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Quoique cette doctrine soit puisée dans les vrais principes, et fondée sur la raison même, on n'a pas laissé de s'en écarter quelquefois.

Dumoulin, sur l'art. 46 de l'ancienne coutume de Paris, qui défendait aussi aux témoins de recevoir des legs, dit qu'il faut en excepter les legs modiques; et il y a dans le Journal du Palais, un arrêt du 29 mars 1677, rendu à la grand'chambre du parlement de Paris, sur les conclusions de M. Talon, qui a confirmé un testament avec le legs d'un tableau que le testateur y avait fait à l'un des témoins.

Ricard en rapporte un semblable du 15 mai 1648, intervenu dans la coutume de Vitry.

La même question s'étant présentée au conseil souverain de Brabant, en 1644, il fut jugé, suivant Stockmans, que le legs fait au Légataire, était nul, mais que le reste du testament devait être exécuté.

L'ordonnance de 1735 a fixé la jurisprudence sur ce point: « A l'égard des Légataires universels

ou particuliers (porte-t-elle, art. 43), ils ne » pourront être témoins que pour l'acte de sus>cription du testament mystique dans les pays où » cette forme de tester est reçue. »>

L'art. 47 ajoute que toutes les dispositions de cette loi qui concernent...... les qualités des témoins, seront exécutées à peine de nullité. Nous devons donc regarder les témoins comme absolument et indistinctement incapables d'être Légataires; et, ce qu'il y a de remarquable, cette décision n'a pas moins lieu pour les pays de droit écrit que pour les pays coutumiers.

L'art. 975 du Code civil porte également : «< Ne » pourront être pris pour témoins du testament par acte public, ni les Légataires, à quelque titre qu'ils soient, ni leurs parens on alliés jus» qu'au quatrième degré inclusivement. »>]]

pas

.Il faut cependant remarquer avec Ricard, « que si, le testament avait été passé en présence de »trols témoins dans une coutume qui n'en dési» rât que deux, et que l'un de ces témoins eût été » fait Légataire, le testament et même le legs par» ticulier au profit de l'un des témoins, ne lais» seraient d'être bons et valables, parce que, » lorsque la coutume a dit que les témoins employés en un testament ne doivent pas être Légataires, elle n'a parlé que du nombre qu'elle » a requis pour la solennité de l'acte; et pour le » surplus, leur signature n'étant pas de l'essence » du testament, elle ne peut avoir d'effet contre >> eux que pour les convaincre qu'ils étaient pré» sens lorsqu'il a été fait ; ce qui ne les rend point incapables de profiter des dispositions faites en » leur faveur. »

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[[Observons encore avec le même auteur, que si, les témoins ne sont pas intéressés individuelle ment, ut singuli, mais seulement comme membres d'une communauté, ut universi, le testament dont ils assurent l'authenticité par leur présence, doit être exécuté. Telle est, en effet, la conséquence de la règle, quod universitati debetur, sin

gulis non debetur, (Loi 7, § 1, D. quod cujus cumque universitatis.) Et voilà pourquoi un arrêt du 3 mars 1654 a ordonné l'exécution d'un testament reçu par un notaire en présence de témoins de Nogent-le Rotrou, quoiqu'il contint un legs. universel au profit des habitans de la même ville, pour y établir un collége.

C'est par un principe semblable, que, dans les pays où, avant le Code civil, les curés étaient considérés comme officiers publics, à l'effet de recevoir des testamens, on tenait pour valable le testament dans lequel il y avait des dispositions en faveur de l'église du curé qui le recevait, quoique celui-ci dût, en sa qualité, profiter des fruits du legs. Telle était la doctrine de Ricard, part. 1, no 554 ; et sur ce principe, un arrêt du parlement de Paris, rendu au mois de février 1746, sur les conclusions de M. d'Ormesson, avocat général, avait ordonné l'exécution, du testament du sieur Chevry de Vimbré, qui avait légué 30 livres de rente à la fabrique de Joui-le-Châtel, à la charge d'un service annuel, pour lequel il serait donné 10 livres chaque année au curé, ministre du testament, et à ses successeurs.

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[EV. mon Recueil de Questions de droit, au mot Testament, § 14.]]'

