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sieur Silvy de l'indemuiser de tous les dommages qu'ils lui avaient causes ; qu'il avait rejeté cette offre, sur le fondement qu'un terrain employé à un si pieux usage, ne pouvant plus être profane par la culture, devait être acheté par la communauté de Marseille; mais que cette prétention était injuste et extraordinaire, et que, si elle était accueillie, il aurait fallu laisser inculte tout le terroir de cette grande ville, parcequ'on avait enterré partout des pestife rés. En conséquence, iis déclarérent qu'ils étaient prés de dedommager le sieur Silvy de tout ce qu'il avait pu ou pourrait souffrir, tant en ses meubles qu'en ses bâtimens, fruits, arbres, et fonds, conformément à l'estimation qui en serait faite par experts.

Une sentence du 13 juillet 1723 donna acte aux échevins de leurs offres, et débouta le sicur Silvy, dépens compensés, avec défenses à toutes personnes et particulièrement aux échevins et au şieur Silvy, de remuer et creuser la terre, avant qu'il se fût écoule trois ans, aux endroits de son enclos qui avaient servi de Sépulture aux cadavres pestiférés. Appel.

M. l'avocat général de Gueidan a porté la parole dans cette affaire. Voici la substance de son plaidoyer.

«Soit que les vivans aient voulu ménager à leurs propres cendres le respect qu'ils ont rendu aux cendres de ceux qui les ont précédés, soit qu'un même instinct pour l'immorta lité ait inspiré la même inclination à tous les hommes. nous trouvons la vénération pour les morts si ancienne et si universellement établie, que tous les temps et tous les peuples déposent en sa faveur. Les patriarches eux-mêmes, ces hommes divins si élevés au-dessus des sens, quelle sollicitude et quelle attention n'ont-ils pas eue pour la conservation de leur dépouille mortelle ! Les Egyptiens, les Grecs, les Romains, en un mot tous les hommes de l'univers, d'ailleurs si divisés de goûts et de sentimens, se réunissent sur ce point; ceux mêmes qui n'ont pas craint de violer la nature dans ses droits les plus sacrés, l'ont respectée dans celui-ci. De là, les lois romaines, qui décident qu'un fonds devient consacré par la Sépulture qu'y reçoit un mort. Mais ces lois ne peuvent nous servir de règles.

» Que les nations idolâtres aient regardé comme sacrées et inviolables les terres qui avaient une fois servi à la Sépulture des morts; qu'elles aient pensé que, dans nul cas, l'on ne pouvait, sans impiété, toucher à leurs tombeaux ni remuer leurs cendres, cela suivait de leurs principes; ou plutôt sans principes sur cette matière, et livrées à leurs préjuges aveugles, que de contrariétés n'ont elles pas éta

blies? Tantôt elles ont regardé l'ame comme tellement esclave du corps, que, même après leur séparation, elle en était encore dependante et en éprouvait toutes les vicissitudes. De là, ces fables si familières aux poëtes, que les ames des corps qui n'étaient point enterrés, et dont on violait les sépulcres, erraient cent ans vagabondes sans pouvoir entrer dans les Champs Elysees. Tantot elles l'ont confondue avec le corps, et en ont fait un seul ètre qu'elles ont encore amplifié, après la mort, de toute la matière qui composait le tombeau ; d'où elles concluaient que l'on ne pouvait toucher à l'un sans troubler le repos de l'autre. De là, ces cris et ces plaintes que Virgile fait pousser aux mánes de Polydore, lorsqu'Enée arrachait quelques herbes qui couvraient sa Sepulture.

» Mais nous, à qui la raison et la religion donnent d'autres lumières, nous, qui savons que le repos des ames ne dépend nullement de la situation de leur corps, et que, quelque part que ceux-ci reposent et de quelque manière qu'ils soient traites, les ames ue reçoivent du bien ou du mal que de leurs œuvres, nous n'avons garde d'imprimer un caractère inviolable de sainteté à des lieux à qui l'on ne doit tout au plus qu'une veneration toujours révocable et toujours subordonnée au bien public. Une maxime contraire serait opposée à la pratique de toute la chrétienté. L'usage ayant toujours eté d'enterrer les morts près des portes des villes,en est-il de tant soit peu considerable qui ne se soit agrandie sur les tombeaux ? Ainsi, les lois romaines et les anciennes coutumes n'ont rien qui soit applicable à nos mœurs.

