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Peu de temps après, lorsqu'elle devint mère pour la seconde fois, la méchante marâtre lui joua encore le même tour, mais le roi ne pouvait se résoudre à croire cette calomnie.

Elle est trop bonne et trop pieuse, dit-il, pour commettre une pareille action; si elle n'était pas muette et qu'il lui fût possible de se défendre, son innocence éclaterait bientôt au grand jour.

Mais au troisième enfant qu'eut la reine, et que la détestable vieille fit disparaître comme les précédents, en renouvelant ses accusations injustes, le roi ne put faire autrement que de dénoncer la de dénoncer la pauvre femme silencieuse à la justice, et la malheureuse fut condamnée à périr par le supplice du feu.

Quand arriva le jour de l'exécution, il se trouva que c'était précisément le terme des six années pendant lesquelles la reine ne devait ni parler ni rire, et qu'elle avait ainsi délivré ses chers frères du charme qui pesait sur eux. Les six chemises de marguerites étaient terminées; seulement la manche gauche manquait encore à la dernière.

Au moment où l'on vint prendre la condamnée pour la conduire au supplice, elle plaça les chemises sous son bras, et quand elle fut parvenue au sommet du bûcher, et qu'on se disposait à mettre le feu aux fagots, elle promena ses regards autour d'elle, et aperçut six cygnes qui volaient dans l'air de son côté. Elle comprit que sa délivrance approchait, et son cœur palpita de joie. Les cygnes battaient des ailes autour d'elle, et s'approchèrent successivement, de manière à ce qu'elle pût leur passer les chemises autour du corps. Dès que cela fut fait, leurs plumes tombèrent, et elle vit ses frères debout à ses côtés, brillants de jeunesse et de beauté; seulement le bras gauche manquait au plus jeune, qui avait à la place une aile de cygne. Ils se jetèrent dans les bras l'un de l'autre et se donnèrent mille caresses. Puis la jeune reine s'avança vers le roi, qui était resté tout ébahi, et lui adressant la parole pour la première fois :

Maintenant, cher époux, lui dit-elle, il m'est permis de parler et

de vous prouver que je suis innocente et qu'on m'a calomniée lâche

ment.

Puis elle lui raconta par quelle ruse la vieille lui avait enlevé ses trois enfants pour les cacher.

Alors on alla les chercher, à la grande satisfaction du roi; et l'abominable marâtre expia son crime, car on la lia à la place de sa victime sur le bûcher, où son corps fut réduit en cendres.

Quant au roi et à la reine, ils vécurent longtemps paisibles et heureux, avec leurs six frères et leurs trois enfants. »>

Tel est ce récit naïf où le fond de la Saga du Chevalier au Cygne se reconnaît à travers les altérations qu'elle a subies. Les esprits vraiment sérieux ne s'étonneront point de nous voir, dans des publications aussi graves que celles de notre comité historique, attacher tant d'importance à des contes d'enfants. La science est sans dédain, et pour trouver les vérités qui lui sont nécessaires, elle interroge l'enfance comme l'âge mûr, l'ignorance comme l'habileté.

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M. L.-Ph.-C. Vanden Bergh a répété l'aventure de la duchesse de M. Vanden Bergh. Clèves, puis celle de l'épouse d'Oriant, dont le premier modèle, à ce qu'il soupçonne, a pris naissance dans le nord de la France 1. Il cite encore, en 1836 et en 1857, Vander Schueren comme inédit, quoique publié en 1824 par M. Tross de Hamm, en Westphalie. M. J.-W. Wolf s'est calqué sur le livre populaire indiqué plus bas (hos 14-18) 2. Son traducteur hollandais a ajouté au texte quelques annexes intéres

santes 3.

Du roman, présenté comme il l'est dans notre poëme, procèdent les ouvrages suivants :

1 Nederl. volksoverleveringen en godenleer. Utrecht, 1836, in-8°, pp. 96-213. Le même, De Nederlandsche volksromans. Amsterd., 1837, in-8°, pp. 23-29. Oude Hollandsche Kronyk, citée par M. Vanden Bergh. Cf. Heldring, Geld. alman., 1835. Robidé Van der Aa, Volksverh. en legend. aan de Rijnoevers. Arnh., 1839, in-8°, p. 19.

2 Niederländische Sagen. Leipzig, 1843, in-8°, pp. 173-194.

3 Nederlandsche volksoverleveringen. Groningen, 1845, pp. 192-218.

TOM. I.

f.

Pierre Desrey.

1. La généalogie avecques les gestes et nobles faictz d'armes du très preux et renommé prince Godeffroy de Boulion et de ses chevaleureux frères Baudouin et Eustace: yssus et descendus de la très noble et illustre lignée du vertueux Chevalier au Cyne. Avecques aussi plusieurs autres cronicques d'histoires miraculeuses tant du bon roy sainct Loys comme de plusieurs aultres puissans et vertueux chevaliers. (Paris) Jehan Petit, achevé d'imprimer le 10 octobre 1504, in-fol. goth. de 158 ff. à 2 col., avec fig. en bois, sign. bu, seconde signat.

a.

