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Le grand tableau du Triomphe de Bacchus par M. Taraval eft d'une compofition très-ingénieufe. Le ton général de la couleur eft bon; mais la manière en eft un peu dure & le caractère du deffin lourd. Le tableau d'Adam & Eve, au moment où Eve lui préfente la pomme, eft pareillement d'une couleur affez agréable, mais d'un deffin peu élégant.

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M. Huet, qui fe montre pour la première fois au Salon a expofé pluhieurs ouvrages qui le font connoître avantageufement. Il paroît s'être attaché principalement au genre des animaux; mais il fcait y faire entrer des figuresjavec goût. Le tableau qui repréfente une Caravanne contient beaucoup dechofes très-bien faites. Sa manière eft large, fon pinceau moelleux, fon exécution agréable. On eftime particulièrement fes études de têtes d'animaux. Il eft cependant à defirer que, prenant la nature pour guide, il s'attache à être vrai, & rejette les nouvelles façons de peindre qui l'en éloigneroient. En cherchant des tons imaginaires, qu'on croit plus beaux que ceux qui font offerts par

la nature, on refte toujours fort au-deffous d'elle, & l'on n'obtient point le fuffrage de ceux qui la connoiflent & la cheriffent.

On est enchanté de plufieurs morceaux de M. Greuze. Le plus univerfellement applaudi est une jeune enfant qui joue avec un chien, La tête eft d'une fraî cheur admirable & d'une beauté de couleur furprenante. Elle eft vivante; le chien fupérieurement faifi & très habilement peint. Le portrait de M. Jeau · rat eft exécuté avec les détails les plus fçavans & la plus belle pâte de pinceau. Celui du Prince Héréditaire eft encore très beau. Cet Arrifte eft excellent; il eft même inimitable lorfqu'échauffé & guidé par la nature préfente à fon efprit, il fe livre à une exécution facile & rapide; mais lorfqu'il fe propofe de plaire par un fini trop précieux, ou lorf qu'il veut joindre aux objets, qu'il rend fi bien en les voyant, d'autres objets qu'il ne peut avoir fous les yeux, fes efforts le font fentir. On voudroit auffi qu'il s'interdit les fujets atroces, tels que celui dont il a montré l'efquiffe fous le titre de La mort d'un père déna

turé, abandonné de fes enfans; le fpectacle en eft horrible. Par bonheur on n'y voit rien qui caractérise un pète; on n'y apperçoit qu'une barbarie révoltante & fans exemple contre un mourant. M. Greuze, par une émulation très louable, a tenté cette année le genre de l'histoire; fon Empereur Sévère qui reproche à Caracalla fon fils d'avoir voulu l'affaffiner dans les défilés d'Ecoffe, n'a pas eu autant de fuccès que fes ouvrages dans d'autres genres; mais il faut confidérer que ce n'eft ici qu'un premier effai, & que ce grand Artifte, dans ce genre nouveau pour lui, peut fe diftinguer un jour Après tout quand même, dans cette partie, il refteroit au deffous des Maîtres renommés, je l'inviterois à s'en confoler par l'exemple de l'immortel la Fontaine qui n'a point réuffi dans fes effais dramatiques. Eh, que peut-on defirer le plus que d'être un la Fontaine !

M. Jollain s'eft fait honneur par fon) grand tableau du Refuge. Elifabeth de Ranfin, fondatrice de l'Inftitut de Notre Dame du Refuge des Vierges & Filles Pénitentes de l'Ordre de Saint Auguf

un y eft repréfentée, avec jes trois filles implorant l'interceffion de la Vierge pour le pardon des Filles Pénitentes. La Vierge offre leur repentir au Père Eternel qui arrête l'Ange Exterminateur prêt à les punir. Une des Filles de la Fondatrice préfente l'habit de l'Ordre aux Filles Repenties. La compofition de ce tableau eft bonne, & les figures principales font bien exécutées. L'auteur a eu moins de fuccès dans fes petits tableaux. Outre qu'il y a peu de fineffe de deffin, le coloris en eft déparé dans les chairs par des demi-teintes d'un bleu noirâtre & fale.

M. Renou avoit annoncé un tableau qui apparemment n'a pas été fini affez tôt ; c'eft avec déplaifir qu'on le voit obligé de fupprimer les éloges que fans doute il eût mérités. Il en eft de même de M. Fragonard qui, après avoir paru il y a quatre ans avec le plus grand éclat, fe laiffe oublier du Public, & pourroit enfin donner lieu de penfer qu'il n'eft pas en état de foutenir cette première célébrité.

M. Carême a mis fous nos yeux quel ques efquiffes très-bien faites, dans lef quelles on apperçoit le fentiment de

l'effet

l'effet & de la couleur, auffi bien que quelques têtes où il y a du mérite. Mais il paroît toujours étonnant que de jeunes Artiftes ne profitent point des occafions de développer l'étendue de leurs ta lens par quelques beaux morceaux faits exprès. Ces expofitions font un des plus grands encouragemens donnés à notre fiécle; les Artiftes qui nous ont précédés n'ont pas eu l'avantage d'en jouir; ce défaut d'émulation en a laiffé dans l'oubli plufieurs dont les talens auroient acquis de la célébrité.

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Un Peintre de Portrait nouvelle. ment admis à l'Académie, M. Dupleffis, faifit fupérieurement la reffemblance; & l'on croit pouvoir dire, fans bleffer perfonne, qu'il eft très- peu de Peintres de ce genre qui peignent une tête avec autant de variétés de tons, de détails exacts, de rondeur & d'effets faillans. Son pinceau eft large, moëlleux & facile. Ha fingulièrement l'art de rendre les étoffes & autres objets dont la couleur eft blanche. Tous fes por. traits font, en général, d'une vérité in téreflante, entr'autres ceux de M. l'Abbé Arnaud de l'Académie des BellesAN. 1769. Tome V.

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