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Cette distinction pouvait même tenir aux principes les plus essentiels de l'ancien droit romain, suivant lequel on divisait les biens en deux classes, res mancipi et res nec mancipi. Les fonds de terre étaient compris de plein droit parmi les res mancipi; et les édifices qui y etaient construits, ne jouissaient des priviléges de ces sortes de biens, que parcequ'ils étaient un accessoire des fonds; et comme on n'admettait point d'accessoire d'ac. cessoire, les Servitudes dues aux édifices, n'étaient pas au nombre des res mancipi; tandis celles qui étaient dues aux fonds de terre, que en étaient aussi comme les édifices mêmes, V. la dissertation de Bynkershoek, de rebus mancipi et nec mancipi.

Quoi qu'il en soit, c'est d'après cette distinction qu'on doit entendre ce que disent les lois romaines, à l'exception de celles qui sont sous le nom de Nératius. Les jurisconsultes opposés à Nératius, convenaient même qu'on devait suivre son opinion dans l'interprétation de certains actes, par exemple, dans celle des testamens, s'il paraissait que leur auteur eût entendu ces mots dans le même sens que lui.

Quoique cette distinction soit à présent généralement adoptée, [[ et qu'elle le soit même par le Code civil, ainsi qu'on l'a vu plus haut, S. 2 ]], elle n'a pas suffi pour lever toutes les difficultés.

II. On a beaucoup disputé pour savoir dans quelle classe on devait mettre les étables, granges, celliers et pressoirs, et par consé. quent, les Servitudes qui leur étaient dues.

Ceux qui les rangent dans la classe des Servitudes rustiques, se fondent principalement sur la destination de ces édifices, qui est purement champêtre.

Quelque fort que soit ce motif, le plus grand nombre des jurisconsultes français, et Davezan et Lalaure d'après eux, n'ont pas cru devoir excepter ces sortes d'édifices du nombre des héritages urbains : les raisons sur lesquelles ils se fondent pour cela, sont que ces distinctions prêteraient trop à l'arbitraire, qu'elles donneraient lieu à des contestations, par les conversions continuelles qu'on peut faire de l'usage des édifices. Ils allèguent enfin les ois 198 et 211, D. de verborum significatione, qui réputent urbains tous les édifices sans exception.

III. Domat, liv. 1, tit. 12, sect. 1, no 6, met au nombre des domaines rustiques, les vergers et jardins, soit qu'ils soient situés à la ville ou à la campagne. Mais cela ne peut être vrai pour le plus grand nombre des jardins de ville, et même pour plusieurs de ceux

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de campagne, qui font partie des maisons de plaisance, et où l'on considère plus l'agrément que le profit. Ulpien a fort bien expliqué cela dans la loi 198, de verborum significatione, au Digeste Urbana prædia, dit-il, omnia ædificia accipimus, non solùm ea quæ sunt in oppidis, sed et si fortè stabula sunt vel alia meritoria in villis et in vicis, quia urbanum prædium non locus facit, sed materia. PROINDE HORtus quoque, si QUI SUNT IN ÆDIFICIIS CONSTITUTI, DICENDUM EST URBANORUM AP

PELLATIONE CONTINERI; planè si plurimùm horti in reditu sunt, vinearii fortè, vel etiam olitorii, magis hæc non sunt urbana.

IV. Les principales Servitudes urbaines, énoncées dans le corps de droit romain, sont les quatorze suivantes : oneris ferendi, tigni immittendi, projiciendi, protegendi, stillicidii vel fluminis recipiendi, vel non recipiendi, altiùs tollendi vel non tollendi, luminum, ne luminibus officiatur, prospectus, ne prospectui officiatur, cloaca. (Lois 2, 3 et 4, D. de Servibutibus urbanorum prædiorum §.1, Inst. de Servitutibus prædiorum.

La Servitude oneris ferendi obligeait celui qui la devait, à soutenir, sur son pilier ou sur son mur le poids du bâtiment de son voisin. Assez souvent on stipulait dans cette Servitude, que le propriétaire du pilier ou du mur serait obligé de l'entretenir et de le refaire, lorsque cela serait nécessaire : mais cette convention particulière, comme on l'a déjà dit dans le premier paragraphe, n'était pas une suite de la Servitude.

