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très-contente ; et si on lui avoit demandé davantage, elle auroit offert de se tenir à demeure en admiration et en surprise de tant d'esprit et de génie de la part de ses Législateurs. On a des louanges prêtes pour d'autres Constitutions, à mesure qu'elles adviendront ; et certainement celle de l'an huit ne sera pas la dernière.

D'où viendra-t-elle la Constitution suivante, cette Constitution nouvelle, aussi nécessaire qu'inévitable? Beaucoup de gens seroient en état de la composer, plus ou moins bien; un seul homme peut la donner, c'est Bonaparte. Et, en me servant d'une expression qui annonce un bienfait, je laisse voir qu'on attend de lui une Constitution d'un beau genre, une Constitution parfaite pour l'ordre, et bonne aussi pour la liberté.

Le moment favorable à une telle Constitution, ce moment s'il exista jamais dans le cours de la fortune humainė est peut-être passé; mais, en politique, c'est une chose heureuse encore d'approcher du but, lorsqu'on ne peut pas y atteindre.

LA Dictature qui fixe aujourd'hui l'attention de l'Europe, cette Dictature est utile, est glorieuse à la France, elle est de plus la meil

un moment

leure garantie de la paix intérieure ; mais les héros aussi sont mortels : et, comme l'a dit Bossuet ? tout peut tomber en par cet endroit. C'est à Bonaparte qu'il appartient de réfléchir, à l'avance, sur le Gouvernement actuel et sur les lois de la France ses lois politiques telles qu'on les voit consignées dans la dernière Constitution. Il faudra tout son

génie pour arranger l'avenir; mais il y réussira, s'il y consacre les facultés de son esprit et les forces de sa volonté. On a dit de lui, qu'il avoit toujours un point par de là la difficulté (*); et cette expression fait image.

NE croyons pas les amis de la Constitution de l'an huit, lorsqu'appelés à en faire l'éloge ils se bornent à la présenter comme un préparatif à une meilleure, comme un chemin à tout. Je pense bien différemment, et je la trouve combinée de telle manière, qu'on ne peut, sans un changement absolu, la faire servir à l'établissement d'une franche République, ni à l'établissement d'une Monarchie tempérée.

LES Autorités secondes, dans cette Constitution, privées de toute espèce de force, d'aucune, du moins, qui leur soit propre, nécessitent au

(*) Mot de M. Haller.

rang suprême un pouvoir absolu, ou le rendent inévitable. Est-ce là le commencement d'une véritable République ?

Il n'y a point de gradations politiques dans cette Constitution; on a fait tout égal, excepté le Prince. Est-ce là le commencement d'une Monarchie tempérée ?

C'EST avec une Monarchie élective que la Constitution de l'an huit a le plus d'affinités; mais, pour une Monarchie héréditaire et tempérée, il faut bien autre chose que le Gouvernement d'un seul.

REMARQUE singulière. Changez le titre de la Constitution de l'an huit; mettez en place: conditions d'une Dictature pour tant d'années, vous n'y trouverez rien à redire; mais, sous le nom de Constitution Républicaine, tout y manque; et, cependant, on montre si peu de défian e, qu'on n'appelle pas même l'expérience à conseil, en désignant l'époque d'un

examen nouveau.

Le mot de révision n'est pas prononcé. Certes, nous devons faire un meilleur présent aux générations à venir, ou elles répudieront notre héritage.

SECTION II.

République, une, indivisible, et soumise aux Lois de l'égalité.

Nous

ous croyons à propos de le rappeler. Nous avons dit, en commençant, que, pour comparer ensemble la République et la Monarchie, et pour y procéder avec utilité comme avec bonne foi, nous devions d'abord tracer un projet de ces deux sortes de Gouvernemens, le tracer avec soin, et les regards fixés sur la nature du pays auquel notre travail est particulièrement destiné.

On ne pourroit autrement atteindre à des résultats précis, et l'on seroit tenu dans le cercle des paroles vagues et des spéculations vaines.

Enfin, un ordre dans les idées, dont on s'appercevra sans peine en suivant la marche de cet ouvrage, nous a déterminés à placer en premier rang le sujet que nous allons traiter.

UNE République, une et indivisible, de trente millions d'hommes, et où l'on ne peut s'aider d'aucune subdivision d'autorité pour diminuer la tâche du Gouvernement, ni d'aucun

Patriciat, pour contenir par l'habitude du respect les passions du grand nombre une telle République est la plus difficile des organisations politiques. Il faut alors trouver tous ses moyens dans les rapports qu'on établit artificiellement ; et si l'on se méprend, si l'on assure mal l'équilibre entre les Pouvoirs, c'est au despotisme qu'on ouvre un accès: car il faut absolument une autorité suprême; et quand le Législateur n'a pas su l'établir avec un soin d'affection pour la liberté, les hommes en crédit ou en fortune la saisissent, et ils s'en servent alors comme d'une conquête, sans règle et sans ménagement.

L'expérience est ici d'accord avec la théorie; et toutes les conceptions politiques, nées en France depuis la révolution, toutes ces conceptions et leurs résultats, sont une preuve animée d'une vérité que tous les hommes d'État doivent avoir présente à l'esprit ; et si la Nation éclairée au milieu de laquelle on a commis tant d'erreurs, les a parfaitement méconnues jusqu'à l'époque où elle en fut avertie par ses malheurs, si même elle les a long-temps favorisées par son aveugle et hâtif enthousiasme, c'est que la politique sociale étoit pour elle une science nouvelle, et qu'enfant, peut-être, par sa confiance et sa mobile imagination, elle s'est

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