XX. Le Légataire qui a écrit lui-même la disposition faite en sa faveur, est incapable de la recueillir. Cette règle générale, qui a aussi lieu pour les institutions d'héritier, a été établie par le sénatus-consulte Libonien. Ea voici le développement.

D'abord, il est constant qu'elle s'applique aussi bien aux dispositions faites par codicilles, qu'à celles qui sont contenues dans des testamens. La loi 15, D. ad legem Corneliam de falsis, y est formelle.

En second lieu, l'incapacité du Légataire ne cesse point, quoiqu'il paraisse que le testateur a dicté lui-même la disposition, et qu'il a ordonné au légataire de l'écrire: c'est ce que décident les lois 14 et 15 du titre qu'on vient de citer, ainsi que les lois 2 et 3, C. de his qui sibi adscribunt

in testamento.

, en

Troisièmement, les dispositions faites par des soldats, ne sont pas moins sujettes au sénatusconsulte Libonien que celles des autres. La loi 5. C. de his qui sibi adscribunt in testamento contient une décision expresse : Quod adhibitus ad testamentum commilitonis scribendum, jussu ejus servum tibi adscripsisti, pro non scripto habetur: et ideo id legatum petere non potes. La loi dernière, D. de his quæ pro non scriptis ha-` bentur, décide précisément la même chose.

Quatrièmement, la peine introduite par le sénatus-consulte Libonien a aussi lieu relativement aux époux entre eux; témoin la loi 5, C. de his qui sibi adscribunt in testamento, dont voici les termes: Que in testamento uxoris maritus sua manu legata sibi adscripserit, pro non scriptis

habeantur.

C'est une question s'il ne faut pas excepter de cette disposition les testamens conjonctifs et réci

proques entre personnes mariées? Perez et Corvin, sur le Code, soutiennent la négative: selon eux, un pareil acte écrit par le mari, ne vaut qu'en faveur de la femme, et vice versa. Mais Catellan atteste que le parlement de Toulouse s'est fait làdessus une jurisprudence contraire à l'opinion de

ces auteurs.

Du reste, cette question ne peut plus être d'aucun usage parmi nous, depuis que l'ordonnance de 1735 a abrogé les testamens conjonctifs.

Cinquièmement, la loi 10, D. de lege Cornelia de falsis, porte que la disposition écrite par un fils de famille en faveur de son père ou de ses frères, soumis comme lui à la puissance de leur père commun, n'est pas moins nulle que si elle était faite à son profit singulier, quia hujus rei emolumentum ad patrem dominumve pertinet, ad quem pertineret, si filius servusve sibi adscripsisset. Mais , par la raison contraire, une mère qui n'a jamais ses enfans sous sa puissance, peut recueillir le legs qu'un d'eux a écrit en sa faveur : Et cum matrt filius adscripserat, divi fratres rescripserunt, cum jus, sutestatoris hoc scripsit impunitum evenisse, matremque capere posse. Ce sont les termes de la loi 11, §, du titre, cité. Sixièmement, il est évident, parce qu'on vient de dire, que les legs écrits par un père en faveur du fils qu'il a en sa puissance, n'est pas plus valable que si le fils l'avait écrit pour lui-même. C'est ce qui résulte de la loi 14 du même titre, aux mots Prohibemur nobis vel his quos in potestate habemus adscribere legatum; et c'est ce qu'a jugé un arrêt du parlement de Provence, de l'année 1645, rapporté par Duperrier, tome 3, quest. 14.

Mais si le fils était émancipé, le legs serait valable, parce que le père ne pourrait en tirer aucun profit. La loi 22, § 2, D. de lege Cornelia de falsis, justifie cette assertion: Sed et si emmacipato filio adscribit, recte id faciet. De Cormis et Brillon présentent l'arrêt que nous venons de citer, comme contraire à cette loi; c'est une méprise : les défenses que Duperrier a fournies lors de cet arrêt, prouvent que le fils n'était pas émancipé.

La disposition du sénatus-consulte Libonien admet plusieurs exceptions.