La Servitude tigni immittendi assujétissait le voisin à souffrir que les matériaux, et principalement les poutres ou les solives de la maison voisine, portassent sur son mur. Il fallait une Servitude exprés pour cela chez les Romains, parceque les murs de cloture n'étaient pas mitoyens à Rome même, où chaque maison était isolée, afin de prévenir les incendies. Neron, sous le règne duquel elle en essuya un terrible, defendit de nouveau cet usage com. mun de murs, qui fut ensuite, autorisé par les Antonins. Les droits de voisinage n'étaient donc pas les mêmes partout; et cela explique des lois qui paraissent opposées sur les Servitudes (1).

La Servitude projiciendi consistait à avancer une partie d'un édifice sur la maison voisine, sans néanmoins l'y appuyer. Nos balcons et certaines galeries peuvent donner une idee

(1)V. Tacite Annal, lib. 15, cap. 42; les Antiquités romaines de Brisson, liv. 1. tit. 2; et celles de Heineccius.

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La Servitude stillicidii vel fluminis recipiendi, obligeait à recevoir sur son terrain les eaux d'un batiment voisin.

La Servitude non recipiendi obligeait au contraire à laisser couler ses eaux chez son voi. sin, sans pouvoir les détourner pour son propre usage. Cette interprétation a été adoptée par Heineccius, Elementa juris civilis secundùm ordinem Pandectarum, part. 2, §. 145. Elle paraît plus naturelle que celle de Vinnius, qu'on peut consulter sur le §. 1 des Institutes, de Servitutibus prædiorum.

Le même Heineccius observe fort bien qu'on appelait flumen, l'eau recueillie dans une gouttière qui en versait beaucoup à la fois ; et stillicidium, celle qui tombait naturellement des toits goutte à goutte.

La Servitude altiùs non tollendi avait pour objet d'empêcher le voisin d'élever sa maison au-delà d'une certaine hauteur.

Il n'est pas aussi facile d'expliquer en quoi consistait la Servitude altiùs tollendi. La loi n, D. de Servitutibus prædiorum urbanorum, dit que celui qui voudrait masquer les jours de ses voisins, ou faire quelque chose à leur désavantage, doit savoir qu'il est obligé de se conformer à l'ancienne structure des édifices : formam ac'statum antiquorum ædificiorum custodire debere. Coras, dans son commentaire sur la loi si servitus.conclud de là qu'il y avait des réglemens qui défendaient d'élever les bȧtimens au-delà d'une certaine hauteur, et de les approcher trop près de ceux du voisin. Il suppose qu'il dépendait néanmoins du voisin de renoncer à ces lois, comme il dépend parmi nous, de renoncer à celles qui defendent des vnes d'une certaine espèce sur la maison voisine, et qu'on appelait Servitude altiùs tollendi celle qui permettait de surhausser sa maison; et luminibus officiendi, celle qui autorisait le voisin à rapprocher sa maison.

Cette interprétation est la plus vraisemblable de toutes celles qu'on a données sur la Servitude altiùs tollendi.

Quant aux Servitudes luminum et ne luminibus officiatur, la première consistait dans le droit d'ouvrir des fenêtres sur son voisin, et la seconde à l'empêcher de les obscurcir par ses propres ouvrages (1). Cette derniere

(1)[Il suit de là que, pour que je puisse empêcher

interprétation est plus simple que celle de Coras.

La Servitude prospectús donnait le droit d'avoir vue sur la maison du voisin ; et celle ne prospectui officiatur, autorisait à l'empêcher de rien faire qui pût borner la vue d'une autre maison. Cette Servitude était bien plus genante que celle de ne pas élever sa maison, ou de ne pas nuire aux jours de la maison voisine, altiùs non tollendi et ne luminibus officiatur. Elle ne permettait pas même d'avoir un jardin d'ornement (viridarium) sur son toit.

