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corde au cou. Une fois battu à Leipzig, il devait fatalement tomber plus bas encore que la première fois, et comme il s'était placé trop haut pour qu'on osât le déposer une seconde fois, on se décida finalement à le tuer. Sachant ou devinant ce qui se tramait à la cour de Vienne, se voyant à deux doigts de la ruine, Wallenstein voulut conjurer le sort en s'alliant aux Suédois, puis, abandonné par son armée, se sauver du moins auprès d'eux. Il s'y prit trop tard et succomba, comme on sait, à Eger, sous le fer des assassins, le 24 février 1634, victime d'une trahi. son qu'il méditait lui-même. Cet attentat stigmatise autant, à notre avis, le prince pusillanime qui l'ordonna que le sujet orgueilleux qui le rendit nécessaire. Il donne un air de grandeur à la fin d'un homme qui ne fut ni un grand caractère, ni même un général hors ligne', mais seulement un égoïste ambitieux, doué d'une volonté de fer, concentré sur lui-même et qui sut merveilleusement mettre à profit la situation extraordinaire de son pays, l'incapacité politique et la mollesse de caractère de son souverain o.

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R.

P.-S. Au moment de terminer ce compte-rendu, nous recevons une brochure de M. Gindely (Zur Beurteilung des kaiserlichen Generals im 3ojaehrigen Kriege Albrechts von Waldstein. Eine Antwort an Dr Hallwich, von Anton Gindely. Prag, Tempsky, 1887, 38 p., 8°), destinée à répondre plus spécialement aux virulentes attaques qu'un des spécialistes en cette matière, M. Hallwich, a formulées contre l'ouvrage dont nous venons de rendre compte. Ces attaques témoignent, ou bien d'une véritable animosité personnelle contre l'auteur, ou bien d'une admiration aveugle pour Wallenstein; mais aucun de ces deux motifs ne peut excuser le ton de la polémique dirigée contre le savant professeur de Prague. On peut discuter, nous l'avons dit, l'affirmation de M. G., qui voit la trahison de Wallenstein se préparer lentement de longues années avant sa chute, et nous comprenons parfaitement qu'on n'admette pas ce point de vue. Mais ce qui est inadmissible, c'est de nier les mille faits exposés par l'auteur d'après les sources les plus authentiques, c'est de l'accuser de n'avoir écouté que les témoigna ges défavorables au général, d'avoir « accumulé la boue » sur le personnage principal de son récit, etc. Ce qui est plus ridicule encore, c'est de reprocher à M. G. (qui depuis un quart de siècle explore toutes les ar chives d'Europe), d'être incapable de s'élever jusqu'à la compréhension de l'ensemble de la guerre de Trente-Ans, alors qu'on n'a qu'à jeter un regard sur les quatre premiers volumes de sa grande Histoire pour s'as

1. Nous sommes heureux de constater cette opinion de M. G. (II, p. 383), alors qu'en ces derniers temps encore les admirateurs de Wallenstein ne tarissent pas sur ses capacités et son génie militaires, qualités qui nous ont toujours paru problématiques.

2. Vol. II, p. 39, il faut lire Philippe IV, au lieu de Philippe II.

surer du contraire. Des attaques aussi passionnées et frivoles ne nuisent qu'à ceux qui les risquent, et M. Gindely a été bien bon de se donner la peine d'en donner une réfutation, qu'on peut appeler d'ailleurs véritablement topique.

197.- De l'Education des filles par Fénelon. Texte revu sur l'édition originale (1687), et publié avec une introduction et des notes critiques, grammaticales et littéraires, par Armand GASTÉ, professeur à la Faculté des lettres de Caen. Paris, librairie Eug. Belin.

