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IV. Celles de Marsal et de Metz-évêché ne se sont pas expliquées d'une manière aussi précise: elles ne parlent pas des Servitudes continues; elles disent seulement que « droit de Servitudes discontinues sur le fonds » d'autrui, ne peut s'acquérir, s'il y a titre » ou possession de temps immemorial ».

Les dispositions de ces coutumes sur la prescription en général, suppléent à leur silence sur celle des Servitudes continues en particulier. L'art. 78 de celle de Marsal et l'art. 1 du tit. 16 de celle de Metz, admettent la prescription des héritages ou autres choses prescriptibles, par trente ans, entre présens. ou absens; mais l'art. 82 de celle de Marsal et l'art. 6 du tit. 16 de celle de Metz ajoutent «< qu'on ne peut prescrire la Servitude de » prendre jour sur l'héritage d'autrui, par » quelque laps de temps que ce soit, s'il n'y » a en la fenêtre pattes ou assiettes de ven» tillons, ou grilles et araignées du dehors » qui sont marques de ladite Servitude, ou » bien qu'il n'y ait titre de constitution ».

Lalaure a mal-à-propos confondu cette coutume de Metz évêché, avec celle de Metz ville et cité, dans le chap. 2 du liv. 2 de son ouvrage, où il applique le commentaire anonyme donné sur cette dernière coutume, à la première, qui est très-différente.

V. La coutume de Metz-ville et cité présente des difficultés d'une autre espèce. L'art. 1 du tit. 13 porte d'abord, en général, que « la Ser» vitude s'acquiert par celui qui en a joui pai» siblement par vingt ans et vingt jours, au vu » et au su d'un tiers », c'est-à-dire, entre pre

sens.

L'art. 2 ajoute : « le droit dé passage, pátu» rage, conduit d'eau, égoût et autres Servi» des dont l'usage n'est continuel, ne s'acquiert » sur l'héritage d'autrui, s'il n'y a titre oujou»issance paisible de vingt ans et vingt jours, » depuis la contradiction du seigneur ou pro

»priétaire, par le moyen de laquelle ce droit » a été prescrit ».

Le commentateur anonyme de la coutume de Metz assure que la prescription immémoriale n'est point exclue par l'art. 2, pour le cas où la possession n'aurait pas été précedée de contradiction. Lalaure adopte aussi cette décision ; il observe, à ce sujet, « qu'il est as» sez juste d'appliquer cette maxime à toutes » les coutumes dans lesquelles le titre n'est » pas absolument essentiel pour acquérir les » Servitudes, parceque la possession immé» moriale a bien plus de force que toutes les » autres possessions; que, selon Dumoulin, » elle a presque autant de force que le titre » même ; et qu'elle fait présumer que les cho»ses ont eu un commencement légitime, >> exempt de toute suspicion de fraude ».

Ces deux auteurs citent un arrêt du parlé ment de Metz, du 28 juin 1725, qui l'a ainsi ju. gé, pour un droit de vain pâturage, au profit d'un particulier.

Cet arrêt est d'autant plus remarquable, qu'il s'agissait d'un canton qui était dans le ban de la ville. L'hôtel de ville intervint, et prit le fait et cause de son pâtre qui contestait le vain pâturage: enfin, les trois ordres de la ville de Metz formerent opposition à l'arrêt; ils interjeterent même appel d'un jugement interlocutoire de l'hôtel de ville, sous prétexte qu'en admettant la preuve de la possession immemoriale, il était contraire à la disposition de l'art. 2. Un second arrêt, du 17 janvier 1726, confirma le premier.

Cette règle reçoit néanmoins une exception lorsque la possession est contraire à des titres ou à des droits qui en tiennent lieu. Le commentateur anonyme de la coutume de Metz cite un autre arrêt du 2 juin 1706, qui paraît fondé sur cette distinction. Cet arrêt « a fait » defenses au meunier de Louvigny, d'envoyer » vain-pȧturer ses bestiaux sur le ban de la » Hautonnerie, séparément du troupeau com» munal de Louvigny, malgré la possession >> immémoriale que ce meunier et le seigneur » de Louvigny, son maitre, alléguaient; et » cela, parceque tout le droit du ban de Lou» vigny sur celui de la Hautonnerie, n'étant » qu'un simple parcours réciproque, on n'a» vait pu l'étendre, par quelque possession que » ce fût, jusqu'à charger ce dernier ban d'un » troupeau à part et particulier au meunier ».