La Servitude cloaca était très-importante. On sait que Tarquin-le-Superbe avait fait construire des égoûts ou cloaques admirables sous les rues de Rome. Lorsque cette ville eut été détruite par les Gaulois, on la reconstruisit sans suivre l'ancien plan, en sorte que les cloaques, qui ne passaient autrefois que sous les rues et les places publiques, se trouverent sous les maisons des particuliers, comme on on le voit à la fin du liv. 5 de Tite-Live. Ceux dont les maisons étaient à quelque distance de ces cloaques, trouvaient leur avantage à faire de petits égoûts qui s'y déchargeaient ; et souvent on stipulait de son voisin le droit de mener cet égoût par sa maison.

V. Les Servitudes rustiques sont plus faciles à entendre.

Il y avait d'abord le droit de passage, dont on distinguait trois espèces, selon qu'on y pouvait aller à pied ou à cheval, ou y faire passer une voiture. La première espèce s'appelait iter, la seconde actus, et la troisième viaCæpolla suppose mal à propos que la première donnait le droit d'aller dans une chaise trainée deux chevaux. La seconde espèce par ne le donnait même pas. Le texte seul des Institutes, pr. de Servitutibus prædiorum, indique nettement le contraire.

Il faut remarquer, au surplus, que ces Servitudes, comme plusieurs des suivantes, peuvent être tantôt rustiques, tantôt urbaines, selon qu'elles se rapportent à des terres ou à

des édifices.

Deux autres servitudes rustiques bien communes, avaient pour objet de conduire de l'eau par un canal, de l'héritage de son voisin dans le sien, ou simplement d'y puiser de l'eau ou d'y abreuver ses bestiaux. C'etaient là les trois Servitudes aquæ ductus, aquæ haustus, et pecoris ad aquam appulsus.

mon voisin d'obscurcir mon terrain par les ouvrages qu'il élève sur sa propriété, il faut que j'aie sur celle-ci une Servitude proprement dite. . l'arrêt de la cour de cassation, du 28 février 1814, rapporté ciaprès, S. 35, no 2. ]]

On pouvait enfin établir des Servitudes rustiques pour jouir du droit de pâcage, de celui de prendre du sable, etc. Les noms seuls de ces Servitudes en indiquent le caractère.

On pourrait en n mmer un bien plus grand nombre, tant urbaines que rustiques. Cæpolla en a detaillé plus de cent, sur chacune des quelles il a fait un chapitre particulier. Mais des détails de cette espece, qu'on ne peut jamais épuiser, sont, par cela seul, fort inutiles: ce qu'on a dit est suffisant pour l'intelligence du droit romain sur cette matiere.

On établit aussi parmi nous des Servitudes semblables à celles dont on vient de parler, ou peu différentes. Celles de puisage, de prise d'eau, d'égoût, de gouttière, de passage, de vues, etc., sont les plus communes.

Il serait inutile de parler ici de chacune d'elles, parceque les règles particulieres qu'el les peuvent avoir, trouveront leur place dans les S. suivans, ou sont detaillées aux mots Mur, Paturage, Usage (droit d'), Voisinage, Vue, etc.

S. X. Des personnes qui peuvent ou ne peuvent pas constituer des Servitudes.

I. Puisque les Servitudes diminuent les droits ou la liberté de l'héritage servant, il faut avoir un caractère qui autorise à y faire ces altérations, pour pouvoir les constituer valablement. Il suit de là que, dans la règle générale, il n'y a que le proprietaire qui puisse établir des Servitudes durables sur son fonds, et qu'il est même nécessaire, pour cela, qu'il soit maitre de ses actions.

Ainsi, tous ceux dont les biens sont sous l'administration d'autrui, comme les mineurs, les insensés, les interdits pour quelque cause que ce soit, ne peuvent pas établir de Servitude sur leurs heritages. Les tuteurs et les curateurs ne le peuvent pas non plus, car ils n'ont aucun droit reel dans les héritages de leurs pupilles; ils n'en ont que la simple administration.

II. Il n'en est pas tout-à-fait de même du père qui jouit des biens de son fils en vertu de la puissance paternelle, du père ou de la mère et des autres parens qui jouissent de ces mêmes biens en vertu de la garde noble et bourgeoise, du seigneur qui à la garde seigneuriale, de la veuve douairière, du benéficier, de l'engagiste, et généralement de tous ceux qui ont un droit d'usufruit, soit à vie, soit limité à telle et telle circonstance, ou à une certaine époque.

