Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

spéciaux. Leur organisation est du reste analogue à celle des tribunaux des autres îles.

Une série de plus de quarante pièces justificatives, la plupart très importantes, termine ce volume. Le texte en a été établi avec une préoccupation d'exactitude qui peut paraître excessive quand il ne s'agit pas de textes importants au point de vue philologique; toutes les abréviations ont été représentées par des caractères italiques. Ce système n'a du reste pas l'inconvénient de celui dont on fait usage dans certaines publications anglaises et qui consiste à reproduire toutes les abréviations, ce qui rend la lecture toujours fatigante et souvent difficile, beaucoup plus difficile même que le déchiffrement de l'original; mais cela est-il bien utile ? Y a-t-il grand intérêt à imprimer « gratia » au lieu de « gratia», « Willelmus » au lieu de « Willelmus »? Ce système ne devrait être employé, croyons-nous, que quand il y a véritablement lieu de douter de la lecture d'un mot.

A part cette légère critique, si c'en est une, nous ne pouvons faire du livre de M. H. que le plus grand éloge. Tout y montre un esprit méthodique; pas de mots inutiles; le style, admirablement approprié au sujet, est d'une grande simplicité, mais exprime toujours avec une lucidité extrême la pensée de l'auteur; en un mot, en moins de deux cents pages, M. H. a su condenser et ranger suivant une méthode parfaite un nombre de faits assez considérable pour remplir un gros volume, si le sujet eût été traité par moins habile que lui. Il y a fait preuve de grandes qualités d'érudition et de grandes qualités pour la mise en œuvre de ses matériaux. Espérons qu'après ce début, l'auteur n'en restera pas là.

E. MOLINIER.

[ocr errors]

Études pour servir à l'histoire de la vie économique en France au XIe siècle, par Karl LAMPRECHT. 4 vol. in-8°, 152 p. Leipzig, Duncker et Humblot, 1878. (Forme le troisième fascicule du premier volume de la Bibliothèque de droit public et d'économie politique, publiée sous la direction de Gustave Schmoller 1.)

Plus d'un lecteur peut-être se demandera comment une époque qui ne passe pas pour nous avoir laissé beaucoup de documents historiques peut donner lieu à des études qui supposent la connaissance d'un nombre considérable de faits et exigent l'emploi au moins restreint de la statistique. Mais on ne s'étonnera plus du choix d'un pareil sujet, si l'on remarque que le titre du travail de M. L. nous promet seulement des données sur l'état économique de la France au xre siècle. Il n'est pas

1. Beilræge zur Geschichte des franzosischen Wirthschaftsleben im elften Jahrhundert. Staats- und Socialwissenschaftliche Forschungen, herausgg. von Gustav Schmoller. Bd. I, Heft 3.

LAMPRECHT ÉTUDES SUR LA VIE ÉCONOMIQUE EN FRANCE AU XIe s. 171 inutile de le rappeler, car le caractère absolu et systématique que l'auteur a donné à ses généralisations pourrait le faire oublier.

Le xre siècle se distingue surtout, au point de vue économique, par la formation, ou pour mieux dire, par les premières manifestations de la bourgeoisie urbaine; mais, précisément parce que le mouvement communal, qui signale le déclin du siècle, ouvre une ère nouvelle, l'auteur s'est avec raison interdit d'en parler pour se renfermer dans l'étude de l'organisation économique qui caractérise les deux premiers tiers du siècle et qui est entièrement dominée par la Naturwirthschaft. On sait que ce mot désigne un régime dans lequel les richesses naturelles contribuent à la production dans une mesure beaucoup plus large que le travail et le capital. L'importance respective de ces trois éléments de la production au XIe siècle a naturellement déterminé la place que l'auteur leur a faite dans ses études; l'industrie et le crédit n'y occupent que quelques pages, tout le reste est consacré à l'agriculture ou, pour mieux dire, à l'exploitation des richesses du sol.

Dans le premier chapitre, M. L. passe en revue les diverses richesses naturelles les forêts, la pêche, les pâturages, l'élève du bétail. Il établit que l'agriculture fut plus extensive qu'intensive, c'est-à-dire qu'elle se montra plus soucieuse et plus capable d'étendre ses conquêtes que de les féconder en perfectionnant ses méthodes. Il est regrettable que, pour traiter de l'économie forestière, l'auteur n'ait pas consulté l'ouvrage de M. Alfred Maury. Cet ouvrage, du reste, n'est pas le seul dont la connaissance aurait été profitable à une entreprise comme celle de M. L., elle aurait dû également s'aider des Études sur la classe agricole en Normandie de M. Léopold Delisle. Si jamais l'emploi d'ouvrages de seconde main fut, nous ne dirons pas seulement légitime, mais indispensable, c'est pour un travail d'ensemble qui embrasse tout un siècle et tout un pays. M. L. s'est presque exclusivement borné à consulter les cartulaires imprimés. Les eût-il dépouillés tous, ce qu'il n'a pas fait, ils n'auraient pu lui fournir une base assez large pour soutenir les vastes généralisations que comporte sa tentative. L'ouvrage dont M. L. nous donne l'ébauche, s'il est jamais écrit, ne pourra être que la synthèse de nombreux travaux d'un caractère spécial et local.