La première a lieu du reste, lorsque le testateur confirme lui-même le legs écrit par le Légatairs. Mais faut-il de sa part une confirmation spéciale, ou suffit-il qu'en termes généraux il déclare approuver tout le contenu de son testament?

On distingue, à cet égard, les legs faits par un père à des enfans non émancipés, et par un maître à ses esclaves, d'avec les legs faits à des étrangers.

Il suffit, par rapport aux premiers, que le tes tateur déclare en général avoir dicté et approuvé les dispositions de son testament, parce que l'obéissance aveugle que doivent les enfans non émancipés a leur père et les esclaves à leur maître, est pour eux un titre d'excuse (1).

(1) Et cependant la loi dernière. C. de his qui sibi adscri

Il en est autrement des dispositions faites en faveur d'un étranger qui a écrit le testament; elles ne sont valables qu'a 'autant que le testateur les a écrites lui-même, ou qu'il a reconnu spécialement les avoir dictées. La loi, § 8, D. de lege Cornelia de falsis, établit nettement cette différence. Inter filium et servum et extraneum testamentum scribentes hoc interest, quod in extraneo si specialiter subscriptio facta est, quod illi dictavi et recognovi pæna cessat et capi potest. In filio vel servo, vel generalis suscriptio sufficit et ad pœnam evitandam et ad capiendum.

ce que

Il y a même des auteurs qui exigent, par rapport à un étranger, que la reconnaissance spéciale soit consignée dans l'acte qui contient la disposition; et à les entendre, il ne suffirait pas qu'elle fût faite dans un codicille postérieur. C'est, ajoutent-ils, décide la loi 2, C. de his qui sibi adscribunt, en ces termes: Si testator codicillis quos scripsisti, legatum quoque seu fideicommissum reliquisse tibi sua manu adscripsit, non videris in pœnam senatus-consulti incidisse. Quod si testamentum dictasse codicillis significavit, legato quidem fideicommisso abstinere debes.

pas

[[ Mais il est aisé de voir que cette loi ne dit dans sa seconde partie, ce que ces auteurs lui font dire. Déclarer dans un codicille, qu'on a dicté soi-même le testament qui l'a précédé, c'est bien confirmer le testament en termes généraux; mais ce n'est pas confirmer spécialement le legs qui y est porté en faveur de l'écrivain de cet acte. Ce n'est donc pas parce que la reconnaissance du testateur est hors du testament, que la loi citée n'y a aucun égard: c'est uniquement parce que cette reconnaissance n'est pas spéciale.

Du reste, il n'est pas toujours facile de discerner, en cette matière, une reconnaissance spéciale d'avec une reconnaissance générale; et il est des cas où là-dessus les juges n'ont d'autre règle à consulter que leur conscience.

Le 14 août 1760, la dame Serinet dépose entre les mains de Largnaut, notaire, un testament par lequel, après avoir institué les sieurs Willemoaux et Bachelu, ses héritiers, avec substitution et préciput, au profit du sieur Bachelu, d'une somme de 200,000 livres, elle fait au sieur Cuinet, notaire, un legs de 25,000 livres.

En mars 1770, le sieur Cuinet, agissant comme particulier, écrit, sous la dictée de la dame Serinet, un codicilie qui modifie le testament en plusieurs points, et notamment ajoute au legs qu'elle lui avait d'abord fait par cet acte, celui du domaine de Raynaut, d'une valeur beaucoup plus considérable. Immédiatement après cette dernière disposition, la testatrice prend elle-même la plume, et écrit ces mots : j'approuve et veux l'exécution de tout ce que je donne audit sieur

bunt, veut qu'un esclave ne puisse profiter de la liberté qui lui a été léguée par son maître dans un testament qu'il a écrit, à moins que le testateur n'ait reconnu spécialement le legs.

Cuinet, tant par mon testament ci-dessus énoncé qu'en mon présent codicille. Et le 13 décembre suivant, le sieur Cuinet dresse, comme notaire, l'acte de suscription qui donne à ce codicille la forme mystique.

En 1777, la dame Serinet fait devant le notaire Cahuet un nouveau codicille, qui confirme les legs dont elle a précédemment gratifié le sieur Cuinet.

Elle meurt en janvier 1782.

