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gouvernement, ne peuvent être poursuivis pour des faits relatifs à leurs fonctions, qu'en vertu d'une décision du conseil d'état. V. les articles Agent du gouvernement, et Garantie des fonctionnaires publics.

IV. Avant la mise en activité du Code d'instruction criminelle de 1808, les Sous-préfets ne pouvaient, à raison des actes qu'ils avaient signés comme administrateurs, être appelés hors de leur arrondissement, soit pour reconnaître leur signature, soit pour servir de té moins. V. l'article Témoin judiciaire, S. 1, art. 5, nos 5 et 6.

S. II. Des droits et des obligations des Sous-préfets.

I. Les Sous-préfets, en leur qualité de fonctionnaires publics, sont obligés de résider au lieu de leurs fonctions. V. l'article Résidence.

II. Un Sous-préfet ne peut s'absenter sans un congé du préfet ; et ce dernier pourvoit à son remplacement provisoire, comme il le fait pour le cas de maladie. ( Art. 7 de l'arrêté du gouvernement du 17 ventôse an 8.)

L'auteur d'un ouvrage sur l'administration a cru devoir induire du texte de l'article cité, que le préfet ne peut pas pourvoir au rempla cement provisoire d'un Sous-préfet mort ou démissionnaire. C'est une erreur. La mort et la démission sont bien incontestablement des cas d'absence: et le préfet ne doit pas laisser un instant suspendue l'action de l'administration: seulement, il doit, aussitôt qu'il a pourvu au remplacement provisoire du Sous-préfet mort ou démissionnaire, en donner connaissance au ministre de l'intérieur.

III. Un Sous-préfet a le droit d'instituer un secrétaire, chef des bureaux de la sous-préfecture; mais comme la loi n'a établi aucun fonctionnaire sous ce nom, ce secrétaire n'est

qu'un simple employé qui n'est responsable qu'envers le Sous-préfet par lequel il a été choisi; et sa signature ne peut rendre authentique aucun acte, aucune expédition, ni aucun extrait des actes de l'autorité. V. l'article

Maire, sect. 1, no 3.

S. III. Des attributions en général des Sous-préfets.

I. Les Sous-préfets, comme nous l'avons dit en tête de cet article, ont remplacé les administrations municipales, qui avaient ellesmêmes succédé aux administrations de district.

Ainsi, de même que celles-ci ne participaient

aux fonctions administratives, dans leur res. sort, que sous l'autorité des administrations départementales, de même les Sous-préfets n'y participent aujourd'hui que sous l'autorité des préfets, qui, par leur institution, sont seuls chargés de l'administration dans leur département. (Art. 3 de la loi du 28 pluviose an 8; loi du 22 décembre 1789, sect. 2, art. 28 et 31 et sect. 3, art. 3; loi du 15-27 mars 1791, art. 11 et 12.)

Les Sous-préfets doivent donc, en these générale, soit attendre l'impulsion ou les or dres des préfets, dont ils sont les intermédiaires à l'égard des maires, soit se borner, quand ils agissent d'eux-mêmes, à des avis qu'ils soumettent au préfet : dans ce sens, leur compétence s'étend sur toutes les matières qui sont de la compétence de leur chef; et leur surveillance doit s'exercer sur toutes les parties de l'administration.

On indiquera ci-après, §. 4, des cas particuliers pour lesquels les Sous-préfets n'ont besoin ni de l'impulsion ni de l'approbation préalable du préfet.

II. Les Sous-préfets remplacent les commissaires des guerres, [[aujourd'hui les intendans et sous intendans de l'armée ]] lorsqu'il n'y en a point dans leur arrondissement : ceta résulte d'une instruction du ci-devant ministre-directeur de l'administration de la guerre; mais ils rentrent, pour ces objets, dans la classe des agens militaires, reçoivent leurs ordres des chefs de cette partie d'administration, et correspondent avec eux.

