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16 mai 1755, il fut nommé gouverneur de la ville et du château de Caen, sur la démission du maréchal de Coigny, son aïeul, qui, le 17 février 1756, se démit aussi en sa faveur du titre de duc de Coigny. La Gazette de France du 28 février 1756 prend soin de faire savoir qu'Olympe de Bonnevie, la nouvelle duchesse, fut présentée à la cour le 22 février par la douairière de Coigny, sa mère, et qu'elle prit le tabouret en ladite qualité. Mais les grandeurs ne furent qu'un rêve pour cette infortunée dame de Vervins, vouée dès sa première enfance à une suite continuelle de malheurs. Elle mourut à Paris le 27 septembre 1757 à l'âge de vingt et un ans (1), laissant de son second mariage deux fils: 1o François-Marie-Casimir de Franquetot, marquis de Coigny, né le 2 septembre 1756; 2° Pierre-Auguste de Franquetot, marquis du Bordage (2), dont la naissance, à la date du 9 septembre 1757, semble avoir coûté la vie à sa mère dix-huit jours après.

Le duc de Coigny, tuteur honoraire et ayant la garde-noble de ses enfants mineurs, cesse immédiatement de prendre, comme il le faisait, le titre de « seigneur des ville et marquisat de Vervin, à cause de Madame » Olympe de Bonnevie, son épouse, » titre revenant de plein droit à ses enfants, qui jusqu'à leur majorité resteront seigneurs communs de Vervins, etc. Dans un acte du 6 avril 1775 les deux frères, qualifiés marquis et vicomte de Coigny, et toujours seigneurs communs de Vervins, sont déclarés «< mineurs émancipés par justice sous la curatelle du sieur Louis >> Richon de Rochefort, bourgeois de Paris. » Ce n'est qu'en 1779, dans un acte du 20 avril, que nous voyons pour la première fois François-MarieCasimir marquis de Coigny figurer comme seul titulaire de la seigneurie (3). Ce fut le dernier seigneur de Vervins.

De nos anciennes minutes notariales il ne nous reste aucun acte relatif aux Coigny (4), et le moment approche où nous aurons également épuisé,

(1) Gazette de France du 1er octobre 1757.

(2) Le Bordage était un fiel du diocèse de Rennes, qui avait été érigé en marquisat au mois de mai 1656. Le duc de Coigny le possédait du chef de Henriette de Montbourcher, son aïeule maternelle.

(3) Renseignements tirés des anciennes archives du palais de juslice de Vervins avant leur translation à la préfecture de l'Aisne.

(4) Nous savons qu'on n'en trouverait pas davantage dans l'étude que nous avons vue durant un siècle et demi en possession de la clientèle des seigneurs de Vervins

en ce qui les concerne, le stock, comme on dit aujourd'hui, des pièces inédites appartenant à notre collection particulière. En attendant, voici un document que nous ne pouvons négliger à cause de l'intérêt qu'il présente pour l'histoire des anciennes institutions municipales de notre ville. C'est un arrêté rendu par le duc de Coigny, le 4 avril 1769, au nom et comme tuteur de ses enfants mineurs. Nous le donnons in extenso:

« Nous Marie-François-Henry de Franquetot duc de Coigny, maréchal » des camps et armées du Roi, mestre de camp général des dragons de » France, gouverneur des ville et château de Caen et du château et maison » royale de Choisy, tuteur honoraire et ayant la garde-noble de François» Marie-Casimir de Franquetot, marquis de Coigny, et de Pierre-Auguste » de Franquetot, marquis du Bordage, nos enfants mineurs et de def» funte dame Marie-Jeanne-Olympe de Bonnevie de Vervin, notre épouse, » seigneurs des ville et marquisat de Vervin,

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» Vu l'acte de délibération faitte en l'hôtel de ladite ville le mardi » 28 mars dernier par les officiers municipaux en l'assemblée des notables, convoquée en la manière prescritte par l'édit du Roi du mois de mai >> mil sept cent soixante-cinq, par laquelle délibération ladite assemblée a » élu trois sujets pour l'un d'eux estre maire....., en conséquence du » droit que nous avons en vertu de la transaction passée entre nos prédé» cesseurs seigneurs et les habitans de laditte ville au mois d'avril mil >> cinq cent soixante-treize et de la possession dans laquelle ils étoient » avant la création des officiers municipaux électifs en offices royaux, » dans lequel droit nous sommes confirmé par provision par l'article six » dudit édit, à la charge néantmoins par nous de remettre dans un an à » la grande chambre du Parlement nos titres pour estre statué sur nos >> dits droit et possession,

» Avons nommé et nommons, choisi et choisissons parmi lesdits trois » sujets la personne de Claude-François-Xavier Verzeau, ancien échevin » et conseiller actuel pour estre maire de la ville de Vervin conformément » à laditte délibération et pendant le tems y porté. En témoin de ce nous >> avons signé ces présentes et fait apposer le sceau de nos armes.

