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sans frais par les greffiers, notaires ou autres dépositaires d'icelles, aux particuliers qui voudront les retirer, soit pour en faire usage, soit pour les supprimer. N'entendons que ceux desdits particuliers qui auront de la sorte supprimé dans le délai d'un mois leurs quittances, en en reconnaissant librement la fausseté, à laquelle la contagion de l'exemple aurait pu les entraîner, puissent être recherchés pour raison de la fabrication d'icelles. Leur remettons en ce cas, et pour cette fois seule ment, la peine prononcée par nos ordonnances, et imposons sur ce silence à notre procureur gé néral. Ordonnons que les Juifs seront tenus de signifier à leurs débiteurs et produire devant ladite chambre, ou tels commissaires et bureau d'icelle qu'elle jugera à propos de nommer à cet effet, et ce, dans le délai de six mois, à dater de la publication des présentes, les titres quelconques en vertu desquels ils forment des prétentions contre les chrétiens de la susdite classe; et que ces derniers seront tenus de fournir dans le mème délai, à compter du jour de la signification qui leur aura été faite desdits titres, leurs réponses et moyens au contraire, ensemble les quittances dont ils entendront se servir, passé lequel délai ni les uns ni les autres n'y seront plus recevables. Autorisons ladite chambre à faire comparaitre, si le cas échoit, les parties devant lesdits commissaires ou bureau, pour être ouïs sur leurs dires et moyens respectifs, soit pour la vérification des quittances qui pourraient être arguées de faux, soit pour la reconnaissance des autres faits qui pourraient être articulés, soit pour accorder termes aux débiteurs, déférer des affirmations, et généralement ordonner, pour l'instruction la plus sommaire desdites contestations, tout ce qui sera jugé par elle le plus expédient. Lui donnons, pour raison de ce, tout pouvoir, autorité et dispense nécessaires par ces mêmes présentes, pour ce regard seulement et sans tirer à conséquence en aucun autre.cas. Voulons en outre que, dans les séances que tiendra ladite chambre aux jours et heures qui seront indiqués par le président d'icelle, ou celui qui présidera en son absence, toutes les créances des Juifs, ainsi que les frais et dépens, y compris ceux du dépôt faits en exécution dudit arrêt, du 1 juillet dernier soient liquidés par elle définitivement et en dernier ressort; et cependant, par provision et jusqu'à ce que la liquidation soit achevée, nous avons fait et faisons très-expresses inhibitions et défenses, tant aux Juifs qu'aux chrétiens de la susdite classe, de contracter entre eux de nouvelles obligations, ou faire aucuns actes tendant à se libérer, n'est par devant personnes publiques, ou au moins deux préposés des lieux, à peine de nullité desdites obligations et actes, et de telle amende que la chambre jugera à propos d'arbitrer,

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A ces lettres-patentes, en ont succédé d'autres des 7 avril 1779 et 27 mai 1780. Je n'ai pas pu me procurer les premières : mais elles sont rappelées dans les secondes, qui sont ainsi conçues :

a Louis...., par nos lettres-patentes du 6 no5. TOME IX.

