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François, que lui-même et Fra Liberato ont vainement réclamée? A cette dernière question, M. Tocco croit pouvoir faire la réponse suivante. L'approbation si longtemps désirée s'obtient le jour où les Fraticelles se décident à éliminer de leur sein ceux d'entre eux qui s'obstinent à ne voir en Jean XXII qu'un faux pape, et qui flétrissent aussi de ce nom ses successeurs, élus par des cardinaux, dont la plupart doivent leur nomination à ce même pontife (voir p. 149).

On voit du reste, d'après ce qui vient d'être dit, comment, grâce à la connaissance toute spéciale et profonde qu'il a de ces matières, M. Tocco a pu, dans un nombre restreint de pages, donner une forme définitive à la solution de quelques-uns des points les plus difficiles de l'histoire franciscaine, et poser en même temps avec netteté plusieurs des questions sur lesquelles, à propos de cette même histoire, la science doit encore réserver son jugement. C'est là un nouveau service dont on ne saurait lui savoir trop de gré. N'oublions pas d'ailleurs de remarquer encore, qu'en écrivain amoureux des documents inédits et qui en sait la valeur, il n'a pas manqué d'en joindre quelques-uns à son œuvre. C'est là, en effet, l'objet d'un appendice, où se rencontrent, avec le prologue d'une traduction italienne du livre de Jean Climaque, emprunté à la Bibliothèque Laurentienne, divers fragments du Breviloquium d'Angelo Clareno, tirés d'un manuscrit de la Bibliothèque Saint-Marc de Venise, et deux lettres du même personnage, fournies par un volume de la Bibliothèque nationale de Florence.

Charles MOLINIER.

Paul FREDERICO. Corpus documentorum Inquisitionis haereticae pravitatis neerlandicae. Verzameling van stukken betreffende de pauselijke eu bisschoppelijke Inquisitie in de Nederlanden; tweede deel, stukken tot aanvulling van het eerste deel (10771518). Gent, J. Vuylsteke; 'S-Gravenhage, Martinus Nijhoff, 1896. In-8°, xxII-444 pages.

On ne l'a pas oublié peut-être, sous le même titre que nous venons de reproduire, M. Paul Fredericq a publié, en 1889, au sujet de l'Inquisition dans les Pays-Bas durant le moyen âge, un premier recueil de textes très important, et tel qu'il serait fort à souhaiter que tous les pays de l'Europe, où s'est exercée la répression inquisitoriale, en eussent de semblable. Depuis cette époque, c'est, il semble, sur les études auxquelles l'avait forcé l'élaboration de l'ouvrage dont nous venons de rappeler le souvenir, que s'est concentrée plus spécialement l'activité scientifique, d'ailleurs très vive, de l'auteur. Du moins pourrait-on le croire d'après la nature des travaux qui l'ont occupé dans ces cinq ou six dernières années, aussi bien ceux qu'il a déjà mis au jour, comme la première partie de son Histoire de l'Inquisition néerlandaise, parue en

1892, que ceux dont il a annoncé lui-même l'apparition prochaine. Nous voulons dire la deuxième partie de cette même histoire de l'Inquisition, ainsi que la continuation, pour le xvIe siècle et l'âge de la Réforme, du Corpus dont nous avons parlé tout d'abord. Aussi est-il arrivé à M. Fredericq ce à quoi on pouvait s'attendre. Engagé profondément dans un certain ordre de recherches, il a rencontré peu à peu toute une série de textes se rattachant intimement à ceux dont il avait composé déjà le volume édité par lui en 1889. Ce sont ces textes découverts plus récemment qu'il a eu l'heureuse idée d'imprimer à leur tour. Avec les précédents, ils constituent, au sujet de la lutte soutenue par l'Église contre l'hérésie dans les Pays-Bas, durant le moyen âge et jusqu'à la seconde phase de répression qu'ouvrent les temps modernes et le règne de Charles-Quint, un ensemble aussi complet et aussi riche qu'on peut le désirer.

