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moyen qui fait le moins de victimes. Il est universellement reconnu que l'opération césarienne est la plus grave des opérations obstétricales. Si, dans les premiers temps il y eut, après la publication du livre de Rousset, un engouement incroyable pour cette opération, qui fut alors souvent pratiquée sans nécessité, bientôt les insuccès de Paré, de Guillemeau et autres chirurgiens célèbres, ouvrirent les yeux sur ses dangers, et elle fut à peu près bannie de la pratique. Moriceau la défend expressément sur la femme vivante, et il est à remarquer qu'il appuie même cette défense sur des considérations théologiques, dont on s'est également servi depuis pour prescrire la céphalotomie et l'avortement provoqué. Peu, sans se prononcer aussi nettement, laisse pourtant assez voir son opinion, puisqu'il termine ainsi sa longue dissertation: « Je n'ai point fait cette opération sur la femme vivante, et je n'ai point envie de commencer; fraye le chemin qui voudra, je n'y veux marcher que sur les pas d'un autre qui en soit honorablement sorti. » De la Motte garde la même réserve, et proteste: « que, quand il se trouverait dans le cas où il la croirait d'une utilité absolue, et avec la plus belle espérance d'y réussir, il ne la mettrait jamais en usage, d'autant qu'elle n'est pas plus à approuver que de tirer par le moyen du crochet un enfant en vie pour sauver celle de sa mère. » Levret paraît être le seul des accoucheurs anciens qui se soit prononcé pour l'opération césarienne. Je pourrais augmenter le nombre de ces citations, mais les opinions de d'Ant. Dubois, de La Chapelle, de Baudeloque, de Capueron, et des célébrités obstétricales modernes, sont assez connues pour qu'il soit inutile de les rappeler. Les plus conciliants se bornent à dire que cette opération n'est point essentiellement mortelle, et qu'elle peut être tentée lorsqu'on est certain que l'enfant bien vivant ne peut être extrait sans mutilations par les voies naturelles, ou bien lorsque le bassin est si étroit que cette opération est encore ce qui offre le moins de mauvaises chances pour le salut de la mère; mais, à part ce dernier cas, aucun ne donne le conseil précis d'y recourir.

Les statistiques, en effet, démontrent que cette opération tue presque toutes les femmes et ne sauve pas la moitié des enfants.

Boër croit trop accorder en disant qu'on sauve tout au plus une femme sur 14.

Wilde et Levy disent que la mortalité est de 90 0/0, Kaizer de 62 0/0, et de 79 0/0 en ne tenant compte que des cas observés dans les cliniques. Sur 164 opérations, il n'y eut que 62 succès.

Le Moniteur des Hôpitaux (1855, no 114) dit que sur 41 opérations pratiquées dans le grand-duché de Nassau, de 1821 à 1843, 29 ont été faites sur des femmes mortes, et une pour une grossesse extra-utérine; restent donc 11 opérations césariennes véritables, pratiquées sur des femmes vivantes; or, une seule a survécu.

Les chiffres de Burns sont encore plus sombres : sur 33 femmes opérées en Angleterre, 2 seulement ont été sauvées; et sur 36 opérées dans divers hôpitaux, 25 ont succombé.

Il résulte, des recherches plus récentes auxquelles M. Chailly s'est livré, qu'on sauve seulement une femme sur 10.

Cependant il y a des auteurs qui ont fourni des statistiques plus rassurantes; ainsi, Baudeloque parle de 51 femmes sauvées sur 75 opérées; Sprengel dit que sur 106 cas recueillis par lui, il y eut 6 succès. Michaelis en a trouvé 48 sur 110 cas; et M. Villeneuve, sur 69 opérations pratiquées depuis trois quarts de siècle dans tous les pays, a noté 45 guérisons, 24 morts et 2 cas douteux. Mais il est à peine utile de faire observer que, depuis trois quarts de siècles, l'hystérotomie a été pratiquée plus de 69 fois dans tous les pays, ce qui diminue de beaucoup la valeur de la statistique de M. Villeneuve, qui n'a évidemment recueilli que les cas choisis.

Si l'on prend la moyenne de toutes ces statistiques, on trouve à peu près pour sept opérations un succès et six insuccès. Si maintenant on tient compte de ce qu'il est plus probable que plupart des cas malheureux n'ont pas été publiés, tandis qu'on

la

s'est naturellement empressé de faire connaître les cas heureux, on trouvera que cette proportion 1/7 est encore fort audessous de la réalité, et l'on conviendra que M. Chailly n'a rien exagéré en disant qu'on perdait les 9/10 des mères.

Voyons maintenant les résultats de cette opération par rapport à l'enfant.

Kayser, sur 164 opérations, indique seulement 158 fois le sort des enfants; 57 sont morts, 101 ont vécu.

Sur les 11 opérations faites dans le duché de Nassau, 7 enfants sont nés vivants, 1 avait subi la craniotomie, les 3 autres

sont morts.

Dans les 86 cas de la statistique de M. Villeneuve, 47 enfants sont nés vivants, 18 sont morts, le sort de 22 est resté inconnu; en tout, 87 enfants dont 2 jumeaux.