L'art. 19 de la même coutume dit que «< nul » n'est tenu de porter les eaux ou égoûts de » son voisin; s'il n'en appert pas titre on pos>> session suffisante ».

Cet article semble d'abord contraire à l'art. 2, qui met les conduits d'eaux et égoûts au

nombre des Servitudes discontinues et imprescriptibles, tant qu'il n'y a pas eu de contradiction.

On pourrait dire, à la rigueur, que l'art. 19 peut se rapporter à cette prescription; mais dans ce cas, cet article serait au moins inutile. Le commentateur propose une conciliation très-raisonnable de ces deux articles.

« L'art. 2 (dit-il) n'a en vue que les égoûts destinés à l'écoulement des eaux sales, qui sortent ou qu'on jette des cuisines, écuries ou autres endroits des maisons (1), et qui forment une Servitude tout-à-fait incommode.

» L'art. 19, au contraire, est relatif aux eaux pluviales, qu'on appelle en droit jus stillicidii. Cette sorte d'égoût est mise en droit au nombre des Servitudes continues, parceque, quoiqu'il ne pleuve pas toujours, les chenaux, gouttières, égoûts ou autres tuyaux servant à l'écoulement des eaux de pluie, paraissent et existent.

» Coquille, sur la coutume de Nivernais, tit. 10, art. 2, et Dumoulin, sur celle de Blois, art. 230, distinguent ces deux espèces d'égoûts ; et c'est ainsi qu'on l'observe à Metz.

ART. III. Coutumes où l'on acquiert les Servitudes par la prescription ordi

naire

.I Ces coutumes sont celles d'Artois, art. 72; d'Auvergne, chap. 17, art. 1, 2, 3 et 4 (2); de Béarn, rubrica de præscriptionibus, art. 4; de Boulonnais, art. 120; de Châlons, art. 144; de Chauny, art. 69; de la Gorgue, art. 43 et 45; de Nieuport, rubr. 15, art. 6; de Ponthieu, art. 115, de Saint Omer, bailliage, art. 21; de Saint-Omer, ville et échevinage, art. 30; de Toul, art. 107, de Valenciennes, art. 93; de Vermandois, art. 145.

Toutes ces coutumes ne sont pas d'accord sur le temps nécessaire pour la prescription; mais elles le règlent toutes sur celui qu'elles exigent pour les autres matières réelles ; et la plupart n'ont qu'un seul et même article pour la prescription de ces matières en général, et celle des Servitudes en particulier.

La coutume de Ponthieu est celle qui adopte la prescription la plus courte : elle n'exige que vingt ans entre gens lais et non privilégiés, présens ou absens.

La coutume de Valenciennes exige vingt ans entre presens, et trente ans entre absens.

(1) Le commentateur ajoute que c'est ce qu'on

nomme jus cloaca; mais on a vu dans le S. 15, quela Servitude de cloaque était tout différente Rome.

(2)[[ V. l'article ue, S. 4, no 1 bis. ]]

Les coutumes de Saint-Omer, bailliage et ville, disent simplement que les Servitudes se peuvent acquérir, soit par titre, soit par possession suffisante à prescription. Ces coutumes ne fixent point le temps nécessaire à la prescription; mais comme elles sont locales de la coutume d'Artois, où la prescription est de vingt ans entre présens, trente ans entre absens. et quarante ans contre l'église, c'est aussi là la règle qu'il faut suivre en matière de Servitude.

Il en est de même de la coutume de Toul, qui porte simplement que les Servitudes urbaines et rustiques s'acquièrent par la prescription. On doit se régler sur l'art. 137, qui fixe la prescription à trente années contre les laïcs, et à quarante années contre l'église.

Les coutumes d'Auvergne, de Châlons, de la Gorgue et de Vermandois, admettent aussi la prescription trentenaire; cela ne doit néan moins s'entendre que des majeurs et des autres personnes capables de poursuivre leurs droits. C'est la décision de l'art. 3 de la coutume d'Auvergne.

