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141. The familly of Brocas of Beaurepaire and Roche Court bereditary masters of the royal buckhounds with some account of the english rule in Aquitaine by Montagu BURROWS capitain R. N., M. A., F. S. A. Chichele professor of modern history in the university of Oxford. London, Longmans, Green, and Co, 1886, grand in-8 de xu1-496 p.

Le sous-titre du volume de M. Montagu Burrows pourrait être ce lui-ci Le contenu d'un vieux coffre. Ce coffre, construit au xve siècle, semblait perdu depuis une centaine d'années; on n'en soupçonnait même pas l'existence lorsqu'il devint dans un héritage-ò l'heureux hasard! la part de l'auteur que son mariage rattachait à l'antique famille de Brocas, cette famille dont le nom a eu l'insigne honneur d'être célébré par Shakspeare. Dès que le savant professeur eût ouvert le coffre si longtemps oublié, il prit la généreuse résolution de déchiffrer les documents qui s'y trouvaient réunis au nombre de six cents environ. Les plus anciens de ces documents remontent à l'année 1271; les plus modernes appartiennent à l'année 1782. Malgré les difficultés de lecture que présentent la plupart de ces textes, M. B. leur a vaillamment arraché leurs secrets et, à force de persévérance et de zèle, il a reconstitué l'histoire entière des Brocas depuis la fin du XIIe siècle jusqu'à la restauration de Charles II, n'ayant pas jugé à propos de pousser plus loin un travail qui, à partir de cette époque, aurait été d'un intérêt beaucoup moins général. Comme l'histoire de cette grande famille est intimement mêlée à l'his toire des deux nations pendant toute la durée de la domination anglaise en Aquitaine et en Gascogne, on comprend l'insistance avec laquelle les savants de Londres et d'Oxford, consultés par l'auteur, lui ont conseillé de publier une monographie d'autant d'importance. M. B. regrette, trop modestement, dans sa Préface, que le soin de mettre à profit les liasses du vieux coffre n'ait pas été confié à des mains plus expérimentées nul travailleur n'aurait plus consciencieusement, plus habilement, tiré parti des trésors contenus dans les archives de la maison de Brocas. La période pendant laquelle les Anglais occupèrent la région représentée par les provinces ecclésiastiques d'Auch et de Bordeaux est encore, à certains égards, comme le constate l'auteur, imparfaitement connue sur divers points à demi-obscurs de ces trois siècles la lumière est projetée par l'histoire d'une famille dont plusieurs membres occupèrent successivement les plus hautes positions et furent investis de la confiance des rois qu'ils servirent avec le plus chevaleresque dévouement et jusqu'au sacrifice de leur fortune et de leur vie.

On accuse quelquefois les généalogistes de se montrer faciles et complaisants. Personne n'adressera pareil reproche à M. B.; son cœur d'airain n'écoute que la voix de la vérité. Il écarte impitoyablement de son livre tout ce qui n'est pas établi par l'autorité des documents. Conjectures, légendes, trouvent en lui un adversaire résolu, et l'on pourrait dire que sa plume, en ces discussions sans merci, ressemble à la terrible épée de ce Bernard de Brocas, un des plus renommés guerriers du

XIVe siècle, lequel dort auprès de son maître, le roi Richard, sous les voûtes de l'abbaye de Westminster.

J'ai eu l'occasion de m'occuper d'une façon particulière, à la fois comme voisin et comme parent par alliance (voisin très rapproché, parent très éloigné), j'ai eu, dis-je, l'occasion de m'occuper de l'histoire de la branche française de la famille de Brocas, branche établie depuis très longtemps à Casteljaloux (Lot-et-Garonne). Les indications fournies par le savant anglais sur cette branche concordent avec les résultats de mes propres recherches. Du reste, M. B. n'a rien négligé pour donner à cette partie de son travail une rigoureuse exactitude : il est venu en Gascogne étudier sur les lieux toutes les questions relatives aux anciennes possessions de la branche française, et il a minutieusement compulsé les vieux papiers conservés dans les archives du château de Carnine, habité par M. le comte de Brocas 1.