(l'étude de M. Herbert), et nous avons tout lieu de croire qu'à partir du décès du dernier Cominge-Vervins (novembre 1725), cette clientèle a été acquise à Me Solon, notaire du temps, dont la charge est occupée actuellement par Me Baron.

» Donné à Paris en notre hôtel le quatrième jour d'avril mil sept cent » soixante-neuf. »

DE FRANQUETOT DUC DE COIGNY.

C'est à tort que l'on invoque dans cet arrêté la Transaction de 1575. Le texte primitif de cette charte consacrait un autre système pour l'élection des maires. Nous avons montré ci-dessus (p. Iil), queis en étaient les inconvénients, et comment on avait dû être amené à le modifier. Quoi qu'il en soit, nous ne voyons pas sans étonnement viser, après deux cents ans, ce monument de notre ancienne législation, que nous avions tout lieu de tenir pour abrogé, surtout depuis l'édit de 1765. On sait en effet que cet édit avait pour but spécial l'uniformité dans l'ensemble des institutions municipales. Il est vrai, comme le donne à entendre l'arrêté du duc de Coigny, qu'il pouvait y avoir des exceptions à la règle.

L'hôtel du duc de Coigny était situé à Paris, rue Coq-Héron. C'est de là qu'il datait ses arrêtés toutes les fois qu'il avait à intervenir personnellement dans les affaires du marquisat, par exemple lorsqu'il s'agissait, comme on vient de le voir, de sauvegarder les prérogatives de ses enfants. Tout porte à croire du reste qu'il n'habita jamais la maison. seigneuriale de Vervins et qu'il se déchargeait des menues affaires locales sur son régisseur et ses officiers de justice. Les instructions qu'il leur donnait ne devaient pas être bien autoritaires, à en juger par le fait suivant. Un jour, c'était en 1772, ses agents projetèrent de faire abattre le long d'un ancien chemin quelques arbres plutôt génants qu'utiles, et dont la propriété n'était pas contestée aux seigneurs. On s'imagine volontiers qu'en semblable occurrence un ordre du maître suffisait. Non pas : nous voyons les tuteurs honoraire et onéraire des mineurs de Coigny présenter requête, en bonne et due forme, comme de simples censitaires, à Monsieur le bailli et juge gruyer en la justice de Vervins, à l'effet d'être autorisés à faire vendre lesdits arbres. Il était impossible d'être plus correct. La requête rédigée et signée à Vervins par Me Dubuf, régisseur, est intéressante à plusieurs points de vue: elle fixe la date de la construction de la route nationale qui traverse Vervins, et fournit sur la topographie ancienne de cette ville certains détails généralement ignorés. Nous croyons donc utile de reproduire ici par extrait ce document; ce sera le dernier. << A Monsieur le Bailly, etc. Vous remontrent et exposent MarieFrançois-Henri de Franquetot duc de Coigny, etc, tuteur honoraire de

>> François-Marie-Casimir de Franquetot marquis de Coigny et de Pierre» Auguste de Franquetot marquis du Bordage, ses enfants mineurs,..... » et Louis Richon de Rochefort, tuteur onéraire des dits seigneurs, qu'il » y a actuellement une nouvelle chaussée royale pratiquée de Vervin à » Fontaine, au moyen de quoy les différents chemins qui conduisent de » Vervin à ce village vont être abandonnés et laissés aux propriétaires » des terres en dédommagement de celles qu'ils auront perdues par » l'emplacement de cette nouvelle grande route, que lesdits seigneurs » mineurs se réservent de faire planter d'arbres, à droite et à gauche, » dans l'étendue de leur domaine, aussitôt que la dite chaussée sera >> entièrement achevée; et comme le long de ces chemins qui vont >> être abandonnés, il reste des ormes qui ont été plantés il y a 25 à 30 » ans, lesquels s'ils subsistaient se trouveraient au milieu des terres, » gèneraient les labours et seraient insensiblement détruits par les culti>> vateurs; et comme il en reste peu, et çà et là, sans suite, et qu'au surplus >> il n'est pas naturel de laisser des arbres croître en plein champ, joint à » ce que ces arbres sont pour la plus part de mauvaise venue, rabougris et déjà dépérissans, il convient de les faire abattre, sauf à en planter » d'autres le long de la nouvelle route;