Il faut observer au surplus que, dans la coutume d'Auvergne, la prescription de trente ans a lieu contre l'église même, parceque l'art. 1 du titre des prescriptions porte expressément qu'il n'y a qu'une seule prescription, qui est » de trente ans, à laquelle toutes autres pres»criptions, soit greigneurs ou moindres, sont » réduites.

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L'art. 44 de la coutume de la Gorgue exige, au contraire, une possession de quarante ans contre l'église ; et c'est le droit commun (1).

La coutume de Béarn porte simplement : En prescription de Servitudes, si a gardat lo dret comun, c'est-à-dire, le droit écrit. V. ce qu'on a dit sur le parlement de Pau, dans le S. 22, art. 7.

La coutume de Nieuport veut aussi que « toutes prescriptions de Servitudes, soit con>>tinues ou discontinues, soient réglées selon la » disposition du droit écrit et commun »>.

II. On a cru devoir mettre dans cette classe les coutumes d'Artois et de Boulonnais, quoiqu'elles ne parlent pas nommément de la prescription des Servitudes. Mais l'art. 72 de la première admet la prescription de vingt ans entre présens, de trente ans entre absens, et de quarante ans contre l'église, pour les héri, tages, droits réels ou personnels, corporels ou incorporels, à titre ou sans titre; et Maillard comprend avec raison les Servitudes sous ces termes généraux. Il rapporte trois arréts du parlement de Paris des 13 mars 1691, 2 juin

(1)[[ . l'article Prescription, sect. 3, § 4. ]]

1706 et 22 juillet 1722, qui l'ont ainsi jugé : le premier, pour un droit de pâturage, au profit d'un particulier; le second, pour un droit de vue; et le troisième pour un cantonnement prohibitif entre les habitans d'une même paroisse. L'art. 120 de la coutume de Boulonnais admet la prescription de vingt ans entre présens ou absens pour chose mobile ou immobile, droit corporel ou incorporel, avec ou sans titre ; et Babel (cité par Lalaure) dit que la prescription a été admise plusieurs fois par des sentences confirmées par arrêt, pour un droit de passage.

III. On a mis à plus forte raison dans cette classe la coutume de Châlons, parcequ'on a cru, avec Godet et Lalaure, que l'art. 144 parle de l'acquisition des Servitudes, et non pas de leur extinction par prescription. Cette coutume n'a effectivement que deux articles dans le titre des Servitudes, l'art. 143 et l'art. 144. L'art. 143 porte : « Par la coutume de » Châlons, le pied saisit le chef, c'est-à-dire, » qu'on peut lever son édifice sur la place tout » droit, à plomb et à ligne, si haut que bon » lui semble, et contraindre son voisin de re» tirer chevrons et toute autre chose portant

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sur sa place, par quelque temps que les cho»ses aient été en cet état, et fùt-ce de cent »ans ». L'art. 144 dit ensuite : « Vues et » égoûts et autres Servitudes se prescrivent » par trente ans, encore que le possesseur » n'eût tilre ».

Cependant Billecart prétend qu'il n'est question, dans cet article, que de la prescription contre les Servitudes. « On explique ainsi » (dit-il) le présent article: vues et égoûts se »perdent par celui qui en a le droit par tre; et la liberté s'acquiert par le possesseur de l'héritage chargé, encore que le possesseur n'eut titre par trente ans ».

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Lalaure a fort bien prouvé que cette interprétation était forcée. Dès que l'art. 144 parle des Servitudes, sans faire mention des fonds sur lesquels elle peuvent être constituées, le mot possesseur ne peut pas s'appliquer à ces fonds, mais aux Servitudes. Or, le possesseur d'une Servitude n'est pas celui qui la doit, mais bien celui à qui 'elle est due. Qu'auraitil été besoin d'ailleurs d'un article exprès, pour annoncer que les Servitudes en particulier s'éteignent par la prescription trentenaire? Un point aussi certain ne valait guère la peine d'en faire un article.