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M. Gasté n'est pas de ces professeurs qui s'endorment dans leur chaire de Faculté c'est lui qui a restitué à leur véritable auteur, à l'avocat Jean Le Houx, les jolies chansons attribuées depuis si longtemps à Olivier Basselin; c'est lui encore qui, tout récemment, publiait les Noëls et Vaudevires du manuscrit de Jehan Porée, si curieux pour l'histoire de la poésie populaire. Une traduction en latin étymologique de deux cents vers de la Chanson de Roland, travail très utile destiné aux candidats à la licence ès-lettres, nous prouve qu'il se tient au courant du progrès des études romanes. Il n'a point dérogé à sa qualité de professeur à la Faculté des lettres en publiant quelques éditions classiques, car toutes sont faites avec le plus grand soin, enrichies de notes savantes et ingénieuses, témoin le Traité de l'Éducation des filles, par Fénelon. Je remercie M. G. de m'avoir donné l'occasion de relire une fois de plus cet ouvrage si sage, si pratique, où l'on ne trouve absolument rien de « cet esprit chimérique » qui inventa la république de Salente. En tête est une introduction aussi nette qu'instructive où sont comparés entre eux « les plus glorieux disciples de Fénelon, Mme de Maintenon et J.-J. Rousseau. Je remarque que M. Gréard, dans une édition de ce Traité qu'il a publiée chez Jouaust, n'a pas dédaigné de la mettre à profit: il a bien fait, et il aurait encore mieux fait s'il l'eût citée.

Avant Fénelon, on ne manque certes pas de préceptes et de systèmes pour élever et instruire les garçons, mais sur l'instruction des filles, on écrit peu ou point. Au xvr® siècle, où se firent jour tant d'idées neuves et originales, à cette époque où Rabelais s'égaie et s'amuse en sa mirifique institution de Pantagruel par Ponocrates, où Marnix de SainteAldegonde écrit en latin le plus sérieux des petits livres pour l'instruction des enfants, il ne vient presque à l'esprit de personne que les femmes aient besoin d'apprendre quelque chose. On en était resté aux idées de l'antiquité et du moyen âge : « Or est asseis, fait Aganor, laixiés les dames ez chambres baisier et acoleir, et lor crins paignier et galoneir, que iteil doit estre li lours mestiers. » C'est une réponse brutale qui revient à tout moment dans nos vieux romans, dans nos

Chansons de geste, chaque fois que les femmes veulent intervenir dans les affaires des nobles chevaliers. On ne leur demandait pas autre chose que d'être gracieuses, gentilles, et de « clere façon. Chose curieuse ! C'est une femme, et une femme dont la réputation est restée douteuse, Louise Labé, qui, l'une des premières, revendique pour les dames vertueuses » le droit à l'instruction, et qui essaie de les tirer de leur servage intellectuel; c'est elle qui les prie « d'élever un peu leurs esprits par-dessus leurs quenouilles et leurs fuseaux, et de s'employer à faire entendre au monde que, si elles ne sont faites pour commander, elles ne doivent pourtant pas être dédaignées pour compagnes, tant ès affaires domestiques que publiques, de ceux qui gouvernent et se font obéir ». On ne peut être plus modéré, plus raisonnable. Peu à peu l'idée fera son chemin. Montaigne, plus tard, dira que les femmes ne sont pas aptes à traiter les matières de théologie, mais il leur permettra (Essais, liv. III, ch. 3) la poésie comme un amusemement propre à leur besoin, l'étude de l'histoire et de cette partie de la philosophie « où elles prendront les discours qui les dressent à juger de nos humeurs et conditions, à porter humainement, avec bien d'autres petites misères, l'importunité des ans et des rides ». Fénelon ajoutera peu à ce programme il recommandera qu'on apprenne aux jeunes filles à lire et à écrire correctement (précepte très important à cette époque, et qui n'a pas cessé de l'être depuis); qu'on les forme à une piété raisonnable, qu'on leur enseigne les vérités essentielles de la religion, les quatre règles de l'arithmétique, les principales règles du droit, qu'on ne leur laisse pas ignorer l'histoire de France et celle des pays voisins, étude qui agrandit l'esprit, le tout « avec une exacte sobriété ». Il ne leur interdira pas la lecture des poètes et des orateurs, pourvu qu'on y apporte de la discrétion, et ira jusqu'à permettre d'apprendre la langue latine. J'accorde que ce programme est un peu sommaire, si on le compare à celui dont on a écrasé de nos jours les jeunes filles de quatorze à quinze ans : morale, langue française et littérature, langues vivantes, histoire et géographie, mathématiques, physique et chimie, physiologie, économie domestique, hygiène, dessin, histoire de l'art, musique vocale, sans compter les travaux à l'aiguille et la gymnastique, voilà ce qu'on veut faire entrer dans leurs faibles têtes, dans leurs esprits à peine affermis, c'est-à-dire l'encyclopédie des connaissances humaines presque tout entière, de quoi effrayer un membre de l'Institut! Nous passons toujours d'un extrême à l'autre; nous avons oublié ce que Fénelon avait toujours en vue, qu'il s'agit avant tout de former de bonnes mères de famille, plus raisonnables que raisonneuses, moins instruites que lettrées. En supposant qu'il y ait parmi les jeunes filles quelques monstres capables de dévorer ce programme, n'est-il pas à craindre qu'elles ne puissent le digérer, et que tout ce prétendu savoir mal ordonné ne se tourne en pédanterie? Je dirais volontiers avec Montaigne en changeant légèrement sa phrase: « Il y a dans les sciences des estendues et des

