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Fol. 22 ro.

Hélyas défie Macaire et

le frappe avec VIOlence.

« Or le m'amenés chà, dist li roys, je vous prie.
Dont vient ly chevaliers qui le priesse à partie,
Et a pris Hélias, voiant le compagnie,

1415 Et li a demandé s'il est fol u espie? >>

« Nanil, dist Hélias, je vous aciertefie,

Je demans Mauquaré, qui ma mère a honnie. >>
Dont li enseigna chieus enmy le baronnie
Et ly dist« Vé-le-là qui a coste partie.
1420 Quant Hélyas l'oy, tous ly sans ly fourmie,
A Mauquaret en vint et puis se li escrie:

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A! Mauquaret, dist-il, li miens corps te défie! »
De son puing li donna une telle orellie,
Et l'asséna si fort assés prés de l'oye

1425 Que vivant l'abaty : lors Hélyas s'escrie :

« Prestés-moy ung coutiel, seignour, je vous em prie,
S'ochiray le laron dont la dame est trahie. »

Qu'adont n'éuist tenut Hélyas le vaillant,
Et se péuist avoir ung boing coutiel trenchant
1430 Tantos l'éuist ochis ens ou pailais luisant.

Hélyas out tenut ly chevalier poissant,

1412 Je vous prie, le MS je vous en prie. 1415 Dont, done; qui le priesse, qui pût le prendre; priesse sent encore son scribe flamand. 1414 Voiant le compagnie, à la vue de la compagnie.

1415 Espie, espion.

1416 Je vous aciertefie, je vous donne l'assu

rance.

1417 Demans, demande.

1419 Vé-le-là, le voilà; forme analogue à vé-me-chy, me voilà. Il faut observer que cette forme est plus directe que la moderne, puisqu'elle se traduit exactement par vois-le-là, voismoi-là. Coste partie, terme de blason. Proprement, un écu parti est un écu partagé en deux par une ligne perpendiculaire. A l'époque où le poëme du Chevalier au Cygne fut écrit, les signes héraldiques se produisaient sur les ro

bes, cottes et manteaux. Les robes des maires, prévôts des marchands et échevins de plusieurs villes étaient parties de deux couleurs, et ces habits s'appelaient devises, à cause de cette division de couleurs. En Hollande, les orphelins et les enfants trouvés portent encore des vêtements partis. Voy. Menestrier, Origine des armoiries. Paris, 1679, in-12, I, 418 et suiv.

1420 Tous ly sans ly fourmie, tout le sang lui cause comme des picottements de fourmis? Peut-être aussi pour fourmue?

1423 Orellie, on dirait plutôt aujourd'hui oreillade, mot qui toutefois n'est pas français. 1425 Que vivant, le MS: que vin. 1428 Qu'adont, ce à quoi donc.

1430 Ou, au; pailais, comme au vers 1367; luisant, épithète d'un usage fréquent, comme listé, marbrin, plenier, etc.

Et Mauquarés s'en va hors du palais fuiant;
A soy-méismes dist ly traïtres puant :

<< Dieux l'a chy envoyet pour moi faire dolant.
1435 Ains tel cop ne rechus en trestout mon vivant. »
Et ly boin chevalier qui en furent joiant,

Ont Hélyas menet devant le roy Oryant :

Et ly roys ly a dit hautement en oiant :

<< Comment as-tu oset faire oultraige sy grant,

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1440 Que Mauquaré, mon homme, as batu maintenant? »>
- «A! roys, dist Hélyas or enteng mon samblant ;
Ne me tieng pas à fol, quoy que soie ignorant.
Ançois vieng de par Dieu à toy, à son commant,
Pour dire vérité; si l'orés maintenant.

1445 Vo mère Matabrune, qui ne vaut mie ung gant,
Que je feray ardoir dedens ung feu bruïant,
Ançois que dou pays me vois-je départant,
La royne trahy que je voy là devant;

Mais ains que de ce fait vous die plus avant,
1450 Iray baisier me mère que là voy apparant. >>
Lors vint à la royne, iij fois le va baissant,

Et ly dist: «< Douche mère, ne te vas esmaiant ;
Je te feray avoir le cuer liet et joiant ;
Faussement as esté traïe par devant. >>
1455 Quant ly roys Orians, qui tant fist à prisier,
A véut devant luy la royne baisier,

A soy-méismes dist: « Bien me doit miervelier
De cestui qui ci vient mon homme travelier,
Et baisier la royne, trop me fait miervelier.
1460 U c'est abuisions du dyable d'infier,

1455 Rechus, le MS: rechut; en trestout, pendant.

Cette interprétation nous paraît préférable à celle qui a été donnée sur le vers 232 de Phi1436 Qui en furent joiant, le MS en furent lippe Mouskes; voy. aussi tome II, p. 837. jouant.

1437 Oryant, deux syllabes, ailleurs trois. Peut-être faut-il supprimer le ?

1438 En oiant, en latin coram audientibus.

TOM. I.

1443 Le MS:

Ançois vien-ge de par Dieu à toy et à son commant.
1451 Baissant, baisant.

9

Macaire s'enfuit.

Hélyas fait connaître la

vérité au roi.

Fol. 22 vo.

Fol. 23 r.

