Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub
[ocr errors]

suivis en France pendant quelque temps (Garnier, no 424). Mais il résulte clairement d'une ordonnance de 1315 que, vers le xive siècle, le droit d'épaves était devenu un attribut du domaine de la couronne. Depuis, les seigneurs hauts justiciers s'en trouvèrent investis dans l'étendue de leurs terres, soit par une commission royale, soit par usurpation. Cet état de choses a été renversé par la loi du 13 avril 1791; l'article 7 porte: « Les droits de déshérence, d'aubaine, d'épaves, de varechs, etc., n'auront plus lieu en faveur des ci-devant seigneurs, à compter de la publication du décret du 4 août 1789. » Mais aucun texte ne dit à qui appartiendront ces objets pour l'avenir. - D'un autre côté, l'article 717 se réfère à des lois particulières en ce qui concerne l'acquisition des choses perdues, et il n'en existe aucune sur cette matière (1). De là de graves difficultés :

D'une part, quelques auteurs soutiennent, en se fondant sur l'article 7 de la loi de 1791, sur l'article 3 de la loi du 22 novembre 1790 et sur les termes des articles 539 et 713, C. Nap., que l'État ayant succédé aux droits des anciens seigneurs, les épaves de terre doivent lui appartenir (2).

Mais on répond que c'est là généraliser arbitrairement la règle établie par ces deux derniers articles; car ils se bornent à statuer sur les successions en déshérence et sur les biens vacants, c'est-à-dire sur les immeubles; d'ailleurs, si nous appliquons la règle au trésor, aux choses perdues et autres épaves, en d'autres termes, aux biens mobiliers considérés isolément, les art. 716 et 717 n'ont plus d'objet bien plus, la disposition de ce dernier article qui prononce le renvoi à des lois particulières sc trouve dénué de sens.

Il nous semble par conséquent rationnel et conforme à l'esprit de la loi de distinguer les choses dont il est parlé dans les art. 716 et 717, de celles dont s'occupent les art. 539 et 713, et d'attribuer l'épave à l'inventeur.

Ce système peut d'ailleurs s'appuyer sur une ordonnance du ministre des finances du 22 novembre 1790; enfin sur deux décisions ministérielles, l'une du 10 août 1821, l'autre du 3 août 1825, qui prononcent formellement en faveur de l'inventeur (3).

La dernière est ainsi conçue:

« Vu la pétition de la dame ***, tendant à obtenir l'indemnité à la» quelle elle peut avoir droit d'après les lois et règlements, à raison du » dépôt volontaire par elle fait, il y a trois ans, au greffe du tribunal » civil de Versailles, d'une montre d'or qu'elle avait trouvée sur la voie

(1) Les ordonnances de 1669 et de 1681, les déclarations du 20 janvier 1699, et la loi du 11 germinal an IV, sont les scules, dispositions qui aient trait à la matière.

(2) Merlin, Rép., vo Épaves et Gayves; Favard, Rép., vo Propriété; Toullier, t. 4, nos 48 ét suiv.; Proudhon, Dom. privé, no 412 et 413; avis du comité des finances du 1er décembre 1820, approuvé le 5 janvier 1821.

(3) Dur., nos 270, 318 et suiv.; Garnier, Traité des rivières, t. 1, 148, 145, 443 et suiv.; Rolland, vo Épaves, no 6; Foucart, t. 2, no 715; Delv., t. 2, p. 210.

