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veuve Regnard Imprimeur Libraire de l'Académie Françoife. Vous pouvez vou rappeller le jugement que je portai, d'après le Public, au fujet de ces charmantes productions, dans mes Lettres fur quelques Ecrits de ce Temps, TomeVI page 193, en vous rendant compte de la troifiéme édition qui parut alors en trois petits volumes. Je ne connois point de Recueil où il regne plus de délicateffe & de cet efprit qui, pour être brillant, n'en eft pas moins folide. M. de Moncrif a un talent particulier qui, dans la postérité, le diftinguera de tous nos Poëtes François, le talent d'exprimer fans effort & fans infipidité cette galanterie qui fembloit caractériser notre nation dans les beaux jours de Louis XIV, & que les gens de goût ont tant de fujet de regretter. Il n'eft pas aïfé de prêter des graces durables à ces petites pièces de vers qui fouvent naiffent & meurent au même inftant dans le fein d'une fociété. Nous fommes inondés aujourd'hui d'ouvrages en ce genre; mais peu d'auteurs ont d'auteurs ont fçu, comme M. de Moncrif, y répandre cette jaste dofe d'agrémens fi difficile à faifir. Les

uns y verfent à pleines mains de ce belefprit qui fatigue, & que l'on pourroit comparer à ces vernis brillans dont l'odeur porte à la tête. Les autres entaffent des lieux communs, des images prétendues poëtiques qui ne font que triviales, des complimens doucereux & fades jufqu'à la nausée; au lieu que M. de Moncrif, je le répète, possède l'heureux don de dire des chofes flatteufes avec cette fineffe intéreffante qui rend l'éloge piquant. Cet auteur n'a pas moins réuffi dans la Romance autre efpèce de poësie qui demande un art infini, caché fous un air de fimplicité. Il eft le premier qui nous ait fait connoître ce genre, & le feul qui jufqu'à préfent en ait connu le caractère & le langage.

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Vous retrouverez ici, Monfieur, ces Effais fur la néceffité & fur les moyens de plaire, qui font le fruit d'une étude approfondie du monde & du cœur humain; ces Actes d'Opéra qui ont eu tant de fuccès; ce Zélindor qui a tout le charmé, &, pour ainfi dire, tout l'aërien du fujet; cet inimitable Rajeunif fement de Titon, petit Poëme qui fuffi

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pour immortalifer fon auteur; ces Contes de Fées fi ingénieux & fi moraux; ces Differtations judicieuses, ces Difcours pleins de vûes; ces Chanfons que tout le monde fçait par cœur, &c, &c.

&c.

Cette nouvelle édition eft augmentée 'de plufieurs ouvrages qui ne fe trouvent point dans les précédentes; entr'autres, d'une Lettre au Roi de Pologne Duc de Lorraine & de Bar, dans laquelle M. de Moncrif fonde les refforts de la grande éloquence, & propose de nouveaux moyens d'intéreffer dans ce genre fi peu connu aujourd'hui. Il rapporte à ce fujet un exemple frappant du pouvoir qu'obrient fur l'efprit l'éloquence pittorefque & animée du pathétique. Un célèbre Miffionnaire prêchoit dans une ville affez confidérable * quoique peu loin de Paris : je dois ajoûter que la plupart de fes »Auditeurs étoient venus dans l'idée d'ê. »tre » tre plus amufés que touchés: c'étoit » fon premier fermon, & il s'étoit pro

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Saint-Germain. Ce Miffionnaire étoit le Pa Dupleffis, Jéluite.

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pofé pour fujet Le Pécheur impénitent » au Jugement Univerfel. L'orateur commence, & la vifion d'Ezechiel le préfente à fon efprit. Il appelle d'une voix forte & myftérieufe les morts ca» chés fous la terre ; ils l'entendent; il » voit de toutes parts des offemens for» tir, s'approcher, fe reconnoître, fe rejoindre; un murmure funèbre ac"compagne tous ces mouvemens, » bientôt des fpectres font formés & l'entourent: tous portent quelques at» tributs qui caractérisent d'une manière » funefte leur condition pendant la » vie, les crimes dont ils vont rendre » compte à la face de l'univers, & l'af

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freufe peine qu'ils vont fubir. Dans » le cours de ce récit, je voyois les Au»diteurs affujettis, frappés; la terreur wétoit peinte fur leurs vifages. Tout» à-coup l'orateur refte en filence. It regarde avec trouble un nouveau »fpectre qui fe préfente; il l'interroge; fa frayeur redouble; c'eft fon fpectre »à lui-même. Ce fpectre lui parle » l'accufe; il le rend coupable des er»reurs dont il n'a point guéri tant de pécheurs qui font venus l'entendre.

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La parole de Dieu est toute-puiffante » dans la bouche du jufte; c'eft la foi» bleffe de fon zèle, de fes lumières » de fes talens, ce font fes propres péchés qui ont rendu la vérité stérile. A ces mots, le Prédicateur tombe à » genoux; il adreffe au Seigneur la priè» re la plus fervente & la plus tendre; lui feul a mérité les fouffrances dont fes Auditeurs impénitens font menacés ; il les réclame inftamment, ces fouffrances; il les demande pour de long fiécles, en expiation de leurs cri»mes & pour prix de leur converfion prochaine; il femble que fon ame fuffit à peine au zèle qui la pénètre ; » des larmes coulent de fes yeux, & >tout l'Auditoire fond en pleurs comme » lui.»

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Carite & Eroftès, la Reine de Circaffie, Linus, Ifis & Oziris, Ballets Héroïques, Erozine, Paftorale Héroïque: ces cinq petits Poëmes Lyriques, d'un Acte chacun, font les augmentations les plus confidérables de ce Recueil. Il regne dans ces morceaux une poëlie douce, facile, harmonieufe, pleine d'images, animée par le fentiment, digno

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