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unes contre les aultres, et les plonger au sang civil, et mesmes les mectre à l'abandon de la tyrannie espaignole, soubz umbre de la religion.

A quoy, oultre l'expérience des effectz, nous donne aussy occasion vostre propre lettre, puisqu'en ces mesmes propos par lesquelz vous taschez de nous persuader que ne voulez entrer en guerre civile, vous donnez tacitement à cognoistre que, s'il y a aulcunes provinces qui refusent les conditions que vous estimez estre justes et raisonnables, c'est-à-dire, pour parler clairement, qui veuillent maintenir leurs pays et villes en repos par ung religionsvrede, que vous ne vous vouldriez perdre pour les porter en chose que estimez estre contraire à nostre union générale.

Par où vous voyez, messieurs, sy nous avons occasion de tenir pour suspectz ces traictez, et de les appeler particuliers, puisque par là nous voyons la plus grande part des provinces en estre forclose, et estre apprestée ungne plus cruelle boucherie du sang de noz frères et compatriotz qu'oncques ne fust veue par dechà.

Car, si vous voulez abandonner tous ceulx qui ne vouldront renuncher au religionsvrede, il fault nécessairement que, ou vous leur faciez la guerre, ou la laissiez faire aux Espaignolz.

Si vous la laissez faire aux Espaignolz, ne voyez-vous pas que par vostre paix non-seulement vous ne les faictes pas sortir, mais mesmes vous les inthronisez et plantez plus avant qu'ils ne furent oneques?

Et par ainsy tous voz traictez ne serviront que pour vous amener soubz le joug des Espaignolz, lequel vous faictes profession d'abhorrir.

D'aultre costel, sy vous seulz entreprenez de les réduire par force et les faire quicter par armes le religionsvrede, pour y maintenir la seule religion catholicque romaine, et que pour cest effect vous avez entreprins de dresser ung corps d'armée, il fauldra que vous donniez au Roy les moyens de maintenir non-seulement le siége de Maestricht, mais aussy tout le faix de la guerre, jusques à ce que vous ayez domté le reste de tout le pays qui ne se contentera de la seule religion catholicque romaine en quoy certes vous entreprendrez de faire plus que ne feirent oncques ne l'empereur Charles ne les roys de

France, d'Angleterre, ne tous les princes de la chrestienneté. Et quand bien vous en pourriez venir à boult, ce ne sera, sinon premièrement mectant vostre propre pays et vostre peuple en évident dangier de manifeste ruyne et d'estre nonseulement pillé, gasté et saccagé de ses voisins, mais aussy rongé des contributions et tailles extraordinaires qu'il fauldra faire sur culx pour l'entretènement d'une sy pesante guerre, et finallement ce ne sera sinon en baignant voz mains au sang de voz frères, alliez et compatriotz: en quoy nous vous donnons à juger sy par ce moyen vous maintiendrez la pacification de Gand, laquelle vous prenez pour fondement de voz desseings, et sy vous cheminerez de mesme pied que feirent alors les estatz, quand ilz aymèrent mieulx de quicter (1) à ceulx d'Hollande et Zélande, avecq lesquelz ilz estoyent en guerre, leur religion, mesme avecq l'exclusion de la catholicque romaine, que de plus longtemps leur estre ennemis, à l'appétit des Espaignolz ausquels alors ilz estoyent confédérez et conjoincts: là où, au contraire, vous, pour complaire aux Espaignolz, desquelz vous avez juré l'expulsion, vous banderez à la ruyne et extermination de voz compatriotz, desquelz vous avez juré la conservation et secours, pour ne leur accorder leur religion, avecq la conservation et maintiènement de la catholicque romaine, à quoy vous estes seulement obligez, et non plus avant.

Or, messieurs, comme ces choses sont sy claires et évidentes qu'elles n'ont besoing de grandes preuves, nous vous prions derechief les peser meurement et sans passion, et les confronter avecq lesdictes lettres interceptées, èsquelles vous verrez que les ennemis mesmes, tenans voz desseingz pour ung poco de ayre(2), ne font que se mocquer de vous, taschans seulement d'entretenir par tous moyens les désunions et schismes qu'ilz y ont semez par leurs bons ministres, lesquels mesmes vous voyez comme ilz entendent de récompenser finalement. Et vous prions, avecq toute instance du monde, qu'il vous plaise une fois, retranchant les discours et contestations, monstrer par les effectz que vous désirez maintenir l'union et assister vostre patrie contre

1) Quicter, laisser.

(2) Mots espagnols: Un peu de vent.

la tyrannie des oppresseurs, vous résolvans une fois finalement à effectuer les trois pointz susdicts. Et de nostre part, vous vous pouvez asscurer que nous ne manquerons en rien de tout ce qui concernera nostre debvoir en vostre endroict, pour vous assister aussy de tous noz moyens et facultez, ct vous maintenir en tous voz priviléges, droitz et libertés, sans souffrir que soyez forcez ou constrainctz en aulcune chose contraire à iceulx, soit pour le regard de la religion ou aultrement, et surtout de procurer une bonne, seure, ferme et salutaire paix à nostre pouvre et affligée patrie. A quoy Dieu nous veuille donner sa grâce et vous maintenir, messieurs, en santé et vie longue.