» Mais si le sieur Silvy n'est pas fondé a souteuir qu'on ne peut plus toucher au terrain dont il s'agit, ne peut-il pas au moins forcer les échevins à l'acheter, pour conserver aux cendres de ceux qui y sont enterrés, une retraite paisible et assurée? il est peu d'habitans de Marseille qui n'aient des parens ensevelis dans l'endroit contentieux s'agissant donc d'up intérêt commun, c'est la communauté qui doit supporter les frais funéraires, parmi lesquels le prix du lieu de la Sépulture est un des plus privilegies, suivant la loi 37, D. de religiosis. C'est d'ailleurs la décision de la loi 7 du même titre. Mais ces raisons qui seraient fondees, si, dans des temps libres, on avait destiné l'enclos du sieur Silvy à servir de cimetière, qu'on l'eût beni, et qu'on s'en fût servi en cette qualité, n'ont aucune espèce d'application à un terrain où, par une nécessité pressante, on a enterré des morts : un tel champ doit être regardé comme un champ de bataille que personne n'est jamais tenu d'ache

ter.

» Mais si les raisons proposées par le sicur Silvy, ne suffisent pas pour obliger les éche vins à acheter son enclos, elles méritent au moins qu'on prescrive un plus longterme que celui qui a été fixé, avant qu'on puisse y tou cher. Il est certain que, si l'on y creusait après l'espace de deux années, il pourrait en sortir des vapeurs malignes, et capables de rallumer le feu de la contagion: Il faut donc laisser écouler un temps suffisant pour réduire en poussière ces tas immenses de corps mêlés avec des hardes pestiférées : et comme il vaut mieux, dans une matière si importante, manquer par excès que par défaut de précautions, il semble que ce temps ne peut être moindre de dix années. Ainsi, la sentence doit être infirmée sur ce point, et confirmée dans le surplus de ses dispositions ».

Par arrêt du 13 décembre 1723, il a été prononcé tout d'une voix, conformément à ces conclusions.

IX. La Sépulture des principaux personnages de l'État, avait fait, avant la restauration de 1814, la matière d'un décret du 20 février 1806, l'on peut voir dans le Bulletin des

lois.

que

X. Sur la violation des Sépultures, V. l'article Cadavre, no 8. ]]

[[ SÉQUESTRATION. C'est l'action de Séquestrer.

Appliqué aux personnes arrêtées, détenues, enlevées illégalement et par de simples particuliers, ce mot est synonyme de Plagiat. V. l'article Plagiat, no 2.

Appliqué aux choses, le mot Séquestration désigne l'action de mettre en Séquestre. V. l'article suivant. ]]

* SÉQUESTRE. Ce mot se dit tant de la consignation d'une chose litigieuse en main tierce pour la conserver à qui elle appartient,. que de la personne même à laquelle le dépôt

est confié.

[[ « Le Séquestre (dit l'art. 1955 du Code. civil) est ou conventionnel ou judiciaire ».

S. I. Du Séquestre conventionnel Les articles suivans du Code civil expliquent fort clairement la nature, l'objet et les effets de ce Séquestre.

"1956. Le Séquestre conventionnel est le dépót fait par une ou plusieurs personnes, d'une chose contentieuse, entre les mains d'un tiers qui s'oblige de la rendre, après la contestation terminée, à la personne qui sera jugée devoir l'obtenir.

» 1957. Le Séquestre peut n'être pas gratuit.

» 1958. Lorsqu'il est gratuit, il est soumis aux règles du dépôt proprement dit, sauf les différences ci-après énoncées.

» 1959. Le Séquestre peut avoir pour objet, non-seulement des effets mobiliers, mais mê me des immeubles.