S. IV. Cas particuliers dans lesquels les Sous-préfets peuvent et doivent méme agir sans avoir reçu l'impulsion du préfet, et sans attendre son approbation

I. Premier cas. L'urgence de mesures sollicitées par l'intérêt public: ainsi, par exemple, ils peuvent

force publique en cas de danger imminent(Loi 10 Requérir la garde nationale ou autre du 27 juillet-3 août 1791);

20 Prendre et faire exécuter les mesures

qu'ils croiraient nécessaires pour arrêter les progrès d'une épidémie ou d'une épizootie qui se serait tout-à-coup manifestée (Loi du 24 août 1790, tit. 11, art. 3, no 5);

30. Dénoncer sur-le-champ (ainsi que tous les fonctionnaires publics y sont tenus), toute espèce de délit qui peut parvenir à leur connaissance dans l'exercice de leurs fonctions(Code d'instruction criminelle de 1808, art. 29);

4o. Ordonner par provision, et sauf le recours au préfet, ce que de droit pour faire

cesser les dommages qui pourraient résulter des contraventions en matière de grande voirie (Art. 3 de la loi du 29 floréal an 10).

Dans le cas ci-dessus et dans les autres semblables, les Sous-prefets doivent, sur-lechamp, rendre compte au prefet de ce qu'ils ont fait et ordonné.

II. Deuxième cas. L'avantage de l'accéléra tion de certaines affaires ainsi,

1o. Ils visent les contraintes décernées par le receveur particulier de leur arrondissement, et ils règlent les frais faits en vertu de ces contraintes, tant contre les percepteurs que contre les contribuables (Art. 30 et 46 de l'arrêté du gouvernement, du 16 thermidor an 8);

2o. Ils visent, dans les vingt-quatre heures, les récépissés que le receveur particulier de leur arrondissement délivre, soit aux percepteurs, soit aux préposés de l'enregistrement et des domaines, ou de toute autre régie, soit enfin à tout agent ou débiteur public. Ils séparent le talon du récépissé, et en font directement l'envoi au ministre du trésor public. (Décret du 14 janvier 1808);

30. Lorsqu'un mendiant se trouve arrêté dans leur arrondissement, ils sout chargés de constater à son égard le fait de la mendicité, de le faire conduire au dépôt, et de l'y faire écrouer (Décrets successifs portant établissement des dépôts de mendicité);

40. En cas d'arrestation d'une voiture de roulage dont la circulation est interdite par la loi du 7 ventose an 12 et le décret du 23 juin 1806, le Sous préfet, ordonne le bris des roues par un arrêté (Art. 4 de la loi, et art. 1 du décret cité);

50. Ils prononcent. sauf le recours au préfet, sur les contestations relatives au paiement de l'octroi de navigation (Art. 15 de l'arrêté du gouvernement du 8 prairial an 11).

III. Troisième cas. S'il s'agit de formalités, nominations ou opérations qui soient la suite nécessaire d'actes préalables des préfets. Ainsi,

1. Ils font la répartition entre les communes, du contingent attribué par le préfet à leur arrondissement dans la contribution des por tes et fenêtres (Art. 18 de la loi du 18 floréal an 10);

20. A l'égard des contributions foncière, personnelle et mobilière, dont la répartition entre les communes est confiée aux conseils d'arrondissement, le Sous-préfet, après que Je préfet a verifie le tableau de cette répartition, fait et délivre les mandemens à chaque commune (Lois des 3 frimaire et 3 nivóse an

7, et instruction du ministre de finances);

30. Les Sous-préfets nomment les répartiteurs chargés de poser les bases de la sousrépartition entre les contribuables de la commune (Loi du 3 frimaire an 7);

4o. Après la confection des roles, les Souspréfets visent ceux que le préfet a rendu exécutoires (Instruction du ministre des finances).

IV. Quatrième cas. S'il s'agit de formalités qui ne pourraient être remplies par le préfet qu'en nécessitant, sans utilité, le déplacement soit des fonctionnaires publics, soit des administrés.

