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y étaient communs à une époque antérieure à l'expédition d'Alexandre 1.

Au reste, ce n'est pas seulement l'espèce de l'éléphant qui a éprouvé ces vicissitudes. Il y avait autrefois des lions dans la Grèce, entre l'Acheloüs et le Nestus 2; il у en avait certainement dans la Péonie, puisque Hérodote raconte qu'ils dévorèrent les chameaux de Xerxès 3. Xénophon parle des lions et des panthères que l'on trouvait sur le mont Pangée et sur le Cissus, aux frontières de la Macédoine. L'aurochs (bos urus) et l'élan, qui sont maintenant relégués aux extrémités du Nord, ont vécu autrefois dans la forêt Noire, dans les Ardennes, et même dans les Pyrénées. Les hippopotames, qui étaient communs en Égypte, d'où les Romains en faisaient venir pour leurs spectacles, se sont retirés dans l'intérieur de l'Afrique 6. Les crocodiles étaient si abondants aux embouchures du Nil, qu'ils dévorèrent un grand nombre de soldats de l'armée de Perdiccas, lorsque ce général essaya de passer le fleuve 7. Maintenant pour en trouver, il faut remonter vers la Nubie, où encore ils ne sont pas nombreux. Ne savons-nous pas que l'Angleterre était autrefois infestée de loups,

1 Malcolm's History of Persia. Ranking, Historical researches on the wars and sports of the Mongols... etc., chap. 4. 2 Aristot., Hist. animal., VI, 31, viii, 28. Plin., Hist. nat.,

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5 Cæs., de Bell. gall., vi, 26, 27, 28. Ces animaux ont vécu dans la Gaule à une époque plus récente; on peut consulter à ce sujet le Livre de chasses de Gaston Phoebus et les chroniques qui concernent les rois d'Austrasie et Charlemagne.

6 Ammian. Marcell., xxu, 15.- Herodot., II, 69, 70, 71.

7 Diodor. Sicul., xvi, 35, 36. Nous reviendrons, au chap. 7 du liv. 11, sur cet événement.

et qu'il n'y en a plus maintenant? Des faits semblables se passent même sous nos yeux avant la conquête de Bone et de Constantine par les Français, les communications entre ces deux villes étaient dangereuses, à cause des lions qui s'étaient multipliés dans la contrée ; quelques années d'occupation ont suffi pour éloigner ces terribles animaux.

Passons maintenant aux éléphants de l'Inde, de cette terre favorisée par la nature, où ces animaux atteignent le haut degré de force et d'intelligence qui les rend si précieux pour le service de l'homme. La sagesse providentielle, qui a placé le chameau sous la main de l'Arabe, au milieu du désert, qui a fait présent du renne à l'habitant engourdi des régions polaires, a aussi donné l'éléphant aux Hindous, comme l'auxiliaire qu'il leur fallait pour exploiter la fécondité d'un sol inépuisable, et pour en mettre en circulation les produits : on rencontre en effet cet animal à l'état sauvage dans les deux presqu'îles de ce beau pays, depuis les contreforts de l'Himmalaya jusqu'aux pointes de Malakka et de Comorin. Le Tonquin, la Chine, le Pendjab, sont les limites que la nature lui a assignées à l'est et au couchant. Ceylan, Sumatra et Bornéo sont les seules îles où on le trouve.

Quoique les éléphants de Ceylan aient les défenses plus petites que les autres éléphants d'Asie et surtout que ceux d'Afrique, les naturalistes s'accordent à regarder la race que l'on trouve dans cette ile comme supérieure à toutes les autres pour la taille, la force et la docilité. La supériorité de cette race était connue des anciens', et elle est depuis longtemps une source de

1 Elian., Animal., XVII, 18. La même remarque avait été faite par Onésicrite, l'un des officiers d'Alexandre, auteur d'une vie

profit pour les insulaires, qui exportent leurs éléphants sur le continent, où ils sont très-recherchés. Il arrive cependant quelquefois que ces animaux se multiplient dans l'ile excessivement, et deviennent pour les campagnes de véritables fléaux; car ils détruisent avec leurs pieds dix fois plus de plantes qu'ils n'en consomment pour leur nourriture. Les habitants, qui n'ont pas toujours les moyens de leur donner la chasse en grand, prennent alors le parti de les empoisonner avec de l'arsenic, en remplissant de cette substance délétère des cannes à sucre et des fruits. Le gouvernement lui-même a soin de faire faire tous les trois ou quatre ans de grandes battues, où il en prend un grand nombre qu'il fait vendre sur le continent. On en prit cent soixant-seize dans une de ces chasses qui eut lieu en 1797 1.