» 1960. Le dépositaire chargé du Séquestre ne peut être déchargé avant la contestation terminée, que du consentement de toutes les parties interessées, ou pour une cause jugée légitime ». ]]

S. II. Du Séquestre judiciaire.

I. Le Séquestre judiciaire peut être ordonné, ou d'office, ou à la réquisition des parties.

On l'ordonne d'office principalement dans les matières de complainte, lorsque les parties n'ont pas un droit plus apparent l'une que l'autre.

On l'ordonne à la réquisition des parties, lorsqu'il y a plusieurs pretendans droit à la propriété d'une chose, sans que l'une ni l'autre ait la possession annale en sa faveur, et puisse conséquemment faire usage de l'action possessoire.

[[ L'art. 1961 du Code civil détermine ainsi les cas où il peut y avoir lieu au Séquestre ou dépôt judiciaire.

« La justice peut ordonner le Séquestre » 10 Des meubles saisis sur un debiteur;

» 20 D'un immeuble ou d'une chose mobi

lière dont la proprieté ou la possession est litigieuse entre deux ou plusieurs person. nes (1).

(1) Remarquez bien que la loi dit, la justice peut, et non pas, la justice doit.

Le refus que fait le juge d'ordonner le Séquestre d'un objets litigieux, ne peut donc jamais étre considéré comme une contravention à la loi.

En 1812, Julien Dumoulin fait citer Guillaume Lefebvre devant le juge de paix, pour le faire condamner à des dommages intérêts résultant du trouble qu'il éprouve, de sa part, dans la jouissance d'un fossé dont il prétend avoir la possession exclusive depuis plus d'un an.

Guillaume Lefebvre répond qu'il a lui-même la possession annale de ce fossé, et il demande à y être maintenu.

Jugement qui ordonne des enquêtes ; et les enquêtes rapportées, jugement définitif qui déclare que Dumoulin a seul la possession du fossé, et fait défense à Lefebvre de l'y troubler.

Mais sur l'appel, le tribunal civil d'Argentan rend, le 9 juin de la même année, un jugement qui réforme celui du juge de paix et maintient les deux parties en possession du fossé, Attendu qu'il résulte » de leurs enquêtes, qu'elles y ont cumulativement et

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» 30 Des choses qu'un débiteur offre pour sa libération ».

A ces trois cas, l'art. 688 du Code de procédure civile en ajoute un quatrième : « Si <«<les immeubles saisis réellement (porte-t-il, » art. 688) ne sont pas loués ou affermés, le >> saisi en restera en possession jusqu'à la vente, » comme Séquestre judiciaire, à moins qu'il » ne soit autrement ordonné par le juge,sur la » reclamation d'un ou de plusieurs créanciers. >> Les créanciers pourront néanmoins faire >> faire la coupe et la vente en tout ou en par»tie, des fruits pendans par les racines ». ]]

II. Dans tous les cas, celle des parties qui a intérêt de demander le Séquestre des fruits pendant la contestation, présente une requête incidente, et, en vertu de l'avenir qui suit ou accompagne cette requête, elle poursuit l'audience sur la demande en Séquestre selon la manière ordinaire. Cela est ainsi réglé par les art. 1 et 2 du tit. 19 de l'ordonnance du mois d'avril 1667.

III. Les art. 3, 4 et 5 ont déterminé la forme de la nomination du Séquestre. Comme les parties doivent également concourir à cette nomination, elle ne peut se faire qu'en présence d'un des juges, parties dûment appelées. C'est pour cela que l'ordonnance veut que le jugement qui ordonne le Séquestre, nomme en même temps le commissaire devant lequel les parties seront tenues de procéder,

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et qu'il prescrive le temps dans lequel il faudra qu'elles comparaissent.

Si les parties se présentent devant le commissaire au jour indiqué, on procede de concert à la nomination du Séquestre : si l'une des parties ne comparaît pas, ou que, comparaissant, elle refuse de convenir d'un Séquestre, le juge en nomme un d'office, à moins que, eu égard aux circonstances, il ne juge à propos de donner un nouveau délai. L'ordonnance l'y autorise, pourvu que ce nouveau délai ne soit pas plus long que de huitaine.