On peut remarquer encore que l'art. 145 de la coutume de Vermandois est, mot pour mot, conforme à l'art. 144 de la coutume de Chá lons; et que Buridan et Lafond l'ont également

entendu de la prescription pour acquérir. Frontin, dans sa conférence sur l'art. 186 de la coutume de Paris, Boucheul, sur l'art. 372 de celle de Poitou, no 174, et tous les auteurs, ont adopté cette interpretation, quoique Coquille, dans ses Institutions coutumieres, y ait donné le même sens que Billecart. Enfin, le procès-verbal de ces deux coutumes porte « que cet article a été accordé pour >>coutume nouvelle, à cause que le pays est pays » de frontière, sujet aux guerres, et que, par » ce moyen, les possesseurs peuvent souvent perdre leurs titres». Cette explication dissipe tous les doutes. La perte des titres est favorable à la libération des Servitudes, par la raison même qu'elle est contraire à leur conservation. Il s'agit donc bien ici de l'acquisition, et non pas de l'extinction des Servitudes.

Lalaure pense néanmoins que c'est aussi forcer le sens de l'art. 144 de la coutume de Chálons, que de l'appliquer à toutes les Servitudes. « Il n'est (dit -il) question que de vues et » égoûts et autres Servitudes de la même es»pèce, et non des Servitudes discontinues, » telles que celles de passage et puisage ».

Lalaure veut donc que ces dernières ne puissent être acquises par la possession trentenaire, à moins qu'elle n'ait été précédée de contradiction. Il applique la même décision aux coutumes de Chauny, Metz, Ponthieu et Vermandois. Mais cette distinction est absolument insoutenable. La coutume de Chalons ne dit point vues et égouts et autres Servitudes de la même espèce; mais vues et égoûts et autres Servitudes en général. Enfin, l'exception por. tée par l'art. 143, prouve assez que la coutume a bien su distinguer ce qu'elle entendait exclure de la prescription. Elle ne l'a rejetée que par un règlement de police dont l'objet n'a aucun rapport à toutes les autres Servitudes.

S. XXVII. De l'établissement des Servitudes par prescription dans les cou

tumes muettes.

Les jurisconsultes ont été on ne peut pas plus partagés sur la question de savoir quelle règle on doit suivre dans les coutumes qui n'ont rien décidé sur la prescription des Servitudes.

Plusieurs pensent qu'on y doit admettre les principes du droit romain, principes qu'ils interprétent suivant la doctrine des auteurs qu'ils ont consultés. Ainsi, Barraud, sur le tit. 12 de la coutume de Poitou, dit que, peur acquérir droit de Servitude par la possession sans titre sur le fonds d'autrui, il est néces

saire d'en jouir de bonne foi et par droit de Servitude; et que, « si la jouissance n'est justifiée avoir été faite par droit de Servitude, » elle sera présumée avoir été faite par fami»liarité et vicinité ». H conclud de-là« qu'en » simple tolérance, la prescription de Servi»tude sur le fonds d'autrui, ne commence que » à die possessionis et contradictionis aut » prohibitionis; de manière que si on jouit » post contradictionem aut prohibitionem, » par dix ans paisiblement, acquiritur Servi »tus. Bald. in l. 1, C. de Servit. et aqua. » Néanmoins (ajoute t-il), l'opinion commune >> et plus véritable est que, sur le fonds et hé»ritage d'autrui, droit de Servitude sans titre > ne s'acquiert que par trente ans, non plus » que la liberté ».

prennent d'ordinaire les droits féodaux, les successions, les retraits, etc., il est trèssage d'interpréter une coutume obscure en quelque point, par les usages des lieux, et par les dispositions même des coutumes voisines, ou de celles qui ont le même esprit. Mais lorsqu'il s'agit d'un objet isole et dont un très-grand nombre de coutumes ne disent rien, tels que sont les Servitudes, la loi d'une coutume voisine, ou de celles dont l'esprit général est le même, ne peut guère tirer à conséquence. On peut en voir un exemple frappant dans ce qu'on a dit, S. 25, sur les coutumes d'Anjou et du Maine, qui sont très-voisines et trèsressemblantes.

Il paraît donc plus sûr ici, dans la nécessité où l'on est de prendre un parti, de se ré

On voit que cette décision n'est pas propre gler sur ce qu'a décidé la coutume de Paris.qui à dissiper tous les doutes.

