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du temps; quatrième édition, revue, corrigée et augmentée (Paris, Charles de Sercy, 1655, in-8, en trois parties). Je reconnais, dans ce recueil, plusieurs pièces de Corneille qui ne les a pas signées; mais il faudrait trop de temps et trop de paroles, pour établir aujourd'hui l'origine de ces pièces qui portent l'empreinte du génie corneillien. Je me borne à extraire, de la troisième partie du recueil, laquelle est rare et n'a pas été réimprimée comme les deux premières, une épigramme signée CORNEILLE :

D'un poëte escrivain qui, détaché des occupations de sa plume pour vacquer à celle de la guerre, dit qu'il coupe sa plume avecque son espée.

Ce petit fanfaron à l'œillade échappée
S'estime grand autheur et n'est qu'un animal:
Dit qu'il coupe sa plume avecque son espée...
Je ne m'estonne pas s'il en escrit si mal.

Cette épigramme est-elle dirigée contre George de Scudéry, à qui l'auteur du Cid ne pardonnait pas d'avoir ameuté contre lui l'Académie française, ou bien contre Cyrano de Bergerac, qui, dans sa tragédie d'Agrippine, avait eu la prétention d'égaler Corneille?

Je passe à un autre recueil, que tout le monde a eu entre les mains et qui n'a montré à personne deux excellents sonnets de Corneille, que nous n'eûmes pas même la peine de chercher sous le voile de l'anonyme Les Muses illustres de MM. Malherbe, Théophile et Co, publiées par François Colletet (Paris, Chamhoudry, 1658, 4 part. in-12). A la page 148, il y a un sonnet signé d'une étoile dans le texte, mais signé CORNEILLE dans la table des pièces :

Sur la tragédie de Timocrate.
Endymion est mort; cet illustre champestre
Est déjà descendu dedans le monument.
Chacun est demeuré dans un étonnement

De l'avoir vu mourir presque aussitôt que naftre.

Tous les grands spectateurs qui le virent paroftre
Disent que le Soleil fit mourir cet amant :
Mais ils se sont trompés et dedans un moment
Vous connoitrez celui qui l'a fait cesser d'être.

Non, Apollon n'est point le sujet de sa mort,
Et ce n'est point par lui qu'il a fini son sort:
L'auteur de son trépas assez souvent éclate.

Qu'ils sachent que celui qui lui perça le cœur,
Et qui d'Endymion est demeuré vainqueur,
N'est point l'astre du jour : c'est le grand Timocrate.

Endymion est une tragédie de Gilbert, qui fut jouée sans succès, en 1656, sur le théâtre de l'hôtel de Bourgogne, sous le titre des Amours de Diane et d'Endymion. La foule se portait alors au théâtre du Marais où l'on donnait la tragédie de Timocrate, par Thomas Corneille, représentée pour la première fois au mois de novembre de cette même année. Il semblerait que l'auteur de Timocrate ne se nomma pas d'abord et que la pièce eut l'honneur d'être attribuée à Pierre Corneille lui-même. Celui-ci n'avait rien donné au théâtre depuis Pertharite et il venait de terminer sa traduction en vers de l'Imitation de Jésus-Christ. Quand on apprit que Timocrate était de Corneille jeune, on affecta de rabaisser le mérite de cette tragédie, en exaltant celui des pièces de Corneille l'aîné. L'indignation s'empara alors de ce dernier, qui prit le parti de son frère, en adressant ce sonnet aux détracteurs de Timocrate :

Déplorables jaloux, dont les noires envies
De Don Sanche et Pompée étalent les appas,
Et vantant Nicomède, Horace et Venceslas,
Veulent dans Timocrate en trouver des copies.

Le chimérique orgueil de vos antipathies
En croit par là servir les surprenants éclats,
Comme si c'étoit peu d'égaler de tels pas
Et former un beau tout de ces nobles parties!
Apprenez qu'élever de pompeux bâtiments
Sur un brillant amas d'illustres fondements
Porte un nom au-dessus de la gloire commune.

De semblables larcins sont de grands coups de l'art,
Et quand dans ce chef-d'œuvre on n'auroit d'autre part,
C'est beaucoup d'assembler tant de beautés en une.