Le Séquestre nommé doit être solvable, relativement à l'administration dont il est chargé; et, comme il ne pourrait pas. commodément vaquer à cette administration, s'il était trop éloigné du lieu où sont situés les choses séquestrees, il doit y être résidant, ou du moins en être proche. C'est pourquoi, lorsque les choses saisies sont trop éloignées les unes des autres pour qu'un même Séquestre puisse les regir toutes commodement, on nomme differens Séquestres. Mais comme la multiplication des Séquestres occasionne de nouveaux frais, on ne doit s'y prêter que lorsqu'elle est absolument nécessaire, suivant les rencontres. La coutume de Berry veut qu'il n'y ait qu'un Séquestre, si les biens ne sont éloignés que de six lieues l'un de l'autre.

Et comme dans la nomination du Séquestre, on ne doit envisager que l'intérêt des parties et le bien de la justice, il est défendu au juge de donner cette commission à aucun de ses parens ou alliés jusqu'au dégré de cou. sin germain inclusivement, à peine de nullité, de 100 livres d'amende, et de répondre en son nom des dommages et intérêts des parties, dans le cas d'insolvabilité du Séquestre.

Quand le Séquestre est nommé, il faut, suivant les dispositions de l'art. 6, le faire assigner pour prêter serment devant le juge ; à quoi il peut être contraint par amende ou par saisie de ses biens, si toutefois il n'a aucune excuse suffisante pour se dispenser d'accepter la commission. Cette jurisprudence est fondée sur ce que la fonction de Séquestre est une charge publique qu'on est obligé de remplir quand on n'a aucun titre d'exemption à cet égard.

Aprés la prestation du serment, le Séques tre doit être mis en possession des choses con fiées à sa garde. Cela se fait par le ministère possession, doit ên dresser un proces-verbal d'un huissier, qui, pour constater la mise en contenant une déclaration spéciale et détaillée de toutes les choses séquestrées.

Ce procès-verbal ne fait foi qu'autant qu'il est signé du Séquestre, ou du moins il doit y être fait mention de l'interpellation que l'huis.

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Sier lui a faite de signer, et de la cause de son refus. L'omission de ces formalités,non-sculement opérerait la nullité du procès-verbal, mais mettrait encore l'huissier dans le cas d'être condamné à 50 livres d'amende au profit de celui qui poursuit l'établissement du Séquestre, et à tous dépens, dommages et intérêts. D'ailleurs, comme les procès-verbaux de cette sorte sont au nombre des exploits importans dont il est essentiel de ne point laisser les huissiers seuls maîtres, l'abrogation générale des recors et l'établissement du contrôle ne dispensent point les huissiers de se faire assister, dans ces cas particuliers, de deux témoins sachant signer, lesquels doivent signer le procès-verbal, après que déclaration y a été faite des noms, surnoms, qualités, domiciles et vacations de ces té moins. Toutes ces règles sont établies par les art. 8 et 9. ཏྭ,

Lorsque les choses séquestrées consistent en quelques jouissances, le, Séquestre doit en poursuivre promptement le bail judiciaire, après avoir appelé toutes les parties intéressées. Ce sont les dispositions de l'art. 10.

Au moment de l'adjudication du bail, le sequestre est obligé, suivant l'art. 11, de faire arrêter les frais de ce bail sur-le-champ par le juge, sans qu'il puissse les faire taxer séparément, à peine de perdre ces frais et de 20 livres d'amende.

