»ment du fuffrage des gens de goût; » il falloit opter, & j'ai préféré l'indul»gence de ces derniers ». On voit par cet aveu, que M. de Lonchamps a dû fe permettre quelque liberté dans fa manière de traduire; mais cette liberté lui a fervi à répandre beaucoup d'élégance & d'agrément dans fa veifion. Pour mettre nos Lecreurs à portée d'en juger, & de connoître en même-tems de quelle manière le Traducteur a mis fes principes en pratique, nous citerons quelques morceaux du texte & de la traduction. Voici le commencement de la première Élégie du premier Livre: Divitias alius fulvo fibi congerat auro 1. Vol. E Aut ftimulo tardos increpuiffe boves. Voici comme M. de Lonchamps a traduit ce morceau. « Qu'un autre fe complaife dans les monceaux d'or qu'il entaffe, & que fes fertiles do»maines embraffent des milliers d'ar pens. En proie à d'éternelles inquié »tudes, jamais il ne perdra de vue l'ennemi; la trompette guerrière a pour » jamais écarté le fommeil de fes yeux. » Pour moi je coulerai des jours paifibles au fein de la médiocrité, pourvu Qu'un modefte foyer me réchauffe & m'éclaire, » que des ruiffeaux de vin, qu'une abon » dante provifion de fruits réalifent chaque année les apparences d'une bonne » récolte. Habitant des campagnes, on » me verra, dans la faifon, aligner mes jeunes plants, greffer d'une main légère mes pommiers déjà forts. Je ne rougirai point de manier le hoyau, d'aiguillonner le boeuf trop lent dans » fa marche, de rapportér au bercail la brebis égarée, ou de rendre à fa mère » le chevreau délaiffé ». " 11. eft peut-être à regretter que le caractère de la Langue françoife ne permette pas de rendre littéralement l'aimable fimplicité de ce vers: Dum mens exiguo luceat igne focus, dont au refte M. de Lonchamps a rendu affez heureufement l'idée par un autre vers que nous nous fommes permis de faire remarquer, parce que fon ftyle en offre affez fouvent. Continuons le pa rallèle par un autre morceau de la même Elégie: Non ego divitias patrum, fructufque requiro, Sed canis æftivos ortus vitare fub umbrậ Voici maintenant la truduction. « Je » ne regrette point l'antique opulence » de mes pères, ni ces récoltes abon» dantes qu'ont moiffonné mes ancêtres. » Ce mince héritage fuffit à mon bon» heur: heureux d'y trouver le repos » fous un toît ruftique; fur cette couche, mon refuge ordinaire dans ma laffitude. Ah! qu'il eft doux d'enten»dre gronder l'aquilon, & de preffer »fur fon fein une amante chérie! Que fe fondent en eau, nuages on les » brave alors les humides autans, & le » fommeil n'en eft que plus tranquille. » A ce prix, j'abandonne la richeffe à » ceux que le courroux des mers, que » les hyades orageufes ne fauroient » effrayer: Pour moi, qu'une vie frugale » peut rendre heureux, déformais, au » lieu de la confacrer à des voyages de »long cours, j'irai braver les feux de la canicule, fous le feuillage que rá»fraîchit un ruiffeau qui s'échappe » دو Nous terminerons nos citations par le morceau fuivant, tiré de l'Elégie onzième du premier Livre, & quis, fuivant M. de Lonchamps, eft d'une beauté dont rien n'approche dans les au tres Poëtes érotiques, tant anciens que modernes. Intereà pax arva colar. Pax candida primùm כן دو « Douce & charmante paix, féconde "nos campagnes! Ce fut fous tes aufpices que les boufs attelés fillonne» rent nos premiers, guérêts; c'eft toi » qui mûris nos vendanges, qui foules » ces grappes dont la liqueur mise en réferve, doit abreuver une génération, » nouvelle; c'eft toi qui fais reluire le » foc & le hoyau, tandis que la rouille ,, mine dans l'ombre les armes du Sol» dat impitoyable. C'eft toi qui permets "au Villageois, que le vin égaye far » fon charriot ruftique, de ramener du |