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VIII. Il y a une autre sorte de Subornation qui est souvent employée par l'accusé, par ses parens, par ses amis. Celle-là n'a pas pour objet de faire parler des témoins, mais de tes faire taire. Elle leur suggère un mensonge négatif. Elle est bien moins criminelle que l'au tre, puisqu'elle ne tend pas à faire périr un innocent; son but est seulement de sauver un coupable. Elle est par cette raison moins dangereuse. Mais comme, dans les affaires civiles, elle peut beaucoup nuire au demandeur, et que, dans les affaires criminelles, elle peut compromettre l'accusateur et l'exposer à des dommages et intérêts, celui qui se l'est permise, doit être condamné proportionnellement au tort qui aurait pu en résulter, si elle eût eu son effet.

[[V. l'article Faux témoignage, no 2.]]

IX. Un arrêt qu'on peut citer comme un exemple d'une juste sévérité, est celui qui fut rendu au parlement de Paris, le 7 février 1755, dans l'affaire de Pierrefitte.

Le nommé Du France accusa Pierrefitte d'avoir voulu l'assassiner. Pour donner à son accusation l'effet terrible qu'il s'en promet tait, il suborna deux témoins qui déposèrent contre l'accusé, et qui persisterent au récollement dans leur déposition. Heureusement pour Pierrefitte, qu'il parvint, à la confrontation, à toucher le plus jeune des témoins, et à lui faire faire l'aveu de la Subornation. Du France fut condamné à être rompu vif. Le témoin qui avait soutenu le mensonge à la confrontation eut le même sort. Les juges regrettèrent de ne pouvoir sauver la vie à celui qui avait découvert la machination et empê

ché
que le sang de l'innocent ne fût répandu.
Mais l'art. 1 du tit. 15 de l'ordonnance de
1670, qui porte que les témoins qui, depuis
le récollement, rétracteront leurs dépositions
ou les changeront dans des circonstances
essentielles, seront punis comme faux té
moins, les réduisit à la dure nécessité de ne
faire qu'adoucir son supplice en le condam-
nant à être pendu.

Nous ferons, relativement à cet article de l'ordonnance, une réflexion qui mérite de fixer l'attention du législateur. Il est bien clair que l'intention du législateur a été que des témoins qui auraient fait une fausse déposition, qui auraient persisté dans cette fausse déposition au récollement, et qui, par cette calomnie constante, auraient compromis d'abord la liberté, ensuite l'honneur et la vie d'un accusé, ne fussent pas impunis, par la raison qu'ils se seraient rétractés postérieurement.

TOME XXXI.

Mais, si d'un côté, il est juste que leur men. songe-obstine soit châtié, n'est-il pas, de l'autre, à craindre qu'une fois qu'ils out eu le malheur de persister dans leur mensonge au récollement, ils ne resistent ensuite au remords qu'ils pourraient avoir par une juste frayeur de perdre la vie, s'ils se rétractaient? Car enfin, s'ils disent alors la verité, ils sont assurés de mourir. La fermeté et le courage dans le mensonge leur sont donc, en quelque sorte, devenus nécessaires, puisque leur conservation en dépend? Cette conséquence, dout le suborneur a eu grand soin de les pénétrer, pour les endurcir à la confrontation, et qui peut être si funeste à l'accuse, déterminera sans doute un jour le legislateur à apporter quelques modifications à l'article que nous avons cite.