Le second chapitre est le plus important du livre. L'auteur y étudie le passage de la propriété indivise et soumise au système de la rotation des cultures à la propriété individuelle et libre; il y définit les différents modes de tenure et d'exploitation, avec une précision rigoureuse que les textes n'autorisent pas toujours. A côté de définitions trop absolues, trop systématiques, mais fécondes par les vues qu'elles ouvrent, il faut signaler de véritables méprises: ainsi, le champart n'est pas le signe distinctif des terres dont le produit revient en partie au propriétaire (Theilbau), il se prélevait également sur les tenures à ferme; c'était un droit accessoire du propriétaire qui ne donnait pas au contrat son caractère constitutif.

Dans le chapitre III (Classes agricoles, agriculture et industrie), l'au

teur n'est pas resté fidèle au point de vue économique auquel il s'était placé jusque-là. Ce que ce chapitre contient sur l'état des personnes, les origines de l'esclavage, les circonstances qui y mettent fin, etc., appartient au domaine du droit et non de l'économie politique. L'auteur luimême reconnaît qu'au xie siècle, la distinction des classes a un caractère plutôt juridique qu'économique, il n'aurait donc pas dù s'occuper de la condition civile des classes agricoles en elle-même, mais seulement de l'influence qu'elle a pu exercer sur la production. Il importe d'autant plus de conserver à l'histoire de l'économie politique son indépendance, qu'elle est plus exposée parfois à se confondre avec l'histoire du droit privé ou avec celle du droit public. - L'auteur est dans le vrai en nous présentant les hôtes comme des colons, comme des pionniers voués aux défrichements, mais il ne se prononce pas assez nettement sur le caractère précaire ou durable de leurs tenures. Pense-t-il, comme cela paraît ressortir de son langage, que l'hôtise ne restait entre les mains de l'hôte et de ses héritiers que jusqu'au jour où elle était entièrement mise en valeur? Nous avons peine à le croire, car M. L. reconnaît que le complant rendait le colon propriétaire; or le complant était pour les - vignobles ce que l'hôtise était pour les autres genres de cultures. Sous les titres intraduisibles en français de Geldwirthschaft et Naturwirthschaft, M. L. indique sommairement dans un dernier chapitre les entraves que le droit de famille et le droit féodal apportaient aux mutations immobilières, et parle de la richesse mobilière, du crédit qui n'existait guère que sous la forme du prêt sur gage, des douanes, des taxes sur la vente des marchandises, des marchés. Cette énumération suffit pour montrer qu'on ne peut chercher dans ce chapitre autre chose que des indications. Il a toutefois, comme le reste du livre, le défaut d'être trop hardi, trop systématique; mais ce défaut a l'avantage de provoquer la réflexion et rend plus de service à la science que la timidité et l'indécision.

L'appendice renferme : 1o une liste de prix toujours suivis de l'indication de l'époque et de la région auxquelles ils appartiennent, et un tableau présentant les résultats généraux de ce relevé ; 2o un document important sur l'origine des Colliberts.

G. FAGNIEZ.

Gustave FAGNIEZ. Études sur l'industrie et la classe industrielle à Paris au XIIIe et au XIVe siècle. Paris, F. Vieweg, 1877, 426 p. (Fasc. XXXIII de la bibliothèque de l'École des hautes études.)

Les corps de métier de l'Allemagne du moyen âge ont été dans ces dix dernières années l'objet de plusieurs études historiques. Cette partie importante de notre économie sociale avait été jusqu'à cette époque fort peu étudiée; avant 1850, on avait publié fort peu de chose en fait de

matériaux pour servir à cette étude, trop peu pour qu'il fût possible de se faire une idée claire et nette de l'importance économique de cette institution qui a tenu une si grande place dans la vie politique et intellectuelle de l'Allemagne. Les jugements que l'on portait sur cette institution n'avaient guère pour base que ce que l'on connaissait des corps de métier des XVIIIe et XIXe siècles, et n'étaient rien moins que favorables.

Aussi les historiens, grâce au jugement préconçu des économistes, se trouvaient-ils fort embarrassés pour expliquer l'histoire florissante des villes d'Allemagne et la prospérité de la classe industrielle au moyen âge. Cet embarras n'existe plus à l'heure qu'il est. Me basant sur les nombreux documents publiés depuis 1860', j'ai étudié, d'une façon plus approfondie que cela n'avait pu se faire lorsque les matériaux manquaient, les corps de métier au moyen âge et leur rôle économique ; j'ai cherché à montrer quel avait été le but de cette organisation du travail industriel ainsi que sa nature 2. D'autres savants se sont depuis occupés du même sujet et ont publié une série de travaux importants 3. Ces travaux ont confirmé les résultats du mien et en ont présenté d'autres de grande importance. Grâce à ces recherches, on connaît maintenant dans ses grands traits l'organisation des corps de métier dans l'Allemagne du moyen âge. Il a été démontré qu'il fallait distinguer deux périodes dans l'histoire des corps de métier, celle de leur grandeur et celle de leur décadence. L'organisation des corps de métier à cette dernière époque diffère considérablement de celle du moyen âge, et même lorsque nous retrouvons aux deux époques des institutions semblables en apparence, nous constatons généralement que leur

