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Mais n'appréhendes rien de mes hardis fermens,
Je faurai de mon Roi refpecter les momens.
Admirateur fecret de la vertu du Sage,

Je craindrai de lui rendre un ridicule hommage 3
Ou bien fi le filence eft trop cruel pour moi,
Si je veux m'affranchir de fon austère loi,
Avant que de porter mes pas dans la carrière,
Je fuivrai d'un ami le confeil falutaire ;
Au milieu des dangers fa voix m'enhardira;
Ou fi je fuis trop foible, il m'en rappellera.

Mais, hélas! ce Mentor ou ce Dieu tutélaire... Il n'eft encor pour moi qu'un être imaginaire. Tendre & fidèle ami, du Ciel heureux préfent,

t'attend,

Que fais-tu loin de moi? Viens! mon ame
Et toi, charmant objet, toi, pour qui je soupire,
Toi, que me peint fans ceffe un amoureux délire,
Toi, par qui j'apprendrai comme l'on doit aimer,
Et par quels fons heureux l'amour doit s'exprimer,
Ne fera-tu toujours qu'un fantôme inutile?
N'éprouverai-je enfin qu'un fentiment ftérile?
Non, j'en ai pour garant ma sensibilité :
Le but peut être loin; mais il eft limité,
A ce flatteur efpoir, Mufes, je m'abandonne,
De ce triple bonheur mon ame s'environne :
Hélas! de mon deftin qui ne feroit jaloux ?
Je vis pour l'amitié, pour l'amour & pour vous,
Par M. de Salleri,

L'HARMONIE,

ODE *.

Verba loquor focianda chordis.

EST-CE-T

Horat. Ode IX. Lib. IV.

ST-CE-TOI, puissante Harmonie,
Dont je fens les divins tranfports!
Eft-ce-toi, qui, de mon génie,
Ranime les foibles refforts?

Ton charme a paffé dans mon ame:
D'une douce & rapide flamme
Tous mes efprits font agités.

C'en eft fait tout ce qui refpire

:

Va connoître aux fons de ma lyre,
Le Dieu qui me les a dictés.

En vain la Nature fommeille
Au fein d'une effroyable nuit;
A ta voix elle fe réveille,

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* Cette belle Ode, dont nous ne rapportons ici que quelques ftrophes, eft imprimée, & fe trouve à Paris chez Monory, Libraire de S. A. S. Monseigneur le Prince de Condé, rue de la Comédie Françoife.

Et le vafte filence fuit.

Les fleurs naiffent; le Ciel s'épure;
Les ruiffeaux, par leur doux murmure,
Témoignent leur ravissement;

Et les oifeaux par leur ramage,
Portent, de rivage en rivage,
Le plaifir & le fentiment.

Nul être dans l'efpace immenfe,
N'échappe à ton heureux lien.
Tout eft foumis à ta puissance,
L'empire du monde eft le tien.
Tu parles, Dodone s'anime.
Les monftres du profond abyfme,
S'empreffent autour d'Arion.

Les cailloux prenant des entrailles,
Viennent s'élever en murailles
Aux tendres accens d'Amphion.

C'eft par un prodige auffi rare,
Qu'aux premiers jours de l'Univers,
Tu fis fortir l'homme barbare
Du fond de fes affreux déferts.
Tiré de fon repos stérile,
L'homme à l'homme devint utile.
Tu polis, tu créas ses mœurs.
Cérès fut alors plus féconde;

Et les premiers Chantres du monde. Furent fes premiers bienfaiteurs.

Quels font les guerriers que Bellonne
A vu reculer dans fes champs?
De ton fein, ô Lacédémone!
Sort-il donc de lâches enfans?
Mais que dis-je l'ardent Tyrthée
Souffle en leur ame épouvantée,
Le feu que refpirent ses vers:
Il ranime leur noble audace,
Comme le Chantre de la Trace
Calme le courroux des Enfers.

Un digne fils du Dieu du Pinde,
Par des charmes auffi puiffans,
Soumet le Conquérant de l'Inde
Au caprice de les accens.
Tantôt Alexandre s'agite;
De fon courage qui s'irrite,
Rien ne peut arrêter les flots;
Et tantôt oubliant les armes,
Il foupire, il verfe des larmes ;
Le Chantre eft vainqueur du Héros.

Voyez fous l'ombre de ces hêtres,
Les Habitans de nos Hameaux,

Célébrer leurs plaifirs champêtres
Aux fons des légers chalumeaux.
Aux cris joyeux qui fe confondent,
Les échos des vallons répondent ;
Et l'allégreffe en cet inftant,
Efface au fond de leurs pensées,
L'empreinte des peines paffées,
Et de celle qui les attend.

Quels maux ne rend point fupportables,
Duchant l'invincible pouvoir?

Eft-il des cœurs fi miférables,
Qu'il n'endorme au fein de l'efpoir?

Au milieu d'un désert aride,

Le Voyageur pâle & timide,

Chaffe l'ennui par

des concerts,

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Telle, durant la nuit obfcure,
La Mufe plaintive des bois
Attendrit toute la Nature

Par les doux accens de fa voix.
Pour l'entendre exhaler fa peine,
Phébé plus lentement promène
Son char émaillé de faphirs,

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