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avaient administré le couvent avec une grande sagesse; et pour consolider les intérêts spirituels de la maison aussi bien que pour en sauvegarder la propriété temporelle, ils en sollicitèrent la confirmation, non-seulement des prélats de Cambrai et de Laon, mais ils obtinrent de plus des papes Nicolas V (1141) et Grégoire VIII (1187) la confirmation de tous les biens que possédait déjà l'abbaye (1).

L'œuvre de Robert sera poursuivie et complétée par l'abbé Gumbert, au XIII" siècle. C'était là, sans contredit, une des plus tristes périodes de l'histoire du peuple en France. La propriété du sol, l'unique richesse de ce temps, s'était concentrée dans les mains de quelques-uns: leudes germains, descendants des sénateurs gallo-romains, grands dignitaires de l'église. Retirés dans les forteresses qu'ils s'étaient bâties, au Ix et au xe siècle, par crainte des Normands, ces seigneurs, sous les noms de ducs et de comtes, ne songaient qu'à user et à abuser des droits que le titre de suzerains leur conférait sur les pays environnants. Ils étaient souverains là où ils étaient propriétaires, et dans leurs provinces, ils étaient propriétaires partout. Le peuple, dans les campagnes surtout, était pour toutes choses dans leur entière dépendance. La foule des opprimés, serfs, vilains, manants, fouille péniblement un sol qui ne lui appartient pas. Il lui faut subir les aides, les corvées, les tailles et toutes ces extorsions qu'on appelait les droits féodaux. Même à ce prix, la sécurité n'était pas garantie, car, rivaux les uns des autres, les seigneurs se faisaient entre eux des guerres cruelles dont le pauvre peuple fut toujours victime. Cette condition malheureuse, où se trouvaient beaucoup de gens, les excita à chercher un asile autour des abbayes qui se fondaient alors en beaucoup d'endroits du Cambresis et de la Thiérache. Ces pieuses retraites furent pour notre contrée d'un immense avantage; elles contribuèrent puissamment à dissiper les restes de la barbarie qui s'y abritaient encore, en même temps qu'elles y introduisirent le goût des arts et de l'agriculture.

Lorsqu'il prit possession de l'abbaye, en 1213, Gumbert y trouva nonseulement de nombreux compagnons, mais toute une population d'ouvriers et de laboureurs que les prédications et les bienfaits de ses prédécesseurs

(1) La grande figure de Robert Ier vit toujours dans les souvenirs du pays. La commune de Fesmy compte au nombre de ses écarts une dépendance qui s'appelle encore aujourd'hui vulgairement Robelmaitre, corruption évidente de la dénomination primitive, Robert-le-Maître.

avaient attirée aux abords du couvent. L'un des premiers actes de Gumbert fut d'octroyer à ses hommes de Fesmy et de Bergues la charte suivante, que nous reproduisons dans son entier, à cause de l'intérêt qu'elle présente pour l'histoire de Fesmy.

CHARTE DE FESMY (1213)

<< Au nom de la Trinité sainte et indivisible, moi, Gumbert, par la grâce

<< divine, nommé abbé de Fémi, avec tout le chapitre, tant aux hommes à << venir que présents,

<< Salut pour toujours.

«Que tous sachent quelle charte demeure arrêtée entre nous et nos hom«mes de Fémi.

« Si quelqu'un venant du dehors veut demeurer dans le village, pourra y << librement rester un an et un jour; et si ensuite il veut se retirer, il s'éloi« gnera librement sous la protection de l'abbé.

<< Les hommes de la ville (Fesmy), peuvent habiter et abandonner libre«ment ledit lieu; - ceux de Bergues ne peuvent s'éloigner qu'après être « venus, en face de l'église, pour payer leur dù et recevoir pareillement le « leur en retour; - de plus ils ne peuvent vendre leurs maisons et leurs << terres qu'aux seuls habitants de Fémi, tout en sauvegardant les droits de « l'Eglise (l'abbaye).

<< Nul résidant au village (Fesmy) ne paiera d'autre rétribution que celle « due à l'église à la Nativité, au jour de Saint-Etienne; elle sera acquittée <<< selon la mesure légale et conformément aux décisions des échevins.