1. Il faut mentionner les travaux de Wehrmann sur les corps de métier à Lubeck (Die ælteren Lübeckischen Zunftrollen. Lübeck, 1864. 2. Aufl. 1872), ceux de Ennen et Echertz sur les corps de métier à Cologne (Quellen zur Geschichte der Stadt Kæln. Band I, 1860) et de Mone sur les corps de métier dans différentes villes du Haut-Rhin (Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins. Band XIII-XVII), de Boehmert (Beitrage zur Geschichte des Zunftwesens. Leipzig, 1862), et de Werner (Urkundliche Geschichte der Iglauer Tuchmacherzunft. Leipzig, 1861).

2. G. Schoenberg. Zur wirthschaftlichen Bedeutung des deutschen Zunflwesens im Mittelalter. 1868 (aussi dans B. Hildebrand's Iahrbücher für Nationalœkonomie und Statistik. Band IX).

-

3. Nous relèverons plus particulièrement G. Schmoller, Strassburg's Blüthe und die volkwirthschaftliche Revolution im 13. Jahrhundert, 1874. Strassburg zur Zeit der Zunftkæmpfe und die Reform seiner Verfassung und Verwaltung im 15. Iahrhundert. 1875. Stahl, Das deutsche Handwerk, Band I. 1874. W. Stieda, Zur Entstehung des deutschen Zunftweseus. 1877 (de même dans le Jahrbuch de Hildebrand, vol. 27, p. 1). — C. Neuburg, Die ælteren deutschen Stadtrechte insbesondere das Augsburgische von 1276, in Bezug auf die Entstehung der Entwickelung der Innungen dans la Zeitschrift für die gesammte Staatswissenschaft. Tübingen, Band 32 (Jahrgang 1876). S. 660. Schanz, Zur Geschichte der Gesellenverbænde im Mittelalter, 1877.

importance au point de vue économique diffère considérablement. Au moyen åge, l'organisation des corps de métier était véritablement conforme aux nécessités du temps, elle était la base d'une bonne organisation industrielle, elle créait et assurait à la population industrielle une position sociale favorable, et à la production la vie et le progrès; elle contribuait à la prospérité de tous et au développement de la civilisation. Voilà ce qui peut être envisagé comme certain, quoique l'organisation des corps de métier dans chaque ville n'ait pas encore été étudiée en détail. Retracer cette histoire au moins pour les villes les plus importantes, telle est la tâche qu'il convient de remplir pour le moment. C'est ce qu'ont compris M. Werner, dont le travail a été cité à la page précédente, M. Schmoller, dont l'ouvrage sur les corporations des drapiers et des tisserands peut être regardé comme un modèle1.

Le corps de métier n'est pas une institution appartenant uniquement à l'économie sociale de l'Allemagne; nous le retrouvons chez d'autres peuples de l'Europe au moyen âge. Cette organisation singulière du travail industriel est née d'une façon indépendante chez tous les peuples de l'Europe, mais elle a pris chez chacun, sous l'empire de circonstances particulières, des caractères divers. Pour mettre cette vérité en évidence, pour approfondir les questions qui se rattachent à l'histoire industrielle, à l'économie sociale du moyen âge en général, il est désirable, il est nécessaire que des recherches analogues à celles qui se font en Allemagne soient entreprises dans les autres pays.

Aussi, avons-nous accueilli avec reconnaissance l'ouvrage de M. G. Fagniez, qui, le premier en France, traite en détail de l'organisation des corps de métier de son pays. Cet ouvrage se recommande autant par la richesse de son contenu que par l'exactitude des recherches et la netteté de l'exposition. L'auteur, qui est au courant de ce qui a été publié en Allemagne, nous a gratifiés d'un ouvrage de la plus haute valeur et du plus haut intérêt pour l'économiste aussi bien que pour l'historien.

M. F. ne s'occupe que de l'industrie parisienne aux Xe et XIVe siècles, en tant que les sources parvenues jusqu'à nous peuvent lui fournir les matériaux nécessaires.

Malheureusement la plus grande partie des documents qui pouvaient nous renseigner sur l'histoire des corporations à cette époque et plus tard sont perdus; la plupart existaient encore au siècle passé, lors de l'abolition des corps de métier. Ce qui nous reste de ces textes ne suffit pas pour poursuivre à travers les siècles et approfondir l'histoire des corps de métier à Paris. L'auteur a fouillé consciencieusement les archives, il a même découvert un grand nombre de documents (il en reproduit 61 dans son livre). Toutefois, les sources principales auxquelles il a puisé sont deux recueils imprimés, les Reglemens sur les arts

1. Die Strassburger Tucher und Weberzunft, Urkunden und Darstellung, nebst Regesten und Glossen. Ein Beitrag zur Geschichte der deutschen Weberei und des deutschen Gewerberecht vom XIII.-XVII. Jahrhundert. Strassburg, 1879.

« VorigeDoorgaan »