vembre 1778, nous avions attribué à la première chambre de notredit conseil souverain d'Alsace la connaissance des inscriptions de faux et des contestations relatives aux créances des Juifs d'Alsace sur les gens de la classe du peuple de ladite province; et par nos secondes lettres-patentes du 7 avril 1779, nous avons expliqué nos intentions en ce qui concerne les créances par lesquelles les Juifs de ladite province seraient dans le cas d'agir contre leurs débiteurs chrétiens de la classe du peuple. Nous avons fait connaître suffisamment quels étaient les motifs qui nous avaient détermi nés à donner ces deux règlements; mais nous sommes instruits, d'une part, que, malgré que quelques-uns de ceux qui ont été convaincus du crime de faux aient été punis suivant la rigueur des lois, cet exemple n'avait encore pu arrêter le cours d'un pareil désordre; de l'autre part, qu'une multitude d'autres débiteurs, bien qu'éloignés de faire usage d'un moyen si dangereux, d'un moyen si dangereux, mais pressés par les poursuites des Juifs leurs créanciers, ont récriminé contre eux, en les taxant d'usure, en sorte que, cherchant par cette accusation à éloigner l'instant d'ètre condamnés au paiement d'une dette contractée en connaissance de cause, et constatée par un titre dont ils avouaient la légalité, ils se mettent dans l'obligation absolue de prouver l'usure, mais s'exposent en même temps à tous les inconvéniens qui doivent résulter d'une accusation de ce genre, s'ils viennent à y succomber. Nous n'entendons point priver nos sujets de la faculté d'employer les différens moyens qu'ils peuvent opposer légitimement pour leur défense; mais nous envisageons en même temps que, si le crime d'usure est, de tous, celui dont la preuve s'acquiert le plus difficilement, il est de leur intérêt, ou qu'ils n'entreprennent pas légèrement et sans s'être bien consultés, une accusation dont le poids retombant sur eux faute de preuve, ne fait qu'augmenter la masse de leurs dettes, et entretient dans les esprits une fermentation et une animosité que nous avons à cœur d'éteindre; ou que, s'ils se croient fondés à prendre la voie dont il s'agit, ils aient du moins de leur côté la facilité de la suivre, comme leurs créanciers doivent l'avoir du leur pour défendre à l'occasion, sans être exposés les uns et les autres aux longueurs et aux frais inséparables du genre d'instruction qu'elle exige. Nous avons considéré d'ailleurs que le nombre des contestations relatives aux quittances arguées de faux, est devenu très-considérable; qu'en y comprenant celles relatives aux créances contre lesquelles les débiteurs ont opposé l'accusation d'usure, ou voudront l'opposer par la suite, il deviendrait, pour ainsi dire, impossible de terminer les unes et les autres, si nous n'y pourvoyions par notre autorité; et dans de pareilles circonstances, où il s'agit du bien et de la tranquillité d'une partie des sujets de notre province d'Alsace, et de faire jouir les individus de la nation juive des effets de la protection que nous voulons bien lui accorder, nous avons jugé devoir

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prendre des mesures propres à simplifier autant qu'il sera possible l'instruction de celles des affaires qui en sont susceptibles par leur nature, et d'en accélérer le jugement, sans néanmoins que, l'ordre du service de la première chambre de notre conseil souverain d'Alsace puisse en être dérangé, ni le cours des affaires interrompu.

» A ces causes............., ordonnons que nos lettrespatentes des 6 novembre 1778 et 7 avril 1779 seront exécutées selon leur forme et teneur, en ce qui n'y sera pas dérogé par ces présentes, à l'effet de quoi..... voulons et nous plaît ce qui suit:

» Art. 1. Nous avons évoqué à nous et à notre conseil toutes les plaintes que les débiteurs chrétiens de la classe du peuple ont formées ou voudront former par la suite pour faits d'usure contre les Juifs, pour raison des créances que ces derniers ont répétées ou répéteront contre eux, et nous avons renvoyé et renvoyons la connaissance desdites plaintes en la première chambre de notre conseil souverain d'Alsace, à laquelle nous attribuons, en tant que besoin est ou serait, toute cour, juridiction et connaissance que nous interdisons à toutes nos cours et juges. Défendons auxdits débiteurs de se pourvoir, pour raison de ce, ailleurs qu'en ladite chambre, à peine de nullité, cassation de procédure et de tous dépens, dommages et intérêts.......

4. Voulons que tous débiteurs chrétiens de la classe du peuple qui ont opposé aux Juifs leurs créanciers de fausses quittances, soient dûment avertis par des publications ordinaires, et même aux prones des églises paroissiales, d'avoir à retirer, dans deux mois pour tout délai, lesdites quittances, et à s'en désister; sinon et à faute de ce faire dans ledit délai, et celui passé, voulons qu'ils soient poursuivis et jugés comme faussaires, suivant la rigueur des ordonnances.

5. Autorisons en outre la première chambre de notredit conseil à accorder, régler et fixer, selon l'exigence des cas, les délais que les débiteurs chrétiens demanderont et requerront pour le paiement de ce qu'ils doivent aux Juifs, à la charge toutefois des intérêts du principal à raison de cinq pour cent lesquels courront du jour que les délais auront été accordés. »

Le conseil souverain de Colmar a enregistré ces lettres-patentes, le 22 juin 1780.].

