Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

dans l'Oraison funèbre de mon chien Balabas, félicite ce digne serviteur de n'avoir jamais lu Voltaire. Krylof, dans ses comédies, l'École des demoiselles et le Magasin de modes, tourne en "ridicule, tout comme Rostoptchine dans ses pamphlets, la gallomanie. Ozérof, auteur de tragédies dans le goût classique, met à la scène, dès 1807, Dmitri Donskoi, et, par les Tatars dont Dmitri a brisé le joug, il faut entendre les Français. Krioukovski, dans sa tragédie de Pojarski, le héros libérateur de 1612, pense à 1812. Joukovski embouche la trompette guerrière dans ses Odes toutes classiques en leur belliqueux délire, le Chant du barde sur la tombe des Slaves victorieux (1806) et le Barde dans le camp des guerriers russes (1812). Karamzine, le correct et brillant auteur de l'Histoire de l'empire de Russie, a écrit un vrai manifeste antifrançais : l'Ancienne et la Nouvelle Russie. La presse périodique est animée du même esprit: Serge Glinka, dans le Messager russe, Gretch, dans le Fils de la patrie, prêchent la guerre sainte contre Napoléon. En cette guerre sainte, les littérateurs russes, comme ceux d'Allemagne, paient bravement de leur personne Joukovski s'est battu à Borodino, Batiouchkof s'est fait blesser à Heilsberg; Pétine est tué à Leipzig; les princes Viazemski et Chakovskoï ont servi dans les kosaks; Glinka et Karamzine dans l'opoltchénie.

C'est de cette époque que datent les débuts de Pouchkine, le premier poète russe qui ait acquis une réputation universelle, le contemporain et le plus glorieux rival du poète polonais Adam Mickiewicz.

On ne peut oublier que sous Alexandre s'accomplit le premier voyage des Russes autour du monde, qui fut aussi un voyage scientifique en 1803, les vaisseaux Nadejda (l'Espérance) et Néva, commandés par les capitaines Krusenstern et Lilianski, ayant à leur bord des savants allemands, visitèrent les Amériques et le Japon. En 1815, le capitaine Kotzebüe, qui avait déjà exploré l'Océan glacial du Sud, explora celui du Nord, cherchant le fameux« passage du Nord-Est ». La marine russe releva exactement les côtes de la Sibérie et démontra que l'Asie n'est point soudée à l'Amérique.

Dans le domaine des arts, les Russes continuent à être les

élèves des Français et des Italiens; à Pétersbourg, c'est par Thomont que s'élève le palais de la Bourse, par Rossi le nouveau Palais-Michel, par Montferrand que commence à se construire la splendide et luxueuse cathédrale de Saint-Isaac. Mais c'est un architecte russe, Voronikhine, qui construit celle de Notre-Dame de Kazan, inaugurée en septembre 1811, et c'est uniquement par des sculpteurs et des peintres russes qu'elle est décorée.

BIBLIOGRAPHIE

Sur le règne et la mort de Paul Ier. Voir ci-dessus, t. VIII, p. 479. Le récit qu'a fait A. Thiers de la mort de Paul est fondé sur les mémoires de Langeron (Ms. des affaires étrangères de France), d'après les confidences de Pahlen et d'autres compères. Éducation d'Alexandre Ia. Le règlement dressé par Catherine II dans Bogdanovitch, Hist. d'Alex. I, t. I, pièces justificatives (voir ci-dessus, p. 637). Papiers relatifs à La Harpe et à l'éducation des deux grandsducs dans la Coll. Soc. Imp. Hist. de Russie, t. I, V et VI, et Arch. russe, 1866 (étude par A. Rambaud, dans R. des D. M., 1er févr. 1874). — Voir même coll., t. XXIII, XXXIII, XLIV. Voir aussi Mémoires de La Harpe, publiés par Vogel, 1864 et Mémoires et corresp. du prince Adam Czartoryski, Paris, 1887, 2 vol.