Je ne puis analyser un travail aussi considérable que celui de M. B.; me contentant d'appeler l'attention sur les choses principales, je signalerai le très grand intérêt du chapitre intitulé: Sir Bernard Brocas and the Black Prince. Il y a là un curieux commentaire des récits de Froissart, ce chroniqueur dont M. B. vante avec enthousiasme les pages enchanteresses. Dans le très recommandable chapitre sur les de Brocas en France, je ne trouve qu'une lacune le savant auteur n'a rien dit de ce capitaine Brocas qui se distingua au milieu des huguenots, dans les guerres de religion du xvie siècle et qui fut tué près de Marmande, en un combat admirablement décrit par d'Aubigné (Histoire universelle, t. II, p. 288). Les nombreux documents inédits, qui s'étendent du XIe au XVIe siècle, méritent aussi une mention spéciale (p. 285-317, 339-358, 375-424, 430-443, 449-470). Louons encore les tableaux généalogiques dressés avec tant de soin par M. B., le copieux index par ordre alphabétique des noms de lieux et de personnes, enfin les illustrations dont le volume est décoré (châteaux, chapelles, tombeaux, sceaux), illustrations qui, jointes aux qualités de l'impression et du papier, lui donnent autant de prix pour l'ami des beaux livres, qu'il avait déjà de prix pour l'ami des excellents travaux.

T. DE L.

1. N'omettons pas de dire que M. B. a interrogé toutes les publications françaises qui pouvaient lui être utiles, par exemple celles de l'abbé Monlezun, de M. Rabanis, de M. Brissaud, de M. Francisque Michel, le recueil des Archives historiques du département de la Gironde, etc., il n'a pas même laissé échapper un travail aussi récent que la remarquable thèse de M. Ch. Bémont sur Simon de Montfort (1884). Il cite aussi la Chronique des quatre premiers Valois, et il appelle l'éditeur (pp. 90, 91) M. Siméon de Luce. C'est probablement la seule inexactitude de tout l'ouvrage.

VARIÉTÉS

Un faux Dieu.

Le dernier fascicule du Bulletin de correspondance hellénique publie une inscription de Myconos dont voici le début :

ΙΔΙΜΕΡΑΝΩΙ ΚΑΙ ΘΕΑΙΣ ΝΥΝΦΑ

ΛΟΥΜΕΝΟΣ, etc.

L'éditeur transcrit et restitue :

Τῶ]ι Δὶ Μερανῶι καὶ θεαῖς Νύμφαις

Φι] λουμενος, etc.

Il ajoute « L'épithète de Mepavòs appliquée à Zeus se rencontre ici pour la première fois. »

Cette épithète ne doit point pénétrer dans les dictionnaires mythologiques. Nous avons ici un curieux exemple d'une erreur par influence dans la gravure d'une inscription. Le lapicide avait sous les yeux une copie manuscrite où ME figurait à la seconde ligne dans [] AOYMENO2, juste au-dessous des lettres qui suivaient IAI dans la première. Il les a écrites une première fois là où elles ne devaient pas figurer. La correction est évidente; il faut lire :

*Ισ]ιδι [κοι]ράνων καὶ θεαῖς Νύνφαις.

L'épithète Koipavos, appliquée à Osiris, se lit dans une inscription grecque du Musée du Louvre (Corpus, no 3724). Isis est appelé dans les inscriptions ävassa, Basidiosa, dimo (Corpus, no 3724, 5039, 4945). Koipavos, épithète de femme, se trouve dans les Orphiques et dans Lucien (cf. le Lexicon de Pape, s. v.) Enfin, Délos, voisine de Myconos, a fourni de nombreuses dédicaces à Isis.

Salomon REinach.

LETTRE DE M. FLEURY.

La Revue critique a publié le 28 mars, à propos de mon Essai sur le patois normand de la Hague, un article signé X., qui, par suite de circonstances qu'il est inutile de mentionner, m'est arrivé tardivement. Me permettrez-vous de remercier l'auteur des compliments qu'il veut bien m'adresser en commençant et en finissant, et aussi de relever quelques-unes de ses erreurs 1? Je tâcherai d'être bref.

La Hague, comme chacun sait, est un petit pays à l'ouest de Cherbourg, entouré de trois côtés par la mer. Les Gaulois et les Scandinaves ont laissé à la Hague des descendants, encore reconnaissables, malgré les croisements. La langue aussi, par suite de l'isolement du pays, a conservé des particularités curieuses surtout dans son vocalisme. Je m'en tiendrai à celles dont M. X. s'est occupé.