Ce sonnet est imprimé, à la suite du précédent, dans les Muses illustres de François Colletet. La vogue de Timocrate continua pendant quatre-vingt-dix-sept représentations, et ce ne fut pas le public qui se. lassa; ce furent les comédiens qui lui demandèrent grâce, en cessant de jouer cette tragédie qui attirait encore la foule. Ces deux sonnets sont un touchant témoignage de l'amitié fraternelle des deux Corneille.

Puisque j'ai parlé de l'Imitation traduite en vers par Pierre Corneille, et dont les quatre livres parurent l'un après l'autre avant d'être réunis dans l'édition in-4° de 1656, je citerai encore deux galants quatrains qui accompagnaient des exemplaires de cet ouvrage offerts par le traducteur:

A. M. P., en luy donnant un livre de l'Imitation de Jésus.

Belle Philis, asseure-toy

Que si tu goustes bien ce livre,
Jésus t'apprendra qu'il faut vivre

Bien plus pour autruy que pour soy.

A une dame

en luy envoyant le livre de l'Imitation de Jésus-Christ.
ÉPIGRAMME.

C'est l'exemple d'un Dieu qu'icy l'on nous propose,
Qui meurt pour nous d'amour aimant infiniment :
Si vous ne pouvez pas le suivre en toute chose,
Ne mourez pas, Philis, mais aimez seulement.

Ces deux petites pièces sont imprimées dans la seconde partie du Recueil de diverses poësies des plus célèbres autheurs de ce temps (Paris, L. Chamhoudry, 1655, in-8). Mais qui aura le bonheur de découvrir les exemplaires de dédicace portant ces vers écrits de la main de P. Corneille? Je ne me pardonnerai jamais, hélas ! d'avoir détaché d'un exemplaire in-4 de l'Imitation, relié en maroquin rouge, le feuillet de garde offrant une dédicace signée, lequel feuillet fut vendu vingt et quelques francs à la vente des autographes de M. de Soleinne. C'est un crime dont je m'accuse et que les bibliophiles n'absoudront pas. P. L. JACOB, bibliophile.

NOTES SUR UNE FABRIQUE DE FAIENCES EN LANGUEDOC. Le Bulletin du Bouquiniste a déjà publié une note sur l'Histoire des faïences et porcelaines de Moustiers, Marseille et autres fabriques méridionales, par M. Davillier: je n'ai donc pas à insister sur le mérite de cette bonne publication; mais, puisque l'auteur a voulu essayer, comme il le déclare avec trop de modestie peut-être, de faire l'histoire de la céramique, en Provence et en Languedoc, je crois devoir signaler aux curieux un léger oubli dans l'énumération des fabriques de faïence de ces provinces.

Il a existé, vers la fin du siècle dernier et au commencement du nôtre, une faïencerie aux environs du Puy (Languedoc). L'existence de cette fabrique, qui a eu son siége d'abord à Orsilhac, commune de Coubon et ensuite à Brives, nous est révélée, en outre de ses produits, par le document suivant, tiré du tome V, page 733 des lois municipales et économiques de Languedoc: « extrait du registre des délibérations « des états généraux de Languedoc, assemblés à Montpellier, par

Au mardi 10 dé

a mandement du roi, le 21 novembre 1782. a cembre suivant, président monseigneur l'archevêque de Toulouse. « Monseigneur l'évêque de Commange a dit que, le syndic du dioa cèse du Puy a présenté plusieurs requêtes.

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« Enfin la commission s'est occupée de la requête par laquelle le syndic a du diocèse du Puy demande le consentement des États à l'imposiation à faire, en 1783, d'une somme de six cents livres, pour être e payée au sieur Lazerme, négociant du Puy, qui a établi à grands « frais, dans son domaine d'Orsilhac, une fabrique de faïencerie dont a les ouvrages sont de la plus grande utilité; cet établissement étant « d'ailleurs unique dans le Velay, et y mettant en valeur les terres a inutiles par leur nature, à tout autre usage, en considérations, dont a l'assemblée de l'assiette a été frappée, ont également fait impression « sur MM. les commissaires, et les ont engagés à proposer aux États

« d'accorder le consentement demandé.

a Sur quoi, les États ont délibéré de consentir que le diocèse du « Puy..

impose en 1783, et pour cette fois

a seulement, une somme de six cents livres, à titre de gratification en a faveur du sieur Lazerme, en considération de sa fabrique de • faïencerie. >

Je me contente aujourd'hui d'appeler l'attention des amateurs sur cette fabrique, me réservant de donner des détails plus complets sur son chef et sur ses produits dans le travail que je prépare sur les àrtistes et les hommes de métiers du Velay et de l'ancienne élection de Brioude (Auvergne).