[ocr errors]

-

Mémoires et correspondances sur le règne d'Alexandre Ier. - Ils sont très nombreux : en français, Savary, duc de Rovigo, Mme de Choiseul-Gouffier; Joseph de Maistre, Lettres à l'amiral Tchitchagof; Mém. politiques; Corresp.; Quatre chapitres inedits relatifs à la Russie. La grande-duchesse Catherine Pavlovna (duchesse d'Oldenbourg, puis reine de Würtemberg, Lettres, Tver, 1880; en français et en russe). Correspondance de Rostoptchine et de Semen Vorontsof, dans Arch. Vorontsof, t. VIII, IX, X (voir art. d'A. Rambaud dans Revue Bleue, 11 sept. 1880). Toute cette collection est à consulter, la plupart des lettres des personnages du temps y sont en français. En russe De Saint-Glin (d'origine française), publiés (en russe) dans l'Antiq. Russe à partir de 1882 (t. XXXVI), de Fon-Vizine (ibid., 1881), de l'officier d'artillerie Jirkiévitch, ibid., 1874; d'A.-B. Biélaef (ibid., 1880); de Mme Bloudof (Arch. Russe, 1863); de Mme Moukhanof, ibid., 1878; de L.-N. Engelhardt, ibid., 1868, et édition à part, Moscou, 1868; d'E.-A. Engelhardt, ibid., 1872; d'Oustriælof, dans Anc. et N. Russie, 1877. - Au reste, la plupart des volumes dans l'Antiquité Russe depuis son apparition en 1870 contiennent des mémoires, des lettres ou des papiers curieux sur cette époque. Il en est de même pour l'Archive Russe.

[ocr errors]

Administration d'Alexandre Ior.

Archives du Conseil d'Etat (en russe), Pét., dep. 1875. Bogdanovitch, Hist. d'Alexandre Ier, Pét., 18691871, 6 vol. (en russe). Dm. Trochtchinski, Note sur les ministères, dans Soc. Imp. Hist. de Russie, t. III (en russe). Schnitzler, Hist. intime de la Russie sous les emp. Alexandre et Nicolas, Paris, 1847, 2 vol. - A. Pypine,

HISTOIRE GÉNÉRALE. IX.

42

Le mouvement des idées sous A. Ier (en russe), Pét., 1885. N.-I. Barsof, Le chancelier Roumiantsof, dans Anc. et N. Russie, 1877, t. II. Dm. Pr. Trochtchinski (1754-1819), dans Antiq. Russe, 1882; Destinées de l'Église orthodoxe russe sous A. I, ibid., 1876, t. XV. - Ikonnikof, Le comte Mordvinof en russe), Pét., 1873. A. Brückner, Matériaux pour la biog. du comte N.-P. Panine (1770-1837) (en russe), Pét., 1890-1892, 6 vol.

1873.

[ocr errors]

-

Spéranski. Spéranski, Corr. avec le prince P.-G. Massalski, Pét., 1862. - A. Bytchkof, Fragments du travail de Spéranski sur le Code russe (époque de Nicolas Ier), dans Antiq. Russe, 1881. Spéranski, Lettres à Sotlchine (1818 et ann. suiv.), dans Arch. Russe, 1871; à Zeir (1814-1817), ibid., 1870. Le baron Korff, Vie du comte Spéranski (en russe, Pét., 1861, 2 vol. - Romanovitch-Slavatinski, Rôle politique du comte Spéranski, Kief, - V. Vaghine, Renseignements historiques sur l'activité du comte M.-M. Spéranski en Sibérie de 1819 à 1822, Pétersbourg, 2 vol., 1872. — Sur Spéranski à Irkoutsk (Sibérie), Mémoires d'E. F., dans Antiq. Russe, 1898; d'un Kosak de Sibérie, dans Anc. et N. Russie, t. V et VI. Spéranski apprécié par N. Tourguinof, dans la Russie et les Russes. t. I et III Paris .1847. Le duc de Richelieu et les Français de Russie. — Richelieu, autobiographie, notes, corresp., Coll. de la Soc. Imp. d'Hist. de Russie, t. LIV. A. Rambaud, Le duc de Richelieu en Russie et en France, dans Revue d. D. M., décembre 1888. L. Pingaud, Les Français en Russie et les Russes en France, Paris, 1886. A. Orlof, Tableau historique d'Odessa (1794-1803), Odessa, 1885. L. de Crouzas-Crétet, Le duc de Richelieu en Russie et en France, Paris, 1897.