Ainsi, sous le premier rapport,

10. Ils president la commission chargée d'examiner et discuter les évaluations des communes de leur arrondissement, dans les ope rations du cadastre (Loi du 15 septembre 1807, sur le budjet );

10. Ils visent et paraphent les registres de comptabilité du receveur de leur arrondissement (Décret du 4 janvier 1803);

30. Lorsque des sections d'une même commune ont des intérêts divisés, le Sous-préfet nomme et réunit chez lui deux commissions composées chacune de cinq personnes, prises parmi les plus imposées des sections contendantes, pour le maintien de leurs droits respectifs; mais son choix ne peut tomber ni sur les maires ni sur les adjoints. (V. l'article Communauté d'habitans, no. 7.)

Sous le second rapport,

10. Ils président les adjudications de ventes de bois appartenant, soit au gouvernement, soit aux communes, soit aux établissemens de charité, aux jours fixés par le prefet (Art 4 du tit.8 de la loi du 15-29 septembre 1791). Il en de même des bois appartenants aux fabriques puisqu'ils doivent être administres dans la même forme que les bois des communes (Arrêté du 7 thermidor an 1 (1) ;

[[ Voici ce que porte là dessus l'art. 86 de l'ordonnance du roi, du 1er août 1827, pour l'exécution du Code forestier du 21 mai precédent :

« Les adjudications des coupes ordinaires auront lieu pardevant les préfets et Sous-pré fets, dans les chefs-lieux d'arrondissement.

» Toutefois les préfets, sur la proposition des conservateurs, pourront permettre que les coupes dont l'évaluation n'excédera pas cinq cents francs, soient adjugées au chef-lieu d'une des communes voisines des bois et sous

la présidence du maire.

» Les adjudications se feront, dans tous les cas en présence des agens forestiers et des re

ceveurs chargés du recouvrement des produit's ». ]]

2o. Ils reçoivent les déclarations des propriétaires ou exploitans qui, soit pour défrichemens, plantations en bois ou autres causes énoncées au tit. 7 de la loi du 3 frimaire an 7, sur la contribution foncière, demandent à jouir des avantages attachés à ces améliora. tions (Art. 117 et 118 de cette loi).

30. Ils reçoivent les déclarations des propriétaires ou entrepreneurs de diligences, de messageries, ou d'autres voitures publiques sur le nombre de leurs voitures, le nombre de places qu'elles contiennent, le lieu de leur destination, le jour et l'heure de leur départ, de leur arrivée et de leur retour (Décret du 28 août 1808).

4o. Ils reçoivent l'attestation des mariniers conducteurs, sur la capacité des personnes que les adjudicataires des bacs veulent employer pour leur service (Art. 47 de la loi du 6 frimaire an 7).

V. Cinquième cas. Lorsqu'il s'agit de nom. mer ou commissionner, soit les personnes par les lumières desquelles les Sous-préfets doivent s'éclairer dans certaines affaires particulières, avant de donner eux-mêmes leur avis au préfet, soit les agens d'exécution sur lesquels ils ont à exercer une surveillance journalière.

Ainsi, sous le premier rapport,

10. Ils nomment les trois jurisconsultes qui composent le comité consultatif charge de l'examen des affaires pour lesquelles les commissions administratives des hospices croiraient pouvoir intenter une action en justice (Art. 11 de l'arrêté du 7 messidor an 9).

20. Ils nomment les experts ou commissaires dont les évaluations leur sont nécessaires

pour former leur opinion dans les avis qu'ils doivent donner sur les demandes en rappel à l'égalité proportionnelle, et sur celles en remises ou modérations (Arrêté du 24 floréal an 8, art. 5 et 10).

Ainsi, sous le deuxième rapport,

3o. Ils nomment les porteurs de contrain. tes chargés d'exercer les poursuites autorisées par leur visa, soit contre les percepteurs, soit contre les contribuables ( Arrêté du 16 thermidor an 8).

40. Ils délivrent les commissions aux gardes champêtres à l'aide desquels s'exerce leur surveillance journalière de la police des campagnes (Art. 5 de l'arrêté du 25 fructidor an 9).