Ou Dieux, li tout-poissans, l'a volut envoyer. »
Et Hélyas s'en vint tantos agenoullier
Pardevant Oriant, pour ses fais pronuncier.
Là sont tout aüné li baron-chevalier,
1465 Pour oir Hélyas esmouvoir son plaidier.
« Rois Orians, dist-il, ne fay mie jugier
La royne à morir, car je ly vieng aidier,
Au commandement Dieu, le père droiturier.
Je te voel de mon fait la voie commenchier:
1470 Vous laissastes ma mère; s'alates guerryer.

Matabrune, vo mère, pour lui faire encombrier,
Ala vier ma mère en son grant mal plenier.
La matrone avoit fait devant luy aloyer,
Et une cambourière qui s'i vot apointier.
1475 De vij enfans se vot la royne akoucier :

Une fille et vj fieux, tant en vot desquierkier;
Et s'avoit cascuns kaines; Dieux le vot atakier;
Et quant nous fûmes net, elle nous fist cangier :
vij chiens fist aporter pour la dame avillier,
1480 Et puis nous fist tout vij en ung bos envoyer.
Uns hiermites nous vit, qui de boin cuer entier,
Nous fist en son ostiel garder et herbegier,
Et Dieus nous envoya d'une chièvre alaitier.
Or vinrent vij larons dedens le bos plenier

1485 Qui des vj enfants volrent là les kaines destacquier ;
Et si tost c'on leur vint les kaines desloyer

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Que li drois soit séus, pour les maux exsillier.
1490 Sy vous prie pour Dieu, le père droiturier,
Faittes que Mauquarés soit tenus prisonnier
Et moy à l'autre lés, tout à vo dezierier,
Et à l'iermite boin trametés chevalier,
Où vous puissiés fiyer de ce fait tiesmoignier;
1495 Et après sy me faites d'armes apparellier,
Et encontre Mauquaret la cause desrainier;
Se dire ne ly fay ce mortel encombrier,
Se me faites morir com traîtres mourdrier. >>
Et quant ly roys oy recouder tel mestier,
1500 De la grande mierveles se vot assés saignier.

Dont s'esbahy ly roys quant Hélyas parla.

A la royne dist: « Dame, oés-vous chela? >>

« Je ne say, dist la dame, voir comment il en va, J'estoie sy malade quant mes corps s'accoucha.

1505 Je ne say c'on y fist ne c'on y devisa ;

Mais bien say que vo mère oncques jour ne m'ama;

Et s'elle m'a bien fait, elle le trouvera,

Je m'en raporte en lui, et en cel enfaut là :

J'en fais mon campion, Dieus envoyet le m'a;

1510 Mais je vous prie pour Dieu, qui le monde créa,
Qu'il soit bien doctrinés ains qu'il conbatera,
Et oussy bien armés que ly autres sera. >>
Et ly roys Orians à ce fait s'accorda :
La royne gentils en prison renvoya.

1515 Pour prendre Mauquaré ses siergans commanda
Et le fist amener, et se mère vint là
Qui esbahie fu de çou c'on ly conta.
Ly roys dist à sa mère comment enfant parla;

1489 Séus, su; pour les maux exsillier, pour diminuer, faire cesser le mal.

1492 Faites emprisonner Macaire d'un côté et moi de l'autre. Tout à vo dezierier, tout à votre désir. La plume d'un flamand se trahit toujours dezierier pour désirier.

1493 Trametés, transmettez.
1496 Desrainier, expliquer.

1500 Se saignier, se signer, faire le signe de la croix.

1507 Et s'elle, le MS: et c'elle.

1517 Conta, le MS : conté a.

La reine accepte Hélyas pour champion.

Fol. 23 yo.

Le roi fixe l'époque du champ-clos et fait enfermer en attendant, Hélyas et Macaire.

Hélyas reçoit des leçons d'escrime.

Fol. 24 ro.

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Sire, dist Mauquarés, je sui tous aprestés.
Dist li roys Orians : « Savés que vous ferés?
1525 D'oujourd'uy en ung moys vous vous combaterés ;
Et se tenrés prison, afin que n'escappés :
Car par celui Seignour, qui en croix fu pénés
Je ne creiroie mie évesque et abés

Qu'entre vous et ma mère ne gisse faussetés
1530 Et grande traïson de quoy vous m'abusés.
Mais j'en saray le vray ains que vous m'escappés.
Pour faire le bataille bien vous endoctrinés,
Car ly enfés ara du boin conseil assés. »
Deux chevaliers en a Orians appiellés

1535 Et leur dist: « My amit, chel enfant-chy prenés,
Et ly faittes ses armes faire, et faittes tés,

Et tout le boin conseil que donner ly porés,
Je vous prie pour Dieu que trèstout ly donnés. »
Adont fu Hélyas avoec les deux menés;
1540 On aporta des armes pardevant ly assés,

Et lanches et espées et héaumes gemés;
Et puis fu noblement en une cambre armés
Et li monstrent comment il se soit démenés,
Et dist uns chevaliers : « Ceste lance prendés
1545 Et encontre ce mur tantos me behourdés,
Oussy bien que fuissiés de combatre aprestés.

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« Sire, dist Hélyas, si com vous commandés. » Lors a saisy le lanche dont ly fiers fu quarés,

1520 Faurra, faudra.

1525 Combaterés, le MS: baterés.

1528 Creiroie, croirais.

1335 My amit, mes amis.

1536 Ses, le MS : ces. Tés, telles.

1541 Gemés, ornés de gemmes, de pierreries. Voy. au v. 1619.

1545 Me behourdés, joutez contre moi.

1548 Dont ly fiers fu quarés, circonstance à remarquer et qu'on rencontre encore dans la suite.

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