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naturelle entre les hommes. Cette religion, deyoit fe perpétuer par la tradition domef tique, par les leçons des pères & des vieillards, par les pratiques journalières du culte divin. Si les hommes y avoient été fidèles, ils auroient évité l'erreur dans laquelle tous les peuples font tombés. Ils ont cru que les differentes partics de la nature étoient animées par des efprits, des intelligences ou génies particuliers; ils les ont pris pour des Dieux, leur ont adreffé un culte, ont oublié le créateur, & font devenus polythéiftes. Telle a été la fource des défordres qui ont inondé la terre, & un des obftacles qui ont retardé les progrès de la civilifation.

Après plufieurs fiècles, lorfque les peuplades furent allez nombreuses pour former differens corps de nations & des fociétés civiles, Dieu révéla par Moyfe une religion nationale; il l'établit fous les yeux des peuples qui alors figuroient dans le monde, des Egyptiens, des Iduméens, des Cananéens out Pheniciens, des Affyriens. Elle tendoit à convaincre les hommes que Dieu eft nonfeulement le fouverain maître de la nature, mais l'arbitre des nations, l'auteur & le vengeur des loix, le père de la république & de la fociété civile. Avec tout l'appareil de la puiffance divine, Dieu exerça l'auguste fonction de Légiflateur; il incorpora les loix civiles & politiques avec les loix morales & religieufes; il leur donna la même fanction.

Comme les peuples s'étoient égarés en prenant pour des Dieux les differentės parties de la nature, Dieu frappa des coups terribles fur la nature, pour démontrer qu'il en eft le feul maître. Tous vouloient avoir des Dieux nationaux, des Dieux pour eux feuls, ennemis des autres peuples; ils adoroient leurs Rois, leurs fondateurs, leurs héros; ils en encenfoient les images: les leçons que Dieu leur donna, les auroient préfervés de cette idolâtrie, s'ils avoient été plus dociles; ils auroient ceffé de fe regarder comme ennemis, & de fe détruire par des guerres continuelles.

La tradition nationale étoit le guide que les Hébreux devoient fuivre; toutes les fois qu'ils s'en écartèrent, ils tombèrent dans les mêmes erreurs & les mêmes défordres que les autres peuples.

Environ quinze cent ans après, il arriva une grande révolution dans l'univers. La puiffance des Romains écrafa les autres Monarchies, rangea fous fes loix toutes les nations du monde connu. Alors les fciences, les arts, la civilifation, le commerce, avoient fait des progrès; les peuples, devenus fujets du même Souverain, ne pouvoient plus fe croire ennemis. Dieu annonça aux hommes une religion univerfelle, JésusChrift envoya, fes Apôtres prêcher l'Évangile à toutes les nations. Il apprit aux hommes que Dieu eft non-feulement le créateur de la nature, le père des peuples, le fonda

teur de la morale & des loix, mais l'auteur du falut & de la fanctification de l'homme,

& que nous ne pouvons y parvenir que par les mérites d'un médiateur. Ainfi JéfusChrift a démontré l'égarement des Philofophes qui s'attribuoient la gloire & le mérite de la vertu, qui avoient fait de leur fage une espèce de Divinité: quatre mille ans d'erreurs & de crimes n'avoient pu les convaincre que la vérité & la vertu font des dons de Dieu.

Suivant M. Bergier, le droit naturel, le droit civil, le droit des gens, toujours méconnus par les Philofophes, ne font point le fruit des réflexions ou des conventions humaines, mais des leçons de la fageffe divine. Aux premiers hommes, elle a parlé par leur père; aux nations naiffantes, par un Législateur; aux peuples civilifés, par un Dieu. La révélation primitive a fondé la fociété naturelle, la feconde a cimenté la fociété civile, la troisième a établi la fociété religieufe, que nous nommons la Communion des Saints. Sous la première, les hom-. mes devoient être guidés par la tradition domestique; fous la loi Juive, par la tradition nationale; fous l'Évangile, par la tradition univerfelle ou la catholicité.

De même que la gion primitive ou patriarchale n'a dû fubfifter que jufqu'au moment où les familles ifolées & nomades commenceroient à former des corps de républi que; ainfi la religion Mofaïque a dû ceffer lorf

que les peuples font devenus capables de fraternifer entre eux, & de lier une fociété religieufe univerfelle. Une quatrième révélation générale eft impoffible; elle ne feroit plus analogue à aucun état de la nature humaine; le Chriftianifme, felon la parole de Jéfus Christ, doit durer jufqu'à la fin des fiècles; les hommes ne peuvent être parfaitement civilifés, fanctifiés, rendus heureux, que par cette religion. Les trois époques de la révélation divifent, comme on voit, en trois parties le Traité de la vraie Religion.

Ce plan fublime, ajoute l'Auteur, porte avec lui la preuve de fa divinité: il n'a pu éclore dans un efprit humain; il embraffe toute la durée des fiècles. Nous le voyons) tracé dans les écrits de l'Ancien Teftament. Jefus-Chrift & fes Apôtres l'ont révélé, & les Pères de l'Églife l'ont très-bien apperçu. Il a été fuivi par S. Auguftin dans fes Livres de la Cité de Dieu, & par Boffuet dans fon Difcours fur l'Hiftoire Univerfelle. Il fait voir une liaison effentielle entre les trois époques de la révélation; il démontre l'erreur des Déiftes, qui ont voulu forger une religion naturelle, indépendante de toute révélation; l'inattention & la méprife de ceux qui ont traité de la loi de nature, de la loi Mofaïque, de la loi Chrétienne, comme fi c'étoient trois religions différentes pour le foud, ont enlevé au Chriftianifme la plus forte de fes preuves.

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Il en eft une autre qui n'eft pas moins frappante; c'eft que les divers fyftêmes d'incrédulité font aufli étroitement lies entre eux, que le plan même de la religion. Dès qu'un raifonneur, bón Logicien, s'écarte de la tradition univerfelle ou de la catholicité, il doit néceffairement palfer de l'Hérélie au Socinianifme ou au Déifime pur, de celui-ci à l'Athéifine & au Matériaiifme, & aboutir enfin au Pyrrhonisme univerfel Cette théorie eft démontrée par l'hiftoire de ces différentes Sectes & par les principes d'où il réfulte que la catholicité eft la forme effentielle & conftitutive du Chrif tianifme.

En expofant le plan de la première partie de fon Ouvrage, M. Bergier donne les preu ves générales d'une révélation primitive. Dans le Chapitre I, il en fait le tableau d'après le Livre de la Genèfe & celui de Job; il prouve, par les Hiftoriens facrés & profanes, que les nations anciennes ont adoré un feul Dieu avant de tomber dans le Polythéifme & dans l'Idolâtrie. Il réfute ceux qui prétendent que les premières idées de religion font nées de l'ignorance & de la crainte des hommes encore fauvages, de la politique des Légiflateurs, de l'ambition des Prêtres. Puifque chez les peuples anciens la vérité a précédé l'erreur, la religion n'a pas fuivi le progrès des connoiffances humaines; elle n'eft donc pas l'ouvrage des hommes, mais un don de Dieu.

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