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faite de Brutus dans M. de Voltaire; Timophane, copie auffi peu fidèle de Titus fils de Brutus; Eronime, copie. plus mauvaise encore de Tullie dans la même Pièce de Brutus; Ifménie, copie furannée de tous les rôles de VoLumnie dans nos Tragédies de Coriolan.

Saint Germain, qui a fait Le Grand. Timoléon il y a plus de cent vingt ans, avoit plus de génie & de connoiffance. du Théâtre que M. de la Harpe. Son Timophane eft un tyran décidé; non content d'avoir affervi fa patrie, il la remplit de fang & de larmes ; chaque jour de fon regne eft marqué par des injuftices; il détefte fes fujets; il abhorre encore plus Timoléon; il veut même faire mourir ce frère, qui l'aime prefqu'autant que fa patrie, & qui fait tous fes efforts pour lui faire abdi quer un pouvoir ufurpé. Timophane,. qui ne fe dément jamais dans cette vieille Tragédie, reçoit les confeils de fon frère avec tout l'orgueil du Trône, & le traite comme le dernier de fes fujets. Timoléon en eft moins affligé pour lui que pour fes concitoyens Mais écoutez, Monfieur, le monologue de Timoléon, après fon entrevue avec Timophane; vous

excuferez quelques termes, quelques tours peu élégans, & vous ferez plus d'attention aux chofes qu'aux mots.

Lâche, lorfque ton frère en fecret te confeille,

Tu n'ouvres donc la bouche & ne prêtes l'o reille

A d'autres fentimens qu'à te rire de moi!
Tu me traites d'esclave, & tu parles en Roi!
Quoi, lorfque je te porte un conseil falu-
taire,

Ton orgueil infolent m'ordonne de me taire !
Alors que je m'oppose à ton jufte trépas,

Ton vain efprit fe moque, & ne m'écoute

pas !

Tu rougis de m'entendre & tu me fais in

jure,

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Quand j'écoute pour toi la voix de la Natu:e!

Mon amitié fe montre ou ta haine paroît,

Et ton mépris augmente, alors qu'elle s'ac

croît !

O Ciel, qui vois le trouble où mon ame eft ré

duite,

En cette incertitude éclaire ma conduite,

Et me fais reconnoître, en cette extrêmité,
Si je dois perdre un frère ou notre liberté ?

Si j'épargne mon fang, mon ame eft crimi

nelle ;

Si je fais mon devoir, elle fera cruelle.

O devoir! O mon lang! Que voulez-vous de moi ?

L'un & l'autre à fon tour me fait pencher à foi.

Que par eax mon efprit fouffre de violence! Tous deux également le tiennent en balance ; Mon cœur pour tous les deux fe fend par la moitié,

Tantôt pour le devoir, tantôt pour l'amitié. Dieux, lequel chafferai-je, & lequel dois-je croire ?

Pour qui fera la perte, & pour qui la victoire ? Qui de ces deux partis aura plus de pouvoir ? Enfin, qui regnera, le fang ou le devoir?

O devoir, je me rends, ta force est la plus grande;

La Raifon me l'ordonne & le Ciel le commande ;

Malgré mon amitié, je me range vers tois
Tes juftes intérêts fe préfentent à moi.

Je fçais que perdre un frère eft un crime exécrable;

Mais, fi fa mort délivre un peuple misérable,

Si c'eft venger les Dieux, punir la trahison,

Je crois qu'on le peut faire & fuivre la raifon.

Toi, qui te vois captive avec tes propres ar

mes,

Corinthe, où le fang coule & le mêle à des larmes,

Qui, perdant ta franchife*, as perdu tous les biens,

Et qui fers de prifon & de fépulcre aux tiens ; Pour gagner dans mon ame une infigne vic

toire,

Qui ferve à ta vengeance & relève ta gloire, Dans ta calamité, parle, ou bien te fais voir Avec tous les malheurs qui peuvent émouvoir.

Mais pourquoi defirer & ta voix & ta vûe ? Corinthe, à mon regret, je t'ai trop enten

due

Tes morts & tes vivans me difent à tous

coups:

Délivre ton païs, venge-toi, fauve-nous. Efprits, appaifez-vous aux tombeaux où vous

êtes !

Vivants, ceffez vos pleurs & les cris que vous faites!

Ce que vous defirez, vous allez l'obtenir;
Votre cruel tyran fort de mon fouvenir..

* Liberté.

Toi, que nous eftimons plus chère que la

vie,

Grace aimable des Cieux, que l'on nous a ra

vie;

Félicité fuprême & qui naît avec nous,
Et dont la jouiflance a des attraits fi doux,
LIBERTÉ, mife aux fers avec tant de furie,
Gloire de la Juftice, amour de la Patrie ;
Et Toi, lang innocent répandu par les mains
Du plus traître des Grecs & de tous les hu
mains;

Fidélité promife & qu'il n'a point tenue,
Piété vers les Dieux à ce monftre inconnue ;
Mépris qu'il fait de moi, Horreur, Crainte,
Pitié,

Soutenez mon devoir contre mon amitié ;
Faites-moi confentir que ce tyran fuccombe,
Que d'un injufte Trône il aille fous la tombe!
C'est fait: votre defir ne peut fe refuser;
Et vous m'excuferez, fi l'on peut m'accu
fer.......

Aurois tu bien le cœur de voir mourir tom frère?

La Juftice condamne une telle action;

Laiffe aux Dieux la vengeance & la punition. Mais lâche, mais timide, apprends de ta mis

fère, Puifque c'est un Tyran, que ce n'eft plus tan frère....

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