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causé aux passans. Si les rédacteurs de la Charte eussent voulu prescrire la censure ou la permission de l'autorité avant la publication des écrits, et mettre ainsi dans le domaine royal la faculté de publier des livres, des brochures ou des journaux, comme s'y trouvait jadis le droit même de travailler, d'exercer une profession; dans cette double hypothèse, ils eussent terminé ainsi notre article 8: En se conformant aux lois qui doivent prévenir les abus, etc.; mais, supposant cette rédaction qu 'ils ont écartée, parce qu'elle serait pernicieuse, la Charte, pour cette seule clause, qui rendrait toutes les autres illusoires, aurait dû être repoussée par les chambres, comme elle l'eût été par l'opinion de toutes les personnes éclairées et impartiales.

par

188. Il est vrai que cet article si essentiel a été continuellement violé par les lois, ou plutôt les contre-lois des 21 octobre 1814, 8 avril, 20 juillet et 9 novembre 1815, et du 28 février 1817. Néanmoins, après de rudes combats contre les ministres, nous avons de fait à-peu-près la liberté entière des livres et des brochures; et . quoique ce triomphe partiel de la Charte soit malheureusement une victoire de l'opinion, une pénible conquête des écrivains, il est vrai, du moins, que la jouissance n'en est plus contestée directement, qu'elle fait très-peu de mal et beaucoup de bien; qu'elle est utile au roi, aux ministres, à la nation, à tous, excepté aux oppresseurs et aux brouillons.

189. Les écrits politiques se succèdent avec une telle rapidité, un tel succès, qu'ils nous aident à supporter l'inconstitutionnel esclavage des journaux qui dure encore; et cet esclavage est devenu ainsi bien plus dommageable aux ministres qu'il ne leur est commode. Sans doute, ils y renonceront d'eux-mêmes, ou seront forcés d'y renoncer, aussitôt qu'ils seront constitutionnels, ou qu'il y aura, dans la chambre des députés, plus d'amis de la Charte entière que de ministres, de sous-ministres, d'agens officiels, et de créatures des ministres. Alors, nous cesserons d'être de pire condition que nos voisins les Anglais, les Belges et les Allemands; et l'argent que nous employons à nous procurer, avec empressement, leurs journaux prohibés en France, tournera au profit de notre commerce et de notre industrie.

190. Cependant, on se plaint des durs traitemens qu'éprouvent dans des tribunaux les écrivains défenseurs et souvent martyrs de nos libertés. L'excès du mal finira par apporter le remède. Nous aurons une loi appelée par les voeux publics; une loi qui conciliera les précautions de police et les systèmes de compétence, avec la justice et la liberté de la presse; qui abrogera, puisqu'il le faut, la contre-loi, en quelque sorte abrogée par ellemême, du 9 novembre 1815, et qui attribuera la décision de la culpabilité sur tous les délits de la presse aux jurés, à des jurés, qui ne seront plus de simples commissaires choisis par les

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nistériels, mais des hommes pris au sort parmi les citoyens lettrés électeurs ou éligibles.

191. Quant à la détermination des délits et des peines en cette matière, elle est assez exacte, assez sévère dans le Code Criminel de février 1810, et rien n'empêche qu'avec le tems on ne la corrige, on ne l'enrichisse de plusieurs dispositions sages, présentées et discutées dans les nouveaux écrits, presque innombrables, qui ont paru en France sur la liberté de la presse et sur la répression des abus de cette liberté.

CHAPITRE VIII.

Propriété. ( Articles 9, 10, 66 et 70 de la Charte.)

192. « TOUTES les propriétés sont inviolables sans aucune exception de celles qu'on appelle nationales, la loi ne mettant aucune différence entre elles » (art. 9).

« L'état peut exiger le sacrifice d'une propriété, pour cause d'intérêt public légalement constaté, mais avec une indemnité préalable » (art. 10).

« La peine de la confiscation des biens est abolie, et ne pourra être rétablie » (art. 66).

<«< La dette publique est garantie. Toute espèce d'engagement pris par l'état, avec ses créanciers, est inviolable » (art. 70).

Ces quatre articles sont analogues et veulent être expliqués de suite.

La propriété est le droit d'employer, comme il nous plaît et sans nuire à autrui, nos facultés naturelles et acquises, et de jouir à notre gré des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels, qui nous appartiennent.

Elle a son fondement dans la loi naturelle, dans nos besoins et nos facultés, dans la possibilité de les satisfaire, sans nuire au droit d'autrui; elle naît de l'occupation, du travail, des conventions ou de la loi. Avant qu'il y ait un gouvernement, elle n'a de garantie que l'isolement des individus et des familles dans de vastes déserts, la force du maître, la justice des voisins. Les nations n'ont entre elles que ces mêmes garanties, et n'en sont pas moins incontestablement propriétaires. On ne saurait trop répéter que les droits ou la justice existent avant les lois humaines, et que les lois ne sont faites que pour mieux conserver les droits, maintenir plus sûrement toutes les propriétés. Les écrivains qui disent le contraire se trompent, servent le despotisme; s'il y a des ministres faisant des phrases pour accréditer la même erreur, c'est qu'ils ne veulent point de frein à leur domination arbitraire, point de barrière exclusive de leurs contre-lois.

193. Pour l'avantage de tous, l'ordre social assure à la propriété les garanties les plus efficaces; il lui procure des développemens, des extensions précieuses; il lui assigne aussi des limites fixes,

mais raisonnables; et si la loi permet à l'autorité de disposer d'un bien privé pour l'avantage public, ce n'est qu'au moyen d'une juste et préalable indemnité'.

Les atteintes portées au droit de propriété par injures, insultes, menaces, voies de fait, anticipation insensible, violence ou dol, doivent être soigneusement prévenues et réprimées par nos lois et par nos magistrats. Ces vérités et d'autres encore sont comprises dans notre article 9: « Toutes les propriétés sont inviolables. »

194. Il ajoute : « Sans aucune distinction de celles qu'on appelle nationales, la loi ne mettant aucune différence entre elles. » On trouve encore ici une recherche de laconisme ou d'élégance, qu'il convenait peut-être d'éviter sur un sujet aussi délicat : ce choix d'expressions n'est pas ce qu'il y avait de plus simple et de plus clair, pour signifier que les ventes des domaines appelés nationaux, sont maintenues irrévocablement. Tout le monde sait, à n'en pas douter, ce que c'est que de tels domaines et de telles ventes; mais ce qu'un parti de laïcs et d'ecclésiastiques n'a jamais cessé d'appeler verbalement et par écrit, et souvent en discours publics, des vols et des spoliations, autrement des propriétés non véritables, dans les mains des acquéreurs successifs, n'est peut-être pas assez évi

Voy. les lois des 16 septembre 1807, et 8 mars 1809, et l'article 345 du Code Civil.

2 Termes des lois précédentes.

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