enfonceures que les jeunes filles feront bien de laisser là », sous peine. de s'égarer dans les unes, de s'abîmer dans les autres. C'était l'avis de Mme de Maintenon qui se conforma presque en tout pour les élèves de la maison de Saint-Cyr aux préceptes, aux conseils de Fénelon; c'était celui de son grand-père Agrippa d'Aubigné, ainsi qu'on peut le voir par cet extrait d'une lettre adressée à ses filles : « Je viens à vous dire mon advis de l'utilité que peuvent recevoir les femmes par l'excellence d'un tel savoir c'est que je l'ay veu presque toujours inutile aux demoiselles de moyenne condition comme vous, car les moins heureuses en ont plus tost abusé qu'usé : les autres ont trouvé ce labeur inutile, essayant ce que l'on dit communément, que quand le rossignol a des petits qu'il ne chante plus. Je dirai encor qu'une eslevation d'esprit desmesurée hausse le cœur aussy, de quoy j'ay veu arriver deux maux, le mespris du mesnage et de la pauvreté, celuy d'un mary qui n'en sçait pas tant, et de la dissension ». (Œuvres de d'Aubigné, I, 449, Réaume et Caussade). « Le rossignol ne chante plus quand il a des petits!» Il y a comme cela des perles dans ces vieux auteurs du xvie siècle. S'ensuit-il, parce que je cite avec plaisir ces quelques mots de d'Aubigné, qu'il faille revenir absolument à Fénelon, et rayer d'un trait de plume le programme actuel ? J'espère que l'on aura mieux com. pris ma pensée.

A. DELBOULLE.

FRANCE.

CHRONIQUE

Le numéro 3 (juillet 1887) des Annales de l'Est renferme la suite et fin de l'article de M. A. CAMPAUX sur David Richard, d'après des lettres inédites de Lamennais et de George Sand, la suite des articles de M. A. DEBIDOUR sur le général Fabvier, et de M. Ch. PrISTER Sur Jean Daniel Schoepflin, et des comptesrendus critiques très sérieux (La Lorraine illustrée, la première partie du Catalogue du musée lorrain, les Beiträge zur æltesten Geschichte des Bisthums Metz, de M. O. Doering; l'Ancien régime dans une bourgeoisie lorraine, de M. Munier-Jolain).

Les Mélanges Renier, qui forment le 73 fascicule de la Bibliothèque de l'École des Hautes-Études, viennent de paraître (Paris, Vieweg. In-8°, Lx et 468 p.). Nous avions déjà annoncé la mise sous presse de ce recueil de travaux, publiés par la section des sciences historiques et philologiques de l'École pratique des HautesÉtudes, en mémoire de son président Léon Renier. Il contient, outre la dédicace, un avant-propos d'Ernest Desjardins et les travaux suivants : Arthur AMIAUD, Cyrus, roi de Perse; Abel BERGAIGNE, La syntaxe des comparaisons védiques; Gaston BOISSIER, Commodien; Michel BRÉAL, Comment les langues réparent les points faibles de leur grammaire; Emile CHATELAIN, Un important fragment de Virgile (Bibl. nat. latin 7906); Arsène DARMESTETER, Le démonstratif ille et le relatif qui en roman; James DARMESTETER, L'apocalypse persane de Daniel; Hartwig DEREN