VI. Dans aucun des cas ci-dessus spécifiés, les Sous-préfets ne peuvent être considérés TOMEXXXI.

comme exerçant une autorité indépendante de celle du préfet. Ils lui doivent compte de tout. Le préfet peut même, soit les prévenir dans tous les cas et diriger leur marche, soit modifier, réformer ou annuler les mesures qu'ils ont prises, comme les ministres peuvent le faire à l'égard des préfets; relativement à toutes les attributions que la loi confère à ces derniers.

V. les articles Maire, Préfet, Juré, Conflit d'attributions, et Pouvoir judiciaire. *

[[ SOUSTRACTION DE TITRES. Celui qui a momentanément enlevé d'un dépôt public, une pièce pour la faire signer par un témoin instrumentaire qui ne l'avait pas signée à l'instant où il eût dû le faire, est il passible de la peine portée par l'art. 255 du Code pénal?

V. le plaidoyer et l'arrêt du 7 septembre 1812, rapportés au mot Faux, sect. 1, S. 33.

Au surplus, V. les articles Suppression de titres, et Vol.]]

voir judiciaire, §. 12, no 2 ; et Privilége de [[ SOUS-TRAITANT. V. les articles Poucréance, sect. 3, §. 2, no 1.]]

*SOUVERAINETÉ. C'est le pouvoir de dicter et les lois politiques qui établissent la nalois civiles ou criminelles qui établissent les ture du gouvernement chez un peuple, et les droits et les devoirs des citoyens dans les rapports qu'ils ont entre eux, et dans les rapports qu'ils ont avec la société.

Cette définition est trop générale pour être très claire et très sensible. Après la lecture de cet article, on verra peut-être que c'est pourtant un résultat tres-simple de toutes les idées qui doivent la composer.

Cet article est un des plus importans da Répertoire de jurisprudence. La Souveraineté est la source de toutes les lois; on ne peut donc étudier les lois avec quelque succès, que lorsqu'on se sera fait de justes idées de la Sou

veraineté dont elles émanent.

Loke et Montesquieu, qui n'ont considéré la Souveraineté que relativement à la formation des empires, ont écrit surtout pour les législateurs. Notre objet n'est pas le même : nous devons la considérersurtout relativement aux lois particulières qui prononcent sur le sort des citoyens dans les temples de la justice; nous devons donc écrire particulièrement pour les magistrats qui en sont les organes, pour les avocats qui les réclament, et pour les citoyens qui ne peuvent les ignorer sans

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grands inconveniens, et auxquels il ne serait peut-être pas très difficile de les faire connaître. Notre objet paraît moins vaste, et il est pourtant immense.

Il est plusieurs points de vue sous lesquels le jurisconsulte doit envisager la Souverai

neté.

10. Il doit chercher d'abord comment elle se forme en général chez les peuples réunis en Société. C'est le moyen le plus sûr et le plus facile d'en bien découvrir la nature : c'est ce que je ferai d'abord.

20. Il lui importe plus encore de savoir et de montrer quels caractères et quelles formes elle a eus chez le peuple pour lequel il écrit. Je parlerai donc du gouvernement français; mais toujours renfermé dans les bornes de mon sujet, j'en ferai le tableau plutôt que l'histoire.

[[ 30 Il est des États qui sont subordonnés à d'autres cette subordination empêche-telle qu'ils ne soient considérés comme souverains? ]]

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4o Dans les pays où la liberté de l'homme est comptée pour quelque chose, le pouvoir des lois ne s'étend pas sur sa tête comme un pouvoir despotique sous lequel il doit nécessairement fléchir. Il faut donc connaître bien nettement la manière dont l'homme s'engage, pour ainsi dire, avec la Souveraineté du peuple où il a reçu le jour. Je ferai voir combien nos lois ont montré de respect pour la liberté naturelle de l'homme cet examen doit être bien intéressant pour tout bon Français.

:

5. Les voyages que la guerre, la curiosité et le commerce font entreprendre, transportent souvent les peuples les uns chez les autres. De ces rapports des peuples entre eux, il doit naître des occasions où des hommes de différens pays doivent être jugés par un pouvoir et par des lois émanes de la même Souveraineté. Quelles sont ces occasions ? Il n'est pas aisé de ·les distinguer. Cet objet a éxcité de grandes disputes entre les jurisconsultes; ils ont agité ici une des plus grandes questions de la jurisprudence. Nous tâcherons d'y répandre quelques lumières.