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<< Les troupeaux du village pourront paître partout avec les nôtres (ceux << de l'abbé) excepté toutefois sur le pré situé entre notre habitation et la (( prairie réservée aux vaches; excepté aussi le bois de Prestrespesse; Depuis le fauchage du pré susdit jusqu'à la Toussaint, les troupeaux du << village ne pourront y pénétrer ; et si par hasard ils y entrent à la suite de << quelque incursion, sans avoir causé de dommage, ils seront expulsés. <«< Après la Toussaint ce pré sera commun à tous, autant de temps qu'il << sera convenable.

« Si par hasard quelqu'un, au temps de la récolte, nous cause quelque dommage, il donnera double mesure, et nous dédommagera selon le juge«ment des échevins.

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<< Depuis le fossé ou limite Ricuart, jusqu'à Oisy, nos hommes récolteront

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<< l'herbe et le bois (le chêne excepté): - et depuis le fossé susdit jusqu'au << moulin, ils recevront l'herbe seulement, sans emploi de navire (bateau) ou << autre bâtiment de transport.

« L'abbé doit placer en son moulin un meunier fidèle et sûr, qui procure « à lui (l'abbé) et aux hommes de la ville toute sécurité pour le dépôt des << grains et farines. Pour la mouture, l'Eglise aura la seizième mesure.

«Si le corps du moulin vient à être démoli, chaque famille possédant un foyer en la ville, sera tenue d'envoyer pour réparation et à la réquisition <«< du major, un ouvrier suffisant pour une journée, si cela est nécessaire. <«< Chaque année, toute maison fornira, comme elle le doit, pour le travail << de nos prés, un ouvrier suffisant qui recevra le pain du couvent.

« Les hommes habitués amèneront, selon la coutume, par l'entremise << d'un fermier, le terrage et le décime qui nous sont dus avant d'enlever les «<< récoltes.

<< Chaque maison, au jour de Noël, est redevable envers l'Eglise.

et en

<< Nos hommes pourront pêcher depuis l'étang jusqu'à l'abbaye; <«< dessus de la maison de l'ager (?), en dehors du village, les hommes de << Fémi seuls pourront user de l'eau jusqu'aux seigles.

<< Quiconque venant du dehors, qu'il soit étranger ou originaire de la <«< ville, si l'église ne lui reconnaît pas le droit de bourgeoisie, ou diffère de « le lui accorder, il ne donnera pas le douzième pendant la durée de l'in<< stance. Mais si l'Eglise le lui accorde, il nous remboursera intégralement << comme les autres hommes; - s'il refuse d'accepter, il rendra seulement << le douzième de la récolte de ses blés et un pain à la Nativité.

<< Si quelqu'un en injurie un autre, que le fermier en avertisse celui-ci <«< même, et lui procure, de la place publique, des garants pour que justice << soit rendue. S'il agit ainsi, cé sera bien; sinon, qu'il mette la main sur l'agresseur, et après qu'il aura appelé au secours, qu'on le tienne et qu'on

« le mène à l'abbaye pour que justice soit faite. Mais si aucuns refusent de porter secours, qu'ils soient soumis au jugement des échevins.

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<< Si les hommes veulent construire dans le village, vers la place pu

blique, près du calvaire, une église de pierre, ils le pourront de manière

« que l'antique église auprès de laquelle sont ensevelis les corps soit « conservée en bon état.

<<< En quelque lieu que les hommes du village seront interceptés, soit

<< justement ou non, l'abbé leur portera assistance autant qu'il sera en son

<< pouvoir.

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<< Nous ajoutons que si l'abbé meurt, son successeur est tenu tout d'abord

<< à procurer la sécurité aux habitants de son village. Les susdits habitants.

<< lui rendront avec fidélité hommage et sécurité.

<< On traitera toutes choses avec discernement, d'après la loi (1) et le jugement des échevins; - et les améliorations s'opéreront en la présence « de l'abbé ou de son délégué.