On a prétendu, à la vérité, qu'on ne pouvait

pas établir de Servitude sur Servitude, Servitutem Servitutis esse non posse. Mais cet axióme, comme tant d'autres, est faux à bien des égards, et ne nous apprend rien dans le cas où il est véritable.

Il est certain que, dans la thèse générale, les Servitudes, qui sont des droits incorporels, ne peuvent guère s'établir sur d'autres Servitudes. Mais lorsque cela se peut faire, pourquoi n'admettrait-on pas la Servitude qui est établie sur une autre servitude?

Cette réponse, qui est prise dans la nature des choses, rend superflues celles que Cæpolla, cher bien loin. Ce n'est pas d'ailleurs l'usuchap. 14, et tant d'autres auteurs ont été cherfruit seul qui peut fournir un exemple d'une Servitude imposée sur une autre Servitude; on peut en imaginer d'autres. Si j'ai stipulé, par exemple, en qualité de propriétaire d'une maison voisine de la vôtre, que vous seriez de votre source, rien n'empêche que je ne tenu de me laisser tirer un pouce cube d'eau puisse abandonner une partie de cette eau au propriétaire de la maison qui est au-delà de la mienne. Voilà bien néanmoins une Servitude imposée sur une autre Servitude, comme dans le cas de celles qui sont établies par l'usufrui tier.

A plus forte raison, le grevé de substitu tion, l'emphytheote, le superficiaire, qui ont plus qu'un simple usufruit, peuvent-ils imposer toutes les Servitudes qui ne deteriorent pas le fonds, pour tout le temps de leur jouissance. Le grevé de substitution peut même en établir de perpétuelles, qui auront un effet durable si la substitution devient caduque.

A la vérité, les servitudes établies par les emphyteotes, ne valaient pas de plein droit, suivant les principes du droit romain; et la même chose avait lieu pour toutes les Servitudes que pouvaient établir ceux qui avaient des domaines dans les provinces romaines. La raison en était, que la propriété de ces sortes de domaines était censée appartenir au peuple romain, et que les habitans de ses provinces n'avaient qu'un domaine subordonné à la possession de leurs terres. C'est par cette raison qu'on les appelait tributaires, colons, vectigales. Mais la jurisprudence du préteur avait autorisé la jouissance de ces sortes de Servitudes; et la distinction des fonds itali · ques et des domaines provinciaux n'avait plus lieu, lorsque Justinien fit rédiger le corps de droit. Il y avait déjà long-temps que tous les peuples des provinces dépendantes de l'empire romain, jouissaient du droit de cité (qui ne valait plus guère d'ailleurs la peine de faire un

privilége), et que la distinction entre les choses mancipi et nec mancipi, ne subsistait plus.

Il en a été à peu près de même des fiefs parmi nous. Tant que les vassaux en jouissaient à titre purement précaire, ou à vie, il est certain qu'ils ne pouvaient pas y imposer de Servitudes. Mais depuis que les fiefs sont devenus patrimoniaux, les vassaux ont pu, sans contredit, y établir des Servitudes. C'est la décision de Lalaure, liv. 1, chap. 6. Cependant si la Servitude diminuait considérablement la valeur du fief, il n'est pas douteux que l'imposition de ce droit ne fût assujétie aux règles que les coutumes ont données pour le démembrement et le jeu de fief.

Lalaure ajoute que cette Servitude s'éteint, Lorsque le fief retourne au seigneur, soit par ummise ou autre droit de seigneurie, parceque la Servitude qui ne subsistait qu'à l'égard da vassal, ne peut préjudicier au seigneur; il n'en excepte que le cas où le fief retournerait au seigneur à titre particulier.

Ç'a été aussi le sentiment de d'Argentrée, qui pensait que la commise rendait caduques toutes les charges que le vassal avait imposées sur son fief, telles que les hypothèques et les Servitudes. Mais le bien du commerce a fait prévaloir l'opinion contraire de Dumoulin. On a pensé que la maxime, soluto jure dantis solvitur jus accipientis, sur laquelle d'Argentrée se fondait, ne doit avoir lieu que lors que le droit de celui qui a imposé les charges, se resout de soi-même et naturellement, sans aucun fait de sa part; et qu'il en doit être autrement, lorsque son droit est révoqué par son fait.