Le sieur Willemeaux attaque le legs que contient au profit du sieur Cuinet le codicille du 13 décembre 1770; et soutient que le sieur Cuinet l'ayant écrit lui-même, il doit, par cette seule raison, être déclaré incapable de le recueillir.

Le 7 floréal an 11, arrêt de la cour d'appel de Besançon qui maintient le legs,

« Attendu que le notaire Cuinet, pour avoir coopéré à la rédaction de la carte intérieure, n'a rien fait de contraire au lois, rien fait qui ne soit permis et légitime, au moyen de la confirmation mise par la dame Serinet; que, dès-lors, il n'est pas pour cela devenu, sous sa qualité de notaire, suspect et incapable de recevoir l'acte de suscription d'un codicille dont il avait écrit, comme simple particulier, la carte intérieure; qu'aucune loi ne lui faisait défense de recevoir cet acte de suscription; qu'on ne peut suppléer au silence des lois, ni créer des nullités qu'elles n'ont point précisées ;

Que, si l'ordonnance d'Orléans porte défense aux curés et vicaires de recevoir aucun legs des personnes dont ils écrivent les testamens; cette défense n'est pas étendue aux notaires; qu'il y a d'ailleurs une grande différence à faire entre les curés et les notaires, et bien moins à craindre d'un notaire que d'un confesseur;

» Que le codicille de 1770 et le legs fait au notaire Cuinet dans ce codicille, se trouvent équivalemment répétés, confirmés et étendus dans un codicille postérieur de la dame Serinet, celui de 1777, qui est reçu par le notaire Cahuet, et auquel on ne reproche aucun défaut de forme; ce qui est un nouveau motif, quoique surabondant, de confirmer le codicille de 1770 dans toutes ses dispositions. »

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Les demoiselles Willemeaux, héritières de leur père, mort dans le cours de l'instance, se pourvoient en cassation contre cet arrêt.

M. Pons portant la parole sur cette affaire à l'audience de la section des requêtes, a dit en substance que la loi 2, C. de his qui sibi adscripserunt, valide le legs fait au profit du scribe d'un testament, lorsque le testateur le confirme luimême spécialement de sa propre main; qu'il ne s'agissait donc plus que de savoir si l'on pouvait regarder comme une confirmation spéciale, la déclaration écrite dans le codicille de 1770 de la main de la dame Serinet; mais que cette question étant toute de fait, le jugement qui l'avait décidée pour l'affirmative, ne pouvait, sous aucun rapport, donner prise à la cassation.

5. TOME IX.

Par arrêt du 26 février 1806, au rapport de M. Oudot,

« Attendu que s'il est vrai qu'aux termes de la loi romaine, loi territoriale de la Franche-Comté, le scribe d'un testament ne peut être institué Légataire par ce même testament, il est également certain, et d'après la même loi, que le legs est valable, si le testateur déclare et écrit de sa main qu'il le confirme, pourvu néanmoins que la confirmation ne soit pas générale, mais spéciale, et, comme le dit Dumoulin in forma dispositiva;

» Attendu que, dans l'espèce, il existe une confirmation du legs dont il s'agit, confirmation écrite de la main de la testatrice; qu'ainsi, la question à juger par la cour de Besançon, se réduisait au point de savoir à laquelle des deux classes, qui viennent d'être indiquées, appartenait cette confirmation, c'est-à-dire, si elle était générale ou spéciale;

» Attendu qu'une question de cette espèce, ne devant et ne pouvant se décider que d'après le sens et l'énergie des termes dont s'est servi le testateur, la décision, quelle qu'elle soit, ne peut jamais présenter une contravention expresse à la loi ;

>> Attendu que ces motifs écartent tous les moyens invoqués par les demanderesses; » La cour rejette..... » ]]

La seconde exception est lorsque celui qui écrit le legs, n'en doit tirer aucun avantage. On en a déjà donné des exemples dans le fils qui écrit un legs pour sa mère, dans le père qui en écrit un pour son fils émancipé. La loi 11, D. de Leg Cornelia de falsis, nous en fournit un autre en décidant qu'un père peut écrire un testament militaire, par lequel on dispose en faveur du fils soldat qu'il a sous sa puissance, parce que celuici doit en profiter seul. La loi 18 du même titre déclare pareillement qu'une femme peut recueillir le legs que lui a fait un étranger, quoiqu'il ait été écrit par son mari. La loi 10 va plus loin: elle décide que la disposition faite en faveur d'un tiers étranger, ne laisse pas de demeurer valable, lorsqu'après le testament, le Légataire tombe sous la puissance de l'écrivain de cet acte,