«

<< Nous ajoutons également que toutes les bonnes coutumes utiles à <«< l'Eglise et au village, qui ne sont pas contenues dans la présente charte, << seront maintenues et appliquées par les échevins.>>

La teneur de ce document prouve qu'à l'époque où il fut promulgué il y avait déjà, même au sein des moindres agglomérations rurales, une organisation et des libertés municipales que les chartes d'érection ne firent souvent que consacrer en en précisant l'usage. Nous venons de voir en effet qu'il était déjà question à Fesmy, avant 1213, de major ou mayeur, officier représentant à la fois les intérêts du seigneur abbé et ceux de ses hommes; d'échevins ou jurés, organes plus spéciaux des droits de ceux-ci, circonstance qui permet de reporter à une date antérieure à 1313 les origines du village lui-même.

Entre autres actes du gouvernement du célèbre abbé Gumbert, nous trouvons au Cartulaire :

En 1214, des lettres de A....., chevalier de Hauteville (Altavilla) et son épouse B....., touchant la vente de la rente de quinze muids dans la grange de Bonot, le dimanche où l'on chante le Circumdederunt me.

En 1215, lettres de H..., doyen de Guise et du chapitre, au sujet de la moitié de la terre de Renaufayt, au mois de mars.

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1216. Lettres de Jacques de Saint-Omer, seigneur de Prisches, par lesquelles il rend à l'église de Fesmy le décime préposé sur le territoire de Prisches, près la rivière de Sambreton. En cette même année 1216, Clémence, châtelaine de Prisches, ratifie par lettres adressées à Gumbert la restitution faite à l'abbaye par Jacques, son époux.

L'année suivante, Walterus, seigneur de Bousies, adresse à l'abbé de Fesmy des lettres par lesquelles, comme maître féodal, il approuve l'abandon

(4) Celle de Ribemont.

du droit sur le décime de Bousies, consenti par Adam, bourgeois du même lieu (janvier 1217).

Au mois de mars suivant, Jean, évêque de Cambrai, autorise la fondation par Egidius (Gilles), seigneur de Berlaimont et Elvide, son épouse, d'une chapelle dans leur maison audit Berlaimont.

En 1218, nous voyons Wautier, châtelain de Saint-Omer, approuver par une charte du mois de juin la concession du décime consentie par Jacques, son frère, sur les terres de Prisches. De son côté, Clémence, châtelaine dudit Prisches, accepte par acte adressé à Gumbert, à la date de juin de la même année, la compensation qui lui est faite sur le vinage de Prisches, en lieu et place du décime ci-dessus spécifié et dont elle n'avait que la moitié.

Une charte du même temps (1218), revêtue du sceau de Jean, évêque de Cambrai, et signée au mois de décembre « au pré du chasteau de Cambray, en la fête de Saint-Nicolas, v approuve la cession du décime consentie par Jacques de Saint-Omer en faveur de l'église de Fesmy. Le même prélat, par un titre du mois de décembre de la même année, confirme la restitution du décime de Crois faite précédemment par Walterus, sire de Bousies. La veille des Calendes d'octobre de l'année 1219, on voit R..., évêque d'Arras, ratifier par acte authentique la vente d'une rente qu'Egidius d'Albiniaco percevait sur une terre de l'abbaye, tenue par Manassès, sénéchal de Hordain, au territoire du même lieu.

Nous trouvons encore, parmi les nombreuses transactions passées sous l'abbé Gumbert, la cession à l'abbaye par Godefroi, évêque de Cambrai, de quatre mesures de terre et quatre mencaudées de prairie, entre la rivière de Pierres et celle appelée Gourgouches, libres de terrages, mais en conservant toutefois le domaine (juin 1220). Cette concession fut ratifiée, au même mois de juin, par des lettres de Roger, préposé d'Adam, doyen, et du chapitre de Cambrai.

Au mois d'octobre de la même année 1220, les abbés de Saint-Quentin et de Saint-Prix (Sancti Præjecti), le prieur de Saint-Quentin-dans-l'Isle, concèdent à Fesmy le terrage des terres de Galetus près Bonot.

En 1221, Gumbert obtenait encore de l'évêque de Cambrai, Godefroi, une charte confirmative de la vente du décime, sur le territoire de Sassegnies, que Reinerus (Renier) de Jaucia, chevalier, avait faite à l'église de Fesmy,

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