D'Anvers, le xxvш d'apvril 1579.

Voz bien bons et affectionnez amys,
Les estatz généraulx des Pays-Bas.

Par ordonnance desdicts estatz :
A. BLYLEVEN.

A messieurs messieurs les trois estatz du pays et conté d'Arthois et députez de Haynault, Lille, Douay et Orchies.

Rec. de la Ch. des représent., t. III, fol. 142.

XXXII.

Lettre des états généraux aux états de Lille, Douay et Orchies, pour les prier derechef de demeurer en l'union générale et d'envoyer leurs députés à Anvers.

29 avril 1579.

Messieurs, nous avons receu voz lettres du xyme de ce mois d'apvril responsives sur les nostres du vir dudict mois, par lesquelles n'avons voulu tauxer en façon aulcune vostre intention au regard de l'entretènement de la pacification de Gand et

réconciliation générale avecq Sa Majesté, par préallable sortie des Espaignolz et leurs adhérens, voires, au contraire, avons par noz précédentes vostredicte intention trouvé, comme la trouvons encoires, bonne et louable, mais vous avons bien voulu remonstrer que la voye de procéder par traictez particuliers estoit dangereuse, et qu'on en debvoit plustost craindre une séparation des provinces et guerre intestine, qu'espérer une bonne et asseurée paix, avec la sortie des Espaignolz et leurs adhérens en quoy nous pensous avoir faict vers vous l'office de vrays amys et confédérez, pour maintenir l'union générale et vous préserver d'ung plus grand mal et misère perpétuelle. Car ceulx qui traictent avecq vous de la part des ennemys, ne taschent à aultre chose que vous desjoindre des aultres provinces et mectre en guerre intestine, ou du moins vous tenir en suspens, soubz l'espoir et attente de ladicte sortie des Espaignolz, et cependant (nous estantz frustrez de vos contributions et assistence) avecq plus grande commodité invahir les aultres provinces et empescher le commun secours de Maestricht et d'aultres places, sans une fois penser à bon eschient de faire sortir lesdicts Espaignolz, comme monstrent assez les exemples du passé et est facil à comprendre d'ung chascun, parce qu'il y a certaines nouvelles que, en lieu de ladicte sortie, le Roy envoye par dechà encoires aultres grandes troupes des Espaignolz et Italiens. Et pour plus clairement entendre les tromperies et faulsetez dont usent ceulx qui vous mènent par ceste promesse, nous vous envoyons, joincte à ceste, la copie d'une lettre déciffrée, interceptée par mons" le conte de Lalaing et escripte en ciffre par la main propre de Alonço Curiel, pagador, se tenant à Gravelingues, pour illecq entretenir le sieur de la Motte et aultres; par laquelle verrez ouvertement en quelle es time il tient ceulx-là qui se sont laissez gaigner, et comment il se mocque avecq vostre corps d'armée, et quelle affection il monstre au regard de la sortie desdicts Espaignolz. Vous priant partant de vous vouloir bien garder, sans vouloir passer oultre, à la faulse persuasion d'iceulx qui se sont laissez corrompre et vous désirent abuser et ruyner, ains que voeuillez demourer en l'union générale, et quant et quant (comme entendons qu'avez desjà prudemment résolu) envoyer voz députez en ceste assemblée des estatz généraulx, pour conjoinctement adviser et una

nimement poursuivre la paix générale à Coloigne, où espérons que les députez de la généralité (qui sont desjà six ou sept jours en voye) traicteront, par le moyen de la Majesté Impériale, une bonne et asseurée paix, sy ne soyent empeschez ou traversez par ces traictez particuliers. Vous priant derechief de vouloir tenir la main, comme avez bien encommenché, que lesdicts traictez particuliers ne soyent continuez. Nous, de nostre part, présentons de vous donner toute satisfaction et de vous assister, ensemble et voz bourgeois et voz alliez, et complaire en toutes choses raisonnables et possibles. A tant, messieurs, prions le Créateur vous tenir en sa saincte garde, et donner en repos toute félicité. D'Anvers, le XXIX

d'apvril 1579.

Voz bien bons et affectionnez amys, Les estatz généraulx des Pays-Bas.

Par ordonnance desdicts estatz :

A. BLYLEVEN.

A messieurs messieurs les estatz des villes et chastellenies de Lille, Douay et Orchies, et à messieurs les prélatz, ecclésiasticques et nobles d'icelles villes et chastellenies, ou à leurs députez.

Archives du royaume : États généraux, t. II, fol. 175.

XXXIII.

Traité conclu à Arras, le 17 mai 1579, entre les commissaires du Roi et les députés des provinces d'Artois, de Hainaut et des villes et chatellenies de Lille, Douay et Orchies; éclairci et signé à Mons le 12 septembre suivant.

PHELIPPE, par la grâce de Dieu, roy de Castille, de Léon, d'Aragon, etc., etc. A tous ceulx quy ces présentes verront, salut.

Comme, après la retraicte au chasteau de Namur de feu nos

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