SECTION II. De l'état des Juifs à Metz

et en Lorraine.

I. Le premier établissement des Juifs à Metz, paraît s'être fait en 1567, en vertu d'une ordonnance du maréchal de la Vieuville, alors gouverneur de Metz, qui permit à quatre familles juives de s'y établir, et de s'employer au prêt d'argent sur gages. Ces quatre familles se multiplièrent jusqu'au nombre de vingt-quatre; elles obtinrent, le 20 mars 1603, du roi Henri IV, sur l'avis du duc d'Épernon, gouverneur de Metz, des lettrespatentes, portant que ce prince prend sous sa protection et sauve-garde les vingt-quatre ménages

juifs, descendus des huit premiers établis à Metz sous le règne de son prédécesseur; qu'ils y continueront leur demeure et résidence, et qu'ils pourront trafiquer et négocier suivant leurs franchises, libertés et coutumes anciennes, prêter argent sur gages et sans gages.

En 1632, le nombre des Juifs s'étant accru à Metz, ils s'adressèrent au roi Louis XIII, qui, par ses lettres-patentes du 24 janvier de cette année, confirma les dispositions contenues dans celles de son prédécesseur.

Le 23 mai 1634, intervint un arrêt en forme de règlement au parlement de Metz, à la suite d'une instance entre les corps de métiers et les Juifs, qui permit à ceux-ci le commerce de marchandises d'orfévrerie, d'argenterie et de friperie, avec défenses à eux de faire le commerce de marchandises neuves. La disposition de cet arrêt, rendu avec les corps de métiers et de marchands, prouve que, dans ce temps-là, les Juifs étaient en usage de ne faire venir, vendre et débiter à Metz, que des marchandises vieilles.

[Le 10 avril 1647, autre arrêt entre les bouchers chrétiens et les bouchers juifs de Metz, qui maintient ceux-ci dans la liberté «‹ à eux accordée d'a» cheter aux marchés publics et ailleurs, du bétail, p et en exposer, vendre et débiter la chair, ainsi que les autres bouchers, en payant par eux les » droits de ville et maltôtes ordinaires. »]

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Le 25 septembre 1657, les Juifs obtinrent de nouvelles lettres-patentes confirmatives des précédentes, avec pouvoir de commercer toutes sortes de marchandises suivant leurs libertés, franchises et coutumes (1).

Se fondant sur la généralité de cette disposition, ils étendirent leur commerce de vieilles marchandises à celui de marchandises neuves; entreprise qui excita de nouveau la réclamation des corps de marchands, lesquels s'opposèrent à l'enregistrement des lettres-patentes dont il s'agit.

Les Juifs représentèrent que, s'étant établis à Metz par la bonté des rois, il fallait leur donner moyen d'y subsister; que, supportant les charges publiques, ils ne devaient pas être traités moins favorablement que les étrangers non naturalisés, qui avaient la liberté de vendre des marchandises étrangères de traite espèce; ils distinguèrent ainsi, dans les marchandises neuves, celles qui étaient fabriquées chez l'étranger, et celles du crû du pays; ils demandèrent acte de ce qu'ils n'entendaient faire le commerce de marchandises neuves que comme marchands forains, c'est-à-dire en magasin, sans exposition ni boutique ouverte.

Le parlement de Metz saisit l'affaire sous ce point de vue et rendit un arrêt contradictoire le 21 janvier 1658, par lequel les marchands et autres furent déboutés de leur opposition; et les Juifs

(1) [Il y est dit aussi qu'ils ne pourront à l'avenir choisir » un rabbin, et l'appeler des familles des Juifs établis hors » du royaume, sans au préalable s'être retirés par devers le roi, pour en obtenir la permission. » ]

maintenus et gardés dans la possession de commercer des marchandises étrangères comme faisaient les marchands forains.

Les marchands se pourvurent par requête civile contre cet arrêt, sur le fondement qu'il était contraire à celui de l'année 1634; mais, par un autre arrêt du mois de juillet 1658, ils furent encore déboutés de leur requête civile.

