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par Charles V jufqu'à la mort de ce Prince, puifque les Rois & les Valets ne font point repréfentés dans ce jeu avec cette forte de fouliers; ce qu'on n'auroit cependant pas manqué de faire, s'ils euflent alors été en ufage. so Les Rois font peints fur les Cartes, vêtus d'une robe fourrée d'hermine, avec la couronne fur la tête. Charles VI trouva cette coutume trop gênante; il négligea ces fignes extérieurs de la Royauté. L'inventeur du jeu des Cartes les auroit négligés de même, s'il eût vêcu fous le regne de ce Prince. 6°. Avant Charles VI les Chevaliers ne portoient point de plumes fur leurs bonnets; mais fous ce Monarque & fes fucceffeurs, cet ornement a toujours été en ufage. Or, comme les Valets de Cartes, qui repréfentent les Seigneurs de la Nation, n'ont point de plumes, c'eft une nouvelle preuve que les Cartes ont été inventées avant le regne de Charles VI. 7°. Enfin, & cette derniere raifon eft convaincante, la Chronique de Petit-Jéhan de Saintré, nous fait voir les Cartes en ufage parmi nous dans le temps qu'il étoit Page de Charles V. Je fupprime plufieurs autres preuves qui ne me paroiffent pas

d'un grand poids, & dans lefquelles l'autear fuppofe toujours, avec raison, que les Cartes ont été trouvées en France, & que c'eft de nous que les Peuples voifins les ont prifes. Cela fe prouve par les fleurs de Lys dont les fceptres & les couronnes des Rois, les robes & les manteaux des Dames font ornés. Parmi plufieurs autres preuves, voici un raifonnement qui fait un peu de tort à la Logique de M. Bullet. « Le Valet de cœur, » dit-il, eft appellé la Hire; ce la Hire » eft le fameux Etienne de Vignoles, qui » contribua tant par fa valeur à affermir le trône chancelant de Charles VII. Il n'y a qu'un François qui, en compofant le jeu de Cartes, ait voulu choifir fes braves dans notre Nation je dis fes braves; car c'eft ce que le nom de Valet défignoit alors ». Concevezvous, Monfieur, comment celui qui a inventé les Cartes quinze ans avant la mort de Charles V, a pu donner au Valet de Cœur le nom de la Hire, qui a affermi le trône de Charles VII, furtout fi vous faites attention que le regne de Charles VII a été de quarante-deux

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ans.

Après avoir indiqué le temps & le

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lieu où les Cartes ont pris naiffance l'auteur effaye d'en pénétrer le deffein. »Tout jeu est une efpéce de combat; » & celui des Cartes en a plus parti» culièrement l'apparence. On y trouve » des Rois & des Rois belliqueux pour » être à la tête de l'armée, des Valets » fymbole des Vaffaux qui faifoient la principale force de l'Etat. Les autres » Cartes femblent défigner tous ceux qui n'étoient pas nobles, que l'on commençoit alors à placer dans les Troupes. Il y a quatre couleurs dans » ce jeu, pour repréfenter les quatre » Quadrilles des Carroufels. Le Cœur fignifie le courage, la valeur fi nécef» faire dans les batailles; le Pique, » les armes offenfives dont la principale » étoit alors la pique ou la lance. Les » armes défenfives font marquées par le Carreau, qui eft un bouclier lofangé. "Le Treffle, qui eft un figne de la ferti» lité & de la bonté des pâturages, indique l'abondance des fourrages, principalement néceffaire à une armée » dans ces temps-là, où elle étoit prefque toute compofée de Gendarmerie. » Les Daines ne paroîtront pas dépla * cées dans un jeu Militaire, fi l'on fais

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» attention au genre de galanterie qui regnoit alors. C'étoit une maxime » dans ce fiécle là, qu'il n'y avoit point » de Chevalier fans Dame. Il invoquoit » fa Maîtreffe avant le combat ; il lui >> attribuoit fa victoire ; quelquefois il » ordonnoit qu'on lui portât fon cœur après la mort, &c. Après cette explication, qui paroît d'affez bon fens, M. Bullet s'étend longuement fur les femmes qu'on a voulu défigner par les quatre Dames du jeu des Cartes. On trouve dans cette differtation beaucoup de conjectures, de longues citations, & rien de certain, rien de fatisfaisant : tout cet article mérite peu qu'on s'y arrête. L'article fuivant eft dans le même goût. L'auteur examine quel eft le Prince défigné dans les Cartes par le Roi David. Le Pere Daniel a prétendu que

c'étoit Charles VII. M. Bullet ne trouve pas dans les deux Monarques d'affez grands rapports de reflemblance. Ceci donne lieu à des parallèles auffi tructifs qu'intéreffans.

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Les premières Cartes étoient peintes, & pour cette raifon fort chères. Peu. après on les grava en bois, ce qui en diminua de beaucoup le prix, & mit le

peuple en état d'en faire ufage; les Efpagnols, en adoptant ce jeu, en changèrent les figures, & en altérèrent le plan. Leurs mœurs, dit l'auteur, leur ont fait fupprimer les Dames, & ils les ont transformées en Cavaliers. Ils ont changé le Pique en épée, le Treffle en bâton, le Carreau en denier, le Cœur en coupe. Cette nation a beaucoup gouté le jeu des Cartes. Pafchafius Juftus, qui voyageoit dans ce Royaume au feizième fiècle, dit qu'il faifoit fouvent plufieurs licues fans trouver ni pain ni vin, ni aucune autre chofe néceffaire à la vie; mais qu'il n'y avoit ni fi chétif Village, ni li méchant Hameau, où il ne trouvât des Cartes à vendre. Les Anglois reconnoiffent les tenir de nous. On voit par le terme de Knave, qu'ils employent pour défigner le Valet, qu'ils n'ont pris les Cartes que lorfque le mot de Valet ne fignifioit plus chez nous que ferviviteur. Il faut dire la même chofe des Allemands, qui fe fervent du mot Knecht, Valet. Toutes les nations de l'Europe adoptèrent ce jeu fucceffivement; jamais l'on n'en a vû fe répandre avec autant de promptitude. Aucun monument ne nous a confervé le nom

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