» publique, et dont le propriétaire ne s'est pas présenté pour la ré» clamer, laquelle montre a été vendue récemment par le domaine...; » Vu l'art. 717 C. civ.;

» Considérant qu'en l'absence de dispositions spéciales sur la matière, >> on ne peut se déterminer que par des considérations morales; — qu'il » importe de laisser à l'inventeur l'espoir de profiter un jour de ce » qu'il a trouvé, puisque cet espoir peut le décider à en faire le dépôt, » et que cette mesure, par la publicité qu'elle occasionne et les délais » qu'elle entraîne, a pour but de mieux assurer les droits du propriétaire; >> Considérant d'ailleurs qu'il est de principe qu'en fait de meubles la » possession vaut titre (2279);

» Décide, etc. »

Ainsi, la question est tranchée en faveur de l'inventeur:.- toutefois, les considérants de cette dernière décision donnent lieu à de justes critiques; nous ne pouvons les passer sous silence :- - d'abord, si la maxime en fait de meubles était applicable dans le cas prévu, la propriété se trouverait immédiatement transmise; l'inventeur ne serait pas exposé pendant trois années à l'action en revendication (2279). Cette maxime suppose d'ailleurs que le possesseur a été de bonne foi et qu'il a un juste titre, c'est-à-dire, qu'il est acheteur, donataire ou héritier: or, celui qui trouve une chose perdue n'a pour lui que le hasard; il sait que la chose a un maître, qu'il devra la restituer si le propriétaire se présente dans les trois ans : les positions ne sont donc pas identiques.

Ce n'est pas tout: on comprendrait que le ministre, dans sa sollicitude, eût cru devoir faire un appel à la délicatesse de l'inventeur, et créer dans l'intérêt du propriétaire quelques moyens de publicité : mais il va plus loin; il modifie la loi : il décide implicitement que l'inventeur ne devient propriétaire qu'autant qu'il a fait la déclaration et le dépôt de l'épave au greffe du tribunal civil ou de la mairie, et à Paris à la préfecture de police: c'est là évidemment porter atteinte au droit que l'inventeur tient de l'art. 2279, et commettre un excès de pouvoir.

Quoi qu'il en soit, dans la pratique, on se conforme aujourd'hui à ces décisions. Duranton les approuve sans commentaire; elles comblent, suivant ce judicieux auteur (no 326, 2. 4), la lacune de notre jurisprudence. Nous maintenons nos observations, tout en nous inclinant devant l'usage. Il est hors de doute que l'inventeur possède la chose pendant la durée du dépôt, et que la prescription court en sa faveur à partir du jour où elle a été découverte.

Suivant un décret du 18 juin 1811, les objets périssables ne peuvent rester plus de huit jours sous le séquestre: après ce délai, le juge de paix en ordonne la vente régulièrement; cette vente doit avoir lieu après affiches et publications.

Après un laps de trois années à partir du dépôt, si le propriétaire ne s'est pas présenté, l'épave ou son prix (au cas de vente dans l'intervalle par les soins de l'Etat) est rendue à l'inventeur, à charge par lui d'acquitter les frais de garde.

Le défaut de déclaration n'est point puni par la loi. Ce silence est blâmable sans doute; mais, pour qu'il y ait délit, l'intention de frauder doit se joindre au fait; or, comment pénétrer les secrètes pensées de l'inventeur? L'action criminelle qui serait dirigée contre lui, soit par le propriétaire, soit par l'autorité, s'évanouirait nécessairement, s'il avouait et offrait de restituer la chose trouvée (1).

L'action du propriétaire contre le domaine, si la chose n'a pas été remise à l'inventeur, dure trente ans à partir du dépôt; cela n'est pas douteux. Mais peut-il agir contre l'inventeur pendant le même laps de temps? Ce dernier se trouve-t-il, après l'expiration de trois années, à l'abri des poursuites en restitution? Cette difficulté se rattache à une théorie que nous ne pouvons exposer ici; nous en renvoyons l'examen au titre de la prescription. (V. art. 2279.)

Nous avons supposé jusqu'ici le cas de perte d'une chose inanimée : suivant un décret du 18 juin 181-1, les animaux égarés doivent être mis en fourrière; ils ne peuvent y rester plus de 8 jours après ce délai, ils sont vendus à la diligence de l'administration de l'enregistrement, sur l'ordonnance du juge de paix. - La vente alieu aux enchères, après affiches et publications : les frais de fourrière sont prélevés par privilége sur le produit de la vente; le surplus du prix est versé dans la caisse de l'administration de l'enregistrément.