Ce n'est pas, d'ailleurs, que les documents nouveaux, au nombre de deux cents environ, réunis dans cet appendice, diffèrent, ni par leur nature, ni, cela va sans dire, par la manière dont ils ont été publiés, de ceux auxquels ils servent de complément. Les sources en sont les mêmes. Ce sont, en premier lieu, un certain nombre de dépôts publics, archives ou bibliothèques. Nous mentionnerons à cet égard les archives royales de Bruxelles, les archives d'État de Gand, de Bruges, de Tournai, la bibliothèque de la Haye, la Bibliothèque nationale de Paris. A ces dépôts ont été empruntés spécialement les textes inédits. Quant aux autres, ils ont été extraits d'une foule d'imprimés de tout genre, espacés dans une période de près de quatre cents ans grandes collections ayant trait à l'histoire politique ou religieuse, bullaires, inventaires de documents, chroniques, publications de tout genre dues à l'érudition moderne1.

On comprendra que nous n'ayons pas le dessein d'essayer l'énumération, si abrégée qu'elle soit, d'une telle foule de pièces. Nous nous bornerons à indiquer celles qui, par leur nombre, forment de véritables groupes, offrant sur telle ou telle question ou bien sur tel ou tel personnage une somme considérable de renseignements. A ce point de vue, nous citerons d'abord plusieurs textes se rapportant au début du XIIe siècle et au fameux hérétique Tanchelm (nos 4-7). Dans le même siècle, nous indiquerons encore ceux qui concernent un personnage longtemps énigmatique, et sur lequel M. Fredericq lui-même a contribué tout récemment à faire la lumière, le prêtre liégeois Lambert le Bègue (nos 11-16)2. Aux précédents, nous en joindrons, pour le siècle suivant

1. Voir, du reste, pour plus amples détails sur ce point, la bibliographie donnée par M. F. lui-même, sous ce titre : Aangehalde handschriften en drukwerken, p. 314-323.

2. Sur Lambert le Bègue, voir les travaux suivants de M. F. : les Documents de Glasgow concernant Lambert le Bègue (Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 1895, 3° série, t. XXIX, no 1); Note complémentaire sur les docu

REV. HISTOR. LXII. 2o FASC.

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et pour les années 1235 et 1236, quelques-uns ayant trait à un dominicain et inquisiteur de cette époque, le trop célèbre Robert le Bougre (nos 23-28). A l'ouverture du xive siècle, nous noterons une série de morceaux se rattachant au procès des Templiers (nos 34-36, 40-42).

Toutefois, les groupes de documents que nous voulons indiquer maintenant semblent avoir encore plus d'importance. Un premier, daté des pontificats de Jean XXII, de Benoît XII, de Clément VI, a pour objet les Béguines des Pays-Bas (nos 44-54). Un autre, qu'enferment tout entier les deux années 1245 et 1250, concerne les fanatiques si connus sous le nom de Flagellants (nos 61-89; voir aussi nos 117, 118 pour une renaissance en Flandre de la même folie dans l'année 1400). De celui-ci on peut en rapprocher un troisième, qui nous éclaire sur une secte plus absurde encore que les Flagellants, et dont les représentants, à cause de leurs démonstrations étranges, ont reçu des contemporains le nom significatif de Danseurs (nos 93-104). Un dernier enfin nous initie aux rêveries inoffensives des Frères de la vie commune et de leur maître Gérard Groot (nos 105-107, 109-114, 119, 120). Citons encore, au terme de ces indications rapides, tout un ensemble de textes bien faits pour nous éclairer sur le trouble profond des consciences, sur le désarroi religieux au temps des conciles sur lesquels s'inaugure le xve siècle. Ces textes, ce sont ceux où se trouvent tout au long deux curieuses affaires, celle d'un moine augustin du diocèse de Liège et du couvent de Tournai, Nicolas Serrurier (nos 127, 132, 139, 140, 142, 147-150, 153), ainsi que celle d'un dominicain du couvent de Groningue, Mathieu Grabov (nos 133-138). A tout cela joignons, pour en finir, quelques documents qui nous montrent, aux dernières années du même siècle, des Vaudois et des Vaudoises, brûlés à la fois pour leurs opinions religieuses et pour le crime prétendu de sorcellerie, et victimes du trouble qui, gagnant à ce moment l'Église, ne lui laisse, comme il est arrivé déjà à plusieurs époques de son histoire, qu'une notion indistincte de la réalité.