[[. V. les articles Calomniateur, no 3, et Faux témoignage, nos 3 et 4. ]]

X. Plus la Subornation est par elle-même criminelle, moins elle doit se presumer aisement, et plus le juge auquel elle est dénoncée, doit apporter de prudence et de sagacité dans l'examen de l'accusation. Il doit surtout se exemple, un accusateur qui engage, qui presse défier des apparences et sonder les motifs. Par des témoins à déposer dans l'allaire qui se suit à sa requête, ne doit pas être regardé comme un suborneur, quand même il aurait vu les leur aurait même promis de l'argent ou des témoins, qu'il aurait conféré avec eux, qu'il dedommagemens pour les déterminer à aller déposer, à n'omettre aucune des circonstances qui les auraient frappés et qu'il aurait rappelées à leur souvenir, si toutefois il n'avait rien exigé de contraire à ce qu'ils auraient vu ou entendu, parceque son intention n'aurait point été de tromper la justice, mais au contraire de l'éclairer complètement sur le risque qu'il courrait, serait celui de voir des faits qu'il lui importait de prouver. Tout qu'ils eussent reçu de l'argent avant de dépo récuser ses témoins, si l'accusé découvrait ser, ou même depuis leur déposition, parcequ'ils deviendraient alors suspects et même reprochables. Voilà pourquoi il est plus prudent à une partie civile de ne faire qu'indiquer à la justice les témoins qu'elle croit en état d'appuyer les faits contenus dans sa plainte, à leur mémoire et à leur veracité. Nous ne de ne les point voir, de se confier aveuglément pouvons pas trop le répéter, on n'est réellement un suborneur, on ne doit être puni comme tel, que lorsqu'on incite quelqu'un à faire ou à dire un faux, dans le dessein de nuire

à un autre.

XI. Il y a des cas où le suborneur est moins

coupable que le suborné : ce sont ceux où ilest interessé, pour sa propre conservation. à faire alterer un fait dont la connaissance lui serait funeste. Le témoin qu'il a corrompu dans ce dessein, n'ayant pas un intérêt aussi naturel à tromper la justice, est plus coupable que lui, lorsqu'il se rend parjure, puisque, selon Julius Clarus ( au mot falsum, in supplemento, nos 258 et 262), celui qui dépose faux pour sa défense, ou dans une cause où il a intérêt, devient excusable, et ne doit pas étre puni de la peine ordinaire dufaux. Celui qui, par ce motif, engage un autre homme a déposer faux, mérite donc aussi de l'indulgence; mais il ne faut pas que ce soit dans une cause où il ne soit question que de conserver de l'argent; il faut qu'il ait un puissant intérêt à defendre, tel que sa vie, son honneur et l'existence de ses enfans. Alors ce grand et puissant motif excuse jusqu'à un certain point sa fraude aux yeux de la justice, et modère infiniment la peine qu'il a en

courue.

[[ Aujourd'hui, de parcilles excuses ne pourraient pas être admises par les juges, à l'effet d'acquitter un accusé; elles ne pouvaient l'être qu'à l'effet d'atténuer la peine dans le cas où la loi admet un minimum et un maximum, V. l'article Excuse. ]]

XII. De ce qu'un témoin a fait une fausse déposition, il ne serait pas juste d'en conclure qu'il a été suborné par la partie civile; car il peut se faire que, par des motifs de laine, de vengeance ou d'intérêt personnel, il se soit déterminé à aggraver sa deposition, ou à la charger de faux.

XIII. Selon plusieurs 'criminalistes, les témoins subornés font preuve contre celui qui les a corrompus, s'ils déclarent que ce dernier les a subornes. Papon, liv. 22, tit. 13, observe, avec raison, que deux témoins de cette espèce sont trop suspects pour devoir déterminer les juges à condamner, sur leur seule déclaration, celui qu'ils accusent de Subornation. [[V. l'article Preuve, sect. 3, n• 5.]]

XIV Boerius et Farinacius sont d'avis que, quoiqu'une partie ait suborné des témoins en sa faveur dans le cours du procès, elle n'est pas pour cela déchue du droit qu'elle pouvait avoir, si d'ailleurs ce droit est fondé sur d'autres preuves. Cela est juste au fond; mais il nous semble qu'elle mériterait bien de le perdre, dans le cas où la Subornation serait complètement démontrée; et si on ne l'en prive pas, c'est parce qu'elle doit être punie d'une autre manière (M. DE LA CROIX.)

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FIN DU TOME TRENTE-UNIÈME.

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