Les réparations ou autres impenses nécessaires aux lieux séquestrés, ne peuvent être faites que par autorité de justice, les parties dûment appelées; autrement, elles tombent en pure perte à ceux qui les ont fait faire. Il est d'ailleurs défendu aux Séquestres, sous peine de 20 livres d'amende et de tous dépens, dommages et intérêts, de se rendre adjudicataires de ces réparations. Telles sont les dispositions de l'art. 12. « Si aucun empêche » par violence (porte l'art. 16) l'établissement » ou l'administration du Séquestre, ou la le"vée des fruits, il perdra le droit qu'il eût » pu prétendre sur les fruits par lui pris et en» levés, lesquels appartiendront incommuta»blement à l'autre partie, et sera en outre >> condamné à 300 livres d'amende envers » nous, et dont il ne pourra être déchargé; » et l'autre partie sera mise en possession » des choses contentieuses, sans prejudice des poursuites extraordinaires que nous enten» dons être faites pas nos procureurs généraux » ou nos procureurs sur les lieux, contre ce» lui qui aura fait la violence; auxquels nous >> enjoignons, et à nos autres officiers, d'y te»nir la main ».

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Comme on n'ordonne le Séquestre que dans

le cas où la justice pense qu'aucune des parties litigantes ne doit avoir la possession provisoire, l'art. 18 leur a défendu de prendre, directement ni indirectement, le bail des choses séquestrées.

L'art. 19 veut que les sentences qui ordonnent les Sequestres, s'exécutent par provision, nonobstant l'appel et sans y prejudicier.

Les Séquestres demeurent déchargés de plein droit pour l'avenir, aussitôt que les contestations d'entre les parties ont été définivement jugées; mais ils sont obligés de rendre compte de leur commission pour le passé. C'est ce que porte l'art. 20.

Et l'art. 21 veut que ceux qui ont fait établir un Séquestre, fassent vider leur différend dans le cours de trois années, à compter du jour de l'etablissement du Séquestre : autrement, les Séquestres demeurent déchargés de plein droit, sans qu'il leur faille d'autre décharge; à moins toutefois que le Séquestre n'ait été continué par le juge, en connaissance de cause. (M. GUYOT.)*

[[ IV. De toutes ces dispositions, le Code de procédure civile n'en renouvelle aucune; et, par conséquent, il n'y en a plus une seule qui, par elle-même, fasse loi.

Voici, au surplus, ce que règle le Code civil tant sur les obligations qui naissent du Séquestre judiciaire, que sur la manière de le défé

rer:

« Art. 1962. L'établissement d'un gardien judiciaire produit, entre le saisissant et le gardien, des obligations réciproques. Le gardien doit apporter pour la conservation des effets saisis, les soins d'un bon père de famille.

» Il doit les représenter, soit à la décharge du saisissant pour la vente, soit à la partie contre laquelle les exécutions ont été faites, en

cas de main-levée de la saisie.

>> L'obligation du saisissant consiste à payer au gardien le salaire fixé par la loi.

» 1963. Le Séquestre judiciaire est donné, soit à une personne dont les parties intéressées sont convenues entre elles, soit à une personne nommée d'office par le juge.

» Dans l'un et l'autre cas, celui auquel la chose a été confiée, est soumis à toutes les obligations qu'emporte le Séquestre convention

nel ".

V. les articles Gardien, Dépôt, Vol et les deux suivans. ]]

[[ SÉQUESTRE DE GUERRE. C'est la main-mise d'un gouvernement qui est en guerre contre un autre, sur les biens que possèdent dans son territoire et le gouvernement ennemi et les sujets de ce gouvernement.

Cette main-mise, en tant qu'elle s'exerce sur les biens du gouvernement ennemi, n'a rien que de juste, et l'usage en est universellement

reçu.

En tant qu'elle s'exerce sur les biens des sujets de ce gouvernement, l'usage n'en est plus aussi fréquent qu'il l'a été autrefois; mais n'a-t-elle rien de contraire aux principes du droit des gens?

Vatel, liv. 5, chap. 5, S. 77, prouve trèsbien que l'intérêt des gouvernemens, l'honneur, la bonne foi et l'équité s'opposent à la pratique de cette main-mise; cependant il finit par convenir << que le souverain peut, à la ri»gueur, confisquer les dettes de ses sujets en

"vers ses ennemis ».