L'a accentué des verbes latins en are, des participes en atus, des substantifs en as, alem, s'est conservé dans l'italien, le provençal, l'espagnol, le portugais et le roumain, c'est-à-dire dans toutes les langues issues du latin, à une seule exception près, le français du nord. Nous retrouvons cet a à la Hague et dans le langage des

1. M. Fleury veut dire sans doute de « mes erreurs », mais passons.

iles anglo-normandes; Aurigny, Guernesey et Jersey; est-il possible de ne pas reconnaître là la voyelle a du latin, et de ne pas considérer cet a comme primitif 1? Ajoutons que deux circonstances ont contribué à maintenir cet a: le breton héritier du celtique, l'ancienne langue du pays 2, le scandinave parlé par les pirates qui s'y sont fixés 3, ont également a à l'infinitif de la majorité de leurs verbes.

M. Joret et M. X., qui le suit, ne veulent pas admettre cette conservation. Selon eux, l'a latin, qui s'est maintenu dans la plupart des langues, n'a pas dú se conserver à la Hague. Les Haguais, les Guernesiais ont dú changer l'a latin en e d'abord, et c'est après cette modulation en mineur qu'ils sont revenus à a. Toutes les vraisemblances sont contre cette évolution ; mais enfin,

Seulement pour être cru, l'invraisemblable doit être prouvé. Et nous sommes en face d'une simple supposition 5.

En quoi M. Joret a raison, c'est que dans une partie de la presqu'île de la Manche, plus rapprochée du domaine français, on a très anciennement remplacé cet a par ei. Un poème, qui paraît être du xe ou du xive siècle, écrit ainsi les mots où a figure en latin à la terminaison, mais dans cette partie du pays on n'est pas retourné à l'a haguais et guernesiais. On y prononce ei aujourd'hui comme au temps où fut écrit le poème de Thomas Hélie 6, tandis qu'à la Hague, au Cotentin, à Guernesey, etc., on prononce toujours a comme au temps des Gaulois, des Romains et des Scandinaves 7.

Dans le Val de Saire, séparé de la Hague par Cherbourg et la Divette, cet a du latin est devenu partout o. Ce passage de a à o est un fait ordinaire dans les langues. En Scandinavie, où j'ai voyagé l'année dernière, j'ai vu le son ổ, qu'on écrit á, remplaçant fréquemment un a primitif: karl, se prononce kórl, etc. 3. On n'a même pas besoin d'aller si loin pour voir a passer à o les paysans des environs de Paris nous en fournissent l'exemple. On s'explique donc très bien, d'une part l'a conservé, de l'autre a passant à o. Ce qu'on ne s'explique pas, c'est que de a on soit descendu à e pour remonter ensuite à la Hague à a, au Val de Saire à o 9.

1. Certainement cela est possible, et M F. est seul à croire à la persistance de cet a.

2. Est-ce que le breton, (ce soi-disant) « héritier du celtique », n'a pas été la langue de l'Ile-etVilaine, bien plus sans doute que de la Hague? Pourtant l'a latin ne se retrouve pas dans son patois.

3. Quand les Scandinaves se sont fixés en Neustrie, l'a latin était déjà passé à e; d'ailleurs il y a eu autant de Scandinaves dans le bassin de la Basse-Seine que dans la Hague; pourquoi ne trouve-t-on pas a dans le patois de cette région?

4. M. F. se trompe; toutes les vraisemblances et l'histoire de la langue sont en faveur de cette évolution.

Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable,

5. C'est M. F. qui fait une supposition; les chartes des Iles normandes nous montrent encore au XVI siècle è ou ei (= è), là où il y a aujourd'hui ai ou a.

6. Ceci est entièrement inexact et non moins confus. M. F. affecte de dire que la Vie du Bienheureux Thomas Hélie a été écrite dans une « partie de la presqu'ile du Cotentin où a latin, changé en ei, est resté ei»; d'abord il n'y a pas dans le Cotentin de région dont le patois ait aujourd'hui ei pour a; d'un autre côté, l'auteur de cette Vie nous dit lui-même qu'il parle en «< Hague language > ; donc ce parler, qui aujourd'hui dit a, o, pour a, disait autrefois ei ou même è.

7. Il est vraiment trop plaisant de parler de la prononciation du temps des Gaulois et des Scandinaves qu'est-ce que M. F. en sait?