BOURG, Note sur quelques mots de la langue des Francs au x11° siècle, d'après le texte de l'autobiographie d'Ousâma Ibn Mounkidh; Joseph DERENBOURG, Elazar, le Peitan; l'abbé Louis DUCHESNE, Le concile d'Elvire et les flamines chrétiens; H. GAIDOZ, Les gâteaux alphabétiques; Jules GILLIÉRON, Mélanges gallo-romans ; Paul GUIEYSSE, Réprimande à un fonctionnaire égyptien; Joseph HALÉVY, Notes sémitiques; Bernard HAUSSOULLIER, Note sur les trois tribus doriennes en Crète; HAUVETTE-BESNAULT, Episode des grains de riz écrasés; Louis HAVET, Ve en grec; Ant. HÉRON DE VILLEFOSSE, Bibliographie des travaux de Léon Renier; Alfred JACOB, De nonnullis codicibus graecis palimpsestis in bibliotheca majore Parisiensi asservatis; Aug. LONGNON, La civitas Rigomagensis; Gabr. MONOD, Les mœurs judiciaires au vin siècle, d'après la Paraenesis ad judices de Théodulf; Alfred MOREL-FATIO, Note sur l'article dérivé de ipse dans les dialectes catalans; Jules NICOLE, Athénée et Lucien; Pierre de NOLHAC, Notes sur Pirro Ligorio; Jules Op. PERT, Inscription d'Antiochus I Soter; Gaston PARIS, L'appendix Probi; Jean PsiCHARI, Le poème à Spanéas; Othon RIEMANN, Remarques sur l'attraction du démonstratif et du relatif en latin; Félix ROвIOU, L'enseignement de Pythagore contenait-il des éléments égyptiens?; Jules Roy, Conférence de Vincennes et conflits de juridiction (1329-1350); Ferd. de SAUSSURE, Comparatifs et superlatifs germaniques de la forme inferus, infimus; Marcel THÉVENIN, Etude sur la propriété au moyen âge, les « communia »; Edouard TOURNIER, Observations sur le texte de l'Economique de Xénophon; Henri WEIL, L'auteur du premier discours contre Aristogiton est-il bien informé des institutions d'Athènes?

- M. Eugène MüNTZ a publié dans la Gazette archéologique une fort intéressante notice sur Pétrarque et Simone Martini (Memmi) à propos du Virgile de l'Ambrosienne (Paris, A. Lévy, 1887, in-fo de 11 p., tirage à part à très petit nombre d'exemplaires, avec deux gravures, une représentant le frontispice du Virgile de Pétrarque, peint par Simone Martini, l'autre le prétendu portrait de Laure, d'après une fresque du palais des papes, à Avignon.) M. M. a réuni en quelques pages une foule de particularités curieuses sur Simone Martini, « ce maître pur et suave entre tous, véritable Fra Angelico du XIVe siècle »; sur Pétrarque et notamment sur les connaissances qu'avait ce poète en matière d'archéologie, question déjà traitée par l'auteur dans ses Précurseurs de la Renaissance, mais sur laquelle il revient ici très heureusement, à la suite d'investigations nouvelles; sur la fresque qui ornait autrefois le porche de Notre-Dame des Doms, à Avignon, et qui a disparu en 1828, au sujet de laquelle il cite une description très peu connue, que nous a conservée Valladier, dans son étrange livre intitulé Labyrinthe royal de l'Hercule Gaulois (Avignon, 1600), et, à cette occasion, sur les divers portraits de la femme chantée par Pétrarque. T. DE L.

Il a été fait mention ici (n° du 25 juillet dernier, Chronique, p. 78) du catalogue de la bibliothèque de Galilée, reconstitué avec autant de savoir que de sagacité par M. A. Favaro. Mentionnons quelques indications relatives aux relations du grand astronome florentin et de l'obscur astronome périgourdin, Jean Tarde, qui viennent d'être données dans le Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord (tome XII, 1887, p. 99), d'après le ms. inédit des voyages du chanoine en Italie, lequel ms. est possédé par M. Frut : « Tarde part d'Avignon le 3 mai 1593... A Florence, il décrit les monuments et les jardins du Pratolino qui avaient excité si fortement la curiosité de Montaigne. A Rome, il assiste à un consistoire, se met en rapport avec l'illustre antiquaire Fulvio Ursino, admire les splendeurs du Vatican. Après un séjour de quatre mois, il retourne en France par Sienne, Lucques, Gênes, et rentre à Avignon le 19 octobre. Le second voyage est

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