[[ 60 Deux Souverainetes distinctes peuvent être gouvernées par le même prince : quels sont alors dans l'une, l'état et les droits des habitans de l'autre ? Quels sont, dans celle-ci, les effets des actes de gouvernement ou de juridiction faits pour celle-là ?

70 Un État souverain est quelquefois réuni à un autre. Quels sont les effets de cette réu

nion ?

So Le souverain qui reprend par la force des armes, les États de son allié envahis par

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L'homme est né pour la société. Ce n'est que de nos jours qu'on a tenté de rendre cette vérité problématique; mais tous les efforts de l'un des plus beaux génies de notre siècle n'a pu lui rien enlever de son évidence. Il serait impossible de l'obscurcir, même en humiliant l'orgueil de l'homme jusqu'à le comparer aus animaux. Il est plusieurs espèces d'animaus qui, comme l'homme, ont reçu l'instinct social de la nature. Les perdrix dans nos champs, & les castors dans les plaines de l'Amérique septentrionale, vivent en compagnie. Les natura listes assurent que les quadrupedes vivraient presque tous en troupe, si l'homme plus puissant par son intelligence, ne les dispersait, pour les détruire ou pour les asservir à son joug. Celui qui règne sur eux, n'est donc pas fait pour vivre isolé, puisqu'eux-mêmes ont un penchant naturel qui tend sans cesse à les rapprocher et à les mettre en société. L'homme perdrait bientôt son empire sur les espèces qui lui sont soumises, s'il errait comme elles dans les forêts.

Cet instinct social, qui est le premier besoin et le caractère le plus marque de l'homme, produit les associations avant les sociétés. Si nous avions reçu de la nature un esprit plus vaste et des facultés physiques plus étendues, le genre humain ne formerait peut-être qu'une société unique, soumise aux mêmes lois, gouvernée par le même pouvoir. Mais, bornés dans nos idées comme dans notre force, la nature même, qui nous rend sociables, nous impose la nécessité de former plusieurs socié tés. Dans les forêts, les hommes se divisent en troupes; dans la société, ils se divisent en nations. La terre même, qui nous a été donnée pour demeure, nous oblige par son organisa tion, à diviser la famille universelle en plusieurs grandes familles ; partout la nature a placé de distance en distance, ou de vastes étendues d'eaux, ou de hautes montagnes, qui séparent les différentes habitations des hommes; et tout nous dit que ces barrières naturelles doivent aussi nous servir de barrières politiques. Les conquérans ont franchi quel quefois ces barrières ; mais le temps et l'ordre nécessaire des choses que le temps ramène infailliblement, ont toujours pressé, ont tou

jours étouffé l'ambition des peuples et des rois entre ces limites et les boulevards de la nature. Les Romains n'avaient fait qu'un même empire de l'Italie, de la Grande-Bretagne, de l'Ibérie et des Gaules. Rome a succombé sous sa propre grandeur et l'lbérie, les Gaules, l'Italie et la Grande Bretagne, séparées par des limites naturelles, ont forme de nouveau plusieurs empires. Les sociétés ne s'établissent donc naturellement et d'une manière solide, qu'entre les individus qui, se trouvant assez rapprochés pour éprouver ensemble les besoins de la vie, peuvent aussi se réunir aisément pour se prêter des secours mutuels.