Nous arrêterons là ces indications, auxquelles il ne nous reste, d'ailleurs, que peu de chose à ajouter. Aucun de ceux qui connaissent M. Fredericq ne s'étonnera sans doute si nous affirmons que son œuvre nouvelle porte, à notre sens, le témoignage du même soin qu'il met dans tous ses travaux. Cet appendice du recueil paru, il y a sept ans, offre en tout cas le même appareil scientifique que l'on trouve chez son aîné des éclaircissements parfois très étendus, en tête de chaque texte, afin d'en faciliter l'intelligence, des notes au bas des pages dans le même but, une table analytique aussi complète que possible. Mentionnons de plus une liste des inquisiteurs pontificaux et épiscopaux dans les Pays-Bas de 1175 à 1517, liste qui augmente d'un nombre

ments de Glasgow concernant Lambert le Bègue (Ibid., ut supra, no 6). Sur ces travaux, voir aussi le jugement de M. Hermann Haupt, Zeitschrift für Kirchengeschichte, t. XVII, 1, 2.

considérable de noms la série de ces personnages insérée déjà dans le premier recueil. N'oublions pas enfin un détail qui n'est pas sans importance pour le maniement commode de tant de textes historiques accumulés. C'est une double numérotation, dont le second signe classe les textes dont il s'agit à la suite de ceux qui concernent le même sujet et qui figurent dans le volume publié antérieurement. Cet artifice offre un avantage qu'on devine sans peine. Il permet de fondre en quelque sorte les deux publications l'une dans l'autre.

Charles MOLINIER.

Eine mailændisch-thüringische Heiratsgeschichte aus der Zeit Koenig Wenzels, von Prof. K. WENCK. Dresde, Bænsch, 1895. In-8°, 42 pages.

Les projets matrimoniaux entre familles princières au xive siècle furent presque toujours le prix, la condition, ou le point de départ d'alliances politiques. Les États étaient alors considérés comme des biens de famille, et les dots des princesses n'avaient pas seulement pour effet d'accroître le territoire de leur époux, elles ouvraient en outre souvent la perspective de prétentions héréditaires avantageuses pour l'avenir. On espérait aussi que la jeune épouse deviendrait comme un ambassadeur permanent de son ancienne patrie dans sa nouvelle. C'est là ce qui explique que bien des projets matrimoniaux aient échoué, c'est là aussi ce qui rend particulièrement intéressants ceux qui ont réussi. Un savant professeur de Pavie, G. Romano, avait en 1891, dans un article de l'Archivio storico lombardo, attiré l'attention sur le mariage d'une princesse milanaise avec un landgrave de Thuringe de la maison de Wettin, mariage curieux puisque les époux ne se virent jamais, et mariage propre non seulement à piquer la curiosité, mais à exercer la sagacité des historiens, puisque les documents qui nous en parlent se contredisent, et qu'un certain nombre d'entre eux défigurent certainement la vérité.

