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mortelle Clariffe, celui-ci, fans contredit, eft un des meilleurs pour le pathétique, les fituations & le but mo

ral.

L'auteur a dédié fa nouvelle production à Madame la Comteffe de Sercé, digne de cet hommage par les lumières de fon efprit, par la délicateffe de fon goût, par la bienfaifance de fon ame; L'Epître Dédicatoire eft fimple & char

mante.

L'Almanach des Mufes.

Cet Almanach, dont les exemplaires font diftribués chez les Marchands de nouveautés au Palais-Royal & ailleurs, contient un choix des meilleures poëfies fugitives qui ont paru en 1764, avec des Remarques. Mrs de Voltaire, Gref fet, Dorat, le Mière, Blin de SaintMore, de P***, Légier, Lattaignant, de la Harpe, Sabatier, de Saint-Péravi, de la Louptière, Chamfort, le Prieur Mangenot, de Beauchamp, Sautreau, Rochon de Chabannes, Girard, Beffière, de Chenevières, de Maupertuis & Thomas, font les honneurs de ce petit Recueil. Je ne fçais fi les Poëtes, bons

& mauvais, connus & inconnus, dont l'Editeur a rafflemblé les vers, lui fçauront gré de fes remarques critiques. Ils trouveront peut-être fingulier qu'on prenne leur bien pour en dire du mal. Quelques-unes de ces remarques font allez judicieuses, quelques autres peu juftes & futiles. Elles font accompagnées d'éloges qui fervent de correctif aux critiques. Au refte, il y a dans cette collection, n'en déplaise à l'Editeur, plufieurs morceaux d'une date plus ancienne que 1764.

Parmi les Pièces qu'on a fait entrer dans cet Almanach, il en eft une que j'ai rapportée dans mes Feuilles, & dont j'ignorois l'auteur. C'eft L'Epitre à Alexandrine. J'apprends qu'elle eft de M. Dorat Je ne connoiffois pas auffi la perfonné à qui elle eft adreflée. C'eft Mile Fannier, jeune

Françoile, quitrice de la Comédie

joue les rôles de Sou

brette avec fuccès.

Je fuis, &c.

A Paris, ce 14 Janvier 1764.

LETTRE V.

Un Hermaphrodite qui a épousé une fille, peut-il être réputé profanateur du Sacrement de Mariage, quand la Nature, qui le trompoit, l'appelloit à l'état de Mari?

Ette question intéressante vient d'être traitée, Monfieur, avec éloquence & piécifion, dans un Mémoire in 4° de 24 pages, qui fe vend à Paris chez Cellot Imprimeur rue Dauphine, & dont l'auteur et M. Vermeil Avocat. Un événement fingulier a produit cet ouvrage curieux.

Au mois de Novembre 1732 nâquir à Grenoble un enfant qui fut baptifé fous le nom d'Anne, fille de Jean Baptifte Grandjean & de Claudine Cordier parce qu'au premier inftant de fon exiftence, le fèxe le plus apparent chez lui fut le fèxe féminin. Il porta les habits propres à ce fèxe, & fut élevé parmi les jeunes filles de fon voifinage.

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Lorfqu'il eut atteint fa quatorzième an née, un inftinct naturel, dont il ignoroit la caufe, le rapprochoit fans ceffe de fes compagnes. La préfence des hommes, au contraire, ne lui faifoit aucune impreffion. Son père, qui s'apper çut de ce penchant victorieux, lui fit des questions auxquelles il répondit d'une manière équivoque. Ce père lui

dit de confultet fon Confeffeur. L'enfant fut docile; le Confeffeur inftruit l'obligea de quitter l'habit de femme qu'il ne pouvoit plus gårder fans crime, & de prendre le vêtement convenable au fèxe qui dominoit en lui. Anne Grandjean obéit. Toutes les filles de fon voisinage furent d'abord étonnées de fa métamorphofe, & le virent enfuite avec un nouvel intérêt. Une d'elles, nommée le Grand, mérita fes premières attentions; mais ce goût fut paffager. La paffion qu'il fentit pour. Françoife Lambert fut beaucoup plus forte; elle occafionna, même entr'eux des familiarités, dont ils furent également fatisfaits. Ce commerce ne fervic qu'à les enflammer de plus en plus l'un pour l'autre ; ils fe jurèrent une fidélité mutuelle, & réfolurent de confacrer

leur amour par la Religion. Ils allèrent à Chamberry, & le 24 Juin 1761, après trois publications de bans, ils furent mariés avec les formalités ordinaires. Les deux époux vivoient dans la bonne foi, heureux & tranquilles, fans que la femme eût aucune défiance du fèxe de fon mari, & fans que le mari eût aucun foupçon de fon infuffifance. Après environ une année de féjour à Chamberry, Françoife Lambert fit entendre à fon mari qu'ils feroient mieux leurs affaires à Lyon; ils s'y tendirent, & vêcurent enfemble pendant trois années entières, toujours contens l'un de l'autre, fe conduifant avec beaucoup de fageffe, & méritant les éloges de ceux qui leur donnoient à travailler.

La le Grand, les premiers amours de Grandjean, arriva par malheur à Lyon dans le cours de l'année dernière. Elle apprit qu'il avoit épousé Françoife Lambert; elle eut occafion de voir cette femme, & lui dit qu'elle étoit étonnée de fon mariage, parce que fon prétendu mari étoit Hermaphrodite. Ce difcours furprit Françoife Lambert ; elle fit des réfléxious fur la ftérilité de fa couche; elle témoigna fes inquiétudes

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