Pothier, dans son Traité des personnes, tit. 2, sect. 2, dit que, «< lorsque nous sommes en » guerre avec une puissance étrangère, tous » les étrangers qui sont soumis à cette puis»sance, sont obligés de sortir du royaume » dans le temps prescrit et fixé. Ils doivent aussi > (continue-t-il) mettre hors de leurs mains » tous les biens qu'ils possèdent en France. "S'ils ne font pas l'un et l'autre dans un délai » qui leur est indiqué, le Roi s'empare de leurs » biens. Ils peuvent aussi eux-mêmes être ar»rêtés, et alors, on les oblige de payer une >> rançon pour obtenir leur liberté ».

Grotius, de jure belli et pacis, liv. 3, chap. 5 et 6, n'hésite pas à reconnaître que chaque puissance peut confisquer les biens que possedent chez elle les sujets des états enne

mis.

Bynkersock, quaestiones juris publici, liv. 1, de rebus bellicis, chap. 8, établit également que l'un des effets de la guerre est que les enDemis soient privés de tout droit et proscrits; et que de là il résulte que ceux de leurs biens qui se trouvent chez l'ennemi, changent de maitre et passent dans le domaine du fisc: et sanè cùm ea sit belli conditio, ut hostes sint omni jure spoliati proscripti que, rationis est quascumque res hostium apud hostes inventas, dominum muture et fisco cedere.

Le même auteur rappelle l'édit de Louis XIV qui, pendant la guerre déclarée par ce prince aux états généraux des Provinces-Unies, en. 1672, prononça la confiscation des créances des Hollandais sur des Français. ajoute fue les évêques de Cologne et de Munster, alliés de la France, publierent alors des édits sembla

bles.

A la vérité, il oppose à ces édits le manifeste par lequel les états-généraux les dénoncèrent à l'Europe comme une infraction des usages reçus. Mais, quoique Hollandais lui

même, il ne peut s'empêcher de blâmer ce manifeste; il prouve que, dans des guerres antérieures, les états-généraux avaient souvent exercé le même droit ; et il finit par dire qu'en cas de guerre, le droit commun autorise la confiscation des créances comme celle des autre biens: sed profectó videtur esse jus commune ut et actiones publicentur, ex eadem nempè ratione quá corporalia quælibet. Actiones utiquè sive credita non minùs, jure gentium, sunt in dominio nostro, quàm alia bona; et cur igitur in his jus belli sequamur, in illis non sequamur?

Tout le monde sait qu'en 1778, les EtatsUnis de l'Amérique confisquerent les créances des sujets du roi d'Angleterre sur les Américains.

En 1793, une cédule du roi d'Espagne, du 6 juin, créa, sous le nom de Junte de Représailles, une commission pour rechercher et séquestrer tous les biens et toutes les créances des Français précédemment expulsés de tout le territoire Espagnol (1).

Aussitôt qu'elle fut informée de cette mesure, la convention nationale, usant du droit de représailles, rendit, le 16 août de la même année, un décret ainsi conçu :

« Art. 1. Les biens et les propriétés que les sujets et vassaux du roi d'Espagne ont en France, sous quelque dénomination qu'ils puissent être, soit en immeubles, soit en meubles ou marchandises, rentes viagères ou perpétuelles, seront saisis et séquestrés au nom de la république.

»2. Le produit en sera appliqué à l'indemnité et aux secours dus aux citoyens français qui ont été expulsés ou dépouillés de leurs biens en Espagne. Le résidu du produit de ces biens, s'il y en a sera, employé à dédommager les Français qui auront souffert quelque perte ou prejudice de la part des armées espagnoles ».

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En exécution de ce décret, il en fut rendu un autre le 26 du même mois, qui enjoignit aux débiteurs des Espagnols de faire la déclaration de leurs dettes dans le plus bref délai.

Le 18 messidor an 2, un troisième décret ordonna les mêmes mesures envers les creances et les biens de tous les sujets des puissances en guerre avec la France; cette loi n'accorda qu'un délai d'un mois pour les déclarations; et prescrivit, en termes exprès, le versement à la trésorerie, de tout ce qui était dû aux personnes qu'elle frappait.

(1) V.le Moniteur du 16 août 1793.

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