Boucheul, sur l'art. 372 de la même coutume, propose une distinction. Il prouve d'abord fort bieu, nos 175 et 176, que la plupart des coutumes qui se sont expliquées sur cet objet, excluent la prescription, et que plusieurs arrêts l'ont ainsi jugé. Il observe, no 180, « qu'on suit communément la disposition de l'art. 186 de la coutume de Paris, comme la > capitale du royaume, composée des arrêts » et réglemens de la Cour, que les Servitudes » ne peuvent s'acquérir sans titre, par quel » que temps que ce soit ». Mais il ajoute ensuite « ce que je voudrais restreindre aux » Servitudes qu'on appelle latentes, et quæ » non inhærent solo. Mais quant aux Servitu » des apparentes, et qu'on peut juger par leur » qualité être aussi anciennes, et pour l'usage >nécessaire de l'héritage à cause duquel on » les prétend, une possession immémoriale les > devrait faire recevoir sans aucun titre, non> seulement parcequ'un si long temps le fait » présumer perdu, mais encore parcequ'il » équipolle à un véritable titre : vicem consti » tuti obtinet ».

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Louvet, sur les coutumes de Beauvoisis, art. 12 et 13, propose de recourir à la coutume la plus voisine de celle qui n'a aucune disposition sur la prescription des Servitudes, ou à celles qui ont à-peu-près les mêmes dis positions. Mais cet expedient, qui ne leverait pas toutes les difficultés, est sujet à bien des objections; et, les raisons qui peuvent déterminer à suivre cette règle dans d'autres ma tières, ne peuvent guère être adoptées ici.

Il faut distinguer, dans les coutumes, les matières sur lesquelles elles ont des dispositions, et qui tiennent, pour ainsi dire, essentiellement à leur système, et celles dont elles ne disent rien. Dans les premieres, qui com

contient, à cet égard, les règles les plus sages que l'expérience et les lumieres des magistrats qui ont concouru à la réformation, aient pu trouver sur les Servitudes.

[C'est ce qu'a jugé un arrêt très-récent, dont voici l'espéce.

Une personne, domiciliée sous l'empire de la coutume de la Rochelle, était en possession, depuis 1719, de faire couler ses eaux par un aqueduc passant dans une maison voisine,plu's basse que la sienne: le propriétaire de cette maison, voulant secouer le joug de cette Servitude, a fait assigner le propriétaire de la maison supérieure, pour le faire condamner a s'en abstenir, ou à produire son titre. Sentence du présidial de la Rochelle, qui condamne celui-ci a justifier de son titre, ou à cesser l'usage de la Servitude. Appel au parlement de Paris. L'appelant a pretendu qu'il fallait distinguer entre un égoût caché ou une Servitude latente, qui ne peut s'acquérir sans titre, quelque possession qu'on en ait, et un égout visible, qui est une propriété manifeste, qu'on peut, au contraire, disait-il, acquérir par la voie de la prescription, tel que l'aqué. duc dont il s'agit. L'intimé a soutenu qu'en matière de Servitude, dans les coutumes muettes, comme dans celles de la Rochelle, on devait suivre la disposition de la coutume de Paris; qu'ainsi, la sentence était juste, et devait être confirmee. En effet, par arrêt du 6 février 1782, rendu à l'audience de sept heures, le parlement de Paris a confirmé la sentence du présidial de la Rochelle, et a condamné l'appelant à l'amende et aux dépens.

Il a donc été jugé que la règle, nulle Servitude sans titre, doit être étendue aux coutumes muettes. ]

C'est aussi l'opinion de l'Hommeau, sur l'art.

480 de la coutume d'Anjou; de Leprêtre, dans sa cent. 2, chap. 63; de Durand, sur l'art. 119 de la coutume de Vitry (1); de Labbé et Ragueau, sur la coutume de Berry, tit. 11, art. 2; de Lathaumassière, sur la coutume de Montargis, tit. 10, art. 1; de Legrand, sur l'art. 61, gl. 5, de la coutume de Troyes; des annotateurs de Vigier, sur la coutume d'Angoumois, art. 36; de Valin, sur la coutume de la Rochelle, art. 59, no 42.

Ces derniers auteurs proposent néanmoins une limitation à cette règle générale : c'est que des actes énonciatifs d'une Servitude visible, accompagnés d'une possession paisible et connue depuis un temps immémorial, suffisent, comme supplétifs au titre primordial, pour faire maintenir dans l'usage et l'exercice desa Servitude. Ces auteurs citent des jugemens conformes des siéges d'Angoulême et de la Rochelle, relatifs à des droits de passage et d'égoût.