En somme done, sur 261 enfants, 78 sont mort-nés, 155 sont nés vivants, et 28 fois on a omis de faire connaître le sort des enfants. Or, est-il probable qu'on y eût manqué si ceux-ci eussent été vivants? Dans cette hypothèse, on arrive au chiffre énorme de 106 enfants morts sur 155 vivants, c'est-àdire les 2/3; et en ne tenant compte que des 233 enfants dont le sort est connu, on trouve 78 morts sur 155 vivants, au moins moitié. Et pour obtenir ce résultat on a sacrifié es 9/1 0 des mères, ou, en d'autres termes, sur dix opérations césariennes qui représentent vingt existences, on en sauve à peine six, tout au plus sept, une ou deux mères et cinq à six enfants, dont plus de la moitié, peut-être, naîtront dans de mauvaises conditions de viabilité, parce qu'on aura trop tardé.

C'est juste ce que les partisans de l'hystérotomie font valoir pour en pallier les résultats désastreux. Cette opération; disent. ils, est presque toujours pratiquée dans de mauvaises conditions, alors que la femme est à bout de forces, que les membranes sont rompues depuis longtemps, que la viabilité de l'enfant est plus ou moins compromise, etc. Je ne me dissimule la valeur de ces observations, et le nombre des victimes de l'opé ration césarienne diminuerait certainement beaucoup, si celle-ci

pas

était toujours faite dans des conditions favorables. Je veux même admettre qu'on sauverait alors tous les enfants et qu'on ne perdrait que la moitié des mères; mais on m'accordera aussi qu'il n'est presque jamais possible de réunir ces conditions d'élite dont on parle. En supposant même qu'il ne puisse y avoir d'hésitation, de la part du chirurgien, sur les dimensions du bassin et sur l'opportunité de l'opération, ce chirurgien nesera pas toujours libre d'agir au moment qu'il aura choisi, et ce ne sera que lorsque la femme aura longtemps attendu, qu'elle et sa famille permettront une opération qui sera presque toujours faite alors dans de mauvaises conditions, et dont les résultats déplorables donneront d'ordinaire deux cadavres, au lieu d'un. Voyons maintenant quels sont les résultats de l'embryotomie et ceux de l'avortement provoqué.

La mutilation d'un foetus mort-né a été faite un si grand nombre de fois, qu'il serait illusoire d'en vouloir réunir les cas, et ce n'est certes pas la vie de l'enfant qui aggrave sensiblement pour la mère les dangers de cette opération, presque toujours inoffensive pour elle. Les exceptions à cette règle seront encore plus rares, si, au lieu d'extraire par une filière trop étroite un enfant à terme, on le fait à l'époque où le volume de celui-ci ne sera pas trop disproportionné avec l'étendue du passage qu'il doit traverser. D'autre part, si les avortements naturels ou provoqués sont quelquefois suivis d'accidents graves, il est au moins parfaitement avéré que les suites ordinaires d'une fausse couche sont presque toujours trèssimples, et que, lorsqu'il en est autrement, il en faut chercher la cause, non pas dans l'avortement lui-même, mais dans des conditions morbides spéciales à la femme, ce sont celles-ci qui constituent presque toujours tout le danger. Ainsi donc, d'une manière générale sur dix femmes soumises à l'embryotomie ou à l'avortement, ce qui représente vingt existences, on en sauvera dix. On peut maintenant apprécier la valeur de cette conclusion, formulée dans un travail remarquable d'ailleurs : « Le médecin présentera par une opération brillante toujours

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un individu vivant et souvent deux, à la place d'un cadavre toujours, et souvent de deux. »

Pour moi, il résulte de ces considérations que l'opération résarienne, l'embryotomie et l'avortement provoqué, sont trois opérations qui doivent rester dans la pratique, mais qu'elles ont des indications spéciales et qu'elles ne peuvent se suppléer.

Je réserve l'opération césarienne pour les cas où le travail ne dure pas depuis trop longtemps, où la femme a conservé des forces suffisantes, où il n'y a pas de doute sur la vie de l'enfant, où les membranes ne sont pas rompues ou du moins ne le sont que depuis peu de temps, où le col est assez dilaté pour que les liquides utérins puissent s'échapper facilement. Il faut de plus que l'opérée puisse être mise dans de bonnes conditions hygiéniques, à la campagne autant que possible, et il va sans dire que l'opérateur s'entourera des plus grandes précautions, et s'aidera de chloroforme, à moins qu'il n'y ait une contre-indication formelle à son emploi. Je n'ai pas d'opinion bien arrêtée sur le meilleur mode opératoire, mais toujours est-il qu'il convient de rappeler ici les perfectionnements récents apportés par M. Lebleu à l'hystérotomie, et qui consistent surtout: 4° dans une limitation plus exacte de l'incision qui ne doit pas avoir plus de 13 à 15 centimètres, et qu'il fait de préfé rence sur la ligne blanche en coupant d'un seul trait de bistouri jusqu'à l'utérus; 2o dans la suppression des sutures qu'il remplace par un bandage digité, agglutinatif et unissant, disposé avec soin.

Si toutes ces conditions ne peuvent être convenablement reroplies, si surtout la vie de l'enfant est douteuse et la femme très-épuisée, c'est à l'embryotomie que j'aurai recours, sauf les cas où un rétrécissement extérieur du bassin ne me permettrait pas même l'extraction d'un fœtus mutilé. Ainsi, lorsque ce plus petit diamètre pelvien conserve au plus 5 centimètres, je ne crois pas qu'il y ait d'hésitation possible si l'enfant vit, et l'hystérotomie est nettement indiquée. Mais si l'enfant est

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