La troisième exception est marquée dans la loi 15, §. 6, du même titre le testateur institue deux héritiers, et les charge de fideicommis envers l'écrivain pour le cas où ils viendraient l'un et l'autre à décéder sans enfans: dans cette espèce, le fideicommis est valable.

Le quatrième est pour les impubères. La loi 22 du même titre porte formellement que impuberem in hoc edictum indicere dicendum non

est.

La cinquième, qui est établie par la loi 1, C. de his qui sibi adscribunt, a lieu lorsqu'un fils unique, quoique émancipé, écrit lui-même le testament par lequel son père l'institue héritier, parce qu'il doit succéder indépendamment à l'institution. On sent par cette raison, qu'il en serait autrement si le testateur avait plusieurs enfans,

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et que celui d'entre eux qui écrirait ses dernières volontés, se trouvât avantagé. Cela résulte d'ailleurs de la loi 14, D. de Lege Cornelia de falsis.

Enfin, la loi 22, C. de testamentis, déclare valable le legs fait à celui que le testateur a chargé de rédiger et dicter le testament, parce que le sénatus-consulte Libonien ne prononce la nullité que contre l'écrivain de la disposition, et que peines ne doivent pas être étendues d'un cas à l'autre.

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Du reste le sénatus-consulte Libonien n'avait pas été fait pour les testamens purement nuncu patifs, pas même pour celui dont l'héritier ou Légataire retenait un mémoire par écrit, parce que ce n'était pas ce mémoire, mais la résomption des témoins, qui le faisait valoir.

Telles sont les principales décisions du droit romain, touchant l'incapacité de l'écrivain d'un testament, d'ètre héritier ou Légataire. L'ordonnance de 1735 n'y a rien changé.

« Comme elle permet (dit Furgole), par l'article 9, au testateur, de faire écrire sa volonté consignée dans un testament solennel et mystique, tout ce qui est ordonné par les lois romaines, au sujet des personnes qui écrivent les dispositions testamentaires, devra être observé dans les pays de droit écrit (1), comme avant cette ordon

nance.

» Mais comme elle veut, par l'art. 5, que le notaire écrive lui-même les testamens nuncupatifs, dans cette espèce de testament, la disposition du sénatus-consulte Libonien ne peut avoir lieu qu'à l'égard du notaire qui aurait écrit en sa faveur des legs ou d'autres libéralités; et non pour les autres personnes qui auraient écrit ces testamens, ou bien des testamens olographes, parce que, dans ce cas, si tout autre que le notaire ou le testateur avait écrit le testament, il serait nul et imparfait.

» Par la même raison, nous croyons que, dans les pays coutumiers, où ces testamens doivent nécessairement être écrits, soit par l'un des notaires, suivant l'art. 23 de l'ordonnance de 1735, soit par le testateur, quand il fait une disposition olographe, selon l'art. 20, la peine de Libonien ne peut point y avoir lieu, excepté si le notaire couchait dans le testament qu'il a écrit, des dispositions en sa faveur, parce que, hors de ce cas, le testament serait nul et imparfait pour la forme. »

Ce que dit ici Furgole de l'assujétissement des officiers publics qui reçoivent les testamens, à la peine du sénatus-consulte Libonien, est conforme à nos lois. L'art. 27 de l'ordonnance d'Orléans porte que les curés, vicaires et gens d'église ne pourront recevoir les testamens et dispositions de

(1) Et dans la coutume de Valenciennes. Voyez au mot Testament, sect. 2, §3, art. 3, no 4, l'art. 115 de cette loi municipale et une déclaration du 19 décembre 17

dernière volonté, èsquels aucune chose leur serait donnée ou léguée. L'art. 63 de l'ordonnance de Blois confirme et interprète cette disposition: pourront les curés et vicaires recevoir les testamens et dispositions de dernière volonté, encore que par iceux y ait legs à oeuvres pies, saintes et religieuses, pourvu que les legs ne soient faits en faveur d'eux ou de leurs parens.