[ocr errors]
[ocr errors]

CHAPITRE XXII

L'EUROPE DU SUD-EST

LA TURQUIE ET LES PEUPLES CHRÉTIENS

[blocks in formation]

Caractère et débuts du sultan Sélim III (1789-1807). - Le 7 avril 1789, au plus fort des périls qui menaçaient la Turquie, le jeune sultan Sélim III', fils de Moustafa III, avait succédé à son oncle Abdul-Hamid. Il avait alors vingt-huit ans de ses premiers actes, l'un, qui révélait le croyant sincère, avait été l'ordre de la levée en masse pour tous les musulmans; l'autre, qui était d'un politique, avait été la conclusion. d'un traité d'alliance avec la Suède. Il fit autour de lui des exemples sévères sous ses yeux tombèrent les tètes des fonctionnaires prévaricateurs. On revit le sultan parcourir la nuit les rues de la capitale et redresser les torts. Il annonçait des mœurs austères; aux courtisans qui le plaignaient d'avoir conservé des marques de petite vérole, il disait : « Qu'importe la figure d'un soldat qui doit passer sa vie à la guerre? » Dietz, l'envoyé de Prusse, le jugeait ainsi : « Ce prince est certainement supérieur à sa nation en talents et en activité et parait

1. Voir ci-dessus, t. VIII, p. 326; pour la généalogie, t. VI, p. 821.

être destiné à en devenir le réformateur. » L'ambassadeur de France, Choiseul-Gouffier, pressentait en lui un autre Pierre le Grand. Sélim III a toujours manifesté de la curiosité et du goût pour la France: dès 1786, alors prince héritier, il était entré en relations avec la cour de Versailles et avait envoyé un de ses favoris, Isaak-Beg, pour étudier l'administration française. Il eut de l'audace dans la conception bien plus que dans l'exécution. Ses témérités furent toujours suivies d'étranges défaillances. Peut-être, comme c'était presque devenu de règle dans cette race de princes élevés au fond du harem, manquait-il de courage personnel.

Sélim III, ayant à soutenir l'assaut de deux grands empires chrétiens, voyant un moment toutes ses frontières envahies, les Autrichiens maîtres de la Serbie, les Russes maîtres des Roumanies et de la Bulgarie, ne perdit pas confiance. Les discordes de l'Europe chrétienne travaillaient pour lui. Sa résistance aida la France révolutionnaire à organiser la nôtre, et, à son tour, la Révolution menaçante fit hâler la paix d'Orient. Une fois de plus, et presque sans le chercher, la France et la Turquie s'étaient retrouvées en coopération.

La Turquie pendant l'expédition d'Égypte. - Il était difficile, ensuite, que la Turquie, quand la guerre sévissait sur le continent et les mers, parvint à garder cette neutralité qui convenait si bien à son épuisement et peut-être au caractère de son souverain. Elle avait pu dédaigner l'alliance française, quand la France était séparée d'elle par des mers devenues un moment tout anglaises, quand nos ports et nos arsenaux de Toulon étaient dévastés. Brusquement la France, victorieuse, devint voisine et limitrophe de la Turquie : le traité de CampoFormio nous livrait les places de l'Albanie vénitienne et les îles Ioniennes. A la place de la vieille rivale, Venise, tombée sous la domination autrichienne, la Porte voyait se dresser le long de ses provinces de l'Ouest la puissance d'une République aussi ardente à la conquête qu'à la propagande, et à la tête de ses armées le génie le plus remuant des temps modernes. Presque aussitôt, de ces vieux postes vénitiens d'Albanie devenus possessions françaises, Parga, Butrinto, Larta, Vos

« VorigeDoorgaan »