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Les chambres s'assemblèrent, le 24, pour délibérer sur la réponse du Roi aux remontrances; elles remirent leur délibération au mardi. On trouvera ci-après la délibération d'avant-hier mardi; on n'en put avoir des copies que le mardi au soir fort tard, et dès le mercredi au matin elle étoit imprimée. Si on veut bien comparer cette délibération avec la réponse du Roi, on verra qu'elle la contredit dans tous ses points.

Du mardi 27. Ce jour, la Cour, toutes les chambres assemblées, en délibérant sur la réponse du Roi aux très-humbles et très-respectueuses remontrances de la Cour du 27 novembre 1755, a arrêté qu'il en sera fait registre, sans néanmoins que des termes d'autorité et de juridiction contenus dans la réponse dudit seigneur Roi, on en puisse inférer que les gens du Grand Conseil aient aucun territoire, droit de ressort, ni juridiction proprement dite, leur pouvoir n'étant que précaire et limité à la simple faculté de connoître de certaines causes par attribution et de faire exécuter leurs jugements entre particuliers, sans que, sous ce prétexte, les juges inférieurs puissent être contraints de reconnoître d'autres supérieurs immédiats dans l'ordre de la justice que ceux à qui ils sont tenus, par les ordonnances du royaume et par leur serment, de rendre compte de leur conduite; se réservant ladite Cour de faire en tout temps audit seigneur Roi de très-humbles représentations sur les attributions aux gens du Grand Conseil qui n'auroient pas été régulièrement faites.

Arrêté en outre que, pour empêcher qu'il ne soit rien innové dans l'administration de la justice, pour maintenir l'ordre public, l'état des juridictions et assurer la pleine et entière exécution des lois et ordonnances du royaume, aucun juge du ressort de la Cour ne pourra, en matière criminelle, reconnoître d'autres priviléges que ceux accordés par les ordonnances, édits et déclarations adressés à la Cour et dûment vérifiés en icelle.

Comme aussi nuls officiers des siéges ressortissants en la Cour ne pourront publier, enregistrer et faire exécuter que les ordonnances, édits et déclarations, aussi adressés et vérifiés en la Cour, et arrêts et règlements d'icelle.

Arrêté au surplus qu'aucunes minutes des greffes ne pourront être déplacées, sinon dans les cas prévus par les ordonnances, arrêts et règlements, et que le procureur général du Roi sera mandé à l'instant pour être chargé de donner connoissance du présent arrêté à tous les siéges du ressort, à l'effet de s'y conformer et d'informer la Cour au moins du nom des officiers qui, sous quelque prétexte que ce puisse

être, auroient contrevenu aux ordonnances du royaume en s'écartant des principes et maximes contenus au présent arrêté.

Fait en Parlement, toutes les chambres assemblées, le 27 janvier 1756.

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Du vendredi 30. J'ai marqué que mon fils alla avant-hier chez le Roi avec M. d'Egmont; il est en grande pleureuse comme légataire universel de Mme de Saissac; par cette raison, il a fait demander permission de ne point paroître en grand manteau. Je crois que ce n'est que dans les deuils de père et mère, grand-père ou grand'mère, mari ou femme, que l'on peut demander permission, parce que ce sont les seuls cas du grand manteau. M. le duc de Gesvres pense de même; ce n'est en effet que dans ces cas que le Roi fait l'honneur d'envoyer faire des compliments. On pourroit dire que les deuils d'héritier ou de légataire universel sont des deuils de reconnaissance et non de respect.

Je n'ai point encore parlé du voyage de M le Dauphin et de Mme la Dauphine à Paris, parce que je voulois savoir quelques détails. Ma le Dauphin avoit dans son carrosse M. le duc de Fleury, premier gentilhomme de la chambre en année, et les menins de semaine, et dans les autres carrosses les autres menins avec M. de Bauffremont, de Damas, de Montbarrey, de Talleyrand, d'Henrichemont, de Fosseux, de Flamarens et de Saulx. C'est le lundi 19 que Mr le Dauphin et Mme la Dauphine allèrent à Paris. Ms le Dauphin avoit trois carrosses, et Mme la Dauphine quatre. Les dames qui eurent l'honneur de suivre Mme la Dauphine étoient Mme la duchesse de Brancas la douairière, Mme la duchesse de Lauraguais, les dames de Mme la Dauphine, les trois filles de M. de Sassenage dont deux sont à Me la Dauphine, Mme de Conflans (Portail), Mme la comtesse d'Ayen (de Fresne), et Mme de Tessé (d'Ayen), etc. La Ville n'alla point recevoir Ms le Dauphin à la porte Saint-Honoré; il y avoit seulement à cette porte un détachement des gardes de la Ville avec un drapeau ; c'é

me

toient là aussi où étoient les relais de Mgr le Dauphin et de Me la Dauphine; ils y changèrent même de carrosses. On tira le canon des Invalides et de la Bastille à leur arrivée et à leur sortie. Ils allèrent d'abord à Notre-Dame, où ils furent reçus à la porte par l'abbé de Saint-Exupéry, doyen du chapitre. On chanta le Te Deum; de là ils allèrent à Sainte-Geneviève, où il y eut plusieurs prières, et l'abbé donna la bénédiction pontificalement. M. le duc de Gesvres, comme gouverneur de Paris, M. Berryer, lieutenant de police, et M. Bernage, prévôt des marchands, se trouvèrent à Notre-Dame et à Sainte-Geneviève.

Feu Me de Saissac avoit pour 36,000 livres de rente de domaines du Roi; je crois même qu'elle en tiroit un peu plus que cela de revenu. Ces domaines étant par sa mort rentrés au Roi, S. M. vient d'en donner pour 6,000 livres de rente à Mme de Flavacourt, et autant à Mme de Talleyrand pour marier sa fille.