Supposons-les en très petit nombre : nou distinguerons mieux les droits de chacun, et le dessein de tous dans cette réunion. S'ils ne sont que vingt, par exemple, ils verront sans beaucoup de peine quel est l'intérêt de tous; ils découvriront, sans de grands efforts de génie, quels moyens on doit mettre en usage pour remplir cet intérêt. Ils ont tous les mêmes besoins, et forment tous les mêmes vœux ; il y a donc entre ces vingt hommes une volonté aussi unique que si elle n'appartenait qu'à un même homme. Or, la nature a donné une volonté à chaque individu, pour qu'elle régnát souverainement sur ses actions; la volonté uniforme de ces vingt hommes doit donc aussi régner sur eux en souveraine. La Souveraineté, pour ces vingt hommes, ne sera donc que cette volonté même. Si on leur demandait comment se forme la Souveraineté, ils nous répondraient qu'elle se forme en réunissant plusieurs volontés en une seule ; et si nous leur demandions une définition de la Souveraineté, ils croiraient l'avoir définie on ne peut pas plus clairement, en nous disant qu'elle n'est que la volonté générale. Elle ne peut pas être autre chose en effet. Elle a beau se cacher sous diverses formes de gouvernement, sa nature est partout la même. Qu'un monarque s'en soit rendu l'interpréte, qu'un senat ait été choisi pour en être l'organe, ou que le peuple même, comme dans la démocratie, ait conservé le pouvoir de l'exprimer, elle change d'organe, mais non pas de nature. On ne retrouve point, il est vrai, la volonté générale dans le pouvoir dont sont armés les despotes; mais il n'y a pas plus de Souveraineté que de volonté générale dans les États livres aux horreurs du despotisme. Un jurisconsulte serait coupable de confondre la Souveraineté avec la tyrannie, et l'obeissance à la loi avec la soumission aux volontés d'un seul homme.

On comprendra peut-être mieux actuellement la définition que Gravina et Montesquieu ont donnée de la loi. Elle est, ont-ils dit, l'expression de la volonté générale. On a eu

peine à entendre cette définition dans les pays. où souvent unseul homme paraît faire les lois, et où les peuples ne sont presque jamais appelés au conseil de la législation : mais, dans ces pays, on a élevé à la grandeur souveraine un homme qu'on a cru assez éclairé pour reconnaître toujours la volonté générale, et assez vertueux pour la respecter toujours. C'est cette idée de la réunion des plus grandes vertus et des plus grandes lumières, qui ont consacré parmi nous le nom et le pouvoir des monarques. Louis XII, vêtu d'habits obscurs, se mêlait au peuple dans nos places et sur nos théâtres. Il descendait ainsi de son tróne pour recueillir les suffrages d'une multitude dont ses lois devaient exprimer la volonté. Le chancelier de l'Hôpital, dans l'assemblée de Fontainebleau, cita cet exemple à François II, comme la règle du devoir le plus sacré des rois.

On aura peine à reconnaître, nous le prévoyons, dans une association aussi simple que celle que nous venons de supposer, la nature de la Souveraineté qui gouverne les peuples et les empires. Mais les choses ne changent pas de nature, pour changer de proportion :l'homme et l'enfant au berceau ont une gran. deur et des forces bien différentes, nous y reconnaissons cependant le même être. Qu'il me soit permis d'observer ici que presque tous les auteurs qui ont écrit du droit public, et même Montesquieu, ont voulu trop séparer les principes des lois politiques et des lois civiles. Elles different sans doute dans une multitude de leurs conséquences, mais il importe extrêmement de leur reconnaître la même base; et cette base, c'est la justice. Si l'on refuse, par exemple, d'avouer que le contrat d'association qui forme une maison de commerce, et le contrat d'association qui forme. un empire, sont des contrats de la même nature, il sera toujours impossible de se faire des idées justes du gouvernement des peuples, on ne pourra jamais savoir ni pourquoi on est obligé d'obéir, ni pourquoi on a le droit de commander. Le pouvoir des brigands et celui des souverains les plus adorés, paraîtront sortir de la même source; et rien ne me fera distinguer l'autorité de saint Louis rendant la justice à ses peuples dans le bois de Vincennes, de l'autorité de ce prince barbare des assassins, ordonnant à ses esclaves d'aller poignar

der saint Louis.

S. II. De la Souveraineté en France.

I. L'abbé Dubos et un auteur moderne ont

été chercher bien loin l'origine de la Souve raineté en France. La loi regia, ont ils dit, transmit la puissance du peuple romain entre

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