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duire cet effet, font tellement embues qu'elles ne paroiffent pas.

M. de la Grenée s'eft fait beaucoup d'honneur par quantité de morceaux extrêmement délicats; ce font les graces & le fini de l'Albane. Les tableaux de Pfyché qui furprend l'Amour endormi & de Mars & Vénus furpris par Vulcain font ceux qui de préférence attirent les fpectateurs. En effet, leur coloris paroît avoir plus d'harmonie que les autres. Mais il faut obferver qu'ils ont acquis déja cette force que l'ancienneté donne aux tableaux peints avec foin & dont la couleur n'eft point fatiguée : avantage fi confidérable qu'un tableau du même maître, nouvellement peint quoiqu'abfolument parfait à tous égards, ne pourra fe foutenir à côté de celui qui auroit quelques années; mais le temps les achève & les rend égaux. Malgré cette vérité qui parle en faveur de tous les ouvrages de M. de la Gre

*Emboire eft un terme de peinture qui revient à s'imbiber.On dit qu'un tableau eft embu, quand l'huile a pénétré la toile sur laquelle on l'a peint ; ce qui rend les couleurs mattes.

née, on croit que le tableau de Cérès qui enfeigne l'agriculture au Roi Trip tolême & qui eft destiné à décorer la falle à manger du nouveau pavillon de Trianon, étoit fufceptible d'un plus grand effet. Il eft exécuté avec autant de grace que de correction; le pinceau en est très-Aatteur; mais il paroît foible par le défaut d'ombres affez fourdes. On penfe que, fi la partie entière du païfage avoit plus d'énergie, non feulement dans les ombres mais dans toute fa maffe, il en réfulteroit deux beautés frappantes les groupes de devant en fortiroient davantage, & cette maffe vigoureufe chafferoit le fond. On fe permettra de remarquer encore que les chairs de plufieurs des tableaux de M. de la Grenée ont des teintes un peu trop rougeâtres, particulièrement dans les ombres. On ofe ajoûter qu'on fouhaiteroit de plus beaux caractères à quelquesunes de fes têtes. La brièveté de leurs nés leur donne quelque chofe de commun. On ne craint pas que ce peu de réfléxions puiffe bleffer un homme de mérite, à qui tout le monde rend la juftice qu'il eft un des Peintres les plus

agréables & les plus châtiés de fon fiécle.

M. Amédée Vanloo, Peintre du Roi de Pruffe, a donné la fatisfaction au Public de lui faire voir un portrait reffemblant de ce Monarque. Tous ceux que l'on avoit vûs jufqu'à préfent fe contredifoient, & l'on ne pouvoit fe faire une idée jufte & fixe des traits de ce grand Roi.Ce morceau, d'ailleurs,eft bien compofé, noblement traité, & d'un très-bon effet.

Le tableau que M. Chardin, ce Peintre charmant de la nature & de la vérité, a compofé fur les attributs des Arts & les récompenfes qui leur font accordées, eft d'une vigueur admirable; il en eft de même de deux BasReliefs qu'il a très-bien rendus. Ce n'eft pas feulement le degré d'illufion auquel il eft parvenu qui rend fes tableaux dignes de la plus haute eftime; ils le font encore plus par la manière fière, hardie & large dont ils font peints. Le caractère de cet auteur eft de peindre avec une forte de magie harmonieufe qui étonne les Peintres mêmes les plus habiles. Tous fes tableaux ont ce mérite.

On ne doit pas oublier celui d'une fervante qui revient du marché. On a revû avec le plus grand plaifir ce genre naïf & vrai que M. Chardin a créé & que perfonne n'a pû imiter encore avec fuccès.

Plufieurs têtes de M. de la Tour, ren. " dues avec ce fçavoir & cette sûreté qui, lui ont acquis une réputation fi brillante, affocient la vérité la plus exacte à un art inexprimable dans l'exécution. On diftingue particulièrement le portrait de M. Gravelot, célèbre deffinateur.

L'heureuse abondance de M. Vernet procure ordinairement au Salon fes plus grandes richeffes. Comme il n'a pas été le maître, dans celui de cette année, d'expofer plufieurs grands tableaux qu'il a faits, il n'y a mis que ceux qu'il a pu obtenir de leurs poffeffeurs. Ces tableaux font en petit nombre au gré du Public; mais tous font précieux, for tout les deux plus grands. Le clair de lune eft de la plus ingénieufe compofition & de l'effet le plus piquant; le tableau qui lui fert de pendant attire, en particulier, tous les regards & tous les fuffrages; il préfente

un moment du jour & des fites qui font éprouver une fenfation délicieufe; la beauté & la vérité du coloris le dispu tent à la plus belle nature.

M. Hutin s'eft diftingué par deux Servantes Saxones. Il y a de l'harmonie & de la magie dans la couleur, ainfi que de l'éclat & de la vérité dans les effets; ils font, d'ailleurs, élégamment deffinés.

Plufieurs grands portraits de M. Roflin ont para de la reffemblance la plus frappante & de l'exécution la plus foignée. Il excelle fingulièrement dans l'art de rendre les étoffes. Il y a auffi quelques têtes très piquantes, fur-tout celle d'une femme coëffée à la Bolonoife. Quant aux têtes de caractères, elles ont eu moins de fuccès; ce genre ne paroît pas lui être familier.

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Quelques pastels & deux portraits

à l'huile de M. Péronneau ont mérité l'eftime publique. Il eft peu de Peintres qui voient auffi bien que lui dans la nature, & dont l'œil y faififfe autant de fineffes de détail. Ses ouvrages demandent à être examinés avec attention pour en fentir tout le mérite. Cependang

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