8. Qu'est-ce que la phonétique suédoise peut avoir à faire ici?

9. C'est pourtant ce qu'il est bien facile de s'expliquer, puisque nous voyons cet a, qui est è ou ei (è), jusqu'au xvi siècle, devenu a ou o aujourd'hui dans le haguais, comme dans la plupart des patois picards. D'ailleurs il en est de même de l'e latin transformé de debere, qui, après y avoir

Je me suis un peu étendu sur ce chapitre, parce que M. Joret et M. X. paraissent y attacher de l'importance. Je serai plus bref sur les autres.

M. X. prétend que l'r mouillée, l'r molle des Haguais, est très différente de celle des Russes. Je serais curieux de savoir où il a pris ce renseignement. Il ne manque pas de Russes en France: qu'il demande au premier venu de prononcer un mot français dans lequel r se trouve entre deux voyelles 1, qu'il fasse prononcer le même mot à un paysan haguais, je le défie de reconnaître la nationalité de celui qui aura parlé.

Le son que j'écris y est aussi l'y des Polonais, l'i grave des Russes. Ce son existe aussi en anglais strictly, par exemple, ne se prononce ni strictli, ni strictlé, l'y a un son intermédaire entre é et i 2. Seulement, comme ce son ne se trouve jamais sous l'accent en anglais, tandis qu'il est généralement accentué chez les Polonais, les Russes et les Haguais, le son de l'y anglais final est plus faible, mais c'est à peu près le même. Au reste je n'ai pas plus inventé le nom d'i grave que celui d'r molle ou mouillée. Ce sont les termes techniques.

M. Romdahl, me dit-on encore, écrit ie ce que j'écris iei. Je n'ai pas adopté ie parce que cette transcription est équivoque. Prononcée à l'allemande, c'est í; prononcée à la française, c'est ié, iè, diphongues faibles, tandis que nous avons affaire à une diphtongue forte avec l'accent sur l'i. De plus, après l'e, on entend un i non accentué. Ma transcription me semble donc irréprochable 3.

Ce n'est pas d'aujourd'hui, du reste, que j'écris le patois de mon pays : mes premières études du folkslore de la Hague ont été imprimées en 1840, et à la même époque j'écrivais en patois dans le journal local des lettres dans le genre de PaulLouis Courier au talent près, bien entendu et mes transcriptions semblaient parfaitement claires à mes lecteurs 4.

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Si je n'ai pas mis dans mon Glossaire calin (éclair de chaleur), cofréne, coveche, pouchin, c'est que pendant les vingt ans que j'ai passés à la Hague dans cinq localités différentes, je n'ai jamais entendu prononcer ces mots 5. En revanche, j'ai entendu chavette pour chouette 6. Quant à pouliche, ce mot est dans Littré, et je n'ai donné généralement place aux mots français que dans le cas où j'avais quelque chose de particulier à en dire 7.

donné deveir, est aujourd'hui devai ou devo dans les patois du nord du Cotentin. La transformation de e en a a été également signalée depuis longtemps dans les patois du Maine. Mais M. F. ferme les yeux à toutes les évidences, et, seul contre tous, il s'obstine à défendre une théorie que contredisent les faits les plus indéniables.

1. C'est aussi ce que je n'ai pas manqué de faire; il y a d'ailleurs un fait qui tranche la question à priori; il n'y a pas un, il y a dix r différents dans le patois du Cotentin septentrional, entre autres r = 9, est-ce que c'est là l'r russe?

2. M. F. confond ici les sons les plus différents; l'i haguais est guttural et nasal : quel rapport peut-il avoir avec l'y anglais de strictly, etc.?

3. J'ai opposé la transcription de M. A. Romdahl à celle de M. F., non parce qu'elle me semble parfaite, mais parce qu'elle montre qu'il n'y a pas de diphthongue là où M. F. en met une.

4 Elles pouvaient sembler claires; étaient-elles scientifiquement exactes? Là est la question. 5. Cela prouve tout simplement de quelle manière imparfaite M. F. connait le patois du Cotentin septentrional ou combien il l'a oublié; covéche est très bien usité au S.-O. de la Hague, et M. A. Romdahl, qui n'a passé que quelques semaines aux environs de Cherbourg, n'a eu garde d'oublier calun, forme dialectale de calin, et primitif de calunae, que M. F. dérive si plaisamment de ca + lucere, luna ou lucina, au choix.

6. Comment, si chavette existe dans le patois de la Hague, M. F. a-t-il oublié ce mot si curieux ? 7. Je n'ai remarqué l'absence de pouchin, pouliche, etc., mots si essentiellement normands, que

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