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rappelle; il lui dit adieu & part. Leuxis le montre, accable Palmis de reproches. La vieille, qui eft fa tante, cherche à l'excufer; elle commence un long exorde qui n'apprend rien à Leuxis & le fatigue, il fe retire fans rien écouter, détestant la perfidie de Palmis, & enveloppant fon fèxe entier dans les imprécations qu'il fait contre elle; il s'allie avec quelques amis qui ne le fatisfont pas davantage; il prend une autre maîtreffe, parce qu'il veut oublier Palmis; c'eft une veuve aimable, dont il fe croit adoré ; il y mène Darès fon ami, & part pour un voyage qui doit durer buit jours. Darès confole la veuve en lui parlant de Leuxis pendant trois jours; le quatrième il lui parle d'elle; elle s'apperçoit au cinquième que Darès tourne agréablement ce qu'il dit; le fixième elle l'écoute & lui répond; elle dit au feptième avec froideur que Leuxis arrive le lendemain. Il arrive en effet, ferend invifible, les veut furprendre, en voit affez pour fe dégoûter de fa maîtreffe & de fon ami.

Après plufieurs expériences, foit à la ville, foit à la campagne, foit à

la Cour même, Leuxis commence à croire fes defirs inutiles. Efope gouvernoit la Lydie; le mérite qu'il cherchoit avec tant d'attention & de foins, n'échappoit point à fes regards; Leu xis fut comblé de bienfaits; le Miniftre même voulut l'employer à des chofes bien délicates; il avoit une maîtreffe nommée Lycoris, élevée dans la plus profonde ignorance du monde; elle ne l'aimoit point, & le lui difoit. Elope s'imagina qu'elle étoit infenfible, & conçut un projet merveilleux.– » L'amour, dit-il, eft un befoin pour » une jeune fille, & fouvent pour une vieille. Lycoris l'ignore elle-même; fon cœur eft tout neuf; il faut aider » fes fentimens à fe développer. Leuxis me paroît propre à y réuffir; il ne fera que ce que je voudrai, & auffi de peu temps que je le voudrai. » Alors il faudra bien que Lycoris s'at» tache à quelque objet vifible pour elle, & je ferai le feul qu'elle puiffe appercevoir; je vaux toujours mieux » que rien; car rien eft déja bien peu » de chofe pour une fille de quinze »ans, & Lycoris en a dix-huit. » Efope exécute ce projet ; il réuffit au-delà de

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fes voeux; Lexxis & Lycoris fe trouvent aimables; Leuxis fe crut honnêtement obligé d'avouer à Efope que l'épreuve étoit trop forte; mais le fage tenoit à fon projet; il voulut le pouffer plus avant, réfolu néanmoins d'être préfent aux entretiens des deux jeunes gens. Leur première entrevue fut trèsvive, & bien en prit à Efope d'être à portée d'eux. Lexxis étoit honteux; Ejope lui dit dans fon langage ordinaire Un homme voulut un jour » imiter Prométhée, c'est-à dire, faire » naître du feu où il n'y en avoit pas; il frotte vivement l'un contre l'autre » deux morceaux de bois très-combuf»tibles; fon but étoit de n'en allumer qu'un; le feu prit malgré lui à tous les » deux. Que fit-il du tifon, trop prompt » à s'allumer, demanda vivement Lex» xis? Il le laiffa brûler à fon aife, re

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prit le Philofophe; ce tifon, né com. » buftible, n'avoit fait que céler à fa » nature; & l'homme en question fut » affez fage pour fentir que lui feul » avoit fait une fottife. » Leuxis ne fut pas plus tranquille après cela. Il fe croyoit fort coupable, & le fouvenir de Palmis qui le tourmentoit, malgré

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fes perfidies, ajoutoit à fon trouble. Pour Efope, n'ayant aucune efpérance, il prit le partit de trouver Lycoris trop jeune, & fit là-deffus la belie Fable du Renard & des Raifins. Leuxis inquier, venoit dans le Palais; il apperçut le foldat qu'il avoit vú chez Palmis. Cet homme étoit embarraffé; Leuxis n'étoit pas méchant; il l'interrogea curieufement fur ce qu'il deftroit. Le foldat lui dit que Palmis étoit fa fœcur; que leur père avoit été Général des armées de Créfus,on lui avoit fait un crime d'un malheur, il fut difgracié, & fe retira avec fa famille dans une maifon de campagne; tous fes autres biens furent faifis. Obligé de fe cacher il prit l'habit d'Hermite, & lui fe fit foldat. Ce dif cours fut un trait de lumière pour Leu xis. L'image de Palmis fe retraça plus fortement dans fon efprit; il préfenta le foldat à Efope; celui-ci fit venir toute la famille qu'il conduifit au Roi, le Prince la rétablit dans fes premiers honneurs & dans fes biens. Leuxis époufa Palmis. Phanor, c'étoit le nom du Soldat, époufa Lycoris qu'Efope lui accorda fagement; ils vêcurent ensemble à la campagne & dans le bonheur, en se rappellant

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rappellant les évènemens de fa vie. Leuxis difoit: » Il eft vrai qu'Esope fut » mon ami véritable, quoiqu'il habitât » la Cour, cela eft heureux; Phanor paroît être le mien , quoique nous foyons beau-frère, cela eft très heureux; il eft vrai que Palmis m'aime toujours quoique nous foyons époux » cela eft encore plus heureux; mais, » pour être à coup fur plus tranquille, jettons l'anneau de Gygès dans ce précipice, qu'il ne ferve jamais à dé» tromper ni époux, ni ami trop curieux; Leuxis le fit & s'en trouva bien. »

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Abbas & Sohry, Nouvelle Perfanne. On trouve dans une note que le fond de ce conte eft vrai, & tiré des voyages de Chardin; mais Chardin 'n'a fourni que le nom d'Abbas. Ce Prince fut furnommé le Grand, pour avoir fait beaucoup de mal à fes voifins. » Il aimoit paffionnément les femmes & la » guerre, il la faifoit autant pour peupler fon ferrail que pour accroître »fes Etats. Tout Roi, dont la femme » étoit belle, & le Royaume voifin de celui de la Perfe, devoit alors ANN, 1765. Tome I. I

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