Il ne faut point, comme on l'a vu dans le paragraphe précédent, mettre au nombre des coutumes muettes, les coutumes d'Artois et de Boulonnais: doit-il en être de même de la coutume de la Marche?

L'art. 91 de cette coutume dit que « tous » droits, actions et autres choses corporelles, » ou incorporelles, cens, rentes, et devoirs » quelconques prescriptibles, se prescrivent, » s'acquièrent, et se perdent etiam sans titre, » par l'espace de trente ans continuels et ac»complis contre les laïcs, et de quarante ans » contre l'église ».

Jabely, sur cet article, dit que la prescription qui y est établie, doit s'étendre aux Servitudes, quoiqu'il convienne que des praticiens du pays pensent qu'il faut un titre. La raison qu'il donne de son sentiment, est que ces mots, tous droits, n'exceptent rien; mais la coutume prononce elle-même la réponse, puisqu'elle dit tous droits..... prescriptibles. Il faut done toujours recourir au droit commun des pays coutumiers, suivant lequel les Servitudes ne sont pas des droits prescriptibles.

Cependant cet auteur cite deux arrêts, l'un, du 1er mars 1637, qui a reçu la prescription trentenaire d'aller et venir à la fontaine et au lavoir du village de Vernet, et autres droits de Servitudes, au profit de Simoneau, propriétaire du hameau de Chez-Duprat ; le second, du 30 juillet 1685, qui, en confirmant

(1) Le sentiment de cet auteur est d'autant plus remarquable que, dans la coutume de Vitry le droit d'usage dans les bois est prescriptible par quarante ans, Aans titre, suivant l'art. 119.

une sentence 'de Gueret, a admis Bonnierat à faire preuve de sa possession trentenaire, de passer et repasser par le pré du nommé Aucouturier, son voisin, pour aller au sien et revenir

Couturier de Fornoue, qui est d'un avis opsoutient posé à celui de Jabely, que ces arrêts ne prouvent rien, parceque, dans l'espèce du premier, il s'agissait d'une fontaine et d'un che min publics, et que, dans celle du second, il ne s'agissait que du fait et non pas du droit, dans lequel on aurait dû se renfermer il observe même que lepremier arrêt,au lieu d'avoir reçu la prescription d'autres droits de Servitudes, comme le dit Jabely, avait expressément débouté Simoneau de la demande du droit de pâturage sur le communal d'un village voisin, qui etait entouré, presque de toutes parts, de ses domaines,quoiqu'il alléguât une possession très-ancienne.

Couturier de Fournoue cite deux arrêts des 6 septembre 1664 et 23 mars 1671, dont il ne donne point l'espèce, mais qui ont jugé, ditil, précisement que la possession ne suffisait pas pour acquérir des Servitudes dans la coutume de la Marche. Auzanet, dans ses arrêts, chap. 46, en rapporte un troisième, du 1er mars 1621, qui ordonna qu'un particulier ne pourrait vérifier que par titre un droit de chemin qu'il prétendait; sauf, s'il ne pouvait avoir d'autre chemin pour aller à son heritage, à se pourvoir par action, en indemnisant l'adversaire. Cet arrêt confirma la sentence du premier juge, en infirmant celle des juges d'appel, qui avaient admis la preuve de la pos

session.

Ces arrêts sont aussi rapportés au liv. 3, chap. 17, de l'ouvrage de Lalaure, qui a suivi le sentiment de Couturier de Fornoue. Ce dernier auteur croit néanmoins que la possession est un titre valable pour établir la Servitude, quand il parait que les héritages ont appartenu à la même famille ou à la même communauté, et lorsque, dans la clôture de séparation de deux héritages renfermés de haies ou de murailles, dont l'un joint le che, min public, et l'autre en est séparé par le precedent, il se trouve une porte ou ouverture ancienne; mais Lalaure rejette cette distinction, comme contraire à l'art. 216 de la coutume de Paris; il conclud donc prescription des Servitudes ne pourrait avoir que la hieu, dans la coutume de la Marche, qu'autant que la possession trentenaire aurait été précédée de contradiction, conformément à ce que décide l'art. 362 pour les pâturages.

[[ Mais ne peut on pas opposer à cette doctrine, l'extrême aflinité qu'avait la coutume

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