Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

importante qui devoit fe traiteren préfence du Sacré Collége, M. le Cardinal de Rohan s'étant apperçu qu'on s'écartoit du point de la queftion, prit la parole en latin, & fon avis forma celui des autres. Il charma fes auditeurs par la facilité de l'expreffion, en mêmetemps qu'il les perfuada par la force du raifonnement. Les Cardinaux étrangers

que

la vacance du S. Siége avoit attirés à Rome, reçurent le Chapeau dans un Confiftoire folemnel. M. le Cardinal de Rohan qui fe trouvoit à leur tête, fit au nom de tous un difcours hautement applaudi de cette augufte affemblée. Cet art de manier la parole, d'affujettir au ton du fujet un ftyle toujours noble & pur, eft un des traits qui caractérisent M. le Cardinal de Rohan. Il étoit à ce titre feul un des principaux ornemens de l'Académie Françoise *. Le Roi l'avoit mis trois ans auparavant au nombre des Honoraires de celle des Infcriptions & Belles-Lettres. Les Régiftres de cette Compagnie parlent fouvent de l'ardeur & de l'émulation qu'il y entretenoit par fa préfence, & par le goûr

* Voyez les Lettres fur quelques Ecrits de ce Temps, Tome II page 93.

qu'il marquoit pour les travaux des Académiciens. Il aimoit à encourager les gens de Lettres, & à leur procurer des fecours dans fa Bibliothèque, l'une des plus nombreuses & des mieux choifies qui foient en Europe. Celle de M. de Thou, poffédée depuis par M. le Préfident Menars, en compofe le fonds. Elle étoit prête à fe difperfer en 1701; & la France auroit vû paffer dans des mains étrangères une partie de ce tréfor amaffé par un de fes plus grands hommes, fi le goût de M. le Cardinal de Rohan pour les Lettres ne nous l'eût confervé. Il l'acheta dans le fort d'une guerre opiniâtre & ruineufe, & il n'a ceffé d'augmenter cette riche collection. L'accroiffement qu'elle a reçu par fes foins eft fi confidérable, que l'ancien fonds en fait aujourd'hui la moindre partie. Le nombre & la rareté des Livres qui forment cette Bibliothéque, l'ordre même dans lequel ils font difpofés; tour annonce le goût de celui qui la poffédoit, & c'est moins pour lui que pour elle qu'il femble avoir conftruit le magnifique Palais dont elle Occupe une partie. Elle étoit autrefois ouverte à des Conférences où re

gnoient, fous fes aufpices, la politeffe, l'efprit & l'erudition. Dom Calmet, Dom Bernard de Montfaucon, le Pere de Tournemine, & plufieurs autres de nos plus célébres littérateurs s'y trouvoient à des jours marqués pour s'entretenir de matières de critique ou d'hiftoire. Le Cardinal préfidoit quelquefois lui-même à ces fçavantes affemblées où chacun, obligé de remplir à fon tour une féance entiere, choififfoit à fon gré le fujet de fa differtation.

Parmi le grand nombre de Mémoires académiques dont j'ai préfentement à vous rendre compte, je ne m'arrêterai qu'à quelques-uns de ceux qui préfentent des traits plus agréables ou plus curieux. De ce nombre eft une Differtation fur les miroirs des Anciens, par M. Menard, Confeiller au Préfidial de Nifmes. Les premiers miroirs artificiels furent de métal; une preuve inconteftable de leur antiquité, c'eft l'endroit de l'Exode où il eft dit qu'on fondit les miroirs des femmes & qu'on en fit un baffin d'airain. On en fit depuis qui étoient de fer bruni, & d'autres mêlés d'airain & d'étain. Ceux qui fe faifoient à Brindes pafférent long-temps

pour les meilleurs de cette dernière efpèce. Mais on donna enfuite la préférence à ceux qui étoient faits d'argent. Les Anciens ornoient de ces miroirs les murs des appartemens; ils en incruftoient les plats dans lefquels on fervoit les viandes fur la table. Il est d'autant plus étonnant qu'ils n'ayent pas connu l'art de rendre le verre propre à conferver la représentation des objets en appliquant l'étain derrière les glaces, que les progrès de la découverte du verre furent chez eux pouffés fort loin. On ignore le temps où l'on a commencé à faire des miroirs de cette matière. On fçait feulement que les premiers fortirent des verreries de Sidon.

Il y a en France plufieurs Eglifes anciennes fur le portail defquelles on voit, avec d'autres figures, celle d'une Reine dont l'un des pieds finit en forme de pied d'oye. M. l'Abbé le Beuf recherche quelle pouvoit être cette Reine nommée la Reine Pédauque, des mots latins pes, pied, & anca, qui dans la baffe latinité fignifie oye. Le Père Mabillon a penfé que la Reine au pied d'oye pouvoit bien être la Reine Clotilde, femme de Clovis, s'imaginant

que ce défaut corporel étoit un emblême employé par le Sculpteur pour marquer la prudence de cette Princeffe, les oyes du Capitole ayant acquis à leur efpèce le privilège d'être regardée comme le fymbole de la vigilance. M. l'Abbé le Beuf réfute très-férieufement cette opinion; il cherche la Reine Pédauque ailleurs que parmi les Reines de notre Monarchie, & il fubftitue à Clotilde la Reine de Saba. Elle eft représentée avec un pied d'oye, dit le docte Académicien, premièrement parce que cette Princeffe aimoit tellement le bain qu'elle fe plongeoit tous les jours dans la mer; en fecond lieu, lorfqu'elle fit fon entrée à Jérufalem & qu'elle fut conduite auprès du Roi Salomon, ce Prin ce alla l'attendre dans un appartement tout de crystal. « La Reine en y entrant s'imagina que le Roi étoit dans l'eau ; » & pour le mettre en état de passer, » elle leva fa robe. Alors, dit le Para-phrafte Caldéen qui rapporte ce fait, » Salomon voyant fes pieds qui étoient hideux:Votre visage,lui dit-il, a la beau»té des plus belles femmes; mais vos jam»bes & vos pieds n'y répondent guères.lleft aifé de concevoir, continue M. l'Abbé

"

رو

« VorigeDoorgaan »