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res. Ils font maffacrer toutes les perfon nes fufpectes. La defcription eft affreufe. Les termes de l'auteur font plus énergiques que ceux que je pourrois employer. Dandelot dit en arrivant : « Nous avons été appellés ici (à Amboife) à d'étranges fpectacles. On a » rencontré hier au foir dans la forêt quantité de gens de pied qui étoient » armés; la plûpart ont été taillés en piè »ces, & ceux que l'on a fait prifon»niers viennent d'arriver ici liés & traî nés à la queue des chevaux, & fur le

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champ ils ont été pendus aux créneaux » des murs du Château, bottés & épe» ronnés. Pendant qu'on les exécutoit, » on a vû arriver le corps de la Renau » die que Pardaillan avoit attaqué dans "la forêt de Chateau-Renaud; la Re"naudie l'avoit bleffé, & le valet de » Pardaillan l'a tué d'un coup d'arque»bufe. Le corps de ce malheureux a » été coupé par quartiers, & expofé fur » des pieux aux environs de la ville. Cependant tous les prifonniers du Duc » de Nemours ont été tirés des prifons ; " on a noyé les uns; on a pendu les autres. Ce qui ajoûte à l'horreur, c'est que les Guifes ont eu foin que les

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frères du Roi fuffent préfens à ces fpectacles, fans doute afin d'accoutumer de bonne heure ces jeunes Prin»ces à répandre le fang de leurs fujets; » tous les Seigneurs & toutes les Dames ❝ de la Cour font aux fenêtres pour voir » les exécutions; la feule Ducheffe de Guife*, defavouant fon mari & fon beau-frère, verfe des larmes, & tâche » de calmer la Reine... A quatre lieues à » la ronde, on maffacre fans diftinction > tous les hommes que l'on rencontre, » & il n'y a point de village où il ne >> s'en trouve trente, quarante, plus ou » moins. Le Maître des Eaux & Forets a eu ordre de tuer fans forme de procès "tout ce qui s'offriroit à lui, &, fous » ce prétexte, de pauvres marchands ont été volés & affaffinés; on voit entrer par toutes les portes de la ville des prifonniers qui reçoivent la mort en arrivant les rues font inondées de ; "fang, & les corps font jettés dans la » Loire qui en eft couverte. Un de ces » malheureux, prêt à être exécuté, a trempé fes mains dans le fang de fes "compagnons qui venoient de mou"rir, & les élevant vers le Ciel : Voilà, Elle étoit fille du Duc de Ferrare,

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dit-il, ó Dieu très-bon & très-puiffant, » le fang innocent de ceux qui font à » vous, dont vous ne laifferez pas la mort impunic. » L'Amiral en parle à la Reine elle-même dans des termes qui auroient pû lui donner des remords, fi elle en eût été fufceptible. « Eh quoi," » Votre Majesté n'eft-elle pas accablée des horreurs qu'elle voit? Eft - ce re»gner que de regner par le fang, & nos » maîtres font ils nos bourreaux ? Quoi, Médicis, l'ornement de la Cour du feu Roi, le charme de tous les honnêtes gens, l'afyle des ma heureux, » la protection de tous ceux qu'oppri"moit l'infâme Diane, Médicis, affez inftruite pour ne pas confondre la fuperftition avec la religion véritable, c'eft elle qui fe prête à des forfaits inouis, qui permet que l'on fouille le trône de fon fils du fang de fes plus » fidelles fujets, qui fouffre que fes pro»pres enfans jouiffent des cris de ces » infortunés que l'on traîne à la mort » fans les entendre, & dont les derniè»res paroles appellent en vain le nom

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d'une Reine qui fut autrefois fi jufte » & fi compatiffante ».Tout cet Acte, le plus beau de la pièce à mon avis, est

rempli de grands tableaux véritablement tragiques.

Dans le quatrième Acte la Cour fe tranfporte à Fontainebleau. La Ducheffe de Guife tâche de rappeller fon mari & fon beau-frère le Cardinal à des fenti-. mens plus humains; la Ducheffe de Montpenfier fait les mêmes efforts auprès de la Reine. Cette Princeffe eft touchée moins des représentations de la Ducheffe que de fes propres intérêts. Elle eft jaloufe elle-même du crédit des Gaifes, & choquée de leur infolence.. Elle cherche à réunir tous les partis. Elle dreffe un Edit en faveur des Proteftans, & rend fon amitié & fa protection au Prince de Condé. Dans le même temps on apprend que ce Prince a foulevé les Provinces, & qu'il s'avance à la tête d'une armée. Alors tout change de face.

La fcène du cinquième Acte eft à Orléans. Le Prince de Condé, eft arrêté. On inftruit fon procès. Les Guifes pourfuivent fon jugement avec fureur; ils veulent faire périr en même temps le Roi de Navarre. Au milieu de tous ces troubles, la Reine ne fçait à quel parti fe livrer; elle craint également les Guifes & les Princes du Sang; elle s'attendrit

pour le Prince de Condé ; les Guifes la ra mènent à fes premiers fentimens. Laffe enfin de toutes ces perfécutions, elle fe réfout à rendre la liberté au Prince de Condé, & à s'en faire un appui. Pendant toutes ces négociations, le Roi François 11 tombe malade, meurt, & cet événement ouvre la prison du Prince de Condé, & finit la Tragédie.

C'eft ainfi, Monfieur, que l'auteur nous tranfporte dans les temps & dans les lieux où les événemens remarquaquables qu'il décrit fe font paffés. On voit, on entend les principaux perfonnages; on reconnoît leurs mœurs, leurs motifs, leurs paffions; on eft frappé de la vérité de leurs caractères, & l'on eft d'autant plus fortement affecté, qu'à l'exception de l'entretien fi bien imaginé de Gauric avec la Reine, il n'y a pas un fait, une circonftance, une opinion, un sentiment, qui ne foient fondés dans l'histoire. On a porté l'exactitude au point d'indiquer en marge les auteurs fur le témoignage defquels on s'appuie. Vous fentez maintenant, Monfieur, tous les avantages de cette nouvelle manière d'apprendre les faits. L'Hiftoire nous inftruit à la vérité, mais

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