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CHRONIQUE.

Mars-avril 1845.

Dans sa séance annuelle du 3 avril, la société de l'École royale des Chartes a procédé au renouvellement de son bureau et de ses commissions. Ont été nommés :

Président:
Vice-président :
Secrétaire :

Archiviste-trésorier :

Membres de la commission de publication:

Membres de la commission de comptabilité :

M. LACABANE.

M. GUESSARD.

M. DE MAS LATRIE.

M. LE ROUX DE LINCY.

MM. J. QUICH ERAT.

BORDIER.

BOURQUELOT.

MARION (membre adjoint).

MM. DOUET D'ARCQ.
LALANNE.

DELOYE.

Dans la même réunion, la Société a reçu au nombre de ses membres MM. de Rozière, Morelot, Mévil et Ricard, élèves-pensionnaires de l'École des Chartes.

Dans sa séance du 9 avril, la Chambre des députés a délibéré sur plusieurs pétitions, parmi lesquelles nous avons remarqué celle que les journaux ont mentionnée en ces termes : « Le sieur Blanc, domicilié à Marseille, expose que cette ville ayant été prise, le 20 novembre 1423, par Alphonse d'Aragon, ce prince, après l'avoir livrée au pillage, en enleva les archives et les fit transporter à Barcelone, en Espagne; il cite à l'appui de son assertion la Statistique des Bouches-du-Rhône, tom. II, pag. 139, 687, 688, etc. » Le rapporteur de la Chambre a déclaré que la commission n'ayant aucun moyen de s'éclairer sur l'importance, la possibilité et l'opportunité d'une réclamation de ce genre, n'a qu'à proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre des affaires étrangères. Le renvoi a été adopté.

- L'Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen propose pour sujet du prix fondé par feu M. l'abbé Gossier, l'un de ses membres, la question suivante: « Tracer l'histoire du commerce maritime de Rouen, depuis les temps les plus anciens jusqu'à la fin du seizième siècle. » Le prix est de la valeur de 800 francs, et sera décerné, s'il y a lieu, dans la séance publique de l'Académie, au mois d'août 1846.

Notre confrère M. Ad. Duchalais vient d'ajouter à la dissertation qu'il a insérée dans notre dernière livraison, sur une charte de 1138 relative

à l'histoire des vicomtes de Melun, une note supplémentaire dont nous devons dire ici quelques mots. L'auteur annonce que trois monnaies découvertes récemment à Rome, et qui paraissent avoir été frappées en commun par les villes de Provins et de Sens, confirment d'une manière irrécusable son explication des légendes Rildunis-cato et Seeionis-citi. Il ajoute que le type des monnaies champenoises, prises par quelques érudits pour un peigne, par d'autres pour une tête déformée, est le monogramme dégénéré du roi Eudes, monogramme dont on avait déjà constaté l'emploi à ChâteauLandon et à Étampes, villes placées, comme Provins, sous la dépendance ecclésiastique de Sens.

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Depuis quelque temps, les journaux publient une annonce ainsi conçue: Histoire des ducs d'Orléans de la maison de Bourbon, par M. Flobert, élève de l'École des Chartes. La qualification prise par l'auteur est de nature à induire le public dans une erreur que doivent dissiper les vrais élèves de l'École des Chartes, ceux qui peuvent sérieusement s'intituler ainsi. Il y a à l'École des Chartes un cours préparatoire dont l'entrée est ouverte à tout venant, pourvu qu'il soit bachelier ès-lettres et âgé de moins de vingt-cinq ans. Ce cours, que l'on peut suivre à sa fantaisie, avec ou sans profit, est terminé par un examen que l'on a le droit de subir ou d'esquiver, et qui seul confère aux plus dignes le titre sérieux d'élèves de l'École des Chartes. On comprend que ce titre, obtenu au concours, ait une certaine valeur et soit invoqué comme une garantie de capacité spéciale. Mais que l'on veuille se faire une recommandation d'avoir reculé devant l'examen dont nous parlons, ou de l'avoir subi sans succès, voilà ce qui se comprend plus difficilement; et c'est pourtant le cas de M. Flobert et de plusieurs autres. Si la qualité de ces messieurs ainsi expliquée paraît encore bonne à prendre, si le public veut bien y attacher quelque signification, nous ne saurions le trouver mauvais; mais nous soupçonnons que M. Flobert, en particulier, aimerait mieux le texte sans la glose.