En 1694, les marchands tentèrent de faire restreindre la liberté accordée aux Juifs de faire commerce de marchandises étrangères, à de certains temps de l'année, sur le fondement de prétendus statuts anciens des corps de marchands, qui avaient été perdus et recouvrés; mais le parlement de Metz, invariable à cet égard, rendit un troisième arrêt contradictoire, le 16 juillet 1695, par lequel il maintint la communauté des Juifs dans la possession de vendre, en tout temps de l'année, des marchandises étrangères.

Les marchands se pourvurent en cassation contre cet arrêt, et le 11 juillet 1696, il intervint au conseil d'état un autre arrêt par lequel les marchands furent déboutés de leur demande en cassation.

En 1718, les différens corps des marchands de la ville de Metz se réunirent pour demander au roi que le nombre des Juifs fût réduit, comme étant à charge au public, et qu'il leur fût fait défenses de faire aucun commerce ni trafic, que celui du prêt d'argent à honnête intérêt.

Par arrêt contradictoire rendu au conseil d'état le 9 juillet de la même année, le roi, faisant droit sur le tout, ayant aucunement égard aux requêtes et mémoires des différens corps de marchands de la ville de Metz, et voulant néanmoins traiter favorablement les Juifs établis dans cette ville,

Ordonna que les lettres-patentes des rois ses prédécesseurs seraient exécutées selon leur forme et teneur et en conséquence permit aux Juifs établis à Metz, d'y continuer leur demeure au nombre de quatre cent quatre-vingts familles seulement, et leurs descendans, aux conditions suivantes :

Qu'à la diligence de M. le procureur-général ou de son substitut au bailliage de la ville de Metz, 'il serait dressé, par les élus ou chefs de la communauté des Juifs sans frais, un état de ces quatre cent quatre-vingts familles, et de toutes les personnes de l'un et de l'autre sexe dont elles seraient composées, lequel état serait déposé au greffe dudit bailliage, pour y avoir recours quand besoin serait ;

Que chacun des pères et des mères de famille serait tenu de faire enregistrer au greffe du bailliage tous les enfants qui leur naîtraient de l'un et de l'autre sexe; pour raison de quoi il ne serait payé que cinq sous pour tous droits, au greffier; Que les filles ou veuves juives ne pourraient à l'avenir attirer à Metz aucun Juif étranger par mariage;

Que les Juifs seraient tous obligés de demeurer dans le quartier Saint-Ferron, sans qu'ils pussent

posséder ni louer maisons, magasins, écuries, granges, caves ou greniers dans les autres quartiers de la ville, à peine, contre les contrevenans, d'amende qui ne pourrait être au-dessous de 3,000 liv. contre le Juif contrevenant, et de 1,000 liv. contre le propriétaire ;

Qu'ils seraient tenus de payer annuellement, ainsi que par le passé, à l'hôpital de Saint-Nicolas, la somme de 450 livres, à quoi avaient été com. mués les 200 francs messins d'ancien droit, établi le 6 août 1567; plus, 175 livres à la ville, à quoi avait été évalué le droit d'entrée et de sortie qui se levait anciennement sur chaque Juif, et 200 livres pour le logement du vicaire de la paroisse de Sainte-Ségolène ;

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Qu'ils ne pourraient choisir un rabbin sans la permission et l'approbation de sa majesté ;

Qu'ils ne pourraient aller par la ville, ni travailler en public, les jours de dimanche et de fète, sinon par l'ordre ou permission des commandans, de l'intendant ou des magistrats de Metz, ou dans un cas de nécessité urgente;

Qu'ils se conformeraient, pour le prêt d'argent, aux lettres-patentes des rois prédécesseurs de sa majesté, et aux règlemens faits sur cette matière, et ne pourraient garder les gages qui leur auraient été remis, au-delà du terme d'une année, ou de quinze mois au plus, après lequel temps, ils seraient tenus de les faire vendre, à peine de perdre les sommes qu'ils auraient prêtées;

Qu'ils ne pourraient prêter sur gages aux femmes en puissance de maris, aux enfans de famille, ni aux domestiques, à peine de perdre ce qu'ils auraient prêté, et de plus grande peine, s'il y échéait;

Qu'ils ne pourraient acheter, troquer, ni prendre pour gages aucune arme de soldats ni de bourgeois;