Paul LE BLANC.

LIVRES LITURGIQUES DU DIOCÈSE DE TROYES, imprimés aux Iv' et au xvi° siècles, in-8, orné de 86 gravures originales, par Alexis SoCARD et Alexandre ASSIER.

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«

Troyes est l'une des villes de France où l'imprimerie se développa le plus tôt et avec le plus vif éclat. Une infinité de livres remarquables par leurs gravures sont sortis de ses presses, dès les débuts de l'art typographique. La librairie trouvait un grand débit à Troyes, grâce aux foires fameuses de cette capitale de la Champagne. D'importantes manufactures de papier, célèbres dès le xive siècle, et de nombreux artistes formés dans l'orfévrerie, la peinture sur verre et la sculpture

contribuèrent sans doute à développer dans cette vieille et monumentale cité l'art nouveau qui allait transformer la civilisation.

A notre époque, où tant d'esprits s'efforcent de saisir et de pourtraire au vif le passé qui s'en va, il n'est pas surprenant que les produits de ces imprimeries primitives aient donné lieu à des recherches attentives. Les origines typographiques trouvent partout des historiens: C'est donc chose naturelle que les origines de l'imprimerie troyenne deviennent l'objet de travaux successifs. On se plaint que les livres publiés en province soient étouffés par la centralisation : voici cependant que les savantes Recherches sur l'établissement et l'exercice de l'imprimerie à Troyes, par M. Corrard de Breban, sont parvenues aux honneurs d'une seconde édition. La Xylographie de l'imprimerie troyenne, réunion de 571 bois gravés employés par les anciens typographes, mise au jour par M. Varlot, sous le pseudonyme de Varusoltis, s'est presque épuisée en trois années. La Xylographie n'avait qu'un texte fort court; MM. Socard et Assier ont repris ce sujet curicux, en exposant d'une manière plus développée une foule de faits relatifs à une catégorie de livres naguère fort dédaignés, mais que les bibliophiles se disputent maintenant à grand prix. Combien, en effet, payerait-on dans une vente ce bréviaire imprimé en 1483,et qui est le premier livre dont la ville de Troyes puisse se glorifier? Hélas! les bibliophiles troyens ne possèdent pas tous ces vieux livres d'Heures, qui virent le jour dans leur cité, mais on conserve à la bibliothèque de Troyes une collection précieuse, unique peutêtre en France, celle d'une série de bois gravés ayant servi à illustrer les anciennes productions typographiques de cette ville. MM. Socard et Assier font connaître par des descriptions de précieux volumes pieusement collectés à la bibliothèque de Troyes, parmi lesquels nous noterons un exemplaire des Heures à l'usaige de Troyes, imprimé à Troyes par Jehan Lecoq, en rouge et noir sur peau de vélin, magnifique in-12, dont l'acquisition récente n'a pas coûté moins de 300 fr.; ils font connaître aussi certaines éditions troyennes qui n'existent plus qu'à Paris à la Bibliothèque Impériale.

Je ne puis énumérer ici toutes les gravures originales dont MM, Socard et Assier ont eu l'heureuse chance de pouvoir faire usage et dont plusieurs se retrouvent dans les publications de Pigouchet, de Thielman Kerver, de Jean de Brie, de Vérard et de Simon Vostre. -J'aime fort leur style naïf, tout semblable à celui des vitraux. Voici, en effet, à la page 77, un crucifiement qui rappelle beaucoup ceux que l'on voit briller dans des proportions cent fois plus grandes aux fenêtres du chevet des églises normandes de la Madeleine de Verneuil et de SaintJacques de Lisieux je suppose que ces vignettes ont des analogies

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