidés par le moment préfent & par leur intérêt, peuvent quelquefois, même dans le com » merce, recevoir des règles falutaires » de la part du Gouvernement, dont l'œil paternel parcourt la maffe en»tière des citoyens, & lie continuelle »ment le préfent à l'avenir ?... »

La formation de la Compagnie des Indes ne fut point l'ouvrage de la cupidité; il fallut échauffer les efprits par le patriotifme, & les aiguillonner par la vanité. Louis XIV écrivit à ce fujet aux Maires & Echevins des principales villes du Royaume; il engagea les grands Seigneurs à concom

از

tirà cet établiffement ; fes Edits ne difent point, voulant favorifer tels & tels, mais fur ce qui nous a été repréfenté qu'il étoit du bien de notre Royaume, &c. La Compagnie a toujours été maintenue dans cet efprit, & ce fut fans doute ce qui déterminà le Gouvernement à la faire régir par des Commiffaires du Roi, & à ôter enfuite aux Actionnaires la nomination de fes Directeurs. » Vous rendez compte de toutes les » ventes que la Compagnie a procurées

à l'Etat depuis 1725, qui montent, » dites-vous, à trois cens millions;

vous énumérez enfuite toutes les "fommes que le Roi a payées à la Compagnie, & vous les faites monter depuis cette époque à 376 mil» lions, & vous concluez que 300 millions de vente ayant coûté à l'Etat » 376 millions, il eft clair que la Compagnie lui a constamment été à char

» ge, puisqu'un tel commerce ne va»loit pas un tel facrifice.

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L'auteur prouve à M. l'Abbé Morellet qu'il s'est trompé fur la fomme des ventes. Il examine la méthode que cet écrivain a fuivie pour diminuer en apparence l'étendue du commerce de la Compagnie. I paffe d'abord fous filence les ventes aux Indes des marchandifes d'exportation; il retranche enfuite le montant du commerce de la Chine, de la Guinée, du Sénégal & du Canada. Le tableau des fommes payées par le Roi va jufqu'à l'année 1769 & le tableau comparatif des ventes finit à 1756. On n'y a fait entrer que le retour des Indes; on a fait de leur montant une moyenne proportionnelle entre 44 années, afin d'affoiblir ainfi la fin par le commencement, & la paix par la guerre; & l'on compare enfuite le réfultat que donne une pa