Qu'ils ne pourraient pareillement recevoir pour gages les outils des artisans, ouvriers, laboureurs et journaliers;

Que leurs droits et hypothèques leur seraient conservés sur les immeubles de leurs débiteurs, selon les règles de la justice, et conformément aux ordonnances, lois, usages et coutumes du pays;

Qu'ils seraient obligés de procéder devant les juges et consuls de Metz, dans les matières consulaires, pour les contestations qu'ils auraient avec les chrétiens, sauf l'appel au parlement, dans les cas qui y sont sujets; sa majesté leur réservant pour les contestations de Juifs à Juifs, la liberté de se pourvoir devant leur rabbin, et aux chefs de leur communauté, la connaissance de leur police, religion, coutumes, cérémonies et impositions;

Qu'il leur serait permis d'avoir des boucheries particulières pour la nourriture de leurs familles, avec défenses aux bouchers juifs de tuer un plus grand nombre de bestiaux que ce qui est absolument nécessaire pour la subsistance des mêmes familles, ni de vendre aux chrétiens d'autre viande que celle des quartiers de derrière des animaux, et les chairs

de ceux qui auraient été reconnus viciés des vices qui empêchent les Juifs d'en manger, suivant leur loi, à peine de 1,000 livres d'amende contre les

contrevenants;

Qu'ils seraient tenus de commettre deux Juifs experts, pour visiter tous les animaux qui seraient tués dans leurs boucheries, et reconnaître ces vices, lesquels experts seraient obligés de tenir un registre fidèle de la quantité de bœufs, veaux et moutons qui auraient été trouvés viciés de ces sortes de vices, et de ceux qui ne seraient point viciés, avec mention du nom des bouchers juifs qui les auraient tués et les débiteraient; et prêteraient serment devant l'un des conseillers du parlement de Metz qui serait commis pour cet effet, de bien et dûment s'acquitter de cette visite, d'avertir le procureurgénéral du roi des contraventions qui pourraient arriver, pour les amendes encourues être par lui poursuivies, et de remettre entre ses mains le registre dont il s'agit de six mois en six mois; à la charge en outre que les jurés bouchers de Metz continueraient leurs visites et inspections sur les boucheries des Juifs, ainsi qu'ils avaient droit de faire sur les autres boucheries, et qu'il s'était observé par le passé;

Qu'en cas de contravention à aucun de ces articles, les pères et les mères seraient responsables de leurs enfants, et les maîtres de leurs domestiques, pour le paiement des amendes qui auraient

eté encourues.

II. Quant à la Lorraine, l'état des Juifs dans cette province a d'abord été fixé par une déclaration du duc Léopold, du 20 octobre 1721. Cette loi a permis à cent quatre-vingts familles juives de continuer leur résidence dans les états de ce prince, d'y exercer leur religion, et de tenir leur synagogue sans bruit ni scandale, dans une de leurs maisons, sous la dépendance de la synagogue principale de Boulai, avec défense de reconnaître aucune synagogue étrangère, en quelque matière que ce fût : il a en même temps été permis à ces Juifs de commercer, en se conformant aux ordonnances, usages, statuts et règlements des lieux où ils seraient domiciliés.

Par arrêt du 11 juin 1726, le conseil du duc Léopold ordonna aux Juifs établis dans les états de ce prince, qui tiendraient des maisons à titre de propriété ou de location, dans l'intérieur des villes, bourgs ou villages, et qui se trouveraient mêlées avec celles des catholiques, de se défaire de ces mêmes maisons par vente ou autrement, et d'en sortir dans le mois, à peine, contre les propriétaires juifs, de confiscation de leurs maisons, et contre ceux qui ne seraient que locataires, de 2,000 livres d'amende. Il fut d'ailleurs réglé que les Juifs qui avaient droit de résider en Lorraine, seraient tenus de s'adresser, dans les villes, aux officiers de police, et dans les villages, aux maires et gens de justice, pour que ceux-ci leur désignassent, à l'écart, dans les endroits les moins fréquentés, des terrains ou maisons pour leurs habitations; en sorte que, parmi leurs maisons, il ne

pût y en avoir d'intermédiaires appartenantes aux sujets catholiques du duc.

