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Estrella.

Ancien sceau d'Anvers.

tonem, qui, inito certamine, belluam illam superaverit, et talionem sceleribus reddens, dextram ejus recisam in Scaldim, quanta vi potuit conjecit; atque, ad ejus facti memoriam, castrum esse ab Julio exstructum, nomine Ilantwerpum, id est manus projectionem : hinc manuum amputatarum insignia; hinc gigantis et filiorum ejus amburbialia pegmata restare : et, quo magis credas, domum hactenus exstare, quae Ruesen Huys, id est Gigantis domus, vocatur; et in ipsa curia non tantum ossa ejus ingentia magno miraculo spectari; sed in marmoreo etiam colosso, qui terribili vultu ex alto forum despicit, memoriam restare sempiternam. Haec omnia oppido quam probabilia videntur; sed cum addunt C. Julium Caesarem filium esse regis Arcadum, non jam obscure ut antea, sed aperte nos derisui habent... Brabonem igitur, quem longa serie ab Hectore deducunt, non admodum male de Brabantiae nomine fabricarunt, perinde atque Romani a Roma Romum et Romulum sibi finxerunt. Trita enim haec est et regia via in primis conditoribus indagandis, de regionis urbisve prisca voce cognominem aliquem invenire, qui dicatur loco nomen indidisse.... >>

L'opinion commune, et c'est aussi l'avis d'Estrella, est que les deux mains qui figurent dans les armoiries de la ville d'Anvers, représentent soit celles qu'Antigone coupait aux passagers qui lui refusaient le tribut, soit la main même de ce géant, amputée par Salvius Brabon. Or, ainsi que nous l'avons fait observer 1, un sceau de cette ville, figuré dans le Messager des sciences et des arts de la Belgique 2, et apposé à un acte de l'an 1251, porte des étoiles au lieu de mains 3. Ce n'est donc qu'après cette année que ce symbole nouveau se sera introduit; par conséquent c'est dans le courant du XIIIe siècle que l'histoire se sera confondue

1 Introd. au 2 vol. de Ph. Mouskés, p. cxxv.

2 Année 1835, pp. 337-341. Dans cet article curieux on a confondu aussi la légende de Garin le Loherenc avec celle de Lohengrin. Elles n'ont pourtant aucun rapport entre elles. V. p. LXXVII, not. 3. 3 Ce sceau est représenté pareillement, t. I, p. 175, de Geschiedenis van Antwerp., door F.-H. Mertens en K.-L. Torfs. Antwerp., 1845, in-8°.

avec

une fable en rapport avec le cycle du Chevalier au Cygne et du Lohengrin, dont il doit avoir existé un texte flamand de la même époque, qui aura accrédité ce mythe ou cette fiction, à moins que la Vogue des rédactions françaises dont nous allons nous occuper tout à l'heure, n'ait suffi pour cela.

Il nous reste à examiner rapidement les saga d'un genre mixte desquelles nous avons formé une quatrième et dernière classe. De cette sorte est celle qu'a rapportée un chroniqueur espagnol, Juan de Castillo, et qu'on peut lire parmi nos appendices 1. Dans ce récit c'est encore une duchesse de Lorraine qui doit son salut à la valeur d'un chevalier, mais cette fois d'un chevalier espagnol. Telle est encore la saga du Bon Gérard Swan ou Cygne, que nous ont transmise les livres populaires du Nord sur le roi Charles ou Charlemagne 2.

Un jour le roi Charles (ces livres racontent ainsi la chose) était à la fenêtre d'un château et regardait sur le Rhin. Il vit un cygne qui nageait au beau milieu du fleuve et qui avait au cou une corde de soie remorquant un léger esquif. Dans cette frêle embarcation était assis un chevalier armé au blanc, un écrit suspendu sur sa poitrine. Lorsque le paladin eut mis pied à terre, le cygne, comme dans les autres rédactions, repartit avec la barque, et on ne le vit plus.

Navilon ou Nibelung, un des vassaux du roi, alla à la rencontre de l'étranger, lui offrit la main et le conduisit devant Charles. Celui-ci alors lui demanda son nom; mais le chevalier ne savait point la langue; il lui montra l'écrit dont il était porteur. Cette pancarte indiquait qu'il était Gerhard (Gérard) Swan, et qu'il venait s'engager au service du roi, à condition qu'on lui donnerait des terres et une femme. Nibelung le déchargea de ses armes et les serra; Charles lui fit présent d'un bon

1

App., I, no 12. Introd. au 2o vol. de Ph. Mouskes ou Mouskés, p. cxxv. Castillo est cité par Schmidt à propos d'Artus. Le baron De Roisin, Les romans en prose, p. 22.

2

Cf. Nyerup., Kabslæsning, pp. 90-91. Deutsche Sagen, t. II, pp. 315-316. Traduct. fran

çaise, t. II, pp. 376-77. Gærres, Préface du Lohengrin, p. LXXI.

TOM. I.

k.

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Sur le mot walsch.

manteau; après quoi, ils allèrent se mettre à table. Mais quand Roland
vit le nouveau venu, il demanda quel homme c'était. Charles répondit :
« Dieu m'a envoyé ce chevalier. » Et Roland dit : « Il a un air belli-
queux. » Le roi donna ordre qu'on le servit bien. Gerhard fut un
homme sage;
il fut utile et fidèle au roi et plut à tout le monde. Il
eut bientôt appris la langue. Le roi lui conserva toujours ses bonnes
grâces, le maria avec sa sœur Adalis (en danois Élisa, l'Elsa ou Elsam
du Lohengrin) et le fit duc des Ardennes.

Telles sont les transformations multipliées, les altérations successives d'une fable qui se lie si étroitement à l'histoire de nos siècles héroïques, et qui sert, en quelque sorte, de portique à l'altier monument des croisades. Il est temps enfin de jeter un coup d'œil sur la première branche du poëme roman ou wallon 1 que nous mettons au jour. Cette analyse rapide nous permettra de faire quelques observations qui n'ont pas encore trouvé place dans ce qui précède 2.

1 M. A. Rothe, en convenant que le mot walsch, wallon, désigne le français ou roman et s'applique communément à la langue des Français du Nord, au moyen âge, pense que l'auteur du Reineke Fuchs, en distinguant le walsch du Français (*), entend, par le premier, le flamand. Il appuie cette conjecture sur ce que, dans l'aventure du loup avec la jument et son poulain, le poëte flamand fait dire à Isengrim (v. 4047):

Ja ic can walsch, duutsch ende latyn,

Vers qui, dans le Reineke, est rendu par celui-ci :

Ja dudesch, walsch, latin ok franzoss darby.

Quel que soit le sens que le poëte attache à dudesch et à walsch, il est évident, remarque M. Rothe, qu'ici il fait une distinction entre l'un et l'autre de ces idiomes et le français. Les romans du Renard, p. 71.

2 Sur les rédactions en vers romans du Chevalier au Cygne, voir : Roquefort, De l'état de la poésie française, Paris, 1821, in-8°, pp. 157, 162. Ideler, Gesch. der alt. Franz. Literatur, Berlin, 1842, in-8°, pp. 124-25. Bibl. de l'École des chartes, t. II, 1840-41, pp. 437-460. Le Bibliophile Jacob, VII dissert. sur quelques points curieux de l'histoire de France. Paris, 1839, in-8°,

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(*) Der wegen habe ich Lehr und Hofmeister der Fursten und Herrn Herzogs Lotteringen, dieses gegenwar

tige Buch uth walscher und franzosischer gesucht, und in deutsche Sprache ubersetzet. Édit. de Gottsched, 1752. Préface de Henri d'Alkmar ou de celui qui prend son nom. Cf. l'édit. de Scheltema, p. 4.

En tête du premier feuillet est cette rubrique: Chi commenche une grande istoire de Godefroit de Buillon eti a moult de grandes merveilles si come du Chevallier à Chine.

Le trouvère apostrophe d'abord ses auditeurs, auxquels il s'adresse à chaque instant 1, ce qui semble prouver que ce poëme ou chanson de geste était fait pour être récité, soit avec accompagnements d'instruments et par une espèce de mélopée 2, ou de déclamation plus fortement cadencée que le débit ordinaire, soit purement et simplement. Ces nombreuses interpellations peuvent indiquer en outre les intermèdes remplis par les sons du rébec, de la rote ou de la guitare, les points de repos et les divisions du récit, divisions assez fréquentes pour que les parties du poëme pussent être déclamées musicalement ou non sans fatigue.

Analyse du roman en

L'exposition annonce un sujet très-étendu, qui embrasse non-seulement l'histoire proprement dite du Chevalier au Cygne, mais toute celle de la première croisade, y compris la conquête de Jérusalem. Un seul rimeur a donc composé cette double épopée, ce que montre d'ailleurs L'auteur. suffisamment l'unité du langage et du style. Ce n'est pas tout en terminant cette longue course, l'auteur annonce une autre chanson, celle de Baudouin de Sebourg, nouvellement publiée, et qui ne diffère de celle-ci ni pour la forme ni pour le fond.

L'auteur appartient évidemment à la partie gallicane de la Belgique ancienne ou même moderne. A en juger par sa diction, il doit avoir écrit durant la seconde moitié du XIIIe siècle. Mais son copiste est plus récent;

pp. 22, 122. Michaud, Bibl. des croisades, t. I, pp. 273-75. Annuaire de la bibliothèque royale de Belgique, 1842, p. 265. Adelb. Keller, Romvart. Manheim, 1844, in-8°, pp. 411-424. Heidelb., Jahrb, 1838, p. 1031. Fr. Michel, Tristan, t. II, p. 219. M. Keller cite le Journal des Savants, 1842, p. 54; mais, à cet endroit, M. Libri ne nomme que la Chronique de Geoffroy de Coullon et non le roman de Godefroid de Bouillon. C'est une très-légère distraction d'un savant qui n'est jamais distrait.

1 Voyez la note sur le mot seigneurs, p. 1.

2 Voyez plus bas, vers 25, 52, 1649, etc.

vers.

M. Mone le croit du XIVe siècle; il doit être alors de la fin de ce siècle 1, car il se sert de cette grosse bâtarde employée principalement pour les livres copiés du temps de Philippe-le-Bon. L'orthographe et les lapsus calami de ce copiste trahissent un flamand 2. Le volume qu'il a transcrit a appartenu à Charles de Croy, comte de Chimay, qui l'a signé à la fin 3. On sait que ce seigneur aimait passionnément les livres et favorisait les lettres, autant qu'il était permis de le faire à cette époque. Il était fils de Philippe de Croy, comte de Chimay, et de Walburge de Meurs. Maximilien, roi des Romains, érigea son comté de Chimay en principauté par diplôme expédié à Aix-la-Chapelle, au mois d'avril 1486. Le volume a été à Paris du temps de Louis XV; il en est revenu avec la livrée de ce roi, pour retourner ensuite dans la capitale de l'empire napoléonien. La chute de Napoléon l'a fait restituer à Bruxelles. Mais quel en fut l'auteur? En comparant son œuvre avec les divers manuscrits de Paris, on s'assure qu'il est distinct du poëte que M. Paulin Paris appelle le moine de S'-Trond, et qu'il ne peut être confondu avec Renaut ni avec Graindor de Douai, attendu que cette œuvre est totalement différente des leurs par l'exécution comme par l'étendue.

Les a-t-il précédés ou suivis? Nous toucherons cette question plus tard, lorsque toutes les pièces du procès seront entre les mains du lecteur. Nous renvoyons la cause après un plus ample informé.

Les poëtes que nous venons de nommer se citent successivement; le nôtre ne rappelle le nom d'aucun autre chantre; il se contente d'invoquer l'autorité de la chronique ou de l'histoire :

En la cronicque en est la vérité trouvée.....

Ensi que la cronicque le nous fait raconter 5.

1 Introd. au 2o vol. de Ph. Mouskés, p. XLII. Anzeiger, 1834, p. 375.

2 Voyez plus bas les notes sur les vers 134, 246, 383, 2333, 2437 et 2577.

3 Nous donnons le fac similé de cette souscription.

* Vers 27.

5 Vers 259.

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