D

« Ce considéré, il vous plaise, Monsieur, indiquer les jour et heure >> auxquels lesdits arbres seront vendus..... savoir :

« 1° Soixante-deux ormes qui sont à droite et à gauche de la chaussée » Brunehault, depuis le faubourg de l'Hôtel-Dieu ou la Chiffloterie jusqu'à » la croizée du chemin qui conduit de Vervin à Laigny.

« 2° Quatre-vingt-huit ormes à droite et à gauche de ladite chaussée » depuis la croizée du chemin qui conduit de Vervin à Laigny jusqu'aux » haies de Fontaine ;

« 3o Dix-sept ormes à droite et à gauche du chemin qui prend du carré ou » place de l'ancienne briqueterie et four à chaux et conduit à la chaussée >> Brunehault vers Fontaine.......».

Suit l'ordonnance du bailli du 3 avril 1772 obtempérant à la requête, accompagnée du billet proclamatoire et du procès-verbal d'adjudication du 7 avril, duquel il résulte que la vente des trois lots comprenant ensemble 167 arbres a produit 120 livres 9 sous.

François-Marie-Casimir de Franquetot marquis de Coigny était, depuis 1778 ou 1779, comme nous l'avons dit plus haut, seul possesseur de la

terre de Vervins et des seigneuries en dépendantes. A l'âge de 24 ans il s'embarqua pour l'Amérique et prit part à la guerre de l'indépendance, de 1780 à 1782. Le 4 septembre de la même année, à peine rapatrié, il fut créé brigadier d'infanterie, et le 9 mars 1788 il obtint le grade de maréchal de camp. On sait qu'il suivit son père en émigration, et qu'il eut la bonne fortune, à sa rentrée en France, de retrouver une partie de ses biens non aliénés par la nation, entre autres la plupart des bois de son ancienne châtellenie de Voulpaix, ses deux châteaux de Vervins, etc. Il est mort le 22 janvier 1816, cinq ans avant le maréchal duc de Coigny, son père, décédé le 18 mai 1821 à l'hôtel des Invalides, dont il était gouverneur depuis l'année 1816.

Le marquis de Coigny, le dernier seigneur de Vervins, avait épousé le 21 février 1775 Louise-Marthe de Conflans d'Armentières (1), dont il eut trois enfants: un fils et deux filles. L'aînée des filles, Antoinette-FrancoiseJeanne, née le 23 juin 1771, épousa Horace Sébastiani de la Porta, qui fut député de Vervins, pair et maréchal de France. Elle est morte à Constantinople en 1807, pendant l'ambassade de son mari près la PorteOttomane.

Ici se terminent nos commentaires sur les minutes historiques d'un Notaire de Vervins et sur les autres pièces inédites qui s'y rattachaient. Nous avons expliqué en entrant en matière, dans un avertissement, par quelle heureuse fortune un tas de vieux contrats, perdus dans un grenier, était tombé en notre possession, comment s'en était opéré le triage et quelle source abondante d'informations sur les hommes et sur les choses du Vervinois nous avait révélé, à première vue, leur dépouillement. Nous n'hésitions pas dès lors à formuler cet aphorisme : « Que « l'histoire de chacune de nos pro vinces, par suite la vraie histoire << nationale, pendant les trois derniers siècles, est encore ensevelie sous << la poussière des archives du notariat. » On peut juger maintenant si nous n'avons pas exagéré la portée de cette découverte et si les résultats ont justifié nos premières appréciations.

(1) Nous devons à un historien de notre département, M. A. de Vertus de Brécy, des révélations très piquantes sur la marquise de Coigny, femme des plus excentriques, dont la mémoire est restée légendaire dans les anciens domaines des Conflans d'Armentières, particulièrement à Brécy (canton de Fère-en-Tardenois,) où elle séjourna, séparée de son mari, pendant une partie de sa vie (Voir Histoire de Coincy, Fere, Oulchy, etc. p. 209 et suivantes).

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