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bloquée, bravaient ses ordres et la menaçaient en face. Alors nombre de députés perdirent courage, surtout quand ils virent des étrangers entrer dans notre salle, quand ils entendirent Couthon proférer cette impudente ironie: «< Maintenant que vous êtes » rassurés sur votre liberté, je demande qu'on fasse justice au peuple, qu'on arrête les députés conspirateurs; » quand ils virent des insurgés, non députés, siéger dans nos rangs, et voter avec le parti factieux, jusqu'alors en minorité habituelle, presque tous ceux qu'on appelait girondins avaient jugé à propos de s'absenter. Seul, je luttais contre la tempête. A la fin de la séance, Barbaroux et deux ou trois autres ayant paru et parlé, on injuria Barbaroux. C'était le prêtre-capucin Chabot qui proférait les paroles outrageuses; je le repris exactement dans ces termes : « Je dis au prêtre Chabot, » on a vu, dans l'antiquité, orner les victimes de » fleurs et de bandelettes; mais le prêtre qui les » immolait ne les insultait pas... » et je continuai mon discours. Je persistais à refuser ma démission, parce que j'étais innocent, et que la convention venait de le décréter itérativement; parce qu'elle n'était pas libre; parce qu'au contraire elle était assiégée et menacée par des troupes d'anarchistes. La montagne parut hésiter à me mettre en arrestation; quelques-uns lui faisaient honte de son projet à mon égard, et Chabot dit assez haut, répondant à Legendre: « Pourquoi Lanjuinais est-il dans » la liste? F..... c'est un bon b..... » Tel était l'in

digne langage des factieux. Alors deux montagnards égarés, et que je pourrais nommer, luttèrent contre ceux qui me défendaient, en criant, en hurLanjuinais catholique..... catholique........... catholique..... » Le président, qui favorisait le complot, voyant l'assemblée très-faible et mêlée d'étangers, mit de suite aux voix mon arrestation. - Les conjurés députés votèrent avec des étrangers, les autres restèrent assis en grand nombre aux deux épreuves; quelques-uns protestèrent contre le défaut de liberté, et la convention fut, non pas dissoute, comme on l'avait projeté à Londres; mais elle fut mutilée de vingt-deux membres, et successivement de cent trente-trois. A cette journée du 2 juin, commença le cours libre des horreurs législatives, administratives et judiciaires qui signa, lèrent la fatale période de 1793, terminée seulement en 1795, et pendant laquelle les armées, toujours fidèles à la patrie, souvent sans paie, sans vêtement et sans subsistances, triomphèrent de l'Europe conjurée.

No IX.

DISCOURS

PRONONCÉ LE DIMANCHE 2 JUIN 1793;

ET DÉTAILS TRÈS-CIRCONSTANCIES DES FAITS LES PLUS MÉMORABLES DE CETTE JOURNÉE.

O délibérait (le 2 juin au soir) sur l'arrestation des vingt-deux, en conséquence de la pétition déclarée calomnieuse par décret, et depuis réchauffée par des factieux affamés d'or, de sang et de domination. Ils avaient fait entourer la convention par une force armée de plus de cent mille hommes, commandés par le féroce septembriseur Henriot; et les députés qui se présentaient au dehors de la salle, pour les besoins les plus urgens, étaient repoussés avec violence.

Isnard, Fauchet, Lanthenas, Dusaulx, quatre des vingt-deux députés à proscrire, venaient de consentir leur suspension, proposée comme moyen conciliatoire par le trop complaisant Barrère, au nom du comité de salut public. Barbaroux avait seulement annoncé qu'il se soumettrait au décret s'il était rendu.

Tout au contraire, Lanjuinais, appelé à son rang

de la liste pour se démettre, demanda, par un discours énergique sur les circonstances, la cassation de toutes les autorités soi-disant insurgées dans Paris, et de tous les autres actes, avec défenses aux citoyens de les reconnaître, et autorisation de saisir et d'emprisonner tous ceux qui se présenteraient revêtus d'une telle autorité.

« Si j'ai montré, dit-il, jusqu'à présent quelque courage, je l'ai puisé dans l'ardent amour qui m'anime pour la patrie et la liberté. Je serai fidèle à ces mêmes sentimens, je l'espère, jusqu'au dernier souffle de ma vie; ainsi, n'attendez pas de suspension..... (Interruption.)

» Je dis à mes interrupteurs, et surtout à Chabot, qui vient d'injurier Barbaroux : On a vu orner les victimes de fleurs et de bandelettes; mais le prêtre qui les immolait ne les insultait pas.....

» N'attendez de moi ni démission, ni suspension momentanée; n'attendez aucuns sacrifices, je ne suis pas libre pour en faire, et vous ne l'êtes pas vous-mêmes pour les accepter. La convention est assiégée de toutes parts par de nombreuses troupes armées, les canons sont dirigés sur elle; des consignes criminelles vous arrêtent malgré vous aux portes de cette salle. On vient de vous insulter, de vous outrager, de vous menacer en vertu d'un édit du comité d'insurrection, de cette autorité rivale et usurpatrice qui prétend détruire la république et notre liberté naissante. Tout-à-l'heure on vient de faire charger les fusils contre vous ; il n'est

pas permis, sans risquer sa vie, de se montrer seulement aux fenêtres qui environnent cette salle.

» Si vous étiez libres, je dirais : Je n'ai pas le droit d'abjurer, au gré des factieux, l'auguste mission qui m'est confiée; j'appartiens à la république entière, et non à cette seule portion de citoyens égarés ou intimidés que de grands conspirateurs font mouvoir, et qui, s'ils s'expliquaient eux-mêmes librement, s'élèveraient pour moi contre ceux qui me persécutent; je n'abandonnerai point volontai rement mon poste à l'époque des plus grands dangers de ma patrie.....

» Je me trompe, citoyens, si vous étiez libres, je n'aurais rien à dire... Je n'avais rien dit quand, après une longue discussion, vous prononçâtes dans cette même cause, et à la presque unanimité, ce décret célèbre qui imprima le sceau de l'infamie sur le front de mes calomniateurs... Je n'ai rien dit quand vous avez répété ce décret... vous étiez libres alors... Votre jugement souverain et réitéré pourrait-il être rétracté? le serait-il valablement sous les canons et les bayonnettes qui se dirigent contre la représentation nationale?

>> J'ai encore la faculté de faire entendre ici ma voix, eh bien! j'en userai pour vous donner un conseil digne de vous, qui peut vous couvrir de gloire et sauver la liberté. Osez manier avec vigueur

le

sceptre des lois déposé en vos mains; cassez dès ce moment toutes les autorités que les lois ne counaissent pas; défendez à toutes personnes de leur

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