Ce roman a été rédigé par Pierre Desrey de Troyes 1, lequel, dans son prologue, daté de l'an MCCCCXCIX, dit que ce sont des chapitres de Vincent de Beauvais (Speculum historiale, lib. XXV, cap. 96 et sqq.) qu'il a translatés en français, chapitres que, par une fatalité singulière, je n'ai pas trouvés non plus dans les éditions que j'ai consultées et que j'ai citées plus haut. Les chapitres 96-105 traitent à la vérité de la croisade, dans l'édition de Douai; mais il n'y est pas question, je le répète, du Chevalier au Cygne. Desrey aura pris quelques fragments de Vincent de Beauvais, qu'il aura joints à un extrait du roman en vers, et, pour procurer à son travail une autorité scientifique, il aura affirmé, à l'exemple des trouvères, qu'il était traduit du latin. Nous avons cité ailleurs des exemples de cet artifice littéraire; nous pouvons y joindre un passage Partonopeus de Blois. de l'ingénieux auteur du roman de Partonopeus de Blois. Il s'exprime ainsi, presque au début de son poëme :

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Desrey a ajouté à ses extraits une continuation tirée de divers manuscrits.

↑ Paquot, Mémoires, in-fol., t. III, p. 7. Cf. P. Paris, Les Manuscrits français, t. VI, p. 158.

2 Partonopeus de Blois, publ. par G.-A. Crapelet. Paris, 1834, gr. in-8°, t. I, p. 4.

L'édition de 1504 est la plus ancienne que connaisse M. J.-Ch. Brunet, M. Brunet.
qui a tout connu en ce genre (Manuel du Libraire, etc., 4o éd. orig., II,
421). Mais, ajoute-t-il, la date du prologue en peut faire supposer une
antérieure à 1504. Will. Parr Greswell en marque une édition de Paris,
in-fol. et in-4o, de l'an 1500 (Annals of parisian typography. London, 1818,
in-8°, p. 214).

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grande bibliothèque.

Les Mélanges tirés d'une grande bibliothèque contiennent un extrait du Mélanges tires d'une roman du Chevalier au Cygne et de Godefroid de Bouillon, d'après la publication de Desrey. « Je ne peux point, dit le compilateur, parler d'après le manuscrit de ce roman, qui était dans la bibliothèque du » roi Charles V1, parce que je ne le connais pas; mais je possède celui en prose, qui d'ailleurs a été imprimé en 1499, un peu raccommodé par Desrai (sic), qui a conduit l'histoire des descendants de Godeffroi de Bouillon jusques aux dernières croisades, au lieu que les plus anciens manuscrits ne s'étendent que jusqu'au règne de Baudouin, frère de Godeffroi, qui lui succéda au royaume de Jérusalem. Ces additions ne » sont qu'un extrait des Grandes chroniques de France; ainsi je ne les ferai entrer pour rien dans ce qu'on va lire : mais partant exactement de l'ancien manuscrit, qui est divisé en deux parties, je dois prévenir mes lecteurs, que la première et la seconde sont d'un genre assez différent : l'une n'est qu'une fable, la plus absurde et la plus déraisonnable du monde, un de ces romans qui caractérisent le mauvais goût des XIII et XIVe siècles, mais qui inspirent pourtant quelque sorte d'intérêt quand ils sont bien contés; la seconde partie est une histoire à demi véritable

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D

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de Godeffroi de Bouillon. Ne nous étonnons pas qu'on l'ait traité comme Charlemagne, et qu'on ait chargé son origine de circonstances extravagantes. On croyait, dans les siècles d'ignorance, donner du lustre aux héros par ces sortes de contes. » Voilà comment on appréciait alors les traditions originelles des nations, leurs croyances et leur my

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1 Recueil F, pp. 4-62. Nouv. archiv. hist. des Pays-Bas, t. V, pp. 62-68.

Reines Blanches.

Autres publications françaises.

Publications allemandes.

thologie, et l'on assure que ces critiques ont laissé une postérité nombreuse qui décide encore de nos jours suivant les mêmes principes.

Dans l'extrait, Pierron est roi de l'Isle-Forte, et il épouse Matabrune, héritière d'un puissant roi de Terre-Ferme. Cette Matabrune y est appelée la royne Blanche; et c'est ainsi, remarque l'auteur de l'analyse, sans que nous sachions sur quoi il s'appuie, que l'on nommait encore au XIVe siècle toutes les reines douairières, soit en mémoire de la reine Blanche, mère de saint Louis, soit parce qu'elles étaient toujours entourées de guimpes, voiles ou crêpes blancs, et qu'elles portaient ce deuil perpétuel pendant leur veuvage!

2. La généalogie, etc. Paris, Michel Le Noir, achevé d'imprimer le 24 oct. 1511, in-fol., goth., fig. en bois.

Édition presque aussi rare que la précédente et qui se compose de 160 ff. non chiffrés, signat. a. — bu, seconde signature, y compris le titre. Vendu 12 liv. 12 sh. Heber, et 343 fr. en 1841, rel. de mar. rouge par Bauzonnet.

3. La généalogie, etc. Paris, Philippe Le Noir, achevé d'imprimer le 5 oct. 1525, in-4°, goth., fig. en bois.

4. La généalogie, etc. Lyon, François Arnoullet (imprimerie de Basile Bouquet), 1580, petit in-8° de 741 ff., y compris 7 feuillets préliminaires, plus à la fin 5 ff. pour la table; lettres rondes.

On trouve à la fin du titre : la Complainte de la Terre-Sainte adressante aux princes, prélats et seigneurs chrétiens, en vers, pp. 734-41.

5. La généalogie, etc. Paris, Nicolas Chrestien, s. d., in-4o goth., fig. en bois. Cette édition a 8 ff. prélim. pour le titre et la table; le texte commence par le prologue, daté de 1499, et occupe les cahiers A EELIII.

6. La généalogie, etc. Paris, Jehan Bonfons, s. d., in-4o goth., fig. en bois. Vendu 23 liv., bel exempl., Roxburghe; 12 liv. 5 sh., Hanrott, et 18 liv. 18 sh., Heber.

7. Hienach volgt ein warhaft und bewerte Historie... (s'en suit une authen

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