C'est la décision de Pothier, traité des fiefs, part. 1, chap. 3, sect. 1, art. 3, §. 3, et des auteurs les plus estimés. Les Servitudes constituées par le vassal, ne sont donc éteintes que dans le cas où le fief retournerait au seigneur par l'extinction de la famille à laquelle il aurait été concédé, comme cela a lieu dans la plupart des fiefs d'Alsace.

ti V. les articles Fief, sect. 2, §.6, et Réversibilité des fiefs, et Résolution, no 3. ]]

L'acquéreur sous faculté de réméré, et genéralement tous ceux qui n'ont qu'une propriété résoluble, peuvent néanmoins imposer des Servitudes sur les domaines qu'ils possedent à ce titre; mais ces Servitudes cessent avec leur propriété.

Il en est de même encore du débiteur dont le domaine est hypothéqué. Rien n'empêche qu il n'y puisse établir une Servitude; mais ses créanciers auront une action hypothécaire contre l'acquéreur de la Servitude, comme

contre tout autre acquéreur d'une partie des biens de leur débiteur. V. le §. 34.

III. Celui qui n'a que la nue propriété d'un héritage dont un autre a l'usufruit, peut aussi y imposer des Servitudes, pourvu qu'elles n'aient lieu qu'après l'expiration de l'usufruit. Celui même dont l'héritage est grevé de quelque Servitude que ce soit, peut en imposer de nouvelles, soit de la même espèce, soit d'une autre, dès qu'elles ne préjudicient point aux droits de celui qui avait déjà une première Servitude.

Lorsque l'usufruitier consent que la Servitude imposée par le propriétaire, ait son effet au temps même de l'usufruit, il n'est pas douteux que l'acquéreur de la Servitude n'ait une propriété et une possession de la Servitude aussi complète que s'il l'avait acquise de celui qui réunit en lui seul la propriété et l'usufruit du fonds.

Le droit romain contient, à la vérité, une décision contraire. Les lois 15 et 16,-D. de usufructu, veulent même que le propriétaire ne puisse pas imposer de Servitude avec le contentement de l'usufruitier, à moins qu'elle ne soit du nombre de celles qui ne portent aucune atteinte à l'usufruit, telle que la Servitude de ne pouvoir pas élever sa maison audelà de sa bauteur actuelle.

Superior, dans la loi 2, Davezan, part. 5, et les interprètes du droit romain se sont vainement efforcés de justifier cette décision, que Cæpolla a aussi adoptée. Ils ont prétendu que l'usufruit et la propriété étant deux objets distincts, le consentement de l'usufruitier ne pouvait suppléer,ce qui manquait au consentement du propriétaire; et que, si ce consentement validait la Servitude, il semblerait que c'est lui qui l'a imposée, quoiqu'il n'en eût pas le droit.

pas

De telles subtilités ne méritent guère de porter le caractère de loi; et l'on ne doit balancer à rejeter la décision dont on vient de rendre compte, dans les pays même de droit écrit.

On ne craint pas de porter le même jugement de celles de ces lois qui disent que l'héritier grevé d'un legs d'usufruit, peut, en dédommageant le légataire, imposer, de son chef, sur l'heritage sujet à l'usufruit, telle Servitude qu'il jugera à propos, ou affranchir le domaine voisin des Servitudes qu'il devait à celui dont on a légué l'usufruit.

IV. Lorsqu'un fonds appartient par indivis à plusieurs co-propriétaires, on ne peut, pour l'ordinaire, en assujettir aucune partie

à une Servitude, sans le consentement de tous. Cela est une suite de l'indivisibilité des Servitudes; en sorte que, dans le cas où la Servitude est divisible, comme cela a lieu pour l'usufruit, rien n'empêche que chaque co-propriétaire ne la constitue sur sa portion indivise. De même, lorsqu'un co-propriétaire a imposé une Servitude indivisible par sa nature, comme elles le sont presque toutes, la Servitude aura lieu si les copropriétaires accordent aussi le même droit. Les lois romaines exceptent le cas où l'un des co-propriétaires céderait la Servitude par un acte entre-vifs, et l'autre par testament, sous prétexte que les dispositions à cause de mort ne peuvent pas rester en suspens. Elles décident que, dans ce dernier cas, il faut un nouveau consentement de tous les co-propriétaires.