Les

pays qui, dans l'Inde cis-gangétique, fournissent le plus d'éléphants, sont le Dekkan, le Carnatic et la côte d'Orixa. On rencontre aussi quelquefois ces animaux par bandes de deux à trois cents dans les forêts solitaires des Ghattes; mais il y a des provinces où ils abondaient autrefois et où il est rare d'en trouver maintenant. C'est ainsi qu'ils ont presque disparu des bords de la Djemnah depuis Agra jusqu'à Kalpy, où, si l'on s'en rapporte aux mémoires des sultans Baber et Akbar 2, on en prenait au XVIe siècle une grande quantité. Le contraire est arrivé dans le Mysore : ce pays s'étant trouvé dépeuplé à la suite des longues guerres soutenues par Hyder-Aly et Tippo-Saheb contre les Anglais, les éléphants vinrent s'y établir et s'y multiplièrent

de ce conquérant, où Pline, Arrien et Strabon ont puisé de curieux détails sur l'Inde.

1 Percival, Voyage au Ceylan. Forbes, Eleven years in Ceylon. Baldæus, Description of Ceylon, etc. etc.

-

2 Baber, Memoirs, ed. Erskin. - Ayéen Akbery, by Gladwin,

d'une manière effrayante; bientôt ils détruisirent les récoltes, renversèrent les habitations, exterminèrent les cultivateurs, et les choses en vinrent au point, que le gouvernement fut obligé d'y envoyer des troupes. Enfin, des battues régulières, commencées en 1805, délivrèrent la contrée de ces hôtes incommodes. Nul doute que, si la tranquillité continue à régner dans l'Inde, si l'agriculture surtout y fait des progrès, la race des éléphants n'y aille aussi toujours en diminuant.

A l'orient du Gange, les éléphants que l'on trouve dans l'empire des Birmans sont principalement recherchés à cause de leurs défenses, d'où l'on extrait l'ivoire le plus beau et le plus estimé. Le Chittagong et l'Arracan fournissent aussi de très-beaux éléphants, et l'on en prend de cinq à six cents par an dans les forêts qui bordent le Brahmapoutre. Les montagnes de Laos en donnent de magnifiques; l'espèce est également belle dans le Camboge et dans la Cochinchine (An-nam méridional), dont les éléphants sont surtout renommés à cause de leur docilité. On fait peu de cas de ceux du Pégu, du Tonkin (An-nam septentrional), du Kouang-si, du Sse-tchouan, et du Yun-nam, les seules provinces de l'empire chinois où l'on en rencontre. Mais, de toutes les contrées de l'Inde, celle qui abonde le plus en éléphants, c'est le royaume de Siam. D'après les relations des voyageurs, le roi en possède à lui seul plus de mille, qui sont, pour les propriétaires des terres voi sines de la cour, un véritable fléau; car ce troupeau destructeur a le droit de paître dans tous les champs et dans toutes les fermes, et malheur au particulier qui oserait s'y opposer!

C'est dans le royaume de Siam qu'on voit le plus souvent ces éléphants blancs qui sont en si grande vénération dans l'Inde. On pense maintenant que la couleur

de ces animaux provient plutôt d'une maladie de l'individu que d'une variété de l'espèce. Des observateurs éclairés, qui ont eu le loisir de les examiner, ont remarqué qu'ils étaient toujours dans un état de souffrance, et que leur peau était attaquée d'éruptions dartreuses ou sillonnée de crevasses en suppuration. Ils en ont inféré que ce prétendu type de perfection n'était, au fond, qu'une dégénération analogue à celle que l'on observe dans les Albinos ou nègres blancs, lesquels sont toujours les êtres les plus faibles de leur race. Mais ce n'est pas ainsi que les Hindous jugent leurs éléphants blancs; pénétrés du dogme de la métempsycose, ils sont persuadés que, dans la nature, l'éléphant tient après l'homme le premier rang, et comme, autre côté, ils regardent la blancheur de la peau comme un symbole de la pureté de l'âme, comme une distinction que les dieux n'accordent qu'aux êtres les plus parfaits, il s'ensuit que, pour eux, l'éléphant blanc est un animal privilégié, dont le corps ne peut servir d'habitation qu'aux mânes des rois, des pontifes et des héros.

d'un

Telle est la cause de l'espèce de culte que les Hindous rendent à ce rare quadrupède, dont la possession est regardée par eux comme un gage de la faveur du ciel. Le roi de Siam, l'empereur des Birmans, ont mis au nombre de leurs titres les plus pompeux celui de possesseur de l'éléphant blanc. Tout ce que la magnificence asiatique a de plus éclatant est prodigué pour le service de cet être vénéré : des ministres et des officiers d'un rang élevé veillent à tous ses besoins ; l'or, les perles, les pierreries brillent sur ses harnais, et il ne se montre jamais en public sans être précédé par une musique choisie et escorté d'une garde d'honneur. L'histoire fait mention de guerres acharnées qui ont eu lieu entre les

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