Outre Mes de Flavacourt et de Talleyrand, le Roi a encore donné 6,000 livres de pension à M. de Damas, qui a épousé la seconde fille de M. de Rochechouart-Faudoas; pareille pension de 6,000 livres à M. d'Avaray, qui a épousé une des deux filles de M. de Baschi; l'autre est Mme de Lujac; et 12,000 livres de pension à M. le marquis de Gontaut, apparemment pour le dédommager d'un trèsjoli appartement, grand et bien accommodé, que le Roi avoit eu la bonté de lui donner, il y a quelques années, dans l'hôtel des ambassadeurs extraordinaires, qui étoit anciennement l'hôtel de Pontchartrain. Le Roi a jugé à propos que cette maison fût dorénavant destiné à être habitée par ses contrôleurs généraux des finances, et M. de Séchelles doit y aller loger incessamment. Il loge actuellement dans une belle maison qu'il loue rue SaintDominique, faubourg Saint-Germain, appartenant à M. de Chaulnes, laquelle provient de la succession de M. Bonier.

Toutes les pensions dont j'ai parlé dans cet article et

dans celui ci-dessus font la même somme de 30,000 livres qui sont revenus au Roi par la mort de Mme de Saissac. Le Roi, par ces bienfaits, a voulu exécuter des promesses qu'il avoit eu la bonté de faire; mais il ne veut plus donner aucun de ses petits domaines, et pour cet effet, dès ce moment, il les a réunis aux fermes générales, et les pensions susdites seront payées par les fermiers généraux. J'ai observé ci-dessus que Mme de Saissac tiroit plus de 36,000 livres des domaines dont elle jouissoit. M. de Séchelles a fait cette même observation avec d'autant plus de raison, qu'il a remarqué que l'un de ces petits domaines étoit demandé préférablement à tout autre par plusieurs personnes.

On apprit il y a deux jours que le roi de Prusse a signé un traité avec l'Angleterre; on ne dit point précisément quel est ce traité (1), mais il paroît certain que le roi de Prusse s'est engagé à ne laisser entrer aucunes troupes étrangères dans l'Empire. La France y trouve quelque avantage puisque cette condition met l'Angleterre dans l'impossibilité de recevoir le secours des 70,000 hommes que la Czarine s'étoit obligée de lui fournir en cas de besoin et qui ne pouvoient passer sans entrer sur les terres de l'Empire; mais, d'un autre côté, les États de Hanovre sont garantis par cette même condition de toute invasion de la part de la France, puisque Hanovre fait partie de l'Empire. Ce qu'il y a de plus désagréable pour la France,

(1) Ce traité a été pendant plusieurs jours ici un problème. On le disoit faux et que c'étoient les Anglois qui le publioient pour donner encore plus de faveur à leurs projets. Cependant toutes les gazettes en parloient, hors celle de France, et en rapportoient les détails; enfin il paroît que notre ministère commence à en convenir. On dit que ce n'est pas un traité, mais seulement une convention qui peut être désagréable, mais qui ne nous fait aucun tort, et que la négociation de M. de Nivernois sera vraisemblablement malgré cela d'une grande utilité. Ce qui est certain, c'est que depuis la nouvelle de la signature de ce traité ou convention, l'argent est plus commun en Angleterre et que les actions y ont repris faveur. (Addition du duc de Luynes, datée du 5 février 1756.)

T. XIV.

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c'est que le traité a été signé le 16 de ce mois, à Berlin, quatre jours après que M. de Nivernois y est arrivé. M. de Kniphausen, ministre du roi de Prusse en France, dit assez hautement que le roi son maître avoit offert à la France de traiter avec elle pour faire de concert une irruption dans les États de Hanovre, et que cette proposition n'a point été acceptée.

J'ai marqué ci-dessus que nous aurions dans le mois prochain 14 vaisseaux de ligne et 8 frégates à Toulon prêts à mettre à la voile; on vient de m'envoyer le nom de 12 de ces vaisseaux avec le nombre des canons et les noms des commandants. On les trouvera ci-après :

M. le marquis de la Galissonnière, chef d'escadre, le Foudroyant, de 80 canons.

M. de Massiac, chef d'escadre, le Guerrier, de 74 canons.

M. de la Clue, capitaine de vaisseau, la Couronne, de 74 canons.

M. de Vilarzel, le Redoutable, de 74 canons.

M. Beaumont le Maître, l'Achille, de 64 canons.

M. Villars de la Brosse, le Triton, de 64 canons.

M. le marquis de Saint-Aignan, le Lion, de 64 canons.

M. du Revest, le Sage, de 64 canons.

M. le chevalier d'Ecaux Rémondis, l'Orphée, de 64 canons.

M. de Sabran-Gramont, le Constant, de 64 canons.

M. de Rochemore la Devèze, l'Hercule, de 64 canons.

M. d'Erville, le Fier, de 50 canons.

Du samedi 31. Il y a deux mois que M. de Gagny a vendu sa charge d'intendant des Menus à M. de la Touche. M. de la Touche est neveu de M. Boudré, secrétaire de M. le contrôleur général, et beau-frère d'un premier commis de M. le garde des sceaux, qu'on appelle Cromau. M. de Cury vend aussi sa charge d'intendant des Menus, mais on ne sait point encore à qui. Le prix ordinaire de ces charges est de 200,000 livres et le revenu n'est que de 5,000 livres. L'on offre déjà à M. de Cury un pot-devin de 60,000 livres. C'est un ancien établissement que les charges d'intendant des Menus, mais il n'y en avoit que deux; on en a créé une troisième depuis quelques

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