Ces textes ne parlent point des notaires ni des autres officiers autorisés à recevoir des testamens ; mais leur silence ne doit point nous faire croire que ceux-ci aient été regardés par nos législateurs comme capables d'écrire eux-mêmes des legs en leur faveur : il est bien plus raisonnable, dit Ricard, de présumer qu'il n'y avait personne au temps de ces lois qui doutât du contraire, et « que » la difficulté restait seulement à l'égard des cures » et des vicaires qui se prétendaient exempts de » cette prohibition, à cause de la faveur qui ac>> compagne leur ministère, qui a été le sujet pour lequel ces deux ordonnances ont été faites. »

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Les provinces belgiques ont, sur ce point, une loi qui confirme l'interprétation de Ricard; c'est l'édit perpétuel de 1611, dont l'art. 12 porte: Ils (les témoins) seront interpellés (de signer) par les NOTAIRES, curés ou vice-curés, auxquels nous défendons de recevoir èsdits testamens qui se passeront par-devant eux aucunes donations ou légats à leur profit ou de leurs parens, jusqu'au quatrième degré, selon supputation du droit civil inclusivement.

Cet édit et l'ordonnance de Blois étendent d'une manière très-sensible la disposition du sénatusconsulte Libonien. On a vu plus haut que les lois romaines laissaient subsister les legs écrits par un fils émancipé au profit de son père, par un père au profit de son fils émancipé, par un frère au profit de son frère dégagé comme lui des liens de la puissance paternelle, en un mot, par tous ceux qui ne devaient recueillir, ni par leurs propres mains, ni par le ministère des personnes soumises à leur puissance, ou à celle qui les liait eux-mêmes, les dispositions dont il s'agissait. Les lois françaises et belgiques sont plus sévères elles annullent toutes les libéralités écrites par les curés et les notaires en faveur de leurs parens ; et comme il n'y a ni curé ni notaire qui ne soit émancipé, du moins en pays coutumier, il est clair que la puissance paternelle ne doit être d'aucune considération en cette matière, et qu'il faut seulement faire attention à la qualité de parent.

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Il paraît cependant que le pays de droit écrit suivent encore la jurisprudence que les jurisconsultes romains avaient établie sur cette matière : c'est ce qui résulte d'un arrêt du parlement de Provence, du 16 janvier 1679, rapporté dans la suite de Boniface, qui a confirmé un testament fait au profit de la belle-mère du notaire. Chorier sur Guy, Pape, nous a pareillement conservé un arrêt du parlement de Dauphiné, du 16 décembre 1654, qui déclare valable un legs de 600 liv. fait à la fille du notaire qui avait écrit le testa

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[[ On peut encore voir là-dessus les articles Notaire, § 5, no 4 et 5; et Témoin testamenMaire, § 2, n° XI-16,

Mais aujourd'hui, plus de différence sur cette matière entre les diverses parties de la France. L'art. 8 de la loi du 25 ventose an 11, sur le notariat, porte que « les notaires ne pourront rece

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voir des actes dans lesquels leurs parens ou » alliés, en ligne directe à tous les degrés, et en ‣ collatérale jusqu'au degré d'oncle ou de neveu inclusivement, seraient parties, ou qui contiendraient quelque disposition en leur faveur. » Et l'art. 68 ajoute que tout acte fait en contravention à cette defense, sera nul comme acte public, et ne pourra valoir, s'il est signé de toutes les parties, que comme acte sous seing-privé. ]]

On a mis en question si la peine du sénatusconsulte Libonien doit avoir lieu contre celui qui dresse le projet ou la minute d'un testament.