Dans une autre annonce également reproduite par plusieurs journaux, on a avancé que les élèves de l'École des Chartes sont les seuls généalogistes officiels de l'époque. Or, de généalogistes il y en a fort peu à notre époque; mais de généalogistes officiels, il n'y en a point, pas plus à l'École des Chartes qu'ailleurs. Que s'il prend envie à un élève de cette école de se faire généalogiste, il en a le droit comme tout le monde; mais l'autorité de ses travaux ne sera imputable qu'à son érudition personnelle. Voilà la vérité qu'il était bon de rétablir, afin que personne ne pût nous soupçonner d'être complices de ces ridicules annonces.

-

Sur la proposition de M. le Ministre de l'Instruction publique, M. Le Roux de Lincy, notre confrère, vient d'être nommé chevalier de la Légion d'honneur.

NOTICE

SUR UNE

CHRONIQUE ANONYME

DU TREIZIÈME SIÈCLE (1).

Le manuscrit 4936 de la Bibliothèque royale (olim 5234) renferme une chronique anonyme qui embrasse, dans un petit nombre de feuillets, tous les temps depuis la création du monde jusqu'à l'année 1244 de l'ère vulgaire, et même jusqu'à l'Antechrist et au jugement dernier. Cet opuscule se compose d'une préface et de quatre-vingts chapitres : sept de ces chapitres sont consacrés à des matières qui n'ont rien d'historique; les autres ne présentent que des récits fort arides, du genre de ceux que l'on rencontre dans les chroniques abrégées du moyen âge: c'est assez dire qu'ils n'ajouteraient rien de bien important à nos connaissances, quand même ils seraient inédits; mais ils sont ⚫ tous publiés depuis longtemps, et la préface seule pourrait mériter cet intérêt passager qui s'accorde à une découverte littéraire.

L'auteur y expose en peu de mots les motifs qui l'ont engagé à composer ce manuel historique. Il avait précédemment réuni dans un volume ce qu'avaient dit avant lui tous les historiens et tous les auteurs dont il avait pu connaître les écrits; mais ce volume était fort étendu, et, quelque intérêt qu'il présentat, les uns craignaient de s'engager dans une longue lecture, les autres reculaient devant des frais de copie trop considérables. Il s'est

(1) Cette notice a été lue à l'Académie des inscriptions, le 25 avril 1845.

I. (Deuxième série. )

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donc décidé à extraire de ce grand ouvrage une espèce de manuel, où il s'est proposé d'effleurer tous les temps, et de noter en peu de mots les événements les plus remarquables. Il a donné à cet opuscule le titre de Mémorial, et l'a divisé en quatre-vingts chapitres.

Voici le texte de cette courte préface :

« Quoniam, ut olim Scriptura clamat, Generatio præterit et generatio advenit, terra vero Ecclesiæ in æternum stat (1), parvitati nostræ complacuit eundem Ecclesiæ statum per cunctas seriatim præteritas generationes, et eorum qui ab initio usque hodie Dei populo præfuerunt, videlicet patriarcharum, ducum, judicum, regum, imperatorum successiones, ac per singula tempora totius orbis eventus notabiles diligenter ad ædificationem ac recreationem diligentium retractare nec non et de futuris temporibus superaddere, cunctaque pene quæ de hujusce modi rebus sive a diversis hystoriographis sive ab actoribus ceteris ante nos dicta fuerunt, quorum scripta vel duntaxat ad manus nostras venire potuerunt, in unum volumen abbreviando singula coarctare. Verum quia hoc ipsum opus plerique propter suî utilitatem ac voluptatem pariter appetentes, sed studiosi laboris impatientes, solam in eo voluminis magnitudinem abhorrent propter legendi fastidium, nonnulli vero etiam hoc sibi magno opere transcribi cupientes in expensis notariorum pecuniæ timent dispendium, omnibus autem pene gratum est brevitatis compendium, michi tandem utile visum est ab illo grandi volumine libellum manualem excerpere in quo totam seriem temporum summatim perstringens per singulos temporis articulos gesta famosa breviter annotarem, et ejus exemplar fratribus et amicis nostris petentibus non negarem. Quem videlicet libellum Memorialis vocabulo, eo quod omnium temporum memoriam brevem continuat, appellari de- . crevi, ac per LXXX capitula subjecta distinxi. »