Il en est de même du cas, où l'un de ceux qui n'ont pas consenti à la Servitude, prédé cede ou aliène sa portion. Ses héritiers ou ayant cause ne peuvent pas faire valider la concession de la Servitude par un consentement semblable. La raison qu'on donne de cette loi, c'est que les héritiers n'étaient pas copropriétaires au temps où les premiers co-propriétaires ont donné leur consentement.

Malgré les efforts que Davezan et Supérior ont faits pour justifier ces décisions, il est clair encore qu'elles ne portent que sur des subtilités qui ne sont pas admissibles dans nos

mœurs.

Il faut même remarquer que le co-propriétaire qui a consenti le premier à l'etablissement de la Servitude, d'un droit de passage, par exemple, ne peut pas empêcher, de son chef, que le concessionnaire en jouisse, quoi. que ses co-propriétaires n'aient pas donne leur consentement. La bonne foi, qui doit présider à toutes les conventions, ne lui permet pas d'opposer ce défaut de consentement. Le droit romain même le décide ainsi dans la loi 11, D. de Servitutibus prædiorum rusticorum. Pothier, dans son introduction au titre des Servitudes de la coutume d'Orléans, no 6, pense néanmoins que, si le copropriétaire qui avait accordé le droit de Servitude pour sa portion, avait aliéné sa part à titre singulier, sans charger l'acquéreur de tenir son engagement, cet acquéreur pourrait empecher le concessionnaire de la Servitude d'en user,

et que les co-propriétaires de l'héritage ne pourraient plus y établir la Servitude sans

son consentement.

Cet auteur se fonde, pour cela, sur la loi qu'on vient de citer, et sur la loi 18, communia præcorum. Mais quelle que soit la décision de ces lois, elle ne parait pas

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pouvoir être adoptée parmi nous surtout si la concession a été faite par un acte ayant une date certaine. Quoique le concessionnaire de la Servitude ne pût l'exercer au préjudice des co-propriétaires qui ne l'avaient pas concédée, il n'en résultait pas moins un droit réel au profit du concessionnaire, relativement à la portion de celui qui avait accordé la Servitude. L'exercice de ce droit restait seulement en suspens, tant que les co-propriétaires ne donnaient pas aussi leur consentement; mais ce droit réel, imposé sur la portion vendue, n'a pu être éteint par l'aliénation de cette portion, et il doit avoir tout son effet, lorsque l'obstacle qui en empêchait l'exercice, c'est-à-dire, le défaut de consentement des co-propriétaires, a cessé.

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I. Tous ceux qui peuvent constituer des Servitudes sur leurs fonds, peuvent, à plus forte raison, en acquérir. Il y a même beaucoup de personnes qui ne peuvent pas constituer des Servitudes et qui peuvent néanmoins en acquérir.

Tous les propriétaires, ceux même qui n'ont que la nue propriété, tandis qu'un autre a l'usufruit, le peuvent. Ilen est de même des administrateurs des biens d'autrui, tels que les tuteurs et curateurs, les fondes de procuration, etc., parce que l'acquisition d'une servitude tend au bénéfice de l'héritage dominant.

Cela doit s'entendre néanmoins pour les administrateurs du bien d'autrui, en telle sorte que l'acquisition de la Servitude ne soit pas faite à un prix qui excède sa valeur, et dans le cas seulement où elle est veritablement utile au fonds dominant. Car si elle n'y procurait qu'un simple agrément, celui dont on a géré les affaires, pourrait ne pas agréer l'acquisition qui en aurait été faite à titre one

reux.

La loi 24, D. quemadmodùm Servitutes, dit que le possesseur même de mauvaise foi empêche, par sa jouissance, la prescription

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