La négative paraît assez constante dans le droit romain. C'est mal à propos, dit Furgole, que les auteurs ont prétendu « que la disposition était nulle, quand la minute ou le mémoire se trouve » écrit de la main de l'héritier ou du Légataire, » quoique l'original soit écrit d'une autre main › car, aux termes de la loi 6, D. de lege Cornelia » de falsis, on ne tombe dans la prohibition du Libonien, que quand il s'agit d'un testament » écrit, revêtu de toutes les formalités de droit : » hoc tamen tunc verum est cum testamentum

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» perfectum erit: cæterum si non signatum fuerit, magis est ut senatus-consulto locus non sit. » C'est donc contre le droit qu'on veut étendre le Libonien au cas où le testament n'est pas par» fait, et que le mémoire ou la minute en ont été » écrits par le Légataire ou par l'héritier car » alors le testament ne vaut pas en vertu de ce » mémoire ou de la minute, mais en vertu de la » rédaction qui a été faite par le notaire sur la › minute dressée auparavant. C'est ainsi que l'a » décidé Bartole, et que le parlement de Tou» louse l'a jugé, par un arrêt rapporté par Al» bert. »

Il est vrai qu'on trouve dans le Commentaire d'Anselmo sur l'édit perpétuel de 1611, un arrèt 'du conseil souverain de Brabant, du 5 novembre 1618, par lequel un avocat qui avait rédigé le projet d'un testament, fut condamné à 100 florins d'amende, et privé du legs que lui avait fait le testateur.

Il est vrai encore que Cuvelier nous a conservé une décision semblable dans son Recueil d'arrêts du grand conseil de Malines; voici en effet com

ment il s'explique: « Sur ce que le procureur » général du conseil de Brabant, M. Henri Flo»rius, comme aussi Floris Wanwaure, auxquel » messire Antoine, comte d'Hoostraten,. avait, » par son testament, fait quelques legs, sonte»naient iceux être valables, nonobstant que l'un » avait minuté, et l'autre écrit au net le testament » en question, ils ont, à la poursuite de messire >> Charles, comte dudit Hoostraten, été déchus » de leurs legs par arrêt du mois de mai 1616 : ce qui est notable particulièrement à l'égard dudit >> Wanwaure qui était au service du testateur, auquel le commandement de son maître servai » d'excuse. »

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[[ Mais ces arrêts ne peuvent pas avoir jugé, en point de droit, que le seul fait d'avoir dressé le projet d'un testament, forme contre le Légataire un titre d'incapacité et de déchéance; et tout porte à croire que ce fait n'a influé sur leur décision, qu'autant qu'ils l'auront considéré, d'après d'autres circonstances, comme une présomption grave de la suggestion exercée sur le testateur. ]]

XXI. La qualité d'exécuteur testamentaire ne forme point d'incapacité pour recevoir un legs. C'est ce que décide Basnage sur l'art. 450 de la coutume de Normandie; et tel est l'usage de tous les pays.

§ III. Quel temps faut-il considérer pour savoir si un Légataire est habile ou incapable?

I. Il est constant, aux termes du droit romain, que le Légataire doit être habile au temps de la confection du testament ou du codicille. En effet, la règle de Caton veut que le legs qui serait nul si le testateur venait à décéder immédiatement après avoir testé, ne puisse pas être validé par les événemens qui peuvent survenir jusqu'à son trépas. C'est ce que nous apprend la loi 1, D. de regula Canoniana. Or, le legs fait à une personne qui serait incapable au temps du testament, n'aurait certainement aucun effet, si le testateur mourait alors; il est donc impossible qu'il devienne. valable par la capacité postérieure du Légataire Cette raison seule prouve qu'il faut considérer le temps du testament, pour savoir si une personne est habile ou incapable de recueillir un legs; et c'est ce que justifie eacore la loi 59, § 4, D. de heredibus instituendis, qui, en même temps, déclare que l'espace intermédiaire entre le testament et le décès du testateur, est tout à fait indifférent en cette matière. Les termes de ce texte sont remarquables: Si heres institutus SCRIBENDI TESTAMENTI TEMPORE Civis Romanus fuit, deinde ei aqua et igni interdictum est, heres fit, si intra illud tempus quo testator decessit, redierit, aut si sub conditione heres institutus est, quo tempore conditio existit. IDEM ET IN LEGATIS.

On ne peut concevoir rien de plus décisif que ces autorités; cependant il y a des interprètes qui soutiennent qu'il faut seulement considérer si le

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