Les termes seuls de cette préface anonyme en désignent assez clairement l'auteur, pour qu'on n'hésite point à reconnaître le plus célèbre compilateur du treizième siècle, cet homme avide et insatiable de lectures, selon l'expression de M. Daunou (2), librorum helluo, comme disent plusieurs de ses biographes, Vincent de Beauvais, en un mot. Mais, pour lever toute espèce

(1) Ecclesiastes, I, 4.

(2) Hist. litt., t. XVIII, p. 455.

de doute, j'ajouterai bientôt à cette première présomption une preuve incontestable, qui me sera fournie par un livre authentique de ce laborieux dominicain. En attendant, je dis que Vincent de Beauvais est l'auteur de cette préface anonyme; quant à l'ouvrage considérable auquel il fait allusion, c'est, à n'en pas douter, son Speculum historiale, qui occupe plus de 1300 pages in-folio à deux colonnes dans l'édition de 1624, et qui, selon le calcul de M. Daunou, se compose de 3,793 chapitres. Un abrégé, qui n'en renfermait pas plus de 80, diminuait donc de beaucoup et les longueurs de la lecture, et les frais de copie que redoutaient quelques contemporains de l'auteur. Malgré ce double mérite, le Mémorial de Vincent de Beauvais est resté inconnu, tandis que les copies de sa vaste compilation n'ont pas cessé de se multiplier, jusqu'au moment où l'imprimerie s'est chargée de les reproduire et de les répandre à profusion. Quoique ce résultat s'explique assez par la valeur relative des deux ouvrages, on peut, je crois, en donner une autre raison : c'est que les quatrevingts chapitres du Mémorial se retrouvent textuellement, sauf quelques variantes dont je parlerai tout à l'heure, dans le Speculum naturale, au livre trente-deuxième et dernier, dont ils forment les chapitres 22, 26 à 100, et 102 à 106 (1). Cette circonstance, qui prouve d'une manière évidente que Vincent de Beauvais est l'auteur des quatre-vingts chapitres du Mémorial, explique aussi pourquoi cet opuscule est tombé dans l'oubli. Il est vraisemblable, en effet, qu'on aura attaché peu de valeur aux exemplaires particuliers d'un texte qui se trouvait reproduit ailleurs, moins le titre et la préface. La chronique abrégée a donc cessé de former un ouvrage distinct, pour devenir un fragment en quelque sorte inaperçu du Speculum naturale.

(1) Le chapitre 1er du Mémorial, intitulé De pulchritudine temporali, fait partie du chapitre 22 du trente-deuxième livre du Speculum naturale, qui a pour titre De tempore et cursu ejus. Les titres des autres chapitres sont les mêmes dans les deux ouvrages, sauf de légères variantes, et ils se correspondent dans l'ordre suivant les chapitres 26 à 94 du Speculum naturale reproduisent les chapitres 2 à 70 du Mémorial; viennent ensuite les chapitres 95 et 96, qui forment dans le Mémorial le chapitre 71; puis les chapitres 97 à 100, qui portent les numéros 72 à 75; mais le chapitre 75 du Mémorial ne reproduit qu'une portion du chapitre 100 du Speculum naturale; le chapitre 101 manque dans le Mémorial; enfin la concordance se rétablit pour les chapitres 102 à 106, qui répondent dans l'autre ouvrage aux chapitres

76 à 80.

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