Un jeune professeur de Marbourg, M. Wenck, a tenté de reprendre ce problème: il croit pouvoir interpréter les textes autrement que M. Romano, qui n'a pas su, d'après lui, débrouiller la situation compliquée des partis adverses à cette époque, et n'a pas vu de quel imbroglio politique était sorti ce mariage. La belle Lucie Visconti, l'héroïne de cette histoire, était une fille de ce Bernabò Visconti, qui fut dans la seconde moitié du xive siècle un redoutable adversaire du pape, de l'empereur et des princes italiens. Il s'agissait en 1385, comme le montre très bien M. Wenck, de créer une étroite alliance entre les Bernabò, les princes d'Anjou et la France, et de reprendre la guerre contre Charles de Durazzo. Mais Bernabò et ses deux fils furent faits prisonniers par Galéas Visconti, et durent subir le sort qu'ils pensaient infliger à ce dernier. Complétant les recherches de M. Jarry (Bibl. de l'École des

chartes, 1892, p. 213-505), M. Wenck nous montre en Galéas un diplo mate très habile, et nous fait comprendre à la fois les conditions du traité qui fut conclu avec la France le 30 mars 1398 et les efforts de l'empereur Wenceslas pour s'attacher la maison de Wettin en provoquant une union entre cette famille et celle des Visconti. Le 2 novembre 1398, pleins pouvoirs furent octroyés à Paganius de Biassono pour élaborer un projet de contrat entre Lucie Visconti et l'un des princes de la famille de Wettin, soit Frédéric, fils aîné du margrave de Misnie, Frédéric le Sévère, soit un de ses frères, Guillaume ou Georges, soit enfin Frédéric le Pacifique. Mais la main de Lucie avait été déjà demandée à cette époque par un puissant seigneur anglais, par le comte Henri de Derby qui, provoqué en duel, envoia, nous dit Froissart, grans messages en Lombardie devers messire Galéas pour avoir des armures à son point et à sa volonté. » L'auteur n'a pu dissiper toutes les obscurités qui planent sur cette romanesque équipée, qui fit échouer l'entrevue qui eut lieu à Forchheim, dans la première quinzaine du mois de mai 1399, entre le margrave de Misnie et les princes électeurs rhénans, entrevue qui montre bien l'intérêt tout politique qu'on attachait au mariage de Lucie. Dès le 28 juin 1399, elle était mariée par procuration à Frédéric de Misnie. On sait que la protection accordée par Wenceslas aux Visconti amena bientôt la déposition de ce dernier. On obligea son successeur, le comte palatin Robert, à révoquer Galéas comme duc de Milan et à faire rentrer le Milanais dans la mouvance de l'Empire. C'est à ce moment surtout qu'on voit clairement apparaître les conséquences du mariage contracté dix ans auparavant par Louis d'Orléans avec Valentine Visconti.

L'expédition tentée par Robert en 1400 révèle son impuissance. Il fut éconduit par le pape après s'être laissé jouer par Galéas, et, si ce dernier n'était mort subitement le 3 septembre 1402, peut-être eût-il fait faire un grand pas à l'unité italienne. Ses fils étant incapables de le remplacer, une réaction se produisit. Lucie Visconti fut en quelque sorte la victime de cette politique avortée. Henri de Derby devint roi d'Angleterre sous le nom de Henri IV, et peu de mois après la mort de Galéas, le 7 février 1403, nous le voyons épouser la duchesse Jeanne de Bretagne. Quelques jours après, le 24 février, ainsi qu'il résulte d'un manuscrit de la bibliothèque Trivulcienne à Milan, Lucie jurait sur les saintes Écritures, devant la veuve de Galéas et six témoins, qu'elle n'avait consenti à épouser le fils du margrave de Misnie que sous la pression de la terreur que lui inspirait Galéas, mais avec l'intention bien arrêtée de ne pas devenir sa femme. Elle ajouta qu'elle avait beaucoup pleuré en donnant son assentiment, et avait déclaré en présence d'un grand nombre de personnes qu'elle avait agi contrainte et forcée, et qu'elle avait enlevé sa bague de fiancée et ne se regardait pas comme mariée. Le 14 juillet 1403, elle donnait plein pouvoir à Biassono de négocier pour elle un nouveau mariage qui d'ailleurs n'aboutit pas. Elle épousa finalement le comte Édouard de Kent qui mourut pré

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