Les usures que les Juifs exerçaient en Lorraine, surtout dans les campagnes, donnèrent lieu à un édit remarquable du 30 décembre 1728, qui fut enregistré à la cour souveraine le même jour. Cette loi déclara nuls tous les billets et actes sous seing privé, qui seraient faits avec les Juifs, tant pour argent prêté, que pour vente de marchan dises ou autre engagement; mais les lettres de change, les billets à ordre et les autres qui sont usités dans le commerce, furent exceptés de la prohibition.

Il fut en outre ordonné que, dans le cas où des Juifs se seraient rendus coupables de dol et d'usure envers quelques sujets catholiques, ils seraient punis par la perte de leurs créances, et tenus de payer le double de ses créances au débiteur, outre une amende de 500 francs, sans que ces peines pussent être remises ni modérées par les juges.

Enfin, un arrêt rendu au conseil d'état du feu roi Stanislas, le 29 janvier 1753, forme le dernier état de la jurisprudence relativement aux Juifs de Lorraine. Voici ce qu'il porte :

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>> Le roi s'étant fait représenter l'arrêt du conseil d'état du 26 décembre 1733, donné sur la requête du chef de la communauté des Juifs résidants dans ses états, par lequel il a été permis à toutes. les familles juives comprises dans la répartition qui avait été faite, en exécution d'un arrêt du 26 juillet précédent, et montant à cent quatre-vignts, de continuer leur résidence dans ses états, jusqu'à son bon plaisir; et les impositions sur les Juifs ayant depuis continué d'être faites sur le pied desdites cent quatre-vingts familles, sa majesté ne croit pas devoir déranger leurs établissemens, ni les frustrer du bénéfice de ces arrêts: étant aussi informée de différens abus et inconvéuiens qui naissent de l'exécution de l'ordonnance donnée par le duc Léopold, le 3 décembre 1728, concernant les actes qui se passent avec les Juifs, elle trouve à propos d'en suspendre l'exécution. Ouï sur ce le rapport du sieur Rouot, sa majesté, en son conseil, a ordonné et ordonne :

1° Que le nombre des Juifs qui seront admis dans ses états, demeurera fixé jusqu'à son bon plaisir, à cent quatre-vingts familles, et que sous le nom de famille seront compris le chef et tous. ses enfans et descendans des mâles, demeurant dans une seule et même maison, sans préjudice aux acquisitions faites jusqu'à ce jour par aucuns d'eux, en vertu de permission, et aux désignations faites dans quelques-uns des lieux de leur résidence, des rues ou terrains pour y former des habitations, dans lesquels ils seront maintenus;

2o Que les syndics desdits Juifs déposeront dans le mois, au greffe de son conseil, un rôle ou état exact de tous les Juifs, chefs de famille, qui sont actuellement dans ses états, contenaut leurs noms et le lieu de la résidence actuelle de chacun d'eux, pour être faite et arrêtée en sondit

conseil, la liste de ceux qu'elle jugera à propos de tolérer en chacun lieu, jusqu'audit nombre de cent quatre-vingts familles, et de suite envoyée et publiée partout où besoin sera;

» 3o Que lesdits Juifs résidant dans ses états composeront une seule communauté, de laquelle sa majesté a nommé et établi pour syndics, Salamon Alcan, Isaac Behr, et Michel Godechaux, demeurant à Nancy;

4o Ceux qui dans la suite pourraient obtenir de sa majesté permission de s'établir dans ses états, pour remplacer des familles actuelles qui seraient éteintes, seront tenus de faire registrer ladite permission au greffe du bailliage de la résidence, et de la communiquer au premier officier du lieu, à peine de privation de la grace;

»5o Ordonne au surplus sa majesté, que les édits, ordonnances, déclarations et arrêts de réglements, donnés, tant au sujet de l'exercice de leur religion', que de la police, commerce et autrement, seront suivis et exécutés, à la réserve néanmoins de l'ordonnance du 30 décembre 1728, concernant les actes qui se passent avec les Juifs; dont sa majesté a suspendu et suspend l'effet et l'exécution jusqu'à ce qu'elle en ait autrement ordonné.»

Cet arrêt a été revêtu de lettres-patentes, et enregistré au parlement de Lorraine le 5 avril 1753.

Le 22 avril 1762, cette cour a rendu, sur le réquisitoire du procureur-général, un arrêt par lequel elle a ordonné que les premier, second, troisième et quatrième chefs de l'arrêt du conseil du 26 janvier 1753, et le rôle arrêté le 26 avril suivant, seraient exécutés selon leur forme et teneur ; en conséquence, que toutes les familles juives qui étaient établies en d'autres lieux du ressort que ceux que spécifiait ce rôle, seraient tenues de sortir des états dans le mois, sinon qu'elles en seraient expulsées, et leurs effets confisqués au profit du domaine du roi.

[[SECTION III. De l'état des Juifs en Piémont, en Savoie et dans le comté de Nice. Les constitutions du roi de Sardaigne du 7 avril 1770, contiennent un titre exprès sur les Juifs. C'est le 8e du livre 1er, et il est divisé en 13 chapitres.

Le premier oblige les Juifs d'habiter, dans les villes où ils sont tolérés, des quartiers séparés et fermés.

Le second leur fait défense de bâtir de nouvelles synagogues, et leur enjoint de célébrer leur culte

à voix basse.

Le troisième leur interdit toute acquisition d'immeubles.

Le quatrième les assujettit à porter une marque distinctive.

Le cinquième détermine les effets qu'il leur est défendu d'acheter et de négocier.

Le sixième prononce des peines contre les Juifs qui blasphémeraient le nom de Dieu et ceux des saints.

Le septième les oblige de demeurer renfermés pendant les jours de la passion de J. C.

Le huitième défend de les attirer par force à notre sainte foi.

Le neuvième les garantit de toute attaque, de toute insulte et de tout trouble dans leurs rits religieux.

Le dixième défend aux convertis du judaïsme, de converser avec les Juifs.

Le onzième maintient dans la possession de tous leurs biens, les Juifs convertis à la foi.

Le douzième est rapporté ci-après, sect. 4, n 1.*

Le treizième déclare les Juifs justiciables, tant au civil qu'au criminel, des tribunaux ordinaires. V. ci-après, sect. 5, § 6. ]]

SECTION IV. Décisions particulières concernant les Juifs.

10 Il existe, sous la date de l'an 1280, un règlement qui fait défenses aux Juifs d'avoir des domestiques chrétiens de l'un ou de l'autre sexe. On ne sait pas par qui il a été fait; mais il se trouve au registre Olim du parlement de Paris, feuil

let 50.

[Voici comment il est conçu: Statutum fuit et ordinatum quod aliqui christiani seu christianæ non morentur in domibus Judæorum ut eis serviant, et quod Judai aliquos christianos seu christianas in suis domibus ut eis serviant, retinere non præsumant.

Le conseil souverain de Colmar a adopté ce règlement à son ressort, par un arrêt de règlement du 19 janvier 1717.

Mais il l'a modifiée, par un autre du 25 janvier 1766.

Les préposés des Juifs de la Haute et Basse-Alsace avaient représenté que, par la loi de Moïse, il leur est enjoint de sanctifier le jour du sabbat, et de s'abstenir de tout ouvrage; que de tous temps ils s'étaient servis de chrétiens de bonne volonté qui avaient vaqué dans leurs maisons aux travaux nécessaires et prohibés par la loi, dont le roi daignait tolérer l'exercice en cette province, et qu'ils récompensaient largement ces petits services; de sorte que c'eût été nuire à quantité de persones qui se trouvaient dans la nécessité, que de leur interdire une ressource capable de les soulager dans leur misère; que les évêques de Bâle, par différens décrets qu'ils rapportaient, avaient autorisé cet usage dans leur diocèse; que cependant quelques procureurs fiscaux, moins par zèle que par intérêt, faisaient défenses aux justiciables de leur district de secourir les Juifs les jours de sabbat, et les menaçaient de fortes amendes; qu'il était pourtant visible que cet usage immémorial n'était point contre les bonnes mœurs, qu'il était autorisé même eu Italie, ainsi que dans toutes les villes du royaume où il y avait des Juifs.

C'est sur cet exposé qu'est intervenu l'arrêt cité. Il permet aux Juifs « d'employer dans leurs mai» sons, les jours de sabbat, les chrétiens qui vou

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