Les objets abandonnés et non réclamés par le propriétaire sont assimilés aux épaves terrestres; ce qui comprend : 1° les objets abandonnés dans les entreprises de transport ou bureaux de voitures publiques; après l'expiration de deux années, si le propriétaire ne s'est pas présenté, ces objets appartiennent à l'Etat et peuvent être vendus à son profit (2);

2o Les marchandises abandonnées dans les bureaux des douanes : elles sont vendues au bout d'un an au profit de l'Etat (loi du 6 août 1791); 3o Les sommes remises aux agents des postes avec une destination déterminée; après un délai de huit années, elles sont acquises à l'Etat (3); 4o Les effets mobiliers déposés dans les greffes des tribunaux, des prisons, des conseils de guerre et des tribunaux maritimes, sont vendus à la diligence des préfets, et le prix de ces ventes est versé à la caisse des consignations. La loi du 11 germinal n'accordait au propriétaire qu'une année pour en réclamer le montant; une ordonnance du 22 février 1819 étend ce délai à trente années.

Au premier abord, il semblerait plus logique d'appliquer ici la règle de l'article 2279, qui restreint le délai à trois années; aussi, cette disposition a-t-elle été critiquée : mais il faut observer, d'une part, que la loi de germinal n'est qu'une loi de circonstance; d'autre part, que l'Etat n'est dans l'espèce qu'un dépositaire, et qu'à ce titre il est toujours soumis à l'obligation de restituer (4).

(1) Encyclop., vo Épaves; Dur., no 527; Metz, 3 juin 1817; Nîmes, 16 juin 1819; Grenoble 2 juin 1825; Cass., 4 avril 1828.

(2) Déclaration du 20 janvier 1699; déc. des 23 et 24 juillet 1793, et du 13 août 1810.

(3) Proudhon, Dom. privé, no 425; loi du 31 janvier 1833.

(4) Loi du 11 germina] an IV et du 19 brumaire an VI; ord. du 25 janvier 1821, du 22 février 1829 et du 9 juin 1831; Dur., t. 21, p. 682 et suiv.; Troplong, Prescrip., sur l'art. 2279.

Quant aux titres et papiers appartenant à des condamnés ou à des tiers, ils doivent rester au greffe pour être remis à qui de droit. (Ordon. du 9 juin 1831.)

5o Les essaims d'abeilles le propriétaire du fonds sur lequel ils viennent s'abattre peut s'en emparer, lorsque le propriétaire a cessé de les suivre (1).—Il va de soi que ce dernier doit réparer le dommage qu'il a occasionné en usant de son droit.

[ocr errors]

6o Ainsi que nous l'avons dit, les épaves des rivières qui ne sont point des dépendances du domaine public suivent le sort des épaves de terre. 7° Les articles 559 et 564 C. Nap. nous paraissent consacrer une sorte de droit d'épaves (voyez ces articles). Quant aux choses mobilières prises sur l'ennemi, en tant, bien entendu, qu'elles peuvent être l'objet du butin (2), (præda bellica), ce sont des épaves d'une nature particulière d'un côté, on ne peut les considérer comme des choses perdues ; de l'autre, elles sont acquises au possesseur immédiatement, sans qu'il y ait lieu à revendication.

De l'accession et de la prescription.

712- La propriété s'acquiert aussi par accession ou incorporation, et par prescription.

― L'accession, ainsi que nous l'avons déjà fait remarquer, est tantôt un moyen originaire d'acquérir, par exemple, en cas d'alluvion (556); tantôt un moyen dérivé, par exemple, lorsqu'une chose est devenue, par adjonction, l'accessoire d'une autre (1560). Même observation à l'égard de l'incorporation.

[ocr errors]

Nous avons déterminé sous les articles 541 et 577 les caractères de l'accession.

Quant à la prescription, si on la considère comme moyen d'acquérir, ce moyen ne peut être que dérivé. Mais nous aurons plus tard occasion de démontrer qu'elle ne constitue qu'une présomption légale d'acquisition (2219).

TITRE PREMIER.

DES SUCCESSIONS.

(Décrété le 19 avril 1803, promulgué le 29 du même mois.)

L'état social, nous l'avons vu, est la seule et véritable source de la propriété : la transmission des biens par succession n'est donc pas de droit naturel, mais de droit civil.

Le mot succession vient de succedere (prendre la place d'un autre). Ce mot comprend en conséquence toutes les manières dérivées d'acquérir la propriété : c'est ainsi que l'acheteur ou le donataire succède au vendeur ou au donateur: mais il est envisagé ici sous un rapport spécial: tantôt

(1) Lof des 28 sept. et 6 oct. 1791, tit. 1er, sect. 3: Toullier, t. 3, no 374.

(2) Voy. Dur., nos 335 et suiv., t. 4; Toullier, t. 3, no 371,

on l'emploie pour exprimer l'universalité des biens, droits, dettes et charges héréditairement transmissibles que laisse une personne en mourant: ainsi, l'on dit que tel objet dépend de telle succession, que telle succession est vacante, etc.; le mot succession se confond alors avec les mots hoirie, hérédité (1696, 803, 805, 810, 869); — tantôt on exprime ainsi la transmission de l'universalité des droits et charges d'une personne morte naturellement ou civilement, à une ou plusieurs autres personnes qui lui survivent et la remplacent.

-

Nul ne peut avoir plus d'un patrimoine; dès l'instant où une succession s'ouvre, les biens qui la composent se trouvent confondus dans le domaine de l'héritier avec toutes leurs charges, à moins que la séparation des patrimoines n'ait été demandée (878 et suiv.).

Les successions se transmettent soit par la volonté de l'homme, soit par la force de la loi :

-

Par la volonté de l'homme, lorsqu'on dispose soi-même de tout ou partie des biens qu'on laissera au jour de son décès. Ces sortes de dispositions ont lieu de deux manières : 1o par testament (1001); 2o par le contrat de mariage des institués ; elles prennent en ce cas le nom d'institutions contractuelles: ces sortes de dispositions peuvent être faites ou par l'un des futurs époux à l'autre, ou par des tiers aux futurs époux (1082, 1083 et 1093).

Par la force de la loi, lorsque le défunt n'a point disposé de ses biens: sa succession est alors transmise aux personnes que le Code désigne, et d'après les règles qu'il établit.

En droit romain, pour que la transmission eût lieu, il fallait que l'héritier acceptât; chez nous, elle a lieu de plein droit.

Cette transmission de biens est appelée légitime (a lege), parce qu'elle est réglée par la loi seule.

On dit aussi qu'elle a lieu ab intestat; ce qui n'est pas rigoureusement exact; car, lors même qu'il existe un testament, la loi réserve à certains héritiers (dits réservataires) une quotité de biens dont elle prend soin de régler l'attribution.

L'ordre de succession tracé dans ce cas n'est pas fondé, comme on l'a dit mal à propos, sur l'affection présumée du défunt, mais sur des considérations d'intérêt social.

Si l'affection était le fondement du droit de succession, l'amour conjugal, le sentiment le plus fort après l'amour paternel, eût fait appeler le conjoint avant les collatéraux, et cependant il n'est placé qu'en dernier ordre; les père et mère eussent été appelés avant les frères et sœurs, et cependant ils viennent simultanément. (Toullier, 149 et suiv., t. 4.) Les successions ab intestat sont régulières ou irrégulières:

Régulières ou parfaites, lorsque des personnes auxquelles la loi confère la qualité d'héritier sont appelées à les recueillir (voyez chap. 3); Irrégulières ou imparfaites, quand elles sont déférées à des personnes auxquelles la loi refuse la qualité d'héritier; telles que les enfants naturels, l'époux survivant, et l'Etat (voyez chap. 4).

« VorigeDoorgaan »