Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

l'original. Est-on plus fondé à Montpellier? M. Passavant, qui a eu à se prononcer aussi sur cet exemplaire, le déclare une bonne et ancienne copie de l'original de Raphaël.

Il nous restera du moins, pourvu que les censeurs ne nous les contestent pas, deux dessins où l'on aimera à épier la main du maître dans ses exercices les plus élémentaires. Une madone au crayon toute frottée et pénétrée de sentiment, une autre petite madone, et une feuille contenant plusieurs croquis à la plume, qui sont des études pour la figure appuyée, la tête en avant, à l'encoignure de la Dispute du saint sacrement. Si quelque doute pouvait s'élever sur l'authenticité de ce dessin, il serait facilement dissipé à la vue des vers tracés au bas de la feuille, de l'écriture bien connue de Raphaël. Ils forment une stance entière et quelques vers de plus à l'état d'ébauche. Ce nouvel exemple de caprice poétique est un document de plus pour la biographie du grand peintre, et doit être ajouté au petit nombre de fragments publiés par Comolli et par d'Agincourt. Les sonnets connus sont des élans amoureux; cette stance inédite exprime une pensée d'inquiétude sur les passions de la jeunesse et d'aspiration vers de plus sublimes régions; voici comment j'ai su la lire avec l'aide de quelques amis :

Nello pensier che in te cercar tafanni

E dare in preda el cor per piu tua pace;
Non vedi tu gli efetti asperi e tenace
Vincolno che nusurpa i piu belli anni?
Le fatiche e voi famosi afanni,
Isvegliate el pensier che in otio giace:
Mostrateli quel cole alto che face

Salir da bassi ai piu sublimi scanni.

JULES ROMAIN, à qui notre livret attribue sans autorité une petite et ancienne copie de la Transfiguration, rapportée d'Italie par feu le sénateur Curée, est, avec plus de vraisemblance du moins, l'auteur de deux morceaux assez curieux. Le Portrait d'homme noir est indiqué comme celui de Marc-Antoine, j'ignore par quel motif; sa ressemblance avec les portraits du célèbre graveur m'a échappé. Il est vrai qu'on n'en connaît guère que deux assez disparates: la figure jeune d'un des palefreniers du pape Jules II dans le tableau d'Héliodore, et la tête vieillie gravée par Bonasone. La Stregozza, ou la Sorcière traînée sur une carcasse par des hommes nus, est une composition bien connue par la gravure d'Augustin Vénitien. L'invention en est attribuée sans raison, tantôt à Raphaël, tantôt à Michel-Ange. La peinture qu'on en voit ici est-elle un original qui déciderait la question en faveur de Jules Romain? j'en doute un peu ; mais

on y trouve du moins quelques-unes des qualités solides et serrées de ce maître. On a placé encore sous le nom de Jules Romain un beau dessin du Banquet des Dieux aux noces de Psyché, peinture fameuse de Raphaël au palais Chigi, dont on connaît une estampe avec le nom de Salamanca et la date de 1545.

Pour suivre l'école romaine dans son développement ultérieur, on serait tenté de s'arrêter aux noms de CARAVAGE et de JOSEPIN; mais il faut de la bonne volonté pour saisir dans le Saint Marc du premier son énergique et sombre naturalisme, et dans l'Annonciation du second, son idéalisme clair et facile. On ne saisira toute la beauté de la fière école des naturalistes qu'en présence de la Sainte Marie Égyptienne de RIBERA, étude profonde d'une face et d'une poitrine de vieille gitana.

A défaut de Corrége, dont on n'a ici qu'une copie sans valeur, on trouve, pour représenter l'école de Parme, une Vierge tenant l'enfant Jésus couché sur ses genoux, qui lui présente une rose. Ce tableau, donné au PARMESAN, est en effet tout empreint de la grâce affectée et du coloris séduisant qui le caractérisent.

L'école florentine se reproduit ici avec deux noms célèbres, FRA BARTOLOMMEO et ANDREA DEL SARTO. La Sainte Famille rend autant qu'il est possible, dans d'aussi petites dimensions, la dignité douce et l'expression sérieuse mais non dépourvue de grâce qui furent dans la manière du moine de Saint-Marc. La Vierge accroupie, tenant l'enfant debout sur ses genour, ne nous donne pas les qualités du Sarto dans la plénitude de son génie; on y aperçoit à peine l'admirable don qu'il posséda de combiner l'action et l'expression de ses figures dans les formes les plus belles et la couleur la plus aimable, comme on le voit dans la Madone de SaintFrançois à la tribune de Florence, et dans la Sainte Famille du Louvre. Le tableau qu'on lui donne ici n'est sans doute qu'un de ses premiers ouvrages, alors qu'il tenait quelques-unes des habitudes de son maître Piero di Cosimo. Les écrivains qui ont parlé d'Andrea citent toujours, parmi les nombreuses madones qu'il exécuta, des ouvrages où sa manière est, comme ici, plus petite et plus asservie.

Nulle part, si ce n'est au Vatican, on ne peut connaître la peinture de Michel-Ange, et même, à la chapelle Sixtine, la fresque colossale du Jugement dernier est bien difficile à voir de loin, à travers la couche fuligineuse qu'y ont amassée les bougies des messes papales: aussi une copie est-elle toujours précieuse, et surtout une copie ancienne où ne paraissent pas les draperies ordonnées par le scrupuleux Paul IV. On doit recommander à ce titre une copie du Jugement dernier qui a été donnée par le gouvernement. Mais elle aura un prix tout particulier pour ceux

[graphic][subsumed][ocr errors][subsumed][subsumed][ocr errors][subsumed][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][subsumed][ocr errors][subsumed][ocr errors][subsumed][ocr errors][subsumed][subsumed][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][subsumed][ocr errors][ocr errors][subsumed][subsumed][subsumed][merged small]

ÉTUDE POUR UNE FIGURE DE LA DISPUTE DU SAINT-SACREMENT

[merged small][ocr errors]

qui recherchent les anciennes peintures françaises. Ce tableau sur bois est signé ROBERTUS LE VOYER AVREL FAC ROME, 1570. Voilà donc un peintre d'Orléans, un contemporain et compatriote de Jean Chartier et d'Étienne de Laulne, travaillant à Rome d'après Michel-Ange. Le style du grand Florentin y est singulièrement rapetissé, la couleur en est crue e le dessin imbu de cette pratique qui accuse la charpente musculaire des corps en les capitonnant. Mais il y a dans la manière dont chaque corps est dessiné, chaque tête étudiée et exprimée, tant de soin et tant d'esprit, que l'on s'émerveille à la vue de ce miniaturiste aux prises avec le colossal fresquiste, et l'on s'assure tenir encore ici un autre maître totalement inconnu d'une école dont l'histoire est encore bien incomplète.

DANIEL DE VOLTERRE, le Florentin auquel on infligea le surnom de il Braghettone pour avoir couvert les figures du Jugement des draperies dont je parlais plus haut, a peint une Décollation de saint Jean-Baptiste qui n'est point faite pour le relever à nos yeux. Ce n'est qu'une scène dégoûtante où la science du raccourci et un reste de style grandiose viennent racheter la bassesse des détails et la nullité de la couleur.

A un moment plus avancé de l'école florentine, nous pouvons voir des artistes qui y acquirent du renom. CRISTOFANO ALLORI, dans la Vierge et l'Enfant Jésus et dans l'étude du Jeune David, montre cette originalité brillante qui le maintint supérieur à ses contemporains. CIGOLI, dont il y a ici un Ecce homo et deux autres petits morceaux, témoigne de cette chaleur de coloris et de cette exagération dans l'expression qui gagnait alors la peinture. VANNI, dans l'Enfant Jésus porté par deux anges, exprime cette recherche de l'effet et cette intensité de sentiment que les meilleurs maîtres de la fin du xvi siècle prirent pour idéal à la suite de Bàrocci, qui avait introduit à Florence comme à Rome ses habitudes d'affectation. On en trouve un exemple réduit dans la Tête d'ange, toute pleine de la suavité d'expression religieuse qui devint alors de mode dans les arts comme dans l'Église.

L'école vénitienne peut être étudiée à Montpellier sur quelques ouvrages assez caractérisés. Le Portrait d'un vieillard chauve du TITIEN, et le Portrait d'un antiquaire par SÉBASTIEN DEL PIOMBO, indiquent encore, à travers leur peinture osbcurcie, la puissance de ces maîtres à rendre la vie dans sa plus profonde réalité, tout en lui imprimant un certain air de grandeur auprès de laquelle toute physionomie moderne paraît chétive. Si l'on se place ensuite devant le Mariage de sainte Catherine de Paul Véronèse, tableau gravé dans la galerie Gerini, en 1759, on verra dans: leur splendeur ces figures si attrayantes par la plénitude de vie qui les inonde, par la lumière qui donne tant d'éclat à leurs étoffes et qui rend›

« VorigeDoorgaan »