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donna un grand coup fur le dos. M. » de Turenne s'étant tetourné, le Do❤meftique lui demanda pardon, & lai dit: Monfeigneur, j'ai cru que vous ➡ étiez un tel, mon camarade. Et quand wc'eût été lui, répliqua M. de Turenne, "falloit il frapper fi fort? » On est un peu fâché que l'Auteur n'ait pas transcrit cette anecdote comme elle fe trouve dans un Ouvrage très-connu. Un jour d'été, qu'il faifoit chaud, y eft il dit, le Vicomte de Turenne, en petite vefte blanche & en bonnet, étoit à fa fenêtre dans fon anti-chambre. Un de fes gens furvient, &, trompé par l'habillement, le prend pour l'Aide de cuifine, avec lequel ce Domestique étoit familier, Il s'approche doucement par derrière & d'une main qui n'étoit pas légère, lui applique un grand coup fur les feffes. L'homme frappé, se retourne à l'instant. Le Valet voit en tremblant le vifage de fon Maître. Il fe jette à fes genoux tout éperdu: Monfeigneur, j'ai cru que c'étoit George. Et quand c'eût été George s'écrit Turenne en fe frottant le derrière, il ne falloit pas frapper fi fort.

Nous ne citerons point d'autres anecdotes, parce qu'elles ont fouvent été

rapportées, & parce que l'Auteur, `en voulant les raconter à fa manière, en a fouvent altéré ces traits naïfs & originaux qui les rendoient plus piquantes. Mais nous applaudirons à fa méthode d'appuyer les préceptes d'une morale ardinairement sèche & rebutante, fur des faits hiftoriques, agréables & intẻreffans. L'Auteur, dans plufieurs endroits de fon Ouvrage, donne aux Inftituteurs des confeils généraux fur la conduite qu'ils doivent tenir pour enfeigner l'hiftoire à la jeuneffe. Il leur trace même un plan de cette conduite dans la partie de fon Effai qui a pour titre : Inftruction fur L'étude de l'Hiftoire. Cette inftruction eft fuivie d'une differtation fur l'ordre de l'ancienne Chevalerie, & fur l'éducation que les pères & mères faifoient alors donner à leurs enfans.

Poëfies de Malherbe, rangées par ordre chronologique, avec la vie de l'Auteur & de courtes notes; par M. A. G. M. Q. Nouvelle édition, revue & corrigée avec foin. A Paris, chez J. Barbou, rue des Mathurins.

Malherbe peut être regardé, à juke

titre, comme le vrai reftaurateur de la Langue & de la poëfie Française. Rien ne donne mieux l'idée des obligations qu'elle lui ont l'une & l'autre, que ces vers du Législateur de notre Parnasse, de Boileau, que tout le monde fait par

cœur.

Enfin Malherbe vint, & le premier en France
Fit fentir dans les vers une juste cadence,
D'un mot mis en fa place enfeigna le pouvoir,
Et réduifit la Mufe aux règles du devoir.
Par ce fage Ecrivain la langue réparée,
N'offrit plus rien de rude à l'oreille épurée.
Les stances avec grâce apprirent à tomber,
Et le vers fur le vers n'ofa plus enjamber.
Tout reconnut fes loix, & ce guide fidèle
Aux Auteurs de ce temps fert encor de modèle.
Marchez donc fur fes pas: aimez fa pureté,
Et de fon tour heureux imitez la clarté.

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Un tel éloge a bien de la force dans la bouche du judicieux & févère Defpréaux, qui ne l'eût certainement point. donné s'il n'eût été mérité. Il est certain qu'à quelques tournures près, qui ont vieilli, Malherbe eft encore aujourd'hui un modèle pour l'élégance de la verfification & la pureté de la langue,

ce qui doit paroître prodigieux, lerfqu'o réfléchit qu'il écrivit immédiatement après Baïf & Ronfard. A peine est-it croyable que les ftances que nous allons citer, & qui font une paraphrase du Pleaume CXLV, ayent été composées vers le temps de Henri IV.

N'efpérons plus, mon ame, aux promeffes du monde ;

Sa lumière eft un verre, & fa faveur une onde Que toujours quelque vent empêche de caliner, Quittons ces vanités, laffons-nous de les fuivre 3 C'eft Dieu qui nous fait vivre,

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Envain, pour fatisfaire à nos lâches envies, Nous paffons près des Rois tout le temps de nos

vies

A fouffrir des mépris & ployer les genoux. Ce qu'ils peuvent n'eft rien; ils font, comme nous fommes,

Véritablement hommes,

Et meurent comme nous.

Ont-ils rendu l'efprit, ce n'eft plus que poulière
Que cette majefté fi pompeufe & fi fière,
Dont l'éclat orgueilleux étonnoit l'Univers

Et dans ces grands tombeaux, ou leurs ames

hautaines

Font encore les vaines,

Hls fout mangés des vers.

Là fe perdent ces noms de Maîtres de la terre
D'arbitres de la paix, de foudres de la guerre,
Comme ils n'ont plus de fceptre, ils n'ont plus de
flatteurs;

Et tombent avec eux d'une chûte commune
Tous ceux que leur fortune
Faifoit leurs ferviteurs.

La vie de Malherbe, qui précède le recueil de fes pocfies, contient plufieurs anecdotes.Nous en cirerons quelques unes des moins connues. La plupart font des traits de la caufticité du Poëte, & de fa franchife un peu dure.

Une preuve de fon économie, c'eft le feftin qu'il fit un jour à fix de fes Amis, & où il faifoit le feptième. Tout le repas ne fut compofé que de fept chapons bouillis, dont on fervit à chacun le fien. Cette uniformité de mêts. furprit apparemment les Conviés; mais il fe tira d'affaire en leur difant: